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6. Perspectives scientifiques

6.1 Couplage électrodynamique magnétosphère-ionosphère

 

Projet

de travail

6. Perspectives scientifiques

Les différents résultats présentés ci-dessus peuvent tous conduire à des perspectives intéressantes visant à mieux comprendre et à mieux décrire le système magnétosphère-ionosphère-thermosphère. Je suis plus particulièrement intéressée par comprendre les diverses sources d’asymétrie qui peuvent affecter l’environnement terrestre qu’elles soient liées à l’hémisphère, à la saison ou à des effets externes (voir section 6.1). J’ai également à cœur de poursuivre les développements numériques entrepris avec IPIM afin d’obtenir une description la plus complète de l’environnement spatial terrestre (section 6.2) et les développements de nouveaux indices magnétiques plus pertinents également pour décrire cet environnement (section 6.3). Tous ces aspects permettront également de mieux caractériser l’environnement terrestre de manière synthétique dans un but applicatif dans le cadre de la Météorologie de l’Espace.

6.1 Couplage électrodynamique magnétosphère-ionosphère

6.1.1 Etude des asymétries interhémisphériques à l’aide de conjonctions instrumentales

Pour mieux comprendre le couplage du système magnétosphère-ionosphère et ses variations liées à la reconnexion à la magnétopause ou aux événements de sous-orages dans la queue magnétosphérique, il est utile de pouvoir étudier simultanément les réponses des deux hémisphères. Pour cela, il est possible d’utiliser des instruments conjugués magnétiquement, c’est-à-dire passant par la même ligne de champ magnétique. Les radars SuperDARN sont par exemple un très bon outil pour ce type d’études, puisqu’ils ont l’avantage de présenter une très bonne couverture spatiale permettant d’avoir des radars conjugués dans une même région (cornet polaire, queue magnétosphérique). Des couples de satellites ou missions peuvent également être utilisés, par exemple, Cluster et Polar situés dans chaque cornet polaire simultanément. La recherche de ce type de conjonction peut s’avérer laborieux, c’est pourquoi les spécifications de l’outil « Conjunction Search Tool » (CST) du 3DView décrit en page 7 ont été

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proposées à l’équipe du CDPP et une première version de l’outil a été développé dans le courant de l’année 2017.

Quelques conjonctions très favorables ont ainsi déjà été identifiées et seront étudiées dans les mois qui viennent. Ainsi, une conjonction entre les radars SuperDARN d’Hankasalmi dans le cornet polaire nord et de Kerguelen dans le cornet polaire sud a permis d’étudier des signatures typiques de la reconnexion sporadique (voir Figure 6.1). Cependant, ces signatures sont observées alternativement dans les deux hémisphères et s’expliquent par des oscillations relativement régulières de la composante By de l’IMF, permettant à des sites de reconnexion différents de « s’allumer » en alternance. Cette étude permettra en premier lieu de mieux comprendre comment la composante By de l’IMF contrôle la géométrie de la reconnexion à la magnétopause en poursuite des travaux présentés en section 3.1.1 et ensuite d’étudier si l’inclinaison du dipôle magnétique (période de solstice) et la composante Bx (fortement positive) peuvent également jouer un rôle dans ce contrôle.

Figure 6.1 : Vitesses mesurées le long de la ligne de visée du faisceau 7 en fonction du temps UT et de la latitude magnétique, pour le radar de Kerguelen (à gauche) et pour le radar d’Hankasalmi (à droite). Ces faisceaux sont quasiment conjugués magnétiquement. Les échos de vitesse observés présentent des impulsions de vitesses (PIFs) s’éloignant du radar vers les plus hautes latitudes (patchs

rouges-orange) et sont matérialisés par les flèches noires. L’entrée dans la région du cornet polaire est matérialisée par les lignes verticales noires.

