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CHAPITRE IV : CRISTALLISATION DE LA FRACTION LIPIDIQUE

1. Cristallisation suivant trois profils de refroidissement

Un échantillon d’huile de palme a été refroidi suivant trois profils de refroidissement. Les modifications de structures ont été analysées par des méthodes de diffusion de rayons X et par microscopie optique tout au long du traitement thermique. Les clichés obtenus sont présentés en Figure IV-2.

Figure IV-2. Clichés microscopiques en lumière polarisée de la cristallisation de l'huile de palme pour les 3 profils de

refroidissement (1) « lent », (2) « intermédiaire » et (3) « rapide », pour différentes températures (de +25 à -5°C tous les 5°C). Echelle de 100 μm. Les flèches blanches sur le cliché 2c désignent les deux types de structures : petite sphérulite et

agrégat cristallin de forme discoïdale.

13 Une partie des résultats présentés dans cette section ont fait l’objet de valorisation par le biais de poster et de l’écriture d’une publication pour une revue à comité de lecture (cf. Annexe F – Valorisations scientifiques).

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Si l’on considère le profil de température « lent », nous observons que le palier isotherme effectué à 25°C autorise une croissance cristalline (les cristaux apparaissent dès 30°C). Diminuer la température conduit alors à faire croitre davantage les cristaux déjà formés sans en faire apparaitre de nouveaux. Les cristaux obtenus ont un diamètre moyen égal à 55 ± 18 μm à 25°C. Ce type de structure a déjà été observé par Harrison et al. (2016) (1) et Chen et al. (2) lors de la cristallisation isotherme de l’huile de palme à des températures comprises entre 26°C et 35°C. Harrison et al. (1) relient ce type de morphologie à la composition de l’huile de palme, de moitié composée de TAGs insaturés, incapable de cristalliser à ces températures. Cette fraction insaturée étant liquide autour de 30°C, elle ne diffuse pas assez vite et se retrouve piégée par la croissance des cristaux autour d'elle, donnant lieu à ce type de structure non uniforme et composée d’aiguilles. Si nous considérons le deuxième cas extrême dit rapide, aucuns cristaux ne sont observés à 25°C. Les premiers cristaux de type sphérullitiques sont visibles autour de 21°C. Au cours du refroidissement, seuls de petits cristaux apparaissent. Ces derniers ont une croissance limitée et occupe la quasi-totalité du volume libre et une faible croissance est observée. L’étape dite intermédiaire donne un résultat hybride comparé aux deux précédents : des petits cristaux apparaissent à 25°C, une possibilité de croissance selon deux structures remarquées par les flèches sur la figure IV-2-2c est observée avec la formation d’une multitude de petits cristaux au cours du refroidissement. À partir de ces simples mesures, il est clair que la vitesse de refroidissement conditionne largement la structure cristalline de l’huile de palme. Les diamètres moyens des structures cristallines mesurés à partir de ces clichés sont présentés sur le tableau IV-2.

Tableau IV-1. Diamètre moyen des cristaux/agrégats cristallins en fonction du profil de refroidissement et de la

température.

Diamètre moyen des structures cristallines (μm) Moyenne ± Ecart-type

Profil de refroidissement 25°C 15°C 5°C -5°C

Lent 55 ± 18 63 ± 23 75 ± 22 101 ± 26

Intermédiaire 12 ± 3 26 ± 11 29 ± 12 29 ± 12

Rapide n/a 21 ± 5 23 ± 5 25 ± 6

Lors d’un refroidissement « lent », les agrégats cristallins de forme discoïdale atteignent 101 μm de diamètre en moyenne à -5°C. A cette même température, lors d’un refroidissement « rapide », le diamètre moyen des structures cristallines formées est de l’ordre de 25 μm. Ainsi, lors d’un refroidissement « lent », le diamètre moyen des structures cristallines est presque 4 fois supérieur au diamètre des sphérulites formées au cours d’un refroidissement « rapide » (Tableau IV-1). Lors d’un refroidissement « intermédiaire », le diamètre des cristaux à -5°C atteint 29 μm de diamètre en moyenne. Le rapport moyenne/écart-type est supérieur pour ce profil que pour les deux autres, cela est lié à l’hétérogénéité de la taille des particules.

