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Chapitre I. Mécanismes de défaillance, Caractérisations et Modélisations des IGBT

IV. Modélisation électrothermique de composants de puissance

2. Stratégie de modélisation

2.3. Couplage électro-thermique

Afin de pouvoir coupler l’aspect électrique avec l’aspect thermique des composants de puissance, en particulier l’IGBT, les modèles électrothermiques sont formulés en modifiant les modèles standards des composants de puissance par ajout des nœuds thermiques externes aux modèles électriques. Les paramètres dépendants de la température concernant les semi-conducteurs sont assez nombreux, parmi eux on dénombre, la mobilité, la tension de seuil, la durée de vie des porteurs minoritaires et majoritaires. δa température générée à l’intérieur du semi-conducteur est due en partie à la dissipation de la chaleur par effet joule et calculée comme le produit de V×I. Cette dissipation de la chaleur est prise en compte et détermine ainsi la température du composant [Igi01a, Fat93]. Ce nœud thermique, nous renseigne sur la température du composant et représente une connexion entre les composants actifs et le réseau du circuit thermique, figure (I.41).

Fig I.41 εodèles compacts électrothermique de la diode Pin et de l’IGBT [Igi01a, Igi01b] Ainsi un diagramme a été élaboré représentant le modèle compact électrothermique de composants semi-conducteur en particulier l’IGBT [Maw01]. Ce diagramme montre l’interaction entre le réseau électrique et thermique à travers les nœuds thermiques et électriques, figure (I.42).

Comme on peut le voir, la valeur instantanée du composant en température est estimée par le réseau thermique à savoir le réseau RC ou méthode de Cauer. La méthode Cauer est utilisée afin de calculer la dépendance en température des paramètres électriques et physiques, ainsi que les propriétés du silicium. Ces différentes dépendances en température sont ensuite utilisées via le modèle électrothermique compact afin de déterminer aussi bien les caractéristiques électriques que la puissance instantanée. Finalement, la puissance dissipée est utilisée comme un paramètre d’entrée dans le réseau thermique RC, et les caractéristiques électriques du composant sont transférées au réseau électrique. Les résultats de simulation des dispositifs de puissance dépendent grandement des paramètres physiques des matériaux semi-conducteurs, qui eux-mêmes dépendent de la température (concentration intrinsèque, mobilité des porteurs, durée de vie des porteurs, …).

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Fig I. 42 Diagramme représentant le schéma du modèle électrothermique des semi-conducteurs de puissance [Maw01]

2.3.1. Modélisation électrothermique (uni et multicellulaire)

La finesse de la représentation et les outils mathématiques à prendre en compte dans la modélisation vont dépendre de la précision voulue ainsi que du temps de calcul souhaité. Ainsi, la modélisation d’un matériau, d’une zone de transistor, de l’intégralité d’un transistor, ou encore la modélisation d’un circuit ne requièrent pas les mêmes outils numériques et les mêmes connaissances physiques. En effet, les phénomènes physiques à prendre en compte ne sont pas les mêmes en fonction de l’échelle étudiée. δa stratégie de modélisation adoptée s’inscrit dans une approche multi-échelle/multi-physique, illustrée en figure (I.43). Dans le cas présent, nous décrivons uniquement l’approche unicellulaire et multicellulaire d’une puce IGBT, c’est-à-dire que, ce sont les phénomènes physiques intrinsèques aux régions semi-conductrices de la puce qui nous intéressent. Ainsi, ce qui importe ici, ce sont les équations de transport de charges et les équations qui régissent l’aspect électrothermique ainsi que les méthodes numériques associées que nous serons amenés à exploiter par l’intermédiaire du logiciel Simplorer.

