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Le problème de la dispersion des caractéristiques « matériau », induite par la mauvaise reproductibilité du cycle de cuisson, est inévitable dès que l’autoclave utilisé ne l’est pas spécifiquement pour la réalisation des plaques de test. Cette constatation nous a conduit à nous doter de notre propre four autoclave, de petite dimension, qui permettra de réaliser des cuissons spécifiques pour un coût raisonnable.

3.3.1 Conception et réalisation d’un autoclave de laboratoire

Le travail de conception et de première validation de l’autoclave a été réalisé dans le cadre d’un projet de 1ère

et 2nde

année du cycle d’élève-ingénieur à l’EC Lille que j’ai encadré. D’un diamètre intérieur de 550 mm pour un volume inférieur à 100 litres, l’architecture du four est classique, excepté pour le brassage de l’air et le refroidissement. Le chauffage est assuré par une résistance, la température est mesurée en trois points (fond de cuve, sommet de cuve et plaque support) et le brassage de l’air est assuré par un moto-ventilateur pneumatique situé dans la cuve. Ce choix peu coûteux permet de simplifier l’étanchéité, qui se limite à deux raccords pneumatiques statiques. La vitesse de rotation du ventilateur est réglée manuellement en début de cuisson en jouant sur une vanne. Elle n’évolue a priori pas en cours de cuisson. Le refroidissement est assuré par renouvellement de l’air de la cuve : deux électrovannes sont pilotées, l’une pour la pressurisation et l’autre pour la dépressurisation, le débit de la seconde étant de moitié inférieur à celui de la première. Lors d’un refroidissement, la vanne de dépressurisation est ouverte, ce qui entraîne une chute de pression. Si la pression doit rester constante, la vanne de pressurisation s’ouvre par intermittence pour maintenir cette pression, ce qui apporte de l’air frais dans la cuve et assure le refroidissement. Ce choix de solution est, là encore, peu coûteux, mais complexifie la commande qui doit garantir le découplage des pilotages en température et en pression. La pompe à vide est constituée d’un éjecteur couplé à un manocontact et à un clapet anti-retour. Ce dispositif est complètement autonome, et

garantit un niveau de vide relatif d’environ –700 mbar durant toute la cuisson. L’architecture est présentée figure 3-26 : quatre mesures sont effectuées (trois de températures et une de pression), et permettent de piloter les deux électrovannes et la résistance de chauffage.

Figure 3-26 : architecture de l’autoclave de laboratoire

Un logiciel de commande a été réalisé en deux parties distinctes : dans un premier temps, les consignes de pression et de température en fonction du temps sont saisies graphiquement puis échantillonnées. Dans un second temps, l’asservissement est réalisé. Les évolutions des pression et températures mesurées sont alors tracées en superposition de la consigne. Cette architecture a été testée sur une cuve de récupération (en se limitant à de faibles pressions pour des raisons de sécurité). Les résultats étant positifs (refroidissement et homogénéité de la température en particulier), une cuve spécifique a été commandée en fin de projet (figure 3- 27).

Figure 3-27 : photo de l’autoclave

Le montage de l’autoclave définitif, et la mise au point du logiciel de commande ont été réalisés respectivement dans le cadre d’un projet de 3ème

fin de 2nde

année d’IUT département Mesure physiques. Ses caractéristiques définitives sont les suivantes :

Température maximale : 160 °C Pression maximale : 8 bars

Vitesse de chauffe : de 6 °C/mn à l’ambiante à 3 °C/mn à 160 °C

3.3.2 Etude de l’influence du cycle de cuisson sur les propriétés du composite

Le premier travail de recherche utilisant le four Autoclave a eu lieu dans le cadre du DEA de Mounir Abdellouche. Son objectif était, outre de valider le fonctionnement de ce dispositif, d’étudier l’influence de quelques paramètres de cuisson sur les caractéristiques mécaniques de composites stratifiés carbone-époxyde. Ce travail a été réalisé en collaboration avec l’ONERA-IMFL pour l’approche par plans d’expérience et l’ENSAM de Lille pour la réalisation des plaques stratifiées à partir de préimprégnés.

Les paramètres retenus ont été volontairement limités aux niveaux de pression et de température durant la cuisson.