Une analyse simple conduit à représenter l’évolution des tailles moyennes en fonction de la température. Nous avons choisi de représenter ces données selon ln(Ømoy) = f(1/T) afin d’évaluer dans quelles conditions ces cinétiques de cristallisation obéissent à la loi d’Arrhenius14. Celles-ci sont reportées sur la figure IV-3. Dans le cas d’une réaction non dépendante de la température, l’évolution

14 En supposant que l’énergie d’activation de la réaction ne dépende pas de la température, la loi d’Arrhenius s’exprime comme suit: 𝑙𝑛𝐾 = 𝑙𝑛𝐴 ×−𝐸𝑎

𝑅𝑇 ; avec K le coefficient de vitesse (ou constante de vitesse) ; T la température [K] ; A le facteur pré-exponentiel ; R la constante universelle des gaz parfaits [J/mol.K] ; Ea l’énergie d'activation d'Arrhenius [J/mol].

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de la quantité mesurée en fonction de 1/T suit une droite de coefficient directeur égal à 𝐸𝑅𝐴 et d’ordonnée à l’origine égale à lnA.

Figure IV-3. Evolution de ln(Ømoy) (Ømoy pour diamètre moyen des cristaux) en fonction de 1000/T, pour les trois profils de refroidissement : (■)« lent », (▲) «intermédiaire » et (●) « lent ». Les courbes associées aux profils « rapide » et « intermédiaire » peuvent être découpées en 2 périodes tandis que la courbe associée au refroidissement « lent » est composée de 4 périodes, chaque période étant modélisée par une droite. Les points à l’intersection de deux droites sont

notés A, B et C.

Les courbes représentées sur la figure IV-3 ne suivent pas une simple tendance linéaire dans la gamme de température considérée. Les courbes associées aux profils de refroidissement « rapide » et « intermédiaire » peuvent être délimitées en deux périodes, repérées par les chiffres 1 et 2 sur la figure IV-3. La courbe associée au profil « lent » a été découpée en quatre périodes. Par analogie avec les autres courbes, une période relativement linéaire est définie jusqu’au point B. Après ce point, un comportement différent des deux autres courbes est observé. Nous avons choisi de le découper selon 2 périodes, en émettant une réserve quant à la quatrième période, qui apparait moins nette que les autres.

Chaque période peut être assimilée à un segment de droite dont le coefficient directeur permet de calculer l’énergie d’activation apparente Ea pour la période considérée (en supposant un processus Arrhénien). Les valeurs obtenues sont répertoriées dans le tableau IV-3. Ces comportements traduisent clairement l’existence de processus de cristallisation en plusieurs étapes.

Tableau IV-3. Valeurs des énergies d’activation apparentes déduits des valeurs de coefficient directeur des droites assimilés

aux quatre périodes des courbes ln(Ømoy)=1000/T associées aux trois profils de refroidissement.

Profil de refroidissement Ea1 (kJ/mol) Ea2 (kJ/mol) Ea3 (kJ/mol) Ea4 (kJ/mol) Lent 72 11 40 8

Intermédiaire 111 5 n/a n/a

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Les valeurs des températures aux intersections sont : A=17°C pour le profil « rapide », A=20°C pour le profil « intermédiaire » et, pour le profil « lent », A=25°C, B=5°C et C=1°C.

Les valeurs d’énergie d’activation apparente pour la première période Ea1 sont de 160 kJ/mol lors d’un refroidissement « rapide », 111 kJ/mol lors d’un refroidissement « intermédiaire » et 72 kJ/mol pour un refroidissement « lent ». Une augmentation de la vitesse de refroidissement moyenne engendre une augmentation de l’énergie d’activation apparente nécessaire pour amorcer le processus de cristallisation. Ces observations sont en accord avec les résultats de Bouzzidi et Narine (3), obtenus sur la cristallisation non-isotherme du beurre de cacao selon plusieurs vitesses de refroidissement. Ils avancent qu’une augmentation de la vitesse de refroidissement diminue la mobilité des triglycérides, gênés dans leurs déplacements par une augmentation rapide de la viscosité du système. Les premières périodes sont comprises respectivement entre [30°C 25°C], [26-20°C] et [21°C-17°C] pour les profils « lent », « intermédiaire » et « rapide », soit une période de 5°C environ, et correspondent toutes trois à l’apparition des premières structures cristallines. Cette étape fait intervenir les processus de nucléation-croissance.

