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Le cycle de migration cellulaire

CHAPITRE II : LA MIGRATION CELLULAIRE

2- Le cycle de migration cellulaire

La famille des Rho GTPases joue un rôle important dans les différentes phases du cycle de la migration cellulaire. Chez les mammifères, les Rho GTPases comprennent 23 membres, pouvant être classés en sous-famille sur la base de la similarité de séquence (figure 19). Les trois membres les mieux caractérisés sont Rho, Rac et Cdc42. Toutes les Rho GTPases sont prénylées à leur extrémité C-terminale, modification indispensable à leur fonctionnement.

Ces protéines alternent entre une conformation active (protéine-GTP) et une conformation inactive (protéine-GDP) (figure 20). Quand elles fixent le GTP, elles deviennent actives et peuvent induire une signalisation en interagissant avec une des 60 protéines effectrices, incluant les protéines kinases, les enzymes modificatrices de lipide et les activateurs du complexe Arp2/3 (Etienne-Manneville et Hall 2002). L’alternance entre les deux formes est régulée par trois classes de protéine : Les protéines GEF (guanine nucleotide exchange factors), les protéines GAP (GTPase-activating proteins) et les protéines GDI (guanine nucleotide exchange inhibitors). Les protéines GEF catalysent l’échange nucléotidique et induisent ainsi l’activation des Rho GTPases. Il y a 79 protéines GEF identifiées chez les mammifères pour la famille des Rho GTPases. Les protéines GAP stimulent l’hydrolyse du GTP en GDP, conduisant à l’inactivation des Rho GTPases. Nous dénombrons 65 protéines GAP chez la souris. Les trois protéines GDI peuvent se fixer au groupement lipidique de la partie C-terminale des Rho GTPases, inhibant leur fixation à la membrane et les maintenant dans un état inactif (Tybulewicz et Henderson 2009). Les protéines GEF et GAP possèdent un site catalytique et un domaine d’interaction protéine-protéine. Le fait que les protéines régulatrices soient si nombreuses n’est pas connu, mais suggère une spécificité en rapport aux diverses voies de signalisation pouvant être impliquées par les Rho GTPases.

Rho, Rac et Cdc42 vont influencer et réguler la polarité cellulaire, la dynamique des microtubules, ainsi que d’autres phénomènes extérieures au processus migratoire, à travers des voies de transduction du signal différentes.

Figure 19 : Les membres de la famille des Rho GTPases. Arbre phylogénétique des 23 membres des Rho GTPases. (d’après Tybulewicz et Henderson 2009).

Figure 20 : Le cycle des Rho GTPases. Les Rho GTPases liées au GDP sont activées par les protéines GEF et les Rho GTPases liées au GTP sont désactivées par les protéines GAP. Les Rho GTPases activées peuvent interagir avec des protéines effectrices. (d’après Tybulewicz et Henderson 2009).

2.2- La polarisation de la cellule

Dans le but de migrer, une cellule doit acquérir une asymétrie spatiale, qui lui permette de générer des forces pour la translocation du corps cellulaire. La manifestation de cette asymétrie est une morphologie polarisée, où les processus moléculaires à l’avant et à l’arrière de la cellule sont différents. Il est important de distinguer la migration cellulaire aléatoire, dans laquelle les cellules migrent dans toutes les directions sans coordination, de la migration dirigée, dans laquelle les cellules migrent dans une direction donnée (chimiotactisme). Dans les deux cas, la formation d’un axe avant-arrière de la cellule est requise (figure 21). La polarité de la cellule est établie et maintenue par une série de boucles de rétrocontrôle positif, qui sont reliées entre elles et qui impliquent la famille des Rho GTPases, PI3K (phosphatidylinositol 3-kinase), les intégrines, les microtubules et les vésicules de transport.

