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3.2 Processus de planification et de gestion de la production de Renault

3.2.1 Cycle mensuel de programmation

Tous les mois, la Direction commerciale et la Direction Supply Chain élaborent un premier plan prévisionnel macroscopique, i.e. à un niveau peu détaillé, de la production pour les 24 prochains mois, au cours de ce qui est nommé chez Renault le cycle de programmation. À cause de la forte diversité produit, il n’est pas possible de faire directement des prévisions à un niveau de détails élevé. Ainsi, le plan prévisionnel issu du cycle de programmation est réalisé à la maille mensuelle et à un niveau macroscopique pour des groupes de véhicules, appelé item commercial. Les items commerciaux correspondent aux caractéristiques suivantes.

• Modèle caisse : cela correspond à un modèle de véhicule (exemple : Clio) et un type de caisse (exemple : Break). Cet item commercial est nommé sous une écriture de type K98, où le numéro indique le modèle (ici 98 pour la Clio 4) et la lettre indique le type de caisse (ici K pour Break).

• Niveau d’équipement : cela définit les équipements majeurs du véhicule en termes de finition intérieure (types de rangements, de sièges, système de navigation etc.) et extérieure (types de boucliers, calandres, certains feux, etc.). Selon les modèles, les niveaux d’équipements peuvent concerner différentes pièces du véhicule (par exemple, les jantes peuvent être incluses dans le niveau d’équipement ou être en option, selon le modèle). Généralement, il existe trois ou quatre niveaux d’équipement pour un modèle de voiture (nommés E1, E2, E3, etc.).

• Type de moteur : cela correspond à la gamme du moteur. Notons que cet item commercial ne définit pas totalement la motorisation du véhicule. En effet, la motorisation dépend du type de moteur, mais aussi d’autres paramètres comme la norme de dépollution utilisée, la boîte de vitesse, etc. Un type de moteur est codifié par deux lettres et un chiffre (exemple : K9K) qui sont associés à la cylindrée et au type de culasse.

Le cycle de programmation est la succession de cinq étapes, décrites ci-dessous et résumées dans le schéma 3.3.

1. Le réseau commercial fait l’état des stocks en véhicules finis chez les concessionnaires. Le niveau optimal doit permettre de satisfaire la demande marché sans être trop élevé pour limiter les coûts de stockage supportés par les concessionaires.

2. La Direction commerciale élabore ses premières estimations de ventes et en déduit ses besoins en véhicules, en tenant compte du stock déjà existant. Elle fournit alors à la Direction Supply Chain la demande commerciale libre, i.e. indépendante de toute contrainte capacitaire.

3. La Direction Supply Chain reçoit cette demande commerciale libre et la confronte aux capacités industrielles des différentes lignes d’assemblage. Elle fournit alors à la Direction commerciale sa réponse industrielle, i.e. l’offre qu’elle peut fournir pour satisfaire au mieux la demande libre.

4. La réponse industrielle subit les derniers ajustements et arbitrages pour favoriser certains marchés, modèles et/ou usines selon la stratégie de l’entreprise. Le plan est ensuite définitivement validé par le commerce, la supply chain et la Direction générale.

5. Le plan officiel est diffusé auprès des différents acteurs concernés (usines de mécanique, usines d’assemblage, filiales dans chaque pays, etc.). Il fournit les prévisions de production pour chaque item commercial et pour chaque mois, sur un horizon de deux ans.

Figure3.3 – Cycle mensuel de programmation de Renault

Le cycle de programmation est réalisé mensuellement car il nécessite d’intégrer et de consolider un grand nombre de données à travers le monde, de les analyser et de les confronter pour les négociations, ce qui peut prendre plusieurs semaines. Notons aussi que dans la réalité, seuls les six premiers mois des prévisions (sur les deux ans disponibles) sont significatifs et pertinents pour la gestion de production. L’horizon au-delà est peu fiable, et principalement utilisé pour des études spécifiques, comme les enquêtes capacitaires (évaluer si de nouveaux

investissements sont nécessaires chez les fournisseurs) qui n’entrent pas dans le cadre de cette thèse.

Un point important est que les prévisions n’engagent aucunement le réseau commercial. Ainsi, les concessionnaires ne sont pas obligés de lancer des commandes de véhicules à hauteur des volumes issus du plan officiel. Il n’y a donc aucune contrainte sur un minimum de commandes à réaliser. Ainsi, la production réelle de véhicules peut largement différer des volumes issus du plan officiel. Renault fonctionne avec une approche très orientée BTO, où la production est entièrement tirée par les lancements faits par le réseau commercial.

De nombreux constructeurs automobiles ont un processus relativement proche du cycle mensuel de programmation. Tomino et al. (2009) décrivent la planification mensuelle de la production de Toyota, Nissan et Mitsubishi, et elle s’avère très similaire à celle de Renault. Daimler utilise aussi un cycle de programmation très proche mais avec un découpage temporel différent et des niveaux de gestion plus nombreux et précis. Une différence notable est que pour Nissan et Daimler, le réseau commercial n’a pas une liberté totale dans ses commandes. En effet, pour Nissan, il s’engage sur les volumes prévisionnels des deux premiers mois issus du cycle de programmation, mais peut modifier la répartition en items commerciaux si besoin. Quant à Daimler, il existe un système de quotas pour certains équipements critiques, qui oblige le commerce à lancer certains véhicules selon les prévisions qui ont été établies.

Le plan officiel issu du cycle de programmation est la première donnée essentielle pour l’élaboration du plan de production plus détaillé, décrite dans la section suivante.

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