Les valeurs d’énergie d’activation apparente pour la seconde période Ea2 sont largement inférieures aux valeurs Ea1. Le rapport Ea1/Ea2 est supérieur dans le cas d’un refroidissement « rapide » à celui obtenu dans le cas d’un refroidissement « lent ». Cela signifie, d’une part, que le processus de cristallisation atteint un régime quasi stationnaire et d’autre part, que la transition entre les deux étapes dans le cas d’un refroidissement « rapide » est plus « abrupte » que lors d’un refroidissement « lent ». Cette deuxième période correspond à une étape de croissance.

Enfin, dans le cas d’un refroidissement « lent », la troisième période, comprise entre les températures de 5°C et 1°C, présente une énergie d’activation apparente de 40 kJ/mol. C’est dans cette gamme de température qu’apparait la « couronne » autour des cristaux déjà formés. Une quatrième période quasi stationnaire a été identifiée dont l’énergie d’activation apparente associée est de Ea4=8kJ/mol. Elle correspond à une étape de croissance de la « couronne » formée au cours de la période précédente.

Notons qu’autour de 0°C, une seconde étape de cristallisation a lieu. Elle se traduit, en microscopie optique, par la cristallisation du fond continu dans le cas d’un refroidissement « rapide », de la densification du réseau cristallin dans le cas d’un refroidissement « intermédiaire » et d’une étape de croissance supplémentaire dans le cas d’un refroidissement « lent ». Ces évènements concordent avec les résultats DSC qui mettent en évidence deux évènements exothermiques associés à des cristallisations (Fig. IV-4).

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Figure IV-4. Analyse par DSC de la cristallisation de l’huile de palme raffinée à la vitesse de (A) 0,08°C, (B) 0,4°C/min et

0,05°C/min (correspondant respectivement aux vitesses moyenne des profil « lent », « intermédiaire » et « rapide »). La courbe (lissée) correspondant à la cinétique de refroidissement de 0,08°C a été représentée séparément pour des raisons

de clarté. Les traits pointillés servent de guides de lecture et mettent en évidence la température de début de chaque évènement exothermique majoritaires.

L’analyse DSC est une technique dynamique. En conséquence, les températures et mécanismes de cristallisation diffèrent forcément des résultats obtenus par microscopie optique ou diffusion de rayons X dû à l’absence des plateaux isothermes. L’objectif ici est de mettre en évidence la tendance de l’huile de palme à cristalliser en deux étapes principales. Pour une vitesse de refroidissement de 0,08°C/min, la première étape a lieu à « hautes températures » (Tonset 1 ≈ 33°C) et concerne majoritairement les triglycérides saturés, tandis que la seconde étape (Tonset 2 ≈ 8°C) est liée à la cristallisation des triglycérides insaturés (4). Ces températures se voient décalées vers les basses températures pour les vitesses de 0,4°C/min et 0,5°C/min : Tonset 1 ≈ 27°C et Tonset 2 ≈ 5°C.

