membre supérieur et le membre inférieur
gauche, et s'étant
accompagnée à brève échéance (vingt jours
environ) de contrac¬
ture dans ces mêmes membres avec exagération des réflexes et trépidation épileptoïde du
membre inférieur gauche.
L'excitation de laplante du pied droit (côté sain) provoque la
flexion des orteils; la même excitation pratiquée sous la plante
dupied gauche (côté paralysé) provoque une flexion des orteils
moins nette, il est vrai, que du côté droit; mais on ne constate jamais l'extension des orteils.
Cette hémiplégie est sûrement de nature organique, car l'au¬
topsie a fait découvrir l'existence d'une hémorragie cérébrale
droite.
Observation XYI (Personnelle).
E. M... soixante-trois ans, atteinte depuis dix jours d'hémi¬
plégie droite, flasque, avecaphasie intéressant le membre supé¬
rieur etle membre inférieur droits ainsi que la face. Les réflexes tendineux, le réflexe rotulien droit en particulier, sont à peu
prèsnormaux; ou neconstatepas de trépidation épileptoïdedans
le membre inférieur droit.
On ne retrouve aucun signe qui permette de faire déceler l'existence de l'hystérie; la malade n'a jamais eu de crises
nerveuses; elle ne présente ni zone hystérogène, ni plaques d'anesthésie,ni abolition duréflexepharyngien, quipuissent faire
attribuer à cette hémiplégie une origine fonctionnelle.
L'excitation de la plante du pied gauche (côté sain) provoque la flexion des orteils; la même excitationpratiquéesouslaplante
du pied droit (côté paralysé) provoque également la flexion des
orteils.
Des quelques observations qui précèdent, nous pouvons
déjà tirer cette conclusion : c'est que le signe de Babinski, qui paraît exister assez souvent dans les paralysies d'origine organique peut également faire défaut parfois dans ces der¬
nières.
Nous avons eu l'idée de rechercher si le signe des orteils pouvait parfois ne pas être constaté chez les individus nor¬
maux.
Sur trente sujets examinés, nous avons
recueilli les trois
observations suivantes :
Observation XVII (Personnelle).
Salle 12, lit 29, M.-H..., quarante-deuxans; atteintde pleurésie.
Affirme n'avoirjamais été paralysé ni même avoir
éprouvé le
moindretrouble demotilitéoude sensibilité dansunepartie quel¬
conque ducorps.
L'excitation de la plante du pied gauche provoque la flexion
desorteils sur le métatarse comme cela doit se passer normale¬
ment ; tandis que la même excitation pratiquée à droite ne pro¬
voque parfoisaucunmouvement des orteils, mais
elle
donnelieu
leplus souvent à l'extension des orteils etjamais à la
flexion.
Observation XVIII.
(Personnelle).
G. P..., vingt ans, atteint de rhumatisme articulaire aigu ; s'est toujours très bien porté et n'a jamais eu de troubles de
la
motilité.
Si on excite la plante du pied droit, on constatela flexion des
orteils;tandis que lamême excitation pratiquée sur la plante du pied gauche provoque l'extension des orteils, sauf celle
du cin¬
quième orteil qui reste immobile; mais on observe
jamais la
flexion.
Observation XIX.
(Personnelle).
Marthe L..., trente-neuf ans; atteinte de lésion cardiaque (insuffisance mitrale), n'ajamais présenté le moindre trouble de
motilité.
L'excitation de la plante du pied gauche provoque tantôt la flexion, tantôt l'extension des orteils.
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La même excitation pratiquée à droite provoque toujours
l'extension du gros orteil et jamais sa flexion; quant aux autres orteils ils restent immobiles ou n'ont qu'une légère
tendance h se mettre en extension mais ils ne se fléchissent
jamais.
Chez les vingt-sept autres sujets nous avons toujours
observé la flexion des orteils. Quoi qu'il en soit, il découle de
ces trois observations que le signe de Babinski peut être
constaté chez certains sujets normaux au point de vue du système nerveux.
Nousnous sommes enfin préoccupé de savoir si le- phéno¬
mène des orteils faisait toujours défaut, comme le
prétend
Babinski, dans les paralysies fonctionnelles.Sur trois cas de paralysies hystériques qu'il nous a été
donné d'observer, nous n'avons pas eu à constater ce signe ; est-ce àdire qu'il ne serencontrejamais dans ces
paralysies?
