• Aucun résultat trouvé

Conversion de l’Ins(3)P1 en MI libre par l’IMP

3. 18B MIPS, une enzyme clé de la biosynthèse du MI

3.1.2. Conversion de l’Ins(3)P1 en MI libre par l’IMP

L’Ins(3)P1 produit par MIPS peut ensuite être directement utilisé pour produire des inositols polyphosphates (Figure 3), mais c’est sa déphosphorylation par une IMP qui permet de synthétiser

le MI libre. Il faut remarquer que l’Ins(3)P1 peut également être obtenu lors de la

déphosphorylation des inositols polyphosphates (Figure 3), ce qui implique que l’IMP a un rôle dans la production du MI via la voie de biosynthèse de novo, mais également via le recyclage des dérivés du MI.

De manière intéressante, l’IMP est une enzyme bifonctionnelle chez les plantes, elle est à la fois impliquée dans biosynthèse du MI et dans celle de l’ascorbate, via la voie utilisant le GDP-mannose et non le MI (Fu et al. 2008, Torabinejad et al. 2009). La mutation du gène VITAMIN C

4 (VTC4) codant une IMP chez A. thaliana, conduit à la fois à une légère diminution de la teneur

en MI et en ascorbate (Torabinejad et al. 2009). Deux autres gènes IMP-LIKE 1 et IMP-LIKE 2 (IMPL1 et IMPL2) coderaient d’autres isoformes d’IMP chez cette plante modèle (Sato et al. 2011), ce qui expliquerait que la mutation de VTC4 ne provoque qu’une faible baisse de teneur en MI.

La voie de biosynthèse de novo du MI se réalise en seulement deux réactions catalysées par MIPS et l’IMP qui jouent ainsi un rôle crucial dans la formation des dérivés du MI.

Lors de mon doctorat, mes travaux se sont focalisés sur l’enzyme MIPS, qui catalyse l’étape limitante de la biosynthèse du MI (Loewus and Murthy 2000).Tandis que la partie §3.2 abordera les différentes fonctions de MIPS chez les plantes d’intérêt agronomique, les parties §4 & §5 détailleront l’implication de cette enzyme, et plus particulièrement de l’enzyme MIPS1, dans la synthèse de MI chez Arabidopsis thaliana, plante modèle utilisée au laboratoire.

1 Il faut noter que l’International Union of Biochemistry accepte deux écritures pour l’inositol phosphate

produit par MIPS : L-myo-inositol-1-phosphate ou D-myo-inositol-3-phosphate. Les deux écritures se retrouvent dans la littérature, conduisant parfois une certaine confusion, mais toutes deux sont généralement abrégées en Ins(3)P1 (Tableau 1.). Par conséquent, l’enzyme catalysant sa biosynthèse peut être nommée L-myo-inositol-1-phosphate synthase ou D-myo-inosytol-3-phosphate synthase. Augmentant la confusion, différentes abréviations sont utilisées par les chercheurs, telles que INO, IPS ou encore MIPS, pour désigner cette enzyme qui est référencée sous le numéro EC 5.5.1.4. Uniquement l’abréviation MIPS sera employée dans ce document.

25

3.2. 59BMIPS : une enzyme d’intérêt agronomique

Le MI et ses dérivés semblent être des constituants ubiquitaires chez les eucaryotes, et ils se retrouvent également chez les bactéries et les archées (Michell 2008). Le premier gène codant une enzyme MIPS a été identifié chez la levure S. cerevisiae (Donahue and Henry 1981) : il s’agit du gène INO1 (pour INOsitol synthase 1). Depuis, grâce aux avancées technologiques et aux recherches de nombreux laboratoires, des gènes codant des enzymes MIPS ont été identifiés dans plus de 60 organismes appartenant aux trois règnes du vivant (Majumder et al. 2003).