A

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La seconde étape de cristallisation pour les profils de refroidissement « intermédiaire » et « rapide » n’est pas visible sur les courbes représentées sur la figure IV-3. Cela traduit une limite de la méthode due à l’impossibilité d’effectuer une mesure de la taille des nouveaux cristaux formés à basse température, à partir des clichés de microscopie optique. Cependant, cela met en évidence que lors de la seconde étape en cristallisation, les cristaux formés au début du processus de cristallisation ne croissent pas davantage, de nouveaux cristaux se forment. Ce qui n’est pas le cas pour un refroidissement « lent ». En effet, dans ce cas, une augmentation de l’énergie d’activation apparente entre 5°C et 1°C, est associée à une étape de croissance des larges cristaux observée en microscopie optique. Ce processus est lié à la cristallisation de la fraction de TAGs insaturés. L’énergie d’activation apparente calculée pour cette seconde étape de cristallisation (40kJ/mol) est inférieure à la valeur d’énergie d’activation apparente calculée pour la première étape de cristallisation (72kJ/mol). Lors de la seconde étape de cristallisation, les cristaux déjà existants croissent tandis que lors de la première étape de cristallisation, les cristaux se forment depuis l’état fondu, ce qui nécessite davantage d’énergie que lorsqu’une surface cristalline support existe (principe d’hétéro-germination). Ce résultat concorde avec les résultats obtenus par Chen et al. (2002)(2)dans leurs travaux sur les cinétiques de cristallisation isotherme de l’huile de palme raffinée. Une cristallisation à la température de 15°C implique la formation de cristaux en premier lieu sous une forme α, qui se transforment lors d’une seconde étape en une forme β’. L’énergie d’activation calculée lors de la cristallisation de la forme β’ donne une valeur égale à 4,0 ± 0,3 kJ/mol. L’énergie d’activation de la forme α était alors de 7,5 ± 1,1 kJ/mol. Chen et al. expliquent cette différence par deux phénomènes : (i) la surface du cristal α initialement cristallisé est un site favorable pour la nucléation des cristaux β', et donc moins d'énergie est nécessaire ; (ii) les TAGs mixtes cristallisant dans ces conditions ont une préférence pour la forme β' avec une énergie libre d'activation inférieure pour la nucléation.

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La figure IV-5 présente les résultats obtenus en SAXS lors de la cristallisation de l’huile de palme suivant un profil de refroidissement « lent ».

Figure IV-5. Résultats de l’analyse SAXS d’un échantillon d’huile de palme refroidi selon un profil de refroidissement « lent »

de 80°C à -15°C (du gris vers le noir). Les deux inserts correspondent à des zooms sur les pics situés à q=0,098Å-1 et q=0,147Å-1. Les flèches montrent la tendance du maximum de ces pics à se décaler vers de plus basses valeurs de q pendant le refroidissement. Les annotations sur la figure donnent les distances d calculées à partir de la position q des pics à -15°C et

les types d’empilements lamellaires associés.

Les deux premiers pics à se former en SAXS apparaissent à q=0,147 Å-1 [42,6 Å] (à 30°C) et à q=0,293 Å-1 [21,4 Å] (à 8°C), relatifs à une structure en deux longueurs de chaîne (2L). À partir de -2°C, deux autres pics apparaissent aux positions q=0,098 Å-1 [64,3 Å] et q=0,193 Å-1 [32,6Å] et correspondent à une structure en trois longueurs de chaîne (3L). Ces résultats sont conformes à ceux de Chong et al. (2007) (5). En se basant sur la bibliographie où une analyse WAXS est disponible, il est possible d’associer les structures en 2L et 3L à une forme polymorphique β’. Les cinétiques d’apparition des pics observés en SAXS associés aux structures cristallines correspondantes sont représentées sur la figure IV-6.

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Figure IV-6. Distances d (Å) associées aux pics formés pendant le refroidissement d’un échantillon d’huile de palme selon un

profil « lent ».