Fig I.43 Approche multi-physique/ multi-échelle pour la modélisation 2.3.1.1. Approche unicellulaire

Nous avons vu que les modèles numériques peuvent prévoir le couplage électrothermique des dispositifs de puissance en fonctionnement, afin de comprendre et analyser les mécanismes de défaillance qui en résultent. Plusieurs variétés de modèles de composants IGBT ont été mis en œuvre dans le but soit d’expliquer les observations expérimentales, soit d’analyser et prédire des faits inaccessibles expérimentalement. Cependant, à ce jour, la majorité des modèles physiques de composant IGBT

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développés se concentre sur une cellule ou demi-cellule [Pen98, Ben07]. Cette approche élimine ainsi toute prospection latérale de l’évolution de courant et de la température, ce qui constitue une limite pour ce genre de simulation. Sachant que la puce IGBT est constituée de plusieurs dizaines de milliers de cellules en parallèle pour atteindre le calibre en courant du composant, la simulation multicellulaire serait incontournable pour explorer le comportement latéral du courant et de la température au sein d’une même puce. En effet, avec une cellule, il n’est pas possible de trouver une théorie cohérente susceptible de décrire tous les faits expérimentaux, étant donné que certains mécanismes de défaillance peuvent être issus des effets impliquant plusieurs cellules à la fois [Kop09]. Toutefois, il est convenable d’admettre que l’approche unicellulaire a permis des avancées considérables dans la compréhension de certains phénomènes à l’origine des mécanismes de défaillance de composants de puissance. Dans [Kop09, Ben08], la simulation d’une demi-cellule d’IGBT a permis de comprendre les effets fondamentaux qui se déroulent pendant le court-circuit. Par ailleurs, quelques auteurs ont pu mettre en œuvre d’autres modèles physiques dans des environnements de logiciels types circuits tels que Simplorer ou Pspice [Hef94, Mou13a, Mou13b] pouvant être utilisés pour simuler plusieurs cellules en parallèle afin de représenter l’interaction électrothermique à l’intérieur d’une même puce, entre un grand nombre de cellules élémentaires [Ira07, Cod03, Ric10b]. Néanmoins, la modélisation électrique utilisée pour ces modèles doit rester suffisamment simplifiée pour traduire le compromis entre temps de calcul et la complexité. En revanche, pour des structures moins intégrées et notamment les structures à grille planaire, la simulation multicellulaire est fortement envisageable.

Modèles distribué de composant unicellulaire (approche régionale)

La méthodologie de modélisation distribuée de composant unicellulaire est basée sur une approche régionale des composants semi-conducteurs. Elle consiste à identifier les régions physiquement et/ou électriquement différentiables du composant et à créer un sous-modèle pour chacune d’elles. δes premières d’entre elles sont délimitées par les jonctions métallurgiques. Ce sont les bases larges et faiblement dopées du composant, les grilles MOS, les émetteurs fortement dopés, les caissons, les couches tampons, ... . Ces régions possèdent par définition des frontières fixes. Les secondes sont les zones de charge d’espace, les couches accumulées, inversées ou encore dépeuplées. Leurs comportements sont régis par le niveau de polarisation du composant. Ces dernières possèdent des frontières mobiles. Les sous-modèles établis pour chacune de ces régions sont ensuite reliés entre eux grâce à la continuité des courants et des concentrations de porteurs aux frontières pour construire le modèle complet du composant. Pour plus de détails concernant cette approche, le lecteur est convié de consulter [Mag07].

2.3.1.2. Approche multicellulaire

Les modèles utilisés pour des puces à semi-conducteur ne prenant en compte qu’une seule cellule ou demi-cellule, seront les mêmes pour des structures multicellulaire. En effet, les équations qui régissent les phénomènes de transport de charges dans la structure des transistors bipolaires sont les mêmes quel que soit l’aspect unicellulaire ou multicellulaire de la modélisation. Comme il est souligné dans [Mou13, Kop10, Kop09, Bou13, Bou12], la modélisation des puces de puissance multicellulaire est très envisageable en associant plusieurs structures élémentaires en parallèle.

A la différence de l’approche unicellulaire, des phénomènes intrinsèques multicellulaires doivent être pris en compte dans les équations de transports, notamment des phénomènes physiques intracellulaires dus à l’espacement des cellules. D’autres paramètres seront également pris en compte tels que la répartition de la résistance de grille, la région périphérique, les éventuelles inhomogénéités entre les cellules, … [Mou13, Ros02, Yam03, Kop09, Bou13].