Une autre conjonction entre satellites avec Cluster situé dans le cornet polaire nord et Polar situé simultanément dans le cornet polaire sud, lors d’une période de Bz négatif, de Bx positif et de By proche de 0, a également été sélectionnée. Les observations semblent très similaires en première approche, comme le montre les injections d’ions observées par les deux satellites sur la Figure 6.2. Cependant, en approfondissant ces observations, nous allons étudier les propriétés du plasma observées dans les deux cornets polaires afin de déterminer les sources de symétrie et d’asymétrie et tenter de les relier aux conditions de reconnexion à la magnétopause, en particulier à la localisation de la reconnexion qu’il est possible de déduire à partir des populations d’ions descendant/remontant observés dans le cornet polaire.   Ces études mériteront d’être systématisées même s’il n’est pas aisé de trouver beaucoup de cas aussi joliment documentés en observations. Nous comptons cependant sur le module du CST de 3DView pour

Hankasalmi

Kerguelen

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nous permettre de trouver des conjonctions favorables supplémentaires à étudier et sur les missions spatiales plus récentes lancées ces dernières années, telles que Swarm ou MMS.

Figure 6.2 - Panneau du haut : composantes Bx, By, Bz de l’IMF en coordonnées GSM - Panneau central : flux omnidirectionnel des ions observés par Polar dans l’hémisphère sud - Panneaux du bas :

flux omnidirectionnel des ions observés par Cluster 4 et Cluster-1 dans l’hémisphère nord.

6.1.2 Etudes statistiques des structures de moyenne échelle de convection et de courants

parallèles

Des études statistiques ont déjà été largement menées par le passé sur la convection ionosphérique et sur les courants parallèles. Cependant, ces études étaient réalisées en général sur des distributions globales observées sur la calotte polaire entière et essentiellement pour l’hémisphère nord.

Grâce aux plus de vingt d’observation SuperDARN, nous envisageons maintenant de discriminer statistiquement la convection dans certaines régions spécifiques précises : comme le cornet polaire côté jour et la discontinuité de Harang côté nuit et d’effectuer des statistiques dans les deux hémisphères simultanément. Du fait de la large couverture spatio-temporelle de SuperDARN, nous chercherons à caractériser la direction et l’intensité de la convection dans le cornet polaire, qui reflète l’efficacité du couplage vent solaire-magnétopause, en fonction de paramètres internes et externes moins étudiés jusqu’à aujourd’hui. Parmi ces paramètres, il est possible de citer l’inclinaison du dipôle magnétique terrestre et la composante Bx de l’IMF dont les effets combinés ou non sur le couplage vent solaire-magnétopause n’ont pas encore été totalement élucidés (Suvorova et al., 2010 ; Fear et al., 2012) et pourraient avoir un effet important en terme de source d’asymétrie interhémisphérique de la convection. Ce genre d’étude n’existe pas encore du fait de la difficulté à déconvoluer ces sources de variabilité (internes et/ou externes). D’autres paramètres plus inhabituels, tel que le  du plasma ou le nombre de

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Mach d’Alfvén dans le vent solaire, seront également étudiés. Ce dernier est en effet connu pour avoir un effet important sur le couplage vent solaire-magnétopause (Lavraud et al., 2013), en particulier lorsqu’il prend des valeurs faibles, ce qui par contre ne se produit que dans des conditions extrêmement spécifiques, tels que le passage d’une ICME dans l’environnement terrestre et réduit par conséquent les périodes utilisables pour réaliser les statistiques. Si ces études s’avèrent intéressantes, nous les étendrons à la discontinuité de Harang côté nuit afin d’étudier là encore les effets possibles de l’inclinaison du dipôle magnétique terrestre et de la composante Bx de l’IMF, puisqu’on sait que l’IMF peut également influencer la queue magnétosphérique. Il a été montré récemment que la composante By de l’IMF pouvait pénétrer sur les lignes de champ de la queue magnétique et modifier sa configuration ainsi que la convection et l’électrodynamique associée (e. g. Grocott et al., 2008 ; Reistad et al., 2013).