Dans le règne végétal, le premier gène codant une enzyme MIPS a avoir été identifié est le gène TURION 1 (TUR1), chez Spirodella polyrrhizale (Smart and Fleming 1993). Par la suite, l’intérêt pour cette enzyme chez les plantes cultivées s’est accru. En effet, le phytate, un dérivé du MI, qui s’accumule fortement dans la graine comme forme de stockage du phosphate, est néfaste pour la santé humaine et l’environnement (Raboy 2001). Sa consommation crée un déficit en Zinc chez l’Homme et est à l’origine de pollutions de l’eau lorsqu’il est consommé et rejeté par des animaux non ruminants (tels que les volailles, les porcs et les poissons). Or, l’ABA, connu pour réguler la synthèse de composés s’accumulant dans la graine, induit l’expression du gène RICE

INO 1 (RINO1), codant une enzyme MIPS, dans des cultures cellulaires issues de graines de riz

(Oriza sativa) (Yoshida et al. 2002), ce qui pourrait avoir des conséquences indirectes sur la teneur phytate.

Afin de réduire la teneur en phytate dans la graine, des travaux visant à diminuer l’activité de MIPS ont été réalisés. Chez Arabidopsis, l’altération de chacun des gènes MIPS n’a pas d’effet sur la teneur en phytate (Kim and Tai 2011), alors que dans des plantes d’intérêt agronomique telles que le maïs ou le soja (Glycine max), une diminution de l’activité MIPS conduit à une réduction de la teneur en phytate dans les graines

Cependant, altérer la fonction de cette enzyme peut avoir des effets défavorables sur le développement de la plante. En effet, chez le maïs, le mutant low phitic acid 1 (lpa1), muté dans un gène codant une enzyme MIPS (Larson and Raboy 1999), présente une faible teneur en phytate mais également une masse sèche des graines diminuée (Raboy et al. 2000), tandis qu’une réduction de l’expression du gène MIPS chez le soja, par ARN interférence, conduit à un avortement de l’embryon dans la graine (Nunes et al. 2006). Par une approche similaire, la diminution de l’expression de MIPS chez la pomme de terre (Solanum tuberosum) provoque un phénotype pléïotrope caractérisé par une réduction de la dominance apicale, une altération de la morphologie des feuilles, une diminution dans le rendement du tubercule et une sénescence précoce (Keller et al. 1998).

Figure 12. Structure des gènes MIPS1, MIPS2 et MIPS3 chez Arabidopsis.

Les rectangles pleins représentent des exons, tandis que les barres entre les exons représentent les introns. Les rectangles rouges représentent les régions 5’ et 3’ non traduites, les rectangles verts représentent les régions traduites. Il est également indiqué, la position des ADN de transferts (ADN-T) dans les allèles mutants des gènes MIPS décrits dans la littérature. Les lignées SALK et SAIL sont dans le fond génétique de l’écotype Columbia-0 (Col-0), alors que la lignée FLAG est dans l’écotype Wassilewskija (Ws).

26 Les dérivés du MI sont impliqués dans la résistance à de nombreux stress (§2.2.3). En toute logique, l’expression du gène MIPS est induite en réponse à la sécheresse, au froid ou à un stress salin chez Medicago falcata (Tan et al. 2013). L’expression du gène MIPS2 de pois-chiche (Cicer

arietinum) est également induite par l’ABA (Kaur et al. 2008). De plus, l’expression ectopique du

gène MfMIPS1 (issu de M. falcata), chez le tabac (Nicotiana tabacum) génère des plantes plus résistantes aux stress précédemment cités (Tan et al. 2013). Par une approche similaire, l’expression ectopique des gènes CaMIPS2, issu du pois-chiche, et SaINO1, issu de l’halophyte

Spartina alterniflora, chez Arabidopsis, crée des plantes transgéniques possédant une résistance

augmentée au stress salin et à la sécheresse (Joshi et al. 2013, Kaur et al. 2013). De même, l’expression de PcINO1, issu d’une variété sauvage et halophyte de riz (Porteresia coartata), chez le tabac permet de créer des plantes plus résistantes au sel (Majee et al. 2004).

L’étude du gène MIPS chez des espèces d’intérêt agronomique s’avère intéressante afin de créer des variétés plus comestibles, plus résistantes aux stress abiotiques mais également plus respectueuses de l’environnement. Cependant, comme l’enzyme MIPS est à l’origine de nombreux dérivés, le fait de moduler son activité peut provoquer d’autres effets non désirables pouvant affecter le rendement.