L'observation qui suit nous renseignera à ce sujet.
Observation XX.
(Communication par M. Gf.nths).
Madeleine F..., trente-huit ans. A quinzeans, crises nerveuses occasionnées par une contrariété, caractérisées par la perte de connaissance, convulsions, etc. Ces crises continuèrent jus¬
qu'en 1892, elle avait alors trente-deux ans ; elle sentit alors ses jambes devenir faibles et resta deux mois au lit sans pouvoir les
remuer. Quand elle put se relever elle sentit qu'elle traînait la jambe droite. En 1895, elle entra dans le service de M. le profes¬
seur Pitres parce qu'elle marchait de moins en moins facilement; elle en sortit au bout d'un mois sans amélioration. Au mois d'avril 1899 elle entre à la salle 12. L'examen des réflexespratiqué
àcette époque donne les résultats suivants :
Réflexes. A droite. Agauche.
Plantaire conservé.. it.
llotulien exagéré it.
Abdominalinférieur.. nul très diminué.
Abdominalsupérieur, nul très diminué.
Pharyngien très diminué.
Pupillaire conservé.
Champ visuel rétréci. Diminution des diverses formes de la sensibilité, surtout à droite.
La malade raconte que depuis six ans elle est parfois obligée
de se sonder; elle va assez difficilement à selle.
On ne constate rien d'anormal dans la colonne vertébrale; pas decyphose, pas de point douloureux. Lamalade a le rein droit
flottant.
Elle est soumise au traitement par le bleu de méthylène qui
amèneune amélioration notable; elle marche mieux; elle quitte l'hôptal le 10 mai.
Le 7juillet on revoitla malade qui est très améliorée, la mar¬
che est redevenue presque normale et il existe une différence
considérable entre son état ancien et son.état actuel. On constate néamoins uncertain degréde parésie du membre inférieurdroit.
A l'examen des membres inférieurs on constate : à droite, une exagération très marquée du réflexe rotulien, une trépidation
rotulienne très nette et une trépidation épileptoïde très accen¬
tuée, durant très long-temps et s'étendant à tout le membre; à g-auche une légère exagération du réflexe rotulien avec absence
de trépidation épileptoïde et rotulienne.
L'excitation de laplante du pied droit provoque une extension
trèsmarquée detous les orteils, et du grosorteil principalement; à gauche les deux ou troispremières excitationsprovoquent une extension légèredes cinq orteils; les excitationsultérieures lais,
sent les orteilsimmobiles; mais on neconstatejamais de flexion.
La lecture de cette dernière observation prouve au moins
une chose : c'est qu'on peut constater le signe des orteils
dans la paralysie hystérique et qu'on ne peut pas, par consé¬
quent, le considérer comme un signe permettant d'affirmer
la nature organique des paralysies où on l'observe.
CONCLUSIONS
I. — Le signe des orteils (de Babinski) n'est pas constant
dans tous les cas de paralysie organique où le système pyramidal paraît intéressé.
II. — Il se rencontre parfois chez certains sujets normaux
exempts de toute altération du système nerveux en général,
et des faisceaux pyramidaux en particulier.
III. — On peut l'observer dans la paralysie hystérique qui
ne s'accompagne d'aucune lésion anatomique du système
nerveux.
IV. — On ne peut donc pas le considérer comme un signe
de paralysie, puisqu'on l'observe chez certains sujets
normaux, non plus que comme un signe important permet¬
tantde diagnostiquerune paralysie organique d'une paralysie fonctionnelle, attendu qu'il n'est pas constant dans la première et qu'on peut l'observer dans la seconde.
Vu : LeDoyen, B. de NABIAS.
Vu bon à imprimer:
LePrésident de lathèse, D'' ARNOZAN.
Vu etpermis d'imprimer :
Bordeaux, le 19 juillet 1899.
Le Recteur del'Académie, G. BIZOS.
mm-WtÊ'
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BIBLIOGRAPHIE
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Dieulafoy Pathologie interne. Tome II, Maladies du système
nerveux.
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Dictionnairedemédecine et dechirurgiepratiques.(Jaccoud). TomeXXVI
Étudedesparalysies(Mollière).