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Le cosmopolitisme des classes moyennes au XXI e siècle :

l’exemple de la thalassothérapie

en Tunisie

Fabienne Le Houérou (CNRS – IREMAM)

La thalassothérapie en Tunisie est classée au deuxième rang mondial après la France. Affirmation que l’on retrouve sur tous les sites internet tunisiens soulignant l’excellence tunisienne dans le secteur émergeant de

« migration de santé », notion contestée et contestable reprise par un auteur, dans un récent article de la revue de relations internationales publiée par l’IRIS (Nys, 2010). L’auteur caractérise les « migrations de santé » comme une des formes les plus actuelles des migrations internationales. Notant que les pays émergeants sont devenus des espaces privilégiés pour les patients aisés des pays développés. Le cas de la Tunisie est particulièrement intéressant car son succès en la matière dépasse largement les classes supérieures de la société, notamment dans les soins balnéaires, mettant en mouvement des classes moyennes et des catégories populaires dans ce nouveau marché mondial.

Le modèle tunisien de thalassothérapie s’est imposé en 20 ans et draine dans les stations balnéaires du littoral des Européens et parmi eux de nombreux Français. Ces mises en relation d’une clientèle aux horizons divers ont favorisé l’émergence d’un cosmopolitisme renouvelé. En effet, le frottement des cultures dans ces centres se fait par le médium des classes moyennes françaises, libyennes et algériennes. L’expérience thermale en Tunisie s’inscrit dans la longue durée et dans le droit fil des cures marines de l’époque coloniale.

Nous tenterons de saisir les continuités et les ruptures entre colonial et postcolonial en essayant de trouver du sens à cette césure chronologique

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et épistémique. Cet article entend, à travers l’expérience de la thalassothérapie, comprendre la continuité de l’après colonie dans les activités balnéaires et d’en saisir la réelle nouveauté. Notre hypothèse étant qu’à l’époque coloniale ces stations balnéaires étaient destinées à une « élite coloniale française » (essentiellement urbaine composée de hauts-fonctionnaires et de professions libérales) et n’étaient pratiquement pas fréquentées par une clientèle tunisienne, ni par les colons pauvres des classes sociales défavorisées. Ces stations étant, en quelque sorte, le produit d’une domination française à caractère unique où la langue française, langue du dominant, imposait sa naturelle hégémonie culturelle d’empire. Les années soixante consacrent l’amorce d’un cosmopolitisme singulier en avant-garde sur de nombreux pays de la région. Il est question ici de comprendre le concept de cosmopolitisme dans son sens le plus ordinaire : « le cosmopolitisme est une disposition à vivre en cosmopolite » (Petit Robert, 1978, p.399) et la racine grecque du terme kosmos (univers) et politês citoyen – Kosmopolités – se réfère au

« citoyen de l’univers » qui vit indifféremment dans tous les pays. Le terme s’oppose à « national » et renvoie dans sa définition à la capacité d’être influencé par de nombreuses cultures.

Le construit « cosmopolite » est d’abord un concept philosophique élaboré par Diogène de Sinope et exprime la possibilité d’être natif d’un lieu tout en prétendant à l’universalité sans renier ses origines. Le XVIIIe siècle et les Lumières ont repris cette idée en insistant sur cet universel fondateur de notre humanité. Les déclarations de la révolution française affirmant la liberté et l’égalité de l’Homme sont des héritages de cette vision du monde.

Aussi le cosmopolitisme est-il un concept qui a évolué historiquement de notion philosophique à un concept politique. Les penseurs du cosmopolitisme comme Beck, David Held, insistent plus sur des notions de « gouvernance mondiale » et d’institutions universalistes (en rupture avec le national) que sur une approche anthropologique et historique du cosmopolitisme créatif de mixité culturelle et d’influences réciproques.

Aussi le terme est-il envisagé ici dans sa conception anthropologique plus que philosophique ou politique. Les dictionnaires du temps présent se rapportent au cosmopolitisme comme à un espace accueillant toutes sortes d’étrangers ou d’influences et donnent New York pour symbole et incarnation de ce « cosmopolitisme ». Ainsi cette étude se rapporte au sens commun le plus ordinaire de la définition en renvoyant à un « lieu » de brassage et de mixité.

