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CULTE DES SAINTS MUSULMANS 73

Dans le document Culte des saints musulmans (Page 95-98)

rant, ce dont il faut le plus s'étonner, de l'orgueilde l'au-teur ou de la candeur avec laquelle il dresse sa propre statue à l'admiration et à l'adoration des

musulmans.

el~Aïnîn est, en effet, l’objet d'un véritable culte auprès des adeptes de sa doctrine. Il passe d’ailleurspour être un sorcier, réputation qu’il partage du reste avec

beaucoup

d’autres saints et marabouts, et,

comme

ses confrères, il accomplit des miracles.

Le

prestige qu’il exerce dans certaines régions (pas partout, témoin l’incident de l’Oued

Noûn

que nous avons

cité plus haut) est vraiment extraordinaire.

Le

Bulletin de la Sociétéde géographie d’Algera

pu-blié en 1906 la traduction du récitd’un indigène algérien qui avait pris part à un rezzou dans le Sahara occidental.

Partie du voisinage du Sud-Oranais, la troupe des pil-lards, au bout d’une cinquantaine de jours, arriva près de la résidence de

el-'A'inîn et

tomba

sur un troupeau de 3oo chamelles, toutes situées, c’est-à-dire suivies de leur chamelon, dont elle s’empara. C’était un superbe butin.

Mais

le soir arrivèrent au

campement

des voleurs deux envoyés du saint qui leur dirent : «

Vous

savez que ces chamelles appartiennent au marabout.

Vous

ferez ce que vous voudrez; le

marabout

ne s’opposera pas à ce que vous les

emmeniez,

si tel est votre dessein.

Mais

par

la malédiction qu'il lancera sur vous, pas un seul d’entre vous ne reverra ses enfants, pas un seul ne rentrera chez

lui. » Les voleurs délibérèrent longuement. Devait-on prendre au sérieux cette menace, ou fallait-il s’en

mo-quer? Finalement la crainte l’emporta et ils rendirent les

chamelles. Quatre jours après ils capturèrent une cara-vane.

La même

scène

recommença.

Les envoyés du

ma-rabout revinrent déclarer que dix-neuf charges de

cha-74 KDOUAHl)

MONTET

meau.x appartenaient à

el-'Aïnîn : elles lurent aussitôt restituées.

el-'Aïnîn est, paraît-il, habituellement coiffé d'une grande chéchia de laine blanche, en forme de pain de su-cre'.

On

assure que cette coiffure le rend invisible, grâce à un amulette que porte le saint.

I.e

marabout

réside tantôt à Chengît', dans l'Adràr(de son

nom

de

el-'Aïnin el-Chengît't’î), tantôt au sud du Sàgietel-h'amrâ.

.4 la mort de

Moh’ammed

el-Fàdhel, les Fâdheliyya ont eu pour directeurs les fils

mêmes

de ce saint. Actuel-lement

el-'Aïnîn est considéré

comme

le chef

suprême

des Qàdriyya dans le

Soudan

occidental.

Mais, depuis les événements qui se sont passés au

Ma-roc, il y a deux ans-, il a fondé une nouvelle confrérie, très fanatique, qui porte le

nom

de 'Aïniyya du

nom

de son Fheîkh ou directeur suprême.

Des

lettres du

Maroc

nous apprennent que les frèresde cet ordre religieux sont plus connus, dans le pays, sous le

nom

de Chenàgt'a ou

C'ffiengt’a (originaires de Chengît').

La

confrérie a des zàoLiias à Fez et à Alarrakèch, et l'on a prétendu que

'Abd

el-'Azîz, alors sultan, s'y était affilié.

Ce

dernier

fait est très vraisemblable, étant

donné

les rapports très étroits qui existaient alors entre le sultan et le marabout.

Les frères de la confrérie de

el-'Aïnîn ont été

sur-nommés

par les Marocains «les

hommes

bleus» \rijâl e~-~r()UL]i, parce qu'ils sont vêtus d'une cotonnade bleue

Chéchia, bonnet appelé vulgairementt'ez en Europe. Au Maroc, les cavaliers du Makhzen portent une chéchia rouge, en forme de pain de sucre; les indigènes donnent à cette coiffure lenomde piment (felfel el-ah'mar, poivre rouge).

- Nous avons mis ladernièremainà cemémoirependantl’étéde 1908;

ceci dit pourfixer lachronologie de certainsfaitsquenous mentionnons.

CULTE DES SAINTS

MUSULMANS

7D (khant) qui déteint sur la peau.

Or

les frères ne se lavent

jamais, faisant toujoursleurs ablutions aveclesable, parce que l’eau, à ce qu'ils prétendent, leur fait mal; aussi leur peau est d'une saleté bleuâtre.

Lors des troubles qui ont précédé le

bombardement

de Casablancais août1907), on vit les rues de cette ville par-courues par les

«hommes

bleus» de

el-'Aïnîn.

Le

type particulier de ces gens-là, originaires de l’extrême Sud-Marocain, du Sàgiet el-h’amrâ et de l’Adrâr, leur aspect féroce, leurs longs cheveux en désordre et les

ar-mes

qu'ils portaient, répandaient la terreur autour d’eux, aussi bien parmiles indigènes paisibles et étrangers à tout fanatisme, que parmi les juifs du Mellah (le quartier Israé-lite) et les Européens fixés à Casablanca.

Les ‘Aïniyya se sont fait une réputation sinistre par toutes les violences qu’ils ont exercées et par ont fini

par s’attirer, non seulement la réprobation, mais lahaine des populations

musulmanes,

au milieu desquelles ils

accomplissaient leurs crimes.

E!n igo6, à Marrakèch, venus en grand

nombre

pour y acheter des

armes

et des munitions dans le but de

com-battre les infidèles du Sénégal, ils eurent la prétention d’agir en maîtres dans la capitale, s’emparant des

mar-chandises exposées pour être vendues, pénétrant dans

les maisons particulières pour y

demander

du thé et des femmes.

Un

d’entre eux fut surpris un jour cherchant à forcer la porte d’une mosquée, pour y voler.

Ce

dernier

fait mit le comble à la mesure.

Le Pacha

de

Marrakèch

fit jeter en prisonle coupable et ordonna le

désarmement

de tous les 'Aïniyya'.

Revue du Monde musulman, ibid., p. 346.

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