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Craintes et limites de l’utilisation des médias sociaux par les professionnels de la santé

4. Revue de littérature sur les médias sociaux en santé

4.3 Craintes et limites de l’utilisation des médias sociaux par les professionnels de la santé

Malgré leur popularité grandissante dans le domaine de la santé, les médias sociaux ne sont pas utilisés par tous les professionnels. Selon un sondage effectué en 2010 auprès de 455 étudiants en médecine et médecins américains, la majorité d’entre eux considéraient qu’il est éthiquement inacceptable d’interagir avec des patients via les médias sociaux. En effet, la moitié des répondants étaient pessimistes quant au potentiel des médias sociaux d’améliorer la communication entre le médecin et son patient (86). Certains auteurs considèrent que les médias sociaux peuvent être néfastes pour la communauté médicale car ils amènent de nouveaux défis au niveau éthique, comme au niveau de la confidentialité, du consentement et du professionnalisme (68, 87, 88). Tel qu’apporté dans l’article de George et al., les caractéristiques des médias sociaux, soit leur ouverture sur le monde, leur transparence et leur informalité vont à l’encontre des valeurs que promeuve la médecine. En effet, cette science prime plutôt la confidentialité ainsi que les interactions individualisées et formelles (68). De même, certains individus ne voient pas les sites de réseautage social comme une source fiable de communication. Ils croient que le réseau de la santé ne peut pas être considéré comme crédible lorsqu'il est présenté par le biais des sites de réseautage social (89). Ce moyen de communication peut également être problématique lors des échanges entre patients. En effet, actuellement, la majorité des groupes de discussion en ligne sur la commotion cérébrale ne sont pas menés par des professionnels de la santé. Aucune règlementation n’existe au sujet de la gestion de tels groupes. Certains sont menés par des patients, d’autres par des familles ou des

entreprises. Ceci risque d’entraîner la propagation d’information et de conseils erronés sur le sujet. Il faudrait donc que tous les groupes de discussion, que ce soit sur Facebook ou sur des blogs, soient gérés par des professionnels de la santé qualifiés. Aussi, l’information qui se retrouve sur ces médias sociaux doit être basée sur des données probantes et récentes afin d’éduquer la population sur le thème de la santé. Les professionnels de la santé qui gèrent les pages doivent trier le contenu apporté par les patients et éliminer ce qui est inexact ou inadéquat. De plus, si un professionnel juge qu’un participant bénéficierait d’une évaluation ou d’un traitement particulier, il devrait recommander au participant d’aller consulter le professionnel approprié. Ainsi, il est du devoir des intervenants de rappeler aux utilisateurs que la participation à un groupe sur Facebook ne remplace pas une consultation médicale réelle, qui est essentielle.

La confiance est une composante importante dans la relation patient-professionnel de la santé, autant dans des conditions réelles que virtuelles. Sur Facebook, la confiance occupe plusieurs sphères, soit la confiance entre les patients utilisant le groupe Facebook, la confiance entre les patients utilisant le groupe Facebook et les cliniciens qui gèrent le groupe, et la confiance entre les différents cliniciens qui gèrent le groupe Facebook. Les paramètres de confidentialité du groupe doivent être ajustés par l’intervenant. Par contre, rien ne peut empêcher les participants de copier les informations qui y sont présentées et de les publier ailleurs sur le web. La confidentialité doit être préservée en tout temps par les cliniciens qui gèrent le groupe. Les cliniciens doivent également se respecter mutuellement, comme dans une équipe multidisciplinaire (90).

De plus, en communiquant avec leurs patients via les médias sociaux, les professionnels de la santé pourraient obtenir de l’information sur leur patient qui ne leur serait pas adressée (87). Plusieurs auteurs se demandent s’il est éthique de la part de certains médecins d’utiliser les médias sociaux ou des moteurs de recherche comme Google dans le but précis d’obtenir de l’information sur leurs patients. Volpe et al. expliquent que ce genre d’action constitue un non- respect de la vie privée de la part du médecin (91). Bien que plusieurs professionnels croient qu’ils ne font pas atteinte à la vie privée de leurs patients s’ils accèdent à du contenu qui est public donc visible de tous, on met en garde sur le fait que certains patients ne voient pas cette notion de vie privée du même œil. Certains considèrent qu’il s’agit d’une atteinte à la vie privée lorsque le médecin accède à ses informations personnelles sans leur consentement (85). Cette action nuit à la confiance entre le professionnel et le patient, puisque ce dernier n’a plus la liberté