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Le cosmopolitisme des classes moyennes est exploré dans le film Thalasso tourné en 2007, 2008, 2009. Il nous engage sur l’hypothèse d’une mondialisation et d’un brassage culturel dès les années 1970 en Tunisie. Période qui consomme une forme de « rupture » culturelle, turning point assez net, qui ouvre la Tunisie sur des influences culturelles plurielles. Le pays s’écarte d’un modèle unique à la française et devient l’espace babylonien du multiculturalisme. Les contacts avec d’autres pays ayant une grande capacité d’ouverture et permettant une forme d’innovation que le schéma hégémonique était incapable de fournir.

L’internationalisation induite par la mondialisation précoce de la Tunisie dans ces grands centres touristiques impulse la création d’une variété dans l’offre de soins ; ce qui aura une influence culturelle et économique non négligeable dans le pays.

En témoigne le nombre impressionnant de « polyglottes tunisiens », dans les zones touristiques, parlant avec une aisance exceptionnelle de l’allemand ou du japonais en passant par le russe.

En se basant sur un travail de terrain en Tunisie, dans une station balnéaire, nous allons élaborer la théorie de l’existence d’un phénomène de balnéarisation du loisir et de la migration des médecines douces et des cures à partir des années 1970.

Dans les thermes avant 1956, des soins étaient dispensés à une élite bourgeoise dans le cadre feutré du grand Hôtel. Le modèle grand hôtel de la fin du XIXe siècle, Vichy ou Aix-les-Bains, au milieu du vingtième s’étant imposé comme zone réservée des classes sociales privilégiées.

Celles qui, avant la création de la sécurité sociale, possédaient le privilège de financer leurs dépenses de santé. Cette balnéarisation correspond également à l’avènement du tourisme de masse et de la sécurité sociale et à une prise de conscience des classes moyennes sur l’importance de la santé et du corps en général. Les soins de santé et l’insistance dans ce domaine, dans les années cinquante, étant la phase précédant celle du culte du corps et de ses performances, dans les années soixante.

Les fondamentaux de l’économie tunisienne seront brièvement rappelés afin de positionner ce secteur. À partir de ce plan large, nous analyserons

« le phénomène thalasso » qui n’est qu’une des facettes du tourisme de santé. Nous procéderons à un resserrement progressif en effectuant un rapprochement focal sur le phénomène balnéaire.

188 L’économie tunisienne

La croissance économique de la Tunisie a été pendant une dizaine d’années de 5 % par an. L’économie est historiquement liée à l’agriculture (blé, olives, dattes, agrumes et produits de la mer), aux mines, à l’énergie, à l’industrie textile, au tourisme – secteur qui représente 6,5 millions de touristes pour l’année 2006. Il est question d’une économie largement diversifiée en comparaison avec les autres pays du Maghreb. La Tunisie se hisse à la première place pour le revenu par habitant comme pour le niveau de développement. Bref, le pays, à l’instar du Maroc, est classé dans la catégorie « pays à revenus moyens ».

Pour la Tunisie d’aucuns retiennent la qualification d’économie émergente (terme issu des sciences optiques), un concept historiquement construit dans les années 1980 sous l’impulsion des marchés boursiers dans les pays du sud. Il est question de pays qui pratiquent l’économie de marché et accèdent aux financements internationaux tout en s’engageant dans un programme de réformes (Mathloudi, 2008) : déréglementation des capitaux, consolidation et croissance du PIB et réduction de la pauvreté. Les économistes emploient le mot « émergent » en relation à la soudaineté de la visibilité d’un pays sur la scène internationale.

L’émergence se mesure sur une échelle mondiale. Quelle est la pertinence du concept pour le nord de l’Afrique ?

Les pays du Maghreb ne rentrent dans cette catégorie que dans la mesure où ils réorientent leurs activités exportatrices vers les pays émergeants, les pays occidentaux ou leurs fournisseurs que sont les pétroliers du golfe arabo-persique. Pour Yamina Mathloudi, le Maghreb reste encore dans un entre-deux problématique lié aux limites des PME et une insuffisance de l’investissement privé.