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Les principaux avantages de cette approche proviennent de l'interaction possible entre des cellules adjacentes d'IGBT. En effet, un défaut dans une cellule peut avoir une forte interaction avec les cellules adjacentes comme indiqué dans [Kop09]. Mais aussi, cette méthode nous rapproche un peu plus de la réalité en offrant un vaste champ d’action en termes de distribution aussi bien latéral que vertical de flux de courant et de température [Mou13, Kop09, Bou13].

Actuellement peu d’études de modélisation des composants multicellulaire ont été menées tant sur le comportement statique que dynamique.

Dans [Bou13, Bou12], une modélisation électrothermique sous TCAD-SENTAURUS des trois structures d’IGBT multicellulaire (NPT trench 8 cellules, NPT et SPT planar 6 cellules) a été élaborée, figure (I.44).

Fig I.44 Structure d’IGBT : (a) NPT trench; (b) SPT planar; (c) NPT planar [Bou13]

Des simulations par éléments finis d'IGBT multicellulaire de ces trois structures de technologies différentes en mode court-circuit ont été menées. Cette approche a permis aux auteurs d'analyser le décollement de fils de câblage par exemple ou encore d’observer différents phénomènes tels que le déséquilibre en courant entre cellules dégradées et non dégradées.

Dans [Kop09], en partant de l’hypothèse selon laquelle certains mécanismes de défaillance dans les puces en mode de court-circuit peuvent être causés par les effets impliquant plusieurs cellules élémentaires, un modèle de puce IGBT multicellulaire (structure ayant jusqu’à 5 cellules) a été développé et simulés afin d’aider à l’analyser leurs résultats expérimentaux. Les auteurs ont pu ainsi étudier deux cas de figure. Dans le premier cas, l’une des cellules parallèles présente un faible dopage de P-well et donc une plus forte injection d'électrons que dans le reste des cellules. Dans le second cas, les cellules étaient toutes identiques, mais une section de l'anode présente une faible injection. Ces deux structures présentent qualitativement le même comportement en termes de « courant de filamentation » et les inhomogénéités ajoutées correspondent aux situations qui se produisent dans des dispositifs de puissance réels et qui sont induites pendant les procédés de fabrication. Il faut reconnaitre que ces cas de figures ne peuvent pas être envisagés avec une approche unicellulaire. La figure (I.45) montre la simulation de la densité de courant d'électrons dans un IGBT de 3.3 kV comprenant trois cellules élémentaires. Pour plus de détails le lecteur est prié de consulter [Kop09].

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Fig I.45 Densité de courant d’électron d’une structure d’IGBT 3-cellules présentant des inhomogénéités de profil de dopage [Kop09]

Ici, nous présentons une étude menée par Toyota sur la modélisation d’une structure multicellulaire. Lors de la modélisation, il a été pris en compte la région active à savoir la disposition des cellules trench adjacentes entre elles, ainsi qu’une région inactive appelée région périphérique, figure (I.46).

Cette région inactive, ainsi que la non-uniformité de la structure contribue à l’apparition de phénomènes parasites lors de la commutation d’un IGBT, notamment lors de la phase d’ouverture (turn-off) sous charge inductive sans diode de roue libre (UIS). Pour leur simulation, la structure du composant ne présente pas d’inhomogénéité, tels que l’épaisseur de l’oxyde de grille, l’espacement des grilles trench dans la région active. C'est-à-dire que pour toute la structure, l’épaisseur d’oxyde de grille et l’espacement des grilles restent identiques pour toutes les cellules.

Fig I.46 Schéma de la structure IGBT trench simulée

Lors de la simulation en phase d’ouverture de la structure figure (I.47a), les résultats montrent que la densité des porteurs figure (I.47b) est très élevée au centre de la région active, alors qu’en périphérie celle-ci est moindre. Selon l’étude, cela s’explique par la présence des porteurs de charges stockées en majorité dans la région active. Ceci a pour conséquence l’apparition d’un « current filament », à savoir une distribution inhomogène de la densité de courant à travers la structure et la notion de mouvement

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du "current filament" est également mise en évidence. Ainsi il est montré une corrélation entre la chute soudaine de la tension Vce et le déplacement et la localisation du "current filament" à travers la structure.

Fig I. 47 Résultats de la simulation en phase d’ouverture, b) profil de la densité de courant d’électrons à un temps t