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Ainsi, après avoir déclaré:

«Ûn ne pourrait méconnaître 1 'état réel des affaires en Suisse sans compromettre les intérêts les plus chers de Genève. La révision est l'objet de l'instante sollicitude d'un assez grand nombre de Cantons. C'est la question qui provoque aujourd'hui le plus de mouvement.»61,

60 Cf. Op. cit., in Le Fédéral, Op. cit., loc. cit., (57).

61 Cf. MCR, 1832-1833 (9),

v•

année, n° 13, p. 140.

Rossi poursuit en déterminant en ces termes la nouvelle politique libérale de Genève:

«Le canton de Genève, étranger jusqu'ici aux débats des partis, aussi éloigné de 1 'impatience des uns que de l'aveugle résistance des autres, est bien placé pour essayer de l'influence de la raison politique; mais pour cela, il faut qu'il garde cette attitude neutre.

Il ne faut pas qu'il paraisse céder à contre-coeur, et avec le désir secret de n'arriver à aucun résultat.

Cette attitude lui ferait perdre toute confiance; mieux vaudrait se prononcer nettement pour le rejet de toute modification au Pacte.

Le mot désir, dans les instructions, n'a rien de déplacé. La députation de Genève, vingt-deuxième canton, appelée à parler après toutes les autres en Diète, viendra dire, après avoir entendu des propositions fort exagérées peut-être sur cette question, que le désir du canton est que, en fait de changements au Pacte, on s'attache à ceux qui auront pour eux la sanction de l'expérience.

Ce n'est donc pas une révision quelconque que nous désirons, mais des modifications fondées sur l'expérience. Le désir que nous exprimons, nous l'opposons à ces voeux exagérés qui négligent les faits pour ne rêver que des utopies.»62

Mais il n'y a pas que Rossi à plaider le principe et 1' opportunité d'une révision du Pacte fédéral, encore entendue comme une révision limitée et partielle. Il y a aussi Bellot, qui, dans la même séance du Conseil Représentatif du 27 juin 1832, et presque dans les mêmes termes, affirme 1 'opportunité d'une révision du Pacte limitée aux améliorations rendues nécessaires et fondées sur l'expérience:

«La révision du Pacte n'est pas une idée nouvelle: chaque année porte avec elle la preuve que, sur plusieurs points, le Pacte est susceptible d'améliorations. La question de la révision sera donc soumise à la Diète; c'est un des chefs de la circulaire instruction-nene. Notre canton, appelé à s'expliquer sur la convenance d'une révision, exprimera le désir de voir apporter au Pacte les améliora-tions dont l'expérience aura prouvé la nécessité. C'est la premiè-re partie de 1 'instruction.

Viendra ensuite la question du mode de procéder. Evidemment un travail de cette nature ne peut qu'être renvoyé à une Commission.

Mais il importe d'écarter l'idée d'une Commission composée de membres étrangers à la Diète; il importe surtout d'écarter l'idée

62 Cf. Op. cit., p. 141.

d'une Constituante. L'instruction devra donc exprimer que l'ob-jet doit être renvoyé à une Commission tirée de la Diète.»63

Comme les Instructions finalement votées en Conseil Représentatifle 27 juin 1832, d'une part, éviteront de qualifier formellement 1 'objet à l'ordre du jour de la Diète de «révision du Pacte» - «expression qui semblerait impliquer une révision totale»64 - au profit de la formule pragmatique des «améliorations et modifications du Pacte dont l'expé-rience aura justifié le besoin»6

S.

et que, d'autre part, elles confèreront, à la .suggestion de Bellot, les «pleins pouvoirs pour voter sur toutes les questions relatives à la forme de procéder»66, les chefs de file du libéralisme genevois, après s'être fait les avocats d'une

révisionpartiel-le,

finiront par se rallier à la décision d'une révision

totale

du Pacte par une Commission de la Diète de 15 membres au sein de laquelle siégera P. Rossi.

Dès lors, la politique fédérale des libéraux genevois se présentera en un

second temps

comme une

politique de modération,

inspirée par des principes de

neutralité

entre les camps extrémistes et

deprogrès mesuré

dans les réformes à opérer sur le plan fédéral. Et c'est encore une fois Rossi qui en apparaît le plus éloquent et le plus clair porte-parole dans ses interventions au Conseil Représentatif au début mars 1833.

Cherchant à définir précisément la politique de Genève qu'il a menée à la Diète comme dans la Commission de révision du Pacte, dans le débat relatif aux Instructions de la députation genevoise sur le nouveau Projet d'Acte fédéral le 6 mars 1833, Rossi commence par définir le premier principe qui a commandé la politique genevoise, celui de la

neutralité:

«Or, Messieurs, je dirai comment j'ai compris le système politi-que de Genève, et comment je le conçois encore ( ... ) J'ai cru et je crois fermement que la Suisse était divisée en deux camps; l'un.

ayant pour devise et pour bannière la reconstitution totale de la Suisse, au moyen d'une forte centralisation et d'un pouvoir révolutionnaire; l'autre voulant le statu quo, he demandant rien à l'avenir que le maintien du passé( ... )

63 Cf. Op. cit., p. 129.

64 Cf. Op. cit., n° 12, p. 122.

65 Cf. Op. cit., n° 13, p. 143.

66 Cf. Op. cit., n° 13, p. 130.

Entte les partisans de la Constituante fédérale et ceux du statu quo, Genève, progressive, mais non révolutionnaire, a dû garder la neutralité. C'est ce qu'elle a fait d'abord, attendant que la mêlée se fût éclaircie, que les positions se fussent dessinées, que le moment d'agir fût venu. Mais cette neutralité par laquelle elle devait débuter, y a-t-elle persévéré? Elle aussi n'a-t-elle pas senti qu'elle avait une attitude à prendre dans cette crise de la pa-trie?( ... )

Oui, Messieurs, Genève est sortie et a dû sortir de sa neutralité.»67

Si Genève a dû ensuite abandonner le principe de la neutralité, c'est, poursuit Rossi, pour défendre un second principe, le principe du pro-grès, tel qu'il avait été entendu dans le Canton: c'est explicitement formulée l'extension du progrès graduel du plan cantonal genevois au plan fédéral:

«Genève a fait sentir qu'elle n'était point ennemie du progrès, mais qu'elle l'entendait à l'égard de la Confédération, comme elle l'avait entendu à l'égard du canton; qu'elle n'était point ennemie du mouvement, mais du mouvement régulier; qu'elle ne se refusait point à marcher en avant comme elle l'avait fait pour ses institutions cantonales, et qu'elle était prête à donner la main aux amis du progrès pourvu qu'ils y marchassent d'un pas mesuré, pourvu que l'allure de la Confédération dans cette voie fût comme avait été celle du canton dans la même carrière, sage et réglée.

Ainsi Genève a dit aux partisans du mouvement: je me joindrai à vous, mais à condition que vous n'irez que jusque là. Je ne peux vous suivre passé cette limite. Voilà ce que Genève a fait, voilà selon moi ce qu'elle a dû faire.»68

Retraçant alors les étapes de cette politique modérée de neutralité,

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