La mondialisation

Le processus de mondialisation qui affecte la Tunisie a été conçu par le gouvernement de Ben Ali comme un « ordre naturel », c’est-à-dire comme un allant de soi. Un phénomène non discuté où les hommes proches du pouvoir tenaient des postures de quasi monopole. Le modèle se trouvait en continuité avec la rhétorique bourguibienne du développement et du rôle de l’État comme arbitre et agent de contrôle de la libéralisation financière et de l’ouverture aux capitaux étrangers. Un modèle poussé à l’extrême par le jeu des privilèges et des affinités claniques qui a réduit les bénéfices de cette ouverture à une clique.

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Les performances tunisiennes en matière de santé sont également le fruit de l’investissement constant de l’État tunisien en matière de santé publique. Ces efforts bourguibiens seront exploités à la faveur d’une

« caste » de bénéficiaires qui ne feront que creuser les inégalités à partir des années 1980.

Une étude pluridisciplinaire effectuée en 1990 sur l’état de la santé en Tunisie nous montre que ce champ nous apporte de précieuses informations sur le fonctionnement de l’État tunisien et son rôle dans la reproduction des élites mais surtout établit la remarquable continuité entre l’État colonial et le nouvel État tunisien postcolonial.

« Lors de l’indépendance le nouvel État tunisien s’est distingué au sein du Monde arabe par un engagement des plus résolus sur la voie du réformisme qui se voulait annonciateur d’une société nouvelle… Lors de l’indépendance, le nouvel État tunisien était sous-tendu par un projet de fondation d’une communauté politique de citoyens, différenciée de l’Umma et de communautés infra-étatiques. Mais le projet n’appartenait en propre qu’à une élite dirigeante du Mouvement national. Celle-ci, héritière d’un appareil prolongeant les formes coloniale et beylicale de la puissance, se proposait de réformer les structures et les comportements et d’initier un développement économique de nature à assurer une homogénéisation sociale et une allégeance directe de chaque individu à l’État » (Camau, Zaëm, Bahri, 1990, p.12).

La promesse d’une intervention étatique capable d’améliorer les conditions d’existence du citoyen étant une des composantes du pacte implicite liant l’individu et l’État. Ces attentes ont provoqué des attitudes ambivalences à l’égard de cet État providence (attrait / répulsion) en créant un « clientélisme d’État » et une allégeance passive à l’égard de l’État. Cette étude relève avec finesse, que, dès les années 1990, le clientélisme d’État avait déjà atteint ses limites. Au sein de cet État, la santé occupe un rôle de « mythe fondateur » de l’État moderne (Camau, Zaëm, Bahri, 1990, p.14). Le Welfare State s’érige en modèle incontournable et consacre selon les auteurs de ladite étude une vision totaliste de la santé comprenant la médecine comme « propriété » de cet État. Rappelons que partout dans le système colonial le « médecin » – le French Doctor – était le meilleur agent de l’influence coloniale. Cheval de Troie de l’influence française, le médecin de la postcolonie, dans un remarquable continuum historique, se mue en acteur privilégié du nouvel État indépendant.

Ces médecins seront gratifiés d’une aura sociale incomparable dans la société tunisienne de l’après colonie. Le champ sanitaire est devenu l’un des lieux de promotion de l’individu apportant un modèle nouveau de

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mobilité sociale. Le modèle de la thalasso se situe dans cet héritage, il est le produit d’une politique très volontaire où l’État possède un rôle majeur. La réussite de la thalassothérapie est donc également redevable d’une accumulation d’investissements dans le secteur de la santé des années 1950 à 2010.

L’enquête exhaustive menée par l’équipe de Michel Camau nous montre de manière mathématique que l’offre de soins s’est remarquablement élargie. Le départ des médecins européens a créé un vide que l’État postcolonial s’est empressé de combler. Ce n’est qu’en 1970 que la Tunisie est parvenue à récupérer le haut niveau de personnel médical de 1956.

« Par la suite l’effort intensif de formation a assuré une expansion soutenue de la démographie médicale. En 1985, la Tunisie comptait plus de quatre médecins pour 10 000 habitants, ratio supérieur à la majorité des pays du tiers-monde » (Camau, Zaïem, Bahri, 1990, p.28).

