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Créer un lieu de référence, de démonstration, de formation et de recherche

5 RECOMMANDATIONS

5.3 Créer un lieu de référence, de démonstration, de formation et de recherche

La troisième recommandation est de créer rapidement au moins un lieu qui serve de démonstration de ce qu’on peut faire dans le domaine de la reforestation. À terme, il devrait y avoir ce type de lieu dans

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chaque département, mais il faudrait commencer par un centre modèle qui pourra être imité par la suite.

Inspiré en partie de ce qui s’est fait à Hong Kong avec la Kadoorie Farm & Botanic Garden (KFBG), ce centre pourrait être financé par des bienfaiteurs fortunés (à l’image des frères Kadoorie) qui pourront ainsi donner leur nom à une belle œuvre durable et très bénéfique. Le financement pourrait également venir de grandes entreprises ou de gouvernements étrangers. On choisira un lieu désertifié, par exemple un des nombreux « mornes » pelés qu’on peut apercevoir le long des routes dans différentes régions haïtiennes. Comme dans le cas de Fazenda Bulcão au Brésil, les différents stades de la reforestation de la zone devront être documentés par des notes, mais également des photographies. C’est d’ailleurs une recommandation importante pour l’ensemble des actions de restaurations écosystémiques, car les preuves visuelles sont aussi marquantes que les preuves chiffrées et elles ne nécessitent pas la présence d’agronomes ni de botanistes au moment de la prise de photos. On devra apporter beaucoup de soin à la reforestation de la zone choisie et travailler de manière intensive dès le début pour obtenir des résultats visibles dans des délais assez courts. Après quelques années, le centre tiendra lieu de jardin botanique et de forêt modèle en construction. Il pourra être visité par des étudiants, des écoliers, des bénévoles d’associations ou des techniciens agricoles. Les paysans pourront y obtenir des informations utiles pour améliorer leurs pratiques et participer, à leur tour, à la reforestation de leur coin de pays. Un centre de recherche devrait y être mis en place afin de développer les espèces locales, d’en produire des semences ou des plantules dans une pépinière bien équipée. À l’instar de la KFBG, ce lieu devrait attirer de nombreux visiteurs, y compris des touristes étrangers et participer à la vie économique de la région tout en facilitant son autosuffisance.

Pour arriver à reverdir assez rapidement les lieux désertifiés choisis, il sera primordial de trouver des sources de matières organiques qui vont permettre à la végétation de prospérer jusqu’à créer des espaces luxuriants. La production locale de compost et éventuellement des apports de l’extérieur seront donc à prévoir. Pour la production locale, on pourra s’inspirer des réalisations de l’ONG SOIL dont il a déjà été question. Ses méthodes pourraient d’ailleurs être généralisées en Haïti, car les apports en compost seraient très utiles également pour le chantier national de reforestation. Cela aurait pour avantage de régler, dans plusieurs endroits, les problèmes d’insalubrité et les risques pour la santé publique causés par l’absence de toilettes ou de systèmes d’égouts fonctionnels. On pourra s’inspirer du modèle développé par SOIL et créer de plus gros centres de récupération des matières qui seront équipés des outils mécaniques permettant de retourner le compost pour améliorer et accélérer sa

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transformation. La destruction complète des bactéries pathogènes est primordiale et ne peut se faire qu’avec des équipements appropriés. Une autre source possible de compost, qui pourrait devenir fort importante, résulterait de la mise en place d’un partenariat entre Haïti et des villes ou des régions du Canada ou des États-Unis. En effet, depuis quelques années, la récupération des matières organiques s’est généralisée dans plusieurs provinces canadiennes ou États américains. La plupart de ces matières servent à fabriquer du compost qui a souvent peu de valeur marchande, car l’offre a augmenté plus vite que la demande (Olivier, 2013). Certaines municipalités pourraient se regrouper pour offrir une partie de leur compost à des partenaires en Haïti dans le cadre de programmes structurés de reforestation. Il y aurait, certes, des couts à défrayer pour le transport, mais ce pourrait être une utilisation tout à fait raisonnable des fonds consacrés à l’aide au développement. C’est, en tous cas, une avenue qui devrait être explorée.

Pour revenir au lieu de démonstration qui fait l’objet de la présente recommandation, la question de sa gouvernance sera capitale. Il devrait être géré par un organisme sans but lucratif qui deviendrait, lui aussi, un modèle, cette fois sur le plan de la bonne gouvernance. On pourra s’inspirer de l’Instituto Terra qui gère Fazenda Bulcão, et défendre les mêmes valeurs que celles mises en avant, année après année, par cet organisme brésilien :

 Contribuer à l’amélioration des conditions de vie des êtres vivants;

 Assurer le respect de principes éthiques et moraux qui priment sur les intérêts ou les avantages personnels;

 Maintenir la transparence comme clé de voute de toutes nos actions;

 Faire bénéficier nos partenaires de solutions basées sur les meilleures et les plus récentes connaissances techniques et managériales et sur les prix les plus bas possibles, dans le respect d’une bonne exécution des activités et de la survie de notre institution;

 Chercher l’amélioration continue dans les connaissances techniques et managériales, afin d’améliorer nos processus et de le transmettre à d’autres organisations;

 Cultiver un environnement où prévalent le travail collaboratif et la confrontation d’idées dans le respect des opinions, encourager la créativité et l’initiative. (inspiré d’Instituto Terra, 2013)