La cuisson retenue est relativement simple :

• le vide dans la vessie est établi avant la cuisson et maintenu à un niveau constant (-700 mbar),

• la pression est établie dans l’autoclave dès le début de la cuisson (pressurisation à 0,5 bar/mn), et reste constante durant toute la cuisson,

• le composite est chauffé dès le début à 3°/mn jusqu’à une température de palier (unique), et maintenu à cette température pendant un temps permettant de garantir la polymérisation complète (ce temps de maintien dépend de la température du palier, mais ne constitue pas un paramètre supplémentaire).

Enfin, un troisième paramètre est retenu : l’épaisseur du stratifié. L’exothermie de la polymérisation a en effet une influence importante sur la cinétique de la réaction, et n’est pas prise en compte par la régulation de l’autoclave (pas de sonde de température au cœur du composite).

Les plages de variation retenues pour ces paramètres sont (100°C - 160°C), (1 bar - 6 bars) et (20 plis – 60 plis).

Les évolutions des caractéristiques mécaniques en fonction de ces trois paramètres n’étant pas a priori linéaires, le choix du plan d’expérience s’est porté sur un plan de DOELHERT (non linéaire) à trois paramètres, ce qui nécessite la réalisation de 13 cuissons minimum (15 en réalisant à nouveau la première cuisson en milieu et fin de plan).

Le dernier choix a porté sur le type d’essai permettant de qualifier la qualité de la cuisson en terme de résistance mécanique. C’est un essai de flexion trois points avec appuis rapprochés (cisaillement prépondérant) qui a été utilisé. Sa simplicité de mise en œuvre (géométrie simple des éprouvettes, rapidité de l’essai et du dépouillement) a permis de tester plus de 150 éprouvettes (11 par plaque, réparties entre le centre et les bords). Cinq espacements entre appuis ont été utilisés pour chacun des cinq niveaux nécessaires à la réalisation du plan (20, 30, 40, 50 et 60 plis), de façon à garder un élancement constant (L/h = 7,5).

Outre ces essais de flexion, l’épaisseur des plaques après cuisson a été contrôlée (moyenne et variation) pour qualifier la qualité de la cuisson.

Le premier problème a été la forte dispersion des résultats des essais de flexion. Deux dépouillements ont été réalisés, en exploitant d’une part l’ensemble des essais, et d’autre part, en éliminant (de façon assez subjective) les essais les plus dispersés. Les résultats de ces deux dépouillements étaient finalement très proches.

à rupture variaient entre 45,4 et 50,3 Mpa (figure 3-28).

Figure 3-28 : contraintes à rupture identifiées à l’aide des essais de flexion trois points

L’exploitation du plan d’expérience, en particulier l’analyse des résidus, a permis de conclure que le modèle choisi (non linéaire) explique convenablement les résultats expérimentaux, mais qu’il ne pourra pas donner de prévisions précises. En pratique, aucune tendance de l’influence du cycle de cuisson sur les caractéristiques mécaniques n’a pu être dégagée: la figure 3-29 montre l’évolution de la contrainte de cisaillement prédite par le modèle en fonction des variables centrées réduites pour deux cas de figure : à gauche, ces variables sont les températures et pressions de consigne et à droite les températures et pressions mesurées. Les variables ne diffèrent en moyenne que de 0,1 bar et 6,5°C (et au maximum de 0,39 bars et 28°C) entre les deux cas, alors que le type d’évolution prédit par le modèle est très fondamentalement différent.

Figure 3-29 : évolution prévue de la contrainte à rupture en fonction des paramètres d’entrée

Même si l’approche générale reste d’après nous valable, cette étude n’a pas permis de construire un modèle correctement ajusté. Les arguments retenus pour expliquer cet échec sont avant tout le mauvais choix de l’épaisseur des stratifiés (la plage n’étant pas assez étendue, de plus grosses épaisseurs auraient dû être utilisées) et des problèmes de régulation de température, qui ont perturbé les deux essais de façon importante (panne du système de brassage).

3.3.3 Bilan de l’autoclave

Mis à part les problèmes de mise au point inhérents à tout nouveau matériel, cet autoclave est un outil d’une grande utilité pour tout laboratoire travaillant sur les composites. Lors du stage de DEA, quinze cuissons ont pu être réalisées en l’espace de deux semaines, pour un coût nettement inférieur à une cuisson dans un autoclave industriel. L’abandon provisoire par le laboratoire de l’axe de recherche sur les matériaux composites n’a hélas pas permis

d’exploiter ce dispositif qui aurait permis, à mon sens, de s’affranchir d’une grande partie des dispersions sur les caractéristiques du matériau observées jusqu’alors.