Il est également remarquable que le tissu sanitaire se double d’un processus d’urbanisation et de création de structures hospitalières et de la généralisation de la protection sociale en Tunisie. Dans les années 1990, l’assurance maladie couvrait 9/10e de la population tunisienne. Cet accroissement de la consommation médicale à l’intérieur du pays est donc la condition de base ayant permis d’élargir cette consommation à une clientèle extérieure. La mondialisation est un phénomène qui se situe donc dans le droit fil des succès en Tunisie d’une médecine intra-muros promue par l’État tunisien pendant les quinze premières années de l’indépendance.

Tourisme

La Tunisie cumule les atouts touristiques : sa position géographique, 1 300 kilomètres de côtes en grande partie sablonneuses, un climat méditerranéen chaud l’été et doux l’hiver, un patrimoine civilisationnel très riche (huit site inscrits à la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO) et surtout des prix très compétitifs. Le coût du séjour touristique est le cœur de cette attractivité et fait de la Tunisie la principale destination des touristes européens en Afrique et dans le monde arabe.

Le développement du tourisme est ancien et la Tunisie connaît un attrait touristique dès le XVIIIe siècle. Cette longue expérience dans le domaine touristique prédispose le pays à une certaine performance dans sa gestion du capital d’attractivité. Le colloque de Kairouan (mai 2009) nous a montré que les « voyages en Tunisie pendant le Protectorat » avaient déjà

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balisé certains itinéraires en mettant en œuvre des infrastructures hôtelières pendant la période coloniale. Une ville comme Kairouan recevait, dans les années 1920, quelque 2 000 touristes par an. C’est donc sur la base de cette expérience durable que nous évoquons l’existence d’un modèle. On parle de modèle lorsque démonstration est faite de la pérennité d’une activité qui s’impose sur la durée avec une capacité à s’exporter.

Quelques chiffres

1962 : 52 000 entrées, 4 000 lits, 2 milliards par an de gains,

2006 : 6 549 549 visiteurs, 231 838 lits (27 % dans des hôtels quatre et cinq étoiles).

Le tourisme devient le secteur apportant la principale source de devises du pays. Il représente, en 2010, 6,5 % du PIB et fournit 340 000 emplois dont 85 000 emplois directs, soit 11,5 % de la population active.

Diversification de la clientèle

La clientèle tend à se diversifier et les premiers clients ne sont pas les Français mais les Libyens (selon les sources d’État en 2006). Il y aurait quelque 1 472 411 visiteurs libyens par an.

Force nous a été d’observer que le tourisme de santé y occupe une place prédominante. La Tunisie est la première destination médicale des Libyens. Derrière les Libyens, les visiteurs français sont au nombre de 1 234 735, les Algériens 945 735, les Allemands 547 403, les Italiens 464 323, enfin les Britanniques 350 693. Le secteur intérieur étant loin d’être négligeable avec, en 2006, 1 251 251 touristes tunisiens. Cette diversification est donc à l’origine de ce « cosmopolitisme marin » à l’œuvre dans les stations balnéaires.

Notons que les sites les plus exploités se trouvent sur le littoral. 95 % des lits se trouvent sur le littoral oriental et les destinations essentielles sont celles de Sousse-Monastir-Mahdia (36 %), Nabeul-Hammamet (24 %), Tunis-Zaghouan (10 %), Tabarka-Aïn Draham (2 %).

La spéculation des territoires du littoral va accroître un phénomène d’inégalité entre la Tunisie des plages et celle des champs, creusant, toujours plus en profondeur, un enrichissement à deux vitesses. Les perspectives de développement escomptées, avant la crise de 2008, étaient de prévoir la création de nouvelles stations balnéaires le long du littoral avec une capacité de 200 000 lits en 2015. Toutefois, il convient de souligner que le tourisme balnéaire s’impose comme un exemple de réussite et s’accouple au tourisme médical. C’est ce que l’on appelle la

« station balnéaire intégrée ». Une notion postmoderne qui opère une addition d’activités autour de la station marine à proprement parler. Les

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thalassos s’inscrivent dans ce modèle d’accumulation. Elles s’installent dans les complexes marins sur le littoral. Cette notion de modèle intégré associe hôtellerie, cure et activités marines et constitue une nouveauté qui s’est progressivement installée depuis 20 ans.