À basse température, les triglycérides adoptent une structure lamellaire avec à la fois une configuration en double longueur de chaine (2L) et triple longueur de chaîne (3L). Notons qu’un léger décalage vers les basses valeurs de q (i.e. plus hautes distances inter-planaire) est visible au cours du refroidisssement pour les pics (001) relatifs aux structures 2Lβ’ et 3Lβ’ (plus évident pour ce dernier). Ces observations sont mises en évidence dans les inserts sur la figure IV-5 et les décalages sont représentés par des flèches. Notons que ces derniers (de l’ordre de 0,5 Å) ne sont pas ou peu visibles sur la figure IV-6 du fait de l’échelle considérée pour l’axe vertical. Cela traduit une modification de la composition, probalement liée à l’intégration de TAGs insaturés dans la structure cristalline. Pour que cet effet soit observé, il faut que le système surcomponpense la contraction lié au refroidissement. Pour rappel, l’huile de palme est composée de moitié par des acides gras insaturés. Les triglycérides les plus abondants sont POO et PLO (pour les monosaturés), PPO et PPL (pour les disaturés), et PPP (pour les trisaturés). Une insaturation implique une courbure de la chaine aliphatique d’un acide gras. Ainsi, plus les triglycérides contiennent d’insaturations, plus ils leur est difficile de s’arranger selon une structure lamellaire. Les PPP sont trisaturés et homogènes. Ces TAGs vont adopter une configuration 2L (6,7). Grâce à leur structure régulière et leur compacité, il leur est plus facile de cristalliser à haute température. A l’inverse, des TAGs polyinstaturés cristallisent à plus basse température et adoptent pour la plupart d’entre eux une configuration 3L. Pour ces raisons, à cette composition et à refroidissement « lent », la configuration 2L appararaît avant une configuration 3L.

Une évaluation DSC de cette cinétique (cf. Fig. IV-4-A) est cohérente avec les résultats obtenus par Chong et al. (2007) (5). Les températures caractéristqiues de début de cristallisation ne sont pas identiques entre nos travaux et les leurs. Cela provient de la différence entre les vitesses de refroidissement considérées : 0,08°C/min contre 0,1°C/min. Le premier exotherme à 33°C peut être attribué à la formation d’une structure 2Lβ’. Ce dernier est suivi d’un léger exotherme compris entre 20°C et 8°C correspondant à la cristallisation d’une structure cristalline d’une autre structure de type 2Lβ’, légèrement différente de la précédente (5). Le faible exotherme visible entre 8°C et 4°C est attribuable à la formation de cristaux de même forme que ceux formés au début de la cristallisation,

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soit 2Lβ’. Cela se traduit en SAXS par l’apparition des pics relatifs aux plans 002. Les exothermes suivants (à partir de 4°C) traduisent la formation de structures cristallines sous la forme 3Lβ’.

Après une étape de cristallisation selon un profil de refroidissement « lent », l’échantillon d’huile de palme a été soumis à une montée en température allant de -15°C à 30°C par paliers de 12 min tous les 5°C. Le résultat obtenu en SAXS est présenté sur la figure IV-7.

Figure IV-7. (A) Analyse SAXS d'un échantillon d'huile de palme lors d'une étape de chauffage allant de -15°C à 30°C (du noir

au gris) après avoir suivi un refroidissement « lent » ; (B) Distances d(Å) associées.

Notons qu’un décalage vers les plus hautes valeurs de q (petites distances) au cours de la fonte s’opère. Le phénomène inverse observé au cours du refroidissement est donc réversible. La solution solide adapte sa composition à la température. Cette observation rejoint celle faite par Chong et al. (2007) (5). Les pics situés à 0,099 Å-1 [63 Å], 0,196 Å-1 [32 Å] et 0,295 Å-1 [21 Å] disparaissent à partir de 15°C. À 30°C, seul le pic relatif à la structure 2Lβ’ (001) (0,148 Å-1 [43 Å]) subsiste. Il s’agit donc de la structure la plus stable en température.

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Les résultats obtenus en SAXS et WAXS pour un refroidissement « intermédiaire » sont présentés en figures IV-8 et IV-9.

Figure IV-8. Résultat de l’analyse SAXS d’un échantillon d’huile de palme refroidi selon un profil de refroidissement

« intermédiaire » de 80°C à -15°C. L’insert correspond à un zoom du pic situé à q=0,147Å-1. La flèche montre la tendance du maximum du pic à se décaler vers de plus basses valeurs de q pendant le refroidissement. Les annotations sur la figure donnent les distances d calculées à partir de la position q des pics à -15°C et les types d’empilements lamellaires associés.