Nous utiliserons également la mission multi-satellites Swarm pour étudier la distribution des courants parallèles dans les mêmes régions que pour les études SuperDARN (cornet polaire, discontinuité de Harang). Cette mission apporte en effet une nouvelle perspective à la compréhension des courants parallèles (Pitout et al., 2015), en permettant en particulier de calculer sans ambiguïté l’intensité et la direction des courants avec la paire de satellites en orbites basses parallèles par la méthode du curlomètre. Ainsi, en supposant que le courant est perpendiculaire à ces deux satellites, ce qui est globalement le cas à haute latitude où les lignes de champ magnétique sont quasiment verticales, que la structure de courant reste statique sur quelques secondes et que la structure de courant a une taille supérieure à l’écart entre les deux satellites, soit environ 100 km aux latitudes aurorales, il est possible de calculer la loi d’Ampère autour de la surface délimitée par l’orbite des deux satellites sur deux points espacés raisonnablement le long des orbites de chaque satellite (voir Figure 6.3).

Figure 6.3 – Gauche : orbite des 3 satellites Swarm en début de mission. Droite : schéma représentant la méthode de calcul du curlomètre des courants alignés au champ magnétique avec les deux satellites

en orbite parallèle.

100‐150 km

70 km ~ 10 s

100 km ~ 15 s

B, t

2

+dt

swarm C

A, t

1

+dt

D, t

2

C, t

1

dB

2

swarm A

dB

1

dr

2

dr

1

B, J

//

C

B

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Ainsi, il reste de nombreuses questions en suspens sur la distribution des courants de moyenne échelle dans le cornet polaire, en terme d’intensité, de polarité, de forme des structures et de polarisation (ou direction) en cas de structure de type nappes.

En particulier, de la même manière que pour la convection, nous étudierons la distribution et l’intensité des courants issus du curlomètre Swarm en fonction de la composante Bx de l’IMF, de l’inclinaison du dipôle magnétique (lié aux variations saisonnières) ou de la pression du vent solaire. En particulier, il est relativement bien connu que les courants alignés de grande échelle de Région 1 et Région 2 montrent des différences d’intensité importantes en fonction de la saison, avec des courants plus intenses en été (e.g. Green et al., 2009), nous nous attacherons à vérifier si cette assertion est toujours vraie pour les courants de moyenne échelle du cornet polaire directement liés à la reconnexion magnétique à la magnétopause. Par ailleurs, comme montré par Marchaudon et al. (2006), la polarisation des structures de type nappes dans le cornet polaire prend a priori des orientations très variables. A l’aide de chaque satellite Swarm individuellement, nous vérifierons statistiquement si la distribution de la polarisation évolue en fonction de l’IMF, afin de vérifier si la composante By en particulier influe sur cette polarisation, de la même manière qu’elle influe sur la vitesse des structures qui est contrôlée par la tension magnétique au point de reconnexion. Enfin, en utilisant les 2 satellites Swarm sur des orbites parallèles ou même les 3 satellites dans les périodes où ils sont colocalisés dans le cornet polaire, nous regarderons les différences de polarisation observées afin de voir s’il est possible de retrouver la forme concave du bord amont d’une injection comme obtenue dans l’étude à haute altitude de Marchaudon et al. (2009) ou si cette forme particulière n’est plus observable à si basse altitude, là où le champ magnétique est très intense (voir section 3.2).

Cette étude sera menée simultanément dans les deux hémisphères, afin de pouvoir effectuer une comparaison interhémisphérique de la distribution des courants parallèles et vérifier si les variations du champ interne, de l’inclinaison du dipôle magnétique peuvent influencer cette distribution de courants de moyenne échelle (Laundal et Richmond., 2017). Si cette étude se révèle intéressante, elle pourra être étendue à la discontinuité de Harang côté nuit et comparer aux distributions statistiques de convection de SuperDARN.