La station où le travail de terrain a été conduit est un bel exemple de cette progression. Il s’agit d’un hôtel datant des années 1970, vétuste, sur lequel s’est greffé un nouveau bâtiment de thalasso construit dans les années 2000. Un centre thermal moderne construit trente ans après, a relancé positivement l’activité de l’hôtel, permettant également à ce dernier de ne pas fermer l’hiver car les cures ont l’avantage de provoquer une fréquentation à l’année qui donne lieu à des emplois qui ne sont pas saisonniers mais durables. Aussi ce modèle économique est également performant du point de vue des salariés. Dans le centre élu comme terrain d’investigation, certaines personnes étaient employées à l’hôtel depuis sa création dans les années 1970. Cet attachement des personnels est jugé par les clients comme un atout majeur, un signe de bonne gouvernance de l’établissement. Aussi lorsqu’on évoque le modèle de la réussite balnéaire du modèle intégré, on se rapporte aux centres djerbiens et hammamétiens. C’est la raison pour laquelle le centre de Nahrawess à Hammamet a été sélectionné comme espace privilégié d’observation.

Le film réalisé en 2007 et 2008 (avec un tournage étalé sur plusieurs années) s’est porté sur un ensemble qui modélise le cas de réussite économique de complexe balnéaire intégré.

Le centre de thalasso récent est un symbole d’architecture postmoderne.

Il s’agit d’un paquebot de vitre en forme pyramidale qui donne sur la plage. Les activités entre le centre de soins sur la plage et l’hôtel situé à quelques mètres sur les terres, s’articulent sur les deux espaces en parfaite cohérence. L’hôtel 4 étoiles harmonise ses offres avec les cures en thalassothérapie et les soins esthétiques. Les combinaisons de séjours en modules flexibles étant variées et variables. Des journées touristiques dans le désert peuvent être combinées avec la cure thermale. Le modèle hammamétien propose une infinité de possibilités articulées autour du noyau central hôtelier. Le centre de thalasso moderne s’est greffé sur l’un des plus anciens hôtels d’Hammamet permettant ainsi d’optimiser et de faire rebondir le potentiel d’une offre sans cesse renouvelée.

Cette capacité de réponse aux stimulations du marché touristique-curiste est certainement un des éléments de rupture les plus saisissant avec l’époque coloniale où les activités ne se multipliaient pas à l’infini dans des packages toujours plus sophistiqués. À l’époque coloniale, les

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activités proposées présentaient un caractère plus limité et n’offraient pas une « avalanche de loisirs » ; les clients généralement se satisfaisaient d’une ou deux activités.

L’un des signes de notre époque est la modification de notre rapport à l’égard de la durée : la mise en place de temporalités compartimentées de façon toujours plus hachées, le raccourcissement des horaires du fast living des sociétés du nord. Les notions de timing et d’agenda comme l’emploi excessif par les clients de l’expression sur-booké consacrent cette forme de course qui partout s’impose. Le loisir en Tunisie s’est remarquablement adapté aux pathologies temporelles de nos sociétés postmodernes. Les complexes hôteliers ont une offre qui ne cesse de se renouveler en obéissant aveuglément à la loi de l’offre et de la demande.

Le premier centre de thalasso à avoir ouvert, dans sa forme actuelle, est celui de Sousse en 1994 ; le produit était à l’origine destiné à une clientèle haut de gamme et s’est démocratisé depuis. La filière s’est rapidement développée et rencontre un certain essoufflement.

La Tunisie dispose de 45 centres de thalassothérapies qui offrent la capacité de traiter 4 909 curistes et proposent 1 496 cabines de soins. La plupart des centres sont situés dans des zones touristiques dont 54 % dans

La Tunisie dispose de 45 centres de thalassothérapies qui offrent la capacité de traiter 4 909 curistes et proposent 1 496 cabines de soins. La plupart des centres sont situés dans des zones touristiques dont 54 % dans