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Chapitre 1 : Position du problème, contexte et définition

1.4. Critères de blessure

0 1 2 3 4 5 6 7 8 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 Temps (ms) V ite s s e (m /s )

Figure 1.18: Vitesse de pénétration du point central de la ceinture par rapport à la vertèbre T12 lors du phénomène de sous marinage pour une simulation avec le mannequin HIII.

1.4. Critères de blessure

Pour utiliser les mannequins de choc comme outil d’évaluation de la protection de l’occupant, il est nécessaire d’établir un lien entre les valeurs des paramètres physiques mesurés et l’apparition de lésions. Grâce aux mesures faites lors des essais biomécaniques sur sujets humains ou animaux et aux autopsies réalisées, il est possible d’associer les lésions observées à ces paramètres. Si ces paramètres, que ce soit une compression, une vitesse, une accélération, un effort, une pression ou alors une combinaison de ceux-ci, sont capables de prédire le risque lésionnel dans toutes les configurations d’essais, on les considèrera comme des critères. Deux méthodes permettent de déterminer un critère. Soit l’on identifie le mécanisme responsable des lésions lors d’un choc : dans ce cas, on lui associe une mesure pour ensuite mettre en relation la mesure avec les lésions. Soit, on ne connaît pas le mécanisme lésionnel et on réalise une analyse statistique sur plusieurs paramètres. Dans ce cas, pour que l’analyse soit pertinente, les paramètres étudiés ne doivent pas être corrélés.

Les critères utilisés pour l’abdomen, leur élaboration et leur signification sont détaillés ci-dessous.

Historiquement, le premier critère utilisé pour les lésions abdominales est la mesure de la compression. Cependant, Lau constate en 1981 [28] que des lésions apparaissent pour des compressions entre 30 et 40 % à des vitesses faibles. Par contre, à des vitesses supérieures à 12 m/s, il constate que les lésions apparaissent pour des

compressions de l’ordre de 10 à 20 %. Viano trouve également que la compression est un bon indicateur de lésions si les vitesses de chargement restent inférieures à 3 m/s [29]. Ces observations nous confirment que le comportement de l’abdomen est sensible à la vitesse. Lau, lors d’essais réalisés à une compression constante de 16 % et des vitesses variant de 5 à 20 m/s sur des lapins anesthésiés, constate que la vitesse est un paramètre que l’on doit prendre en compte pour la définition du critère. De ces expériences, Lau et Viano en 1986 [30], proposent un critère dit visqueux, produit de la compression C(t) par la vitesse V(t) dont certaines variantes sont utilisées. L’une d’elle, définie par Rouhana en 1985 [31], est le rapport du produit de la vitesse par la compression, par un moins la compression (V*C/(1-C)). Une autre variante utilisée est le produit du maximum de compression par la vitesse maximale de pénétration (Cmax*Vmax). Stalnaker en 1985 [32] et Miller en 1991 [33] lors d’essais avec des impacteurs trouvent une bonne corrélation entre le critère visqueux et la sévérité des lésions. Certains critères peuvent également se baser sur l’effort maximum ou alors la pression intra abdominale [22]. D’autres tiennent compte de la force d’impact et de sa durée [34]. Par contre, l’accélération étant généralement mesurée sur une partie osseuse, elle n’est pas adaptée pour traduire le comportement des tissus mous [29]. D’autres critères représentant l’énergie d’impact [35] sont définis par le produit de la force par la compression (F*C) ou alors le produit de la force maximum par la compression maximale (Fmax*Cmax).

Chaque auteur définit un critère adapté à ses conditions d’essais, c'est-à-dire à un type de chargement et une sollicitation (vitesse, compression, etc..) donnés. Les critères obtenus pour les lésions abdominales sont donc différents. Cependant, un critère n’est défini comme tel que s’il est valable dans n’importe quel type de chargement et n’importe quelle sollicitation. Ceci est difficilement réalisable et en pratique, les bilans lésionnels sont corrélés à plusieurs paramètres physiques disponibles afin de constater d’une éventuelle relation entre eux. Les corrélations obtenues sont plus ou moins bonnes mais la définition d’un critère unique est délicate.

Après l’association d’un paramètre ou d’une combinaison de paramètres avec une lésion, une valeur seuil de ce critère est définie. Elle correspond à la valeur du paramètre au-delà duquel une lésion est susceptible d’apparaître. Des courbes de risque évaluant la probabilité d’avoir des lésions en fonction de la valeur du critère sont disponibles dans la littérature. Stalnaker [32] dans ses essais avec un impacteur

rigide sur des singes anesthésiés, obtient un seuil pour le critère visqueux (V*C) de 3,83 m/s, pour la pression et une limite pour la compression. De même les essais avec impacteur de Miller [33] suggèrent un risque de 25 % de lésion abdominale AIS 4+ pour un V*C de 1,29 m/s.

