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Je ne saurais à ce sujet que conseiller la passionnante lecture du livre « Plastic Fantastic: How the Biggest Fraud in
Physics Shook the Scientific World », par E.S. Reich, qui relate par le menu cette histoire.
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Pour un tour d’horizons plus complet de tous les phénomènes limitants, voir par exemple le chapitre correspondant dans
notre livre [OUV 1] ou l’article de revue reproduit à la fin de ce mémoire [ACL 10].
Lasers based on ORganic materials). Ce projet a véritablement lancé notre équipe vers l’autonomie. Bien que
le titre du projet mentionne le pompage électrique (de façon un peu publicitaire, il faut l’avouer
5), son cœur
était de proposer une nouvelle architecture laser en pompage optique. L’idée était d’adapter une architecture
bien connue de lasers à semi-conducteurs inorganiques, le VECSEL (Vertical External Cavity Surface-Emitting
Laser) aux matériaux organiques. Cette idée, apparemment simple, n’avait jamais été mise en œuvre : il faut
peut-être y voir là la faible représentation d’opticiens et/ou de laséristes dans la communauté de la physique
des semi-conducteurs organiques. Cette géometrie, que nous avons baptisée VECSOL (avec le O de organique),
permet de gagner considérablement par rapport aux architectures ultra-majoritaires du domaine que sont les
lasers planaires à rétroaction distribuée (DFB) sur trois points : la puissance, l’efficacité et la qualité de
faisceau.
Le VECSOL [ACL 15] a été développé dans le cadre de la thèse d’Hadi Rabbani-Haghighi (2008-2011), et ses
succès (en particulier un record d’efficacité optique-optique à plus de 60% et une très grande luminance) nous
ont orientés fortement et pour plusieurs années vers le développement de sources lasers organiques pompés
optiquement efficaces, éventuellement tournées vers les applications, au détriment de nos études sur les lasers
pompés électriquement. Ce choix a été motivé par les difficultés considérables (et qui nous semblent hors de
portée) à relever pour réaliser une diode laser organique d’une part, et par la conviction que les lasers
organiques pompés optiquement ont un potentiel encore inexploité.
Parmi les avantages du VECSOL, le fait de disposer d’une cavité externe n’est pas le moindre : cela permet
d’insérer dans la cavité différent type d’éléments comme un cristal non-linéaire, donnant ainsi accès à un laser
accordable dans l’UV [ACL 13], ou un filtre de Fabry-Pérot pour obtenir une version accordable sur une très
large plage de longueur d’onde [ACL 7]. Depuis peu, nous développons d’autres variantes comme la possibilité
d’utiliser un réseau de Bragg Volumique pour affiner spectralement notre laser (collaboration avec le CREOL
à Orlando, USA)[ACL 3], ou l’utilisation de diodes lasers très bon marché comme source de pompage afin
d’aller vers un système compact et ultra bas-coût [ACL 5]. Cette dernière étude a été menée à bien par
5
C’est un défaut dont nous nous sommes assez rapidement débarrassés, mais il fut un temps ou faire mention du pompage
électrique nous semblait une condition sine qua non pour apparaitre « sexy » et plus facilement finançable…
Zhuang Zhao, recruté en tant que post-doc sur un financement ANR « émergence » (2012-2015) dont l’objectif
était de franchir un pas de plus vers les applications en réalisant un prototype bas-coût et largement
accordable, et en effectuant en parallèle une étude de marché pour tester la viabilité de la commercialisation
d’un tel système. C’est le projet « Vecspresso » sur lequel je reviendrais en détails dans la suite. Ces
développements sur le pompage par diode nous ont amené à franchir un pas de plus en envisageant le pompage
par LED. C’est une proposition assez ambitieuse car la luminance des LEDs, sources Lambertiennes par
essence, est plusieurs ordres de grandeur inférieure à celle des diodes lasers. Nous avons proposé et sommes en
train d’etudier la possibilité d’utiliser des concentrateurs luminescents, composants initiallement destinés au
domaine du solaire photovoltaique, pour augmenter la luminance des LED et ainsi pomper des lasers,
organiques ou non [ACL 1].
Un laser, c’est la combinaison d’une architecture, d’un système de pompage et d’un matériau. Si nos
démonstrations de VECSOL ont toutes été faites avec des molécules organiques « classiques » (DCM,
Rhodamine, pyrromethènes…), nous n’en avons pas pour autant négligé l’aspect matériaux, notamment grâce
aux compétences d’Alain Siove (DR CNRS) et Dominique Adès (IE) avec qui nous avons collaboré avant qu’ils
n’intègrent officiellement notre équipe en 2008 (ils sont maintenant tous deux à la retraite). Nous avons
ensuite eu la chance de pouvoir rencontrer Elena Ishow, physico-chimiste alors à l’ENS Cachan (maintenant
professeur à l’université de Nantes), qui développait des molécules fluorescentes dérivées de triphénylamines
capables de fluorescer sous forme de films purs, là où les molécules standard ont besoin d’être insérées dans
une matrice pour éviter le phénomène d’extinction de fluorescence (« quenching »). Cette collaboration avec
Eléna nous a amenés à monter un banc optique permettant de mesurer le gain de ces matériaux, et à les
utiliser comme milieu laser [ACL 17]. Ses molécules se sont par ailleurs révélées également très intéressantes
pour réaliser des OLEDs [ACL 14][ACL 8]. L’étude des matériaux utilisés dans nos lasers nous a également
amenés à réfléchir à des propriétés assez peu étudiées dans ces systèmes, notamment liées à la photophysique
et à la dégradation des molécules organiques sous illumination. C’est au cours de la thèse de Tatiana Leang
(2011-2014) et que nous avons étudié théoriquement et expérimentalement l’influence de l’élévation de
température sur les performances de nos lasers organiques [ACL 6], grâce à l’utilisation d’un banc d’imagerie
thermique qui n’est pas sans rappeler celui utilisé lors de mon premier post-doc. Nous avons également
entrepris d’améliorer notre compréhension de la polarisation de l’émission (en fluorescence et en laser)[ACL 9],
et des phénomènes de photodégradation (publications en préparation). Enfin, au-delà de la molecule
elle-même, le processus de fabrication peut être questionné : nous travaillons essentiellement en dépôt en phase
liquide par spin coating, mais nous avons aussi monté une collaboration avec le centre de microélectronique de
Provence à Gardanne pour réaliser des lasers organiques par impression jet d’encre [ACL 2], afin de pousser au
maximum la simplicité de fabrication qui est un des avantages majeurs des technologies organiques.
Aujourd’hui, notre équipe est stabilisée et comporte 3 permanents : Sébastien Chénais, moi-même et Oussama
Mhibik, recruté en tant qu’ingénieur de recherche en 2013 après un post-doc dans notre équipe. Nous avons en
moyenne un doctorant, et souvent un post-doc. Nos activités de photonique organique, initiées avec les
OLEDs, sont maintenant presque exclusivement centrées sur les lasers organiques, domaine où nous
commençons à acquérir un début de reconnaissance internationale (invitation à des conférences, papier de
revue invité…) et où nous avons eu la chance de bénéficier de nombreux financements (notamment 3 ANR).
Nos recherches actuelles et nos projets, majoritairement dans le même esprit, seront décrits plus en détails
dans la partie qui suit.
Dans le document
Lasers organiques solides
(Page 47-50)