2.2.1- La protéine Cdc42

Cdc42, de la famille des Rho GTPases, est une protéine maîtresse dans la régulation de la polarité cellulaire. Elle est active vers l’avant des cellules en migration. Bien que Cdc42 participe à l’activité protrusive de la cellule, elle est directement impliquée dans l’orientation de la cellule durant la migration dirigée, en réponse à un stimulus chimiotactique. La migration dirigée nécessite une orientation précise de l’axe avant-arrière de la cellule d’après la détection de la direction. Détecter la direction dans laquelle la cellule doit migrer est la fonction essentielle de Cdc42. L’altération de l’expression de Cdc42 conduit à une migration aléatoire : les cellules peuvent former l’axe avant-arrière, mais sont incapables de s’orienter selon un gradient chimiotactique (Allen et coll. 1998). Une protéine cible de Cdc42, la kinase PAK1, est capable de médier l’activation de Cdc42 en aval des récepteurs couplés aux protéines G, qui sont activés par des chimioattractants. Cette boucle de rétrocontrôle positive conduit à une activité élevée de Cdc42 à l’avant de la cellule. Cdc42 peut influencer la polarité de la cellule en relocalisant le centre organisateur de microtubules (MTOC) et l’appareil de Golgi devant le noyau, orienté vers l’avant de la cellule. L’orientation du MTOC contribue à la polarisation de la migration en facilitant la croissance des microtubules dans les lamellipodes et le transport des vésicules, dérivées de l’appareil de Golgi, vers l’avant de la cellule afin de fournir les molécules nécessaires à la protrusion. En l’absence de Cdc42, la réorientation du MTOC et du Golgi ne se fait pas, alors qu’une expression constitutive de Cdc42 perturbe l’orientation de ces composants intracellulaires. Ces données suggèrent que l’activation mais aussi une localisation spatiale restreinte de Cdc42 sont requises pour une

polarisation correcte de la cellule. La polarisation de la cellule fait également intervenir d’autres protéines, les complexes de polarité, qui vont interagir avec Cdc42.

Figure 21 : La polarité des cellules en migration. En réponse à un gradient chimioattractant, la polarisation avant-arrière (flèches vertes) et la détection de la direction (flèches rouges) doivent avoir lieu pour transformer une cellule orientée aléatoirement et non polarisée (dessin de gauche) en une cellule migrante entièrement polarisée (dessin de droite).

La formation de l’axe avant-arrière est requise pour la migration, mais pas suffisante pour la chimiotaxie (dessin du bas). Dans ce cas la cellule subie une migration aléatoire. L’orientation cellulaire est cruciale pour la migration dirigée, mais n’est pas suffisante pour induire cette migration (dessin du haut). N : noyau. (d’après Etienne-Manneville 2008).

2.2.2- Les complexes de polarité

Trois groupes de protéines vont participer à la formation et au maintient de la polarisation de la cellule : le complexe Par, le complexe Scrib et le complexe Crb (Etienne-Manneville 2008).

Le complexe Par, qui inclut les protéines Par et l’aPKC (protéine kinase C atypique), est le premier complexe de polarité identifié pour son implication dans la polarité des cellules en migration. Cdc42 fixe Par6 et Par3 et promeut l’activation de aPKC. L’activation localisée de aPKC est cruciale pour l’organisation polarisée des microtubules et l’orientation de la cellule. Par6 est également capable de réguler RhoA. Une fois localisé à l’avant de la cellule, Par6 recrute Smurf1, qui peut initier la dégradation locale de RhoA. Par6 participe ainsi à la formation de l’axe avant-arrière en favorisant l’activité protrusive à l’avant de la cellule. Par3 peut se complexer avec Tiam-1 et induire une migration dirigée par la stabilisation des microtubules à travers la régulation et la localisation de Par6 et aPKC. LKB1/Par4 est également impliquée dans la polarisation cellulaire (Partanen et coll. 2009). LKB1 a été montré pour interagir avec la protéine Cdc42 active afin de la maintenir à l’avant de la cellule en migration.

Le complexe Scrib est formé des protéines Scrib, Dlg et Lgl. Scrib est requis pour l’activation et la localisation de Cdc42 à la membrane plasmique à l’avant de la cellule.

Durant la migration, Scrib interagit avec βPIX, qui est aussi recruté à l’avant de la cellule dans le but de promouvoir d’une part l’activation de Cdc42 et l’orientation cellulaire et d’autre part la localisation de Rac à l’avant de la cellule. Scrib semble être requis pour la migration dirigée en maintenant l’activité protrusive. Dlg a un rôle important dans la régulation du réseau de microtubules. Son recrutement dépend de Scrib, Cdc42, Par6 et aPKC. La protéine Lgl est phosphorylée par aPKC, suggérant qu’elle puisse être impliquée dans le contrôle de l’orientation cellulaire.

Le complexe Crb est composé des protéines Crb, PALS1 et PATJ. PATJ est recruté à l’avant de la cellule en migration et contrôle la localisation de Par3 et aPKC vraisemblablement à travers PALS1 et Par6. Crb ne semble pas être impliqué dans ce phénomène.

Bien que seulement quelques protéines de ces complexes ont été directement impliquées dans la polarisation avant-arrière de la cellule, elles sont toutes essentielles à l’orientation cellulaire.

3- Formation des protrusions et de l’adhésion

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