N’ayant aucune connaissance du mécanisme lésionnel lors du chargement de l’abdomen par une ceinture, Miller [22] étudie par une analyse statistique la corrélation entre, d’une part, le maximum de compression (Cmax), l’effort maximal (Fmax), la pression maximale (Pmax), le produit de l’effort maximal par la compression maximale (Fmax*Cmax) et, d’autre part, la probabilité d’avoir une lésion grave à sévère (AIS 3+). Elle obtient la meilleure corrélation pour le produit Fmax*Cmax. Cependant, elle constate que la régression logistique simple ne permet de considérer qu’un seul mécanisme lésionnel. Or lors du phénomène de sous marinage, elle explique qu’il existe à la fois un chargement quasi statique des organes abdominaux par la ceinture et également un chargement dynamique dû au mouvement de l’occupant. Elle utilise de ce fait la régression logistique multiple prenant comme paramètres d’entrée du modèle statistique la compression maximale Cmax et le produit VCmax et compare les coefficients de corrélation obtenus à ceux des autres modèles. Elle obtient un meilleur coefficient de corrélation pour la régression multiple que pour les régressions simples. Elle en déduit que les lésions induites par un chargement par ceinture au niveau inférieur de l’abdomen sont dues à deux mécanismes lésionnels définis par vitesse de pénétration et le taux de compression. Elle obtient pour un risque de 25 % de lésions AIS 4+, une Cmax de 48 % et un VCmax de 1,4 m/s. Elle propose également un risque de 50 % de lésions AIS 4+ pour une Fmax de 4,72 kN (ceci pour des vitesses inférieures à 3 m/s).

Trosseille dans son étude trouve un V*C maximum de 1,6 m/s et un Fmax de 7,5 kN [23]. Les valeurs des critères obtenus dans l’étude de Foster [24] ainsi que les valeurs précédentes sont répertoriées dans le Tableau 1.7. Les fourchettes de valeurs données par Foster correspondent au maximum des valeurs pour lesquelles il n’y a pas eu de lésions et au minimum de ces valeurs pour lesquelles il y a eu des lésions. Il constate que l’apparition des lésions est fortement liée à l’augmentation de l’énergie des prétensionneurs. Des lésions n’apparaissent que dans la configuration d’essais avec les prétenionneurs de plus haute énergie. Il étudie également l’influence de la compression, de la pénétration, de la vitesse, et des combinaisons de ces paramètres

sur l’apparition des lésions. Cependant, ces paramètres semblent corrélés. En effet, la compression augmente avec l’énergie du système de chargement. De même, la compression, la pénétration et la vitesse sont étroitement liées, la pénétration et la compression augmentent avec la vitesse de façon presque linéaire. Ainsi, comme tous les paramètres sont corrélés, si un paramètre est lié au risque lésionnel, les autres paramètres seront également valables. Pour identifier le paramètre responsable des lésions, une étude de décorrelation aurait été nécessaire.

Critère V (m/s) V*C (m/s) Vmax*Cmax (m/s) Fmax*Cmax (kN) Fmax (kN) Cmax (%) Stalnaker - 3.83 - - - 60% Miller - 1.4 - 2 4.72 (50% AIS4+) 48% (v=3-6 m/s) Trosseille - 1.6 - - 7.5 - Foster 7.5-8.5 2.9-4.1 1.2-1.8 2.8-3.6 7.9- 8.3 38- 44

Tableau 1.7: Valeurs seuil des critères de blessure pour les essais de chargement ceinture.

Les critères utilisés sont variables selon les auteurs : de plus, lorsqu’un même critère est utilisé, on observe des valeurs qui peuvent être très différentes. Ces divergences sont dues à des chargements différents selon les essais. En effet, le système de chargement, les surfaces et les vitesses de chargement, les sujets utilisés sont des facteurs intervenant dans les mécanismes lésionnels. Si l’on considère le V*C, on observe que sa valeur limite est la plus élevée pour Stalnaker lors de ces essais avec impacteur sur des singes anesthésiés. Miller et Trosseille ont des valeurs de V*C équivalentes mais des Fmax variant du simple au double. Les vitesses de sollicitation sont deux fois plus faibles dans les essais de Miller que dans ceux de Trosseille. Cette différence peut expliquer cet écart observé dans les Fmax. De plus, la surface de chargement entre les essais de Miller et de Trosseille est différente. La ceinture vient englober le sujet dans les essais de Trosseille alors que dans ceux de Miller le chargement de l’abdomen ne comprend pas les bords latéraux de l’abdomen. De même la compression maximale obtenue est différente selon les essais.

Ainsi, pour un même type de sollicitation, par exemple avec une ceinture de sécurité, on observe que valeurs des critères utilisés peuvent être très différents. Ceci peut être dû au système de chargement, aux sujets utilisés et à la vitesse de sollicitation par exemple. De ce fait, il est important comme l’a précisé Trosseille, de documenter le

critère utilisé avec les conditions de l’essai. Les valeurs obtenues pourront alors être comparées.

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