Figure IV-9. Analyse WAXS d’un échantillon d’huile de palme refroidi selon un profil de refroidissement « intermédiaire » de

80°C à -15°C : (A) Les courbes ont été manuellement décalées les unes par rapport aux autres pour plus de clarté. Les lignes pointillées ont été ajoutées pour souligner le décalage des pics relatifs à la forme β’ vers les plus haut q. Les annotations sur la figure donnent les distances d calculées à partir de la position q des pics à -15°C et les formes polymorphiques associées ;

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Lors d’un refroidissement « intermédiaire », un premier pic (q=0,146Å-1) avec un épaulement (q=0,137Å-1) apparaît (Fig. IV-8) en SAXS. Ce dernier évolue vers un seul pic centré vers q=0,148Å-1

[d=42,6Å], caractéristique d’une structure en 2L. Les résultats obtenus en WAXS (Fig. IV-9) montrent un premier pic apparaissant à 25°C à q=1,50 Å-1 [4,2 Å] relatif à la forme polymorphique α. Les données SAXS et WAXS couplées à la bibliographie (8) permettent d’attribuer cette évolution à une transition polymorphique d’une forme α vers une forme β’, soit d’une structure 2Lα vers une structure 2Lβ’. En effet, les résultats WAXS présentés sur la figure IV-9-A montrent qu’à partir de 20°C, deux pics relatifs à des formes β’ (5,9) sont visibles à q=1,43 Å-1 [4,37 Å] (évolue légèrement vers q=1,45 Å-1 [4,34Å]) et q=1,60 Å-1 [3,93 Å] (évolue légèrement vers q=1,62 Å-1 [3,88Å]). A cette même température de 20°C, un pic à q=1,38Å-1 [4,57 Å] apparait et correspond à une forme β (10,11). À refroidissement lent (i.e. 0,1°C/min), Chong et al. (2007) (5) avaient observé la formation d’une petite proportion de cristaux β en plus des cristaux de type β’. Ils avaient alors conclu que le décalage observé au cours du refroidissement sur les pics correspondant à la forme β’ était lié à la formation progressive d’une phase β. Les TAGs déjà cristallisés selon une structure β’ voyaient leur arrangement modifié vers une structure β.

À partir de 0°C, deux autres pics apparaissent en SAXS aux positions q=0,117Å-1 [53,7Å] (évolue progressivement vers q=0,113 Å-1 [55,4Å]) et q=0,234Å-1 [26,8Å] (évolue progressivement vers q=0,224 Å-1 [28Å]). Ceux-ci semblent appartenir à la même phase avec les réflexions des plans 001 et 002. En effet, ils apparaissent tous deux en même temps, évoluent de la même manière vers les basses valeurs de q au cours du refroidissement et l’un est le multiple de l’autre. Cette observation est contre intuitive. Cela signifie que l’épaisseur des lamelles de TAGs augmente avec une diminution de la température, comme une dilatation du réseau cristallin. Il y a ainsi une surcompensation de la contraction due au refroidissement. Cette phase originale apparait uniquement pour le profil de refroidissement « intermédiaire ». Aucune référence dans la littérature n’a été trouvée mentionnant ces distances inter-planaires. Nous pouvons remarquer les points suivants :

- La température à laquelle cette phase apparait (i.e. autour de 0°C) correspond à la cristallisation de la fraction de TAGs insaturés (i.e. fraction oléine) (cf. Fig. IV-4).

- La valeur de d001 est comprise entre 55 et 70 Å (6). Nous pouvons donc supposer que la structure formée adopte une configuration de type 3L.

- L’évolution forte des valeurs de distance « long-spacing » n’est pas corrélée avec une modification des distances « short-spacing » durant le refroidissement. Notons cependant qu’à partir de 0°C, un pic de faible intensité apparait en WAXS à q=1,18 Å-1 [5,3 Å]. Rousseau et al. (12) et Lutton et al. (13) associent cette distance à la forme polymorphique la plus stable β. Ce pic est également visible (mais non commenté) sur les résultats WAXS obtenus par Chong et al. (5) lors d’un refroidissement à 0,1°C/min (i.e. refroidissement lent, où le système est très proche de l’équilibre). Nous avons donc déduit que malgré la concordance des températures