l’implantation d’une relation thérapeutique avec le patient si le professionnel évite de parler de certains sujets avec son patient en allant chercher des informations directement sur internet (91). Cette pratique est risquée, puisque certains patients écrivent de faux renseignements sur leur profil. Considérant qu’un médecin est dans l’obligation de rapporter des informations compromettant la sécurité de son patient (agression, suicide, dépression, etc.) aux autorités concernées, il pourrait se retrouver dans l’embarras si ces renseignements ne sont pas véridiques (85). D’un autre côté, certains auteurs mentionnent que le médecin agit de manière responsable si, légalement, il obtient de l’information sur un patient via internet afin de s’assurer que les informations fournies par le patient lors de l’entretien verbal sont vraies (68). Ainsi, un membre d’une équipe de transplantation a regardé la page Twitter publique d’un patient qui devait recevoir une chirurgie de transplantation du foie, et a trouvé une photo que ce patient a publié de lui-même dans un bar avec de l’alcool à la main, bien que ce dernier et sa mère aient affirmé qu’il était sobre (92). Des urgentologues croient que l’utilisation du moteur de recherche Google pourrait améliorer leur pratique face à un patient inconscient ou qui n’est pas en état de fournir les renseignements nécessaires à son traitement. En effet, ils ont réussi à contacter un membre de la famille d’une patiente de l’urgence, qui avait de la difficulté à communiquer, en utilisant les réseaux sociaux. Ils mentionnent toutefois que cette action doit se faire professionnellement et légalement (93). Actuellement, plusieurs auteurs mentionnent qu’il manque de lignes directrices pour ce genre de situations (68, 85, 91, 92).

Dans le même ordre d’idées, les patients pourraient avoir accès à des informations personnelles à propos de leur professionnel de la santé si ce dernier utilise les sites de réseautage. En effet, dans une étude sur le contenu des profils Facebook des étudiants en médecine d’une université de Floride, les auteurs rapportent qu’une proportion significative des profils publics, donc accessibles à tous, comportait un contenu subjectivement inapproprié. On y retrouve, entre autre, un langage inadéquat et des photos démontrant des abus d’alcool. Cela pourrait compromettre la réputation des futurs médecins mais aussi celle de leur profession et de leur institution (94). Williams et al. ont démontré qu’il est possible de modifier ce genre de comportements en ligne. En effet, des étudiants en pharmacie ont modifié les paramètres de confidentialité et de vie privée de leur profile après avoir été sensibilisés à la politique de médias sociaux de leur université (95).

En résumé, les médias sociaux sont de plus en plus utilisés dans le domaine de la santé, que ce soit pour faciliter la communication et le transfert de connaissances entre les professionnels et leurs patients ou entre collègues. Par contre, certains professionnels semble réticents à utiliser cette nouvelle technologie qui s’avère poser problème au niveau de la confidentialité, de la vie privée et de la relation avec le patient sur le web. De plus en plus d’organismes proposent des lignes directrices pour encadrer les professionnels de la santé lors de leurs activités en ligne et pour les aider à utiliser cet outil de manière professionnelle.

Le chapitre quatre a présenté une revue non systématique de la littérature permettant de mettre en lumière l’utilisation des médias sociaux par les professionnels de la santé. Ces outils sont de plus en plus populaires pour communiquer avec les patients bien que la navigation sur le web puisse être risquée, notamment au niveau de la confidentialité et de la vie privée. À cet effet, les associations et organismes réglementaires émettent des lignes directrices à l’intention de leurs membres pour les guider vers une utilisation professionnelle des médias sociaux. Le chapitre cinq portera sur l’analyse des politiques d’utilisation des médias sociaux en physiothérapie.

Les professionnels de la physiothérapie sur Facebook, j’aime?

Chapitre 5

Ce que tout professionnel de la physiothérapie devrait savoir sur les médias sociaux: une

revue des normes et des politiques

Le cinquième chapitre a été rédigé par Alexandre Campeau-Larrivée, en collaboration avec Maude Laliberté et Debbie Ehrmann Feldman. Il présente une revue des politiques concernant les médias sociaux émises par des associations et des organismes réglementaires en physiothérapie au Canada et à l’international. Ces politiques sont analysées en s’appuyant sur la littérature actuelle à propos des médias sociaux dans le domaine de la santé.

5. Ce que tout professionnel de la physiothérapie devrait savoir sur les médias sociaux:

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