Équation 6
où SFC(t) est le taux de solide au temps t, SFC(∞) est la limite du taux de solide à l’infini, k
est la constante d’Avrami représentant le taux de cristallisation et n est l’exposant d’Avrami
dépendant du mécanisme de croissance des cristaux
Ce modèle peut être modifié pour améliorer la description des données
expérimentales et prendre en compte la dérive par rapport aux hypothèses du modèle de
départ, notamment due à la complexité des matières grasses étudiées (Narine et al., 2006).
Une comparaison de différents modèles basés sur le modèle d’Avrami pour modéliser la
cinétique de cristallisation des matières grasses est présentée par Foubert et al. (2003).
Un certain nombre de facteurs internes et externes influencent la nature, la taille, la
morphologie et la vitesse de cristallisation des cristaux de matière grasse. Les facteurs
internes sont liés à l’organisation moléculaire et aux forces intermoléculaires (Janssen-van
Rosmalen et al., 1975). Les facteurs externes sont liés à la température (Breitschuh et
Windhab, 1998 ; Campbell et al., 2002), à la présence d’impuretés (Boistelle et Astier, 1988 ;
Wright et al., 2000 ; Vanhoutte et al., 2002), au cisaillement (Mazzanti, 2004) ou encore la
vitesse de refroidissement (Lopez et al., 2002a).
F. Cristallisation en émulsion
La cinétique de cristallisation en émulsion est différente de celle rencontrée en milieu
anhydre (Walstra et Van Beresteyn, 1975 ; Ozilgen et al., 1993).
1. Effets de la dispersion
Un degré de surfusion plus important est nécessaire pour cristalliser une matière
grasse dispersée sous forme de gouttelettes d’émulsion (Coupland, 2002 ; Lopez et Ollivon,
2009a). En effet, lorsque la matière grasse est dispersée sous forme de gouttelettes fines, le
nombre de gouttelettes peut surpasser le nombre d’impuretés contenues dans la matière grasse
anhydre. Cela conduit à des gouttelettes « libres d’impuretés », ayant une propension à
cristalliser préférentiellement suivant un mécanisme apparent de nucléation homogène (Skoda
et Van Ten Tempel, 1963 ; Walstra et Van Beresteyn, 1975). Kaneko et al. (1999) ont
notamment mis en évidence une vitesse de nucléation accrue lors de l’ajout d’un polyester de
sucrose dans des gouttelettes d’émulsion de n-hexadécane qu’ils ont attribué à un processus
de nucléation hétérogène.
La vitesse de cristallisation est plus rapide dans les gouttelettes d’émulsion que dans
la matière grasse anhydre du fait que le transfert de chaleur est plus rapide dans l’eau que dans
l’huile (Dickinson et McClements, 1996). En effet, la croissance des cristaux dépend de
l’évacuation de la chaleur de la surface du cristal croissant, la transition liquide solide étant
exothermique. Plus la chaleur est évacuée rapidement, plus la vitesse de cristallisation peut
être rapide. Cependant, la cristallisation intervient à plus basse température en émulsion
(Campbell et al., 2002 ; Lopez et Ollivon, 2009a).
Le taux de matière grasse solide est également diminué en émulsion, probablement à
cause d’un mécanisme de cristallisation homogène résultant de la ségrégation des impuretés
dans les gouttelettes (Campbell et al., 2002).
La dispersion d’alkanes et de triglycérides sous forme d’émulsion aurait enfin un
effet sur les types de cristaux formés (Montenegro et al., 2003 ; Bunjes et al., 2000) comparé
à ces matières grasses cristallisées en système anhydre pur. Lopez et Ollivon (2009a) ont
montré la cocristallisation d’un mélange miglyol - beurre de cacao en anhydre, alors qu’il y
avait ségrégation des triacylglycérols issus de ces deux matières grasses en émulsion. De plus,
les critaux formés en émulsion seraient moins bien organisées qu’en système anhydre ou de
plus petite taille (Lopez et Ollivon, 2009a), probablement en relation avec les contraintes
résultantes de la courbure de l’interface des gouttelettes.
2. Effets de la taille des gouttelettes
La taille des gouttelettes d’émulsion a un effet notable sur la cristallisation des
matières grasses, mais moindre sur le comportement de fusion de celles-ci (McClements et
al., 1993a). Il semble exister une taille seuil aux alentours de 1 µm en dessous de laquelle les
gouttelettes d’émulsion cristalliseraient à partir d’un processus de nucléation homogène
uniquement (Figure B-14, McClements et al., 1993a ; Walstra et van Beresteyn, 1975 ;
Palanuwech et Coupland, 2003). En effet, des émulsions de n-hexadecane avec un diamètre
de 3 µm environ cristalliseraient ~5°C au dessus des mêmes émulsions de n-hexadecane avec
taille des gouttelettes a encore été reporté, bien que moins marqué, il diminuerait encore la
température de début de cristallisation (McClements et al., 1993a).
Figure B-14 : proportion de gouttelettes d’émulsion qui cristallisent par nucléation
hétérogène en fonction du diamètre des gouttelettes (d’après Palanuwech et Coupland, 2003).
L’effet de la taille sur la température de fusion est controversé mais serait très faible
comparé à l’effet sur la température de cristallisation (McClements et al., 1993a ; Dickinson
et al., 1991 ; Palanuwech et Coupland, 2003 ; Bunjes et al., 2000). La surfusion nécessaire
pour cristalliser des gouttelettes d’émulsion serait donc augmentée lorsque la taille diminue
(Montenegro et al., 2003). De plus, l’enthalpie de fusion diminue avec la taille des
gouttelettes (Bunjes et al., 2000).
En ce qui concerne la vitesse de nucléation, elle diminue avec la taille des
gouttelettes. Cela serait encore dû à la théorie de la nucléation selon laquelle les gouttelettes
de plus petite taille prendraient plus de temps à cristalliser à cause de la probabilité plus faible
de former un nucleus. Cette probabilité plus faible vient notamment de la moindre occurrence
d’impuretés catalysant la nucléation dans les gouttelettes (Dickinson et al., 1991).
3. Effets de la composition de l’interface
Comme pour l’effet de la taille des gouttelettes, la nature des molécules de l’interface
stabilisant les gouttelettes d’émulsion a une forte influence sur la cristallisation des matières
grasses, mais bien plus faible sur la fusion. La diminution de la tension interfaciale dépend du
type d’émulsifiants. Cette diminution a pour conséquence de jouer sur la distance où les
F racti o n d e g o u ttel ettes cr istal li sa n t p ar n u cléation h été ro g èn e