S'ilfaut,
Vénus
, dire la vérité,
D'un peu
trop près,par-tout, vousêtes vue;Convenons-en,
vousêtesun peu
nue;Etsi l'ontrouve avecvousle Plaisir, C'estbien souvent sans
y
voir le Désir.Vénus
rougitdu
trait quilaregarde;Jupinpoursuit sans
même
y prendregarde:Ne
rencontrant dansl'empiredes cieuxQue
des objets trop présents àmes
yeux, Par passe-tempsj'aidescendu surterre;La
nouveautédu
plaisir etdu
lieu,Une
mortelleentrelesbrasd'undieu, Plus de mystère avec plus de contrainte, Ont, quelques jours, demon
ardeuréteinteDE LA MODE.
Renouveléles feux; cesfeux n'ont lui
Que
peud'instants, et, derechefatteinte,
Mon ame
encore a retrouvél'ennui.Pour
repousser ce dégoiit quim'oppresse,Où
trouverai-je, hélas!une
maîtresseAu cœur
fidèle, auvisage inconstant,Qui
chaquejouraugmente mon
ivresse;Toujoursla
même,
et qui sachepourtant Sibien changersaforme naturelle,Que
touslesjours elleme
soitnouvelle!Qu'on me
l'amène, et je suis satisfait.Or, maintenant que vousêtes
au
faitDu
noir sujet dema
mélancolie, Allez,Vénus; et], sijevoussuis cher,Voyez
auciel, surlaterre et surmer, Et trouvez-moil'objetdema
folie!Vénus
s'éloigne, emportant dans soncœur D'un
long dépitle sentimentrongeur; Se rappelant,non
sansvivesalarmes,
Que
Jupiter, insensibleà ses charmes,
L'avait traitéeavec tantde froideur.
Depuis cejour, époque dedisgrâce,
Tous
ses appasluiparurentflétris,LA NAISSANCE
Sesyeux battus necherchaient plusla glace, Les Jeuxfuyaientloin d'elle, et lesouris
Ne
venaitplus errer sur sa figure;
Tout
l'attristait, etsa belle ceinture Avait perdu désormais toutson prix.Il est
une
île, ouvrage de Cybèle,Où
la natureestsimple, riche etbelle;De
ceséjour rien ne troublelapaix,
L'onde esttranquille et lebocage épais.
Le doux
rayon d'une lumière pureEn
traits d'argent sillonnela verdure;L'oiseaus'y plaît; dans le crystaldes eaux L'arbre penchévientmouiller son feuillage;
Les
pommes
d'orquipendent aux rameaux, Surce miroir balancentleurimage;Sous lecouvert de ces riants berceaux,
Des doux
Zéphirsla troupe voltigeante Sans cesseagiteune
ailecaressante;Etlesbuissons chargés de mille fleurs,
Dans
cetair frais confondentleurs odeurs.C'est làqu'on vitl'aimable Cythérée Gâchersa vie honteuse et retirée.
Un
deces joursoù
ses ennuissecrets,
DE LA MODE.
Seuls
compagnons
de soname
attristée, Se faisaientvoirdans ses regardsdistraits, Prèsdu
rivageelle aperçut Protée, Qui, dans l'instant sortidu
fonddesmers, Pliait soncorps auxmouvements
diversDont
l'Océan, Thétiset laNature Avaientdoué
samobile structure.Veut-ilplongerdans lecrystal deseaux:
Son
corpssevoûte,une
écaille doréeCouvre
ses flancs, s'épaissitsur son dos;
Sa
main
s'agite en nageoire pourprée, Lepiedgouverne, etdedeux
coups égauxIl glisse etfile en partageantlesflots.
Veut-ildans l'airs'éleverintrépide, Semblable àl'aigle en son essor rapide:
Ilréunitetporte verssesbras L'effort triplé deses nerfs délicats;
Son
ailes'ouvre,une plume
légère Étendsurlui sonabri tutélaire;Jusqu'àl'Olympeil vole sanseffroi, Saisit lafoudre; et des oiseaux leroi
Du
roidesdieux asitele tonnerre.H LA NAISSANCE
Vénus
s'arrête; etson étonnementA
faitrentrerdans soname
accablée Cette douceur qu'elle en crut exilée;Elle a senti cegrand soulagement
Que
danslecœur
apporteune
surprise,Qui
le remet,l'assied, le tranquillise, Et, l'échauffantpar le feudu
désir,Le
fait renaître encorpour
leplaisir.Protée alors,
du
haut de l'Empyrée,
D'un
volmoinsprompt
ménageait sonretour;Il aperçoitla
mère
de l'AmourDans
ses pensersvaguement
égarée,Qui
, relevant sesyeux
,où
le cielpur Réfléchissaitlalumièreet l'azur, Suivaitsonvoldans lavoûte éthérée;Plus
prompt
qu'un trait, il s'abaisseàl'instant:Vénus
pâlitd'unefrayeur mortelle,Quand
tout-à-coupellevoit auprès d'elle,Au
lieud'unaigle,un
cygne aucou
pliant,Qui
la couvraitdoucement
deson aile Et lui jetaitun
regard suppliant.Belle
Vénus
, dit-il, d'unevoix tendre,
Ah!
par pitié, daigne, daigne m'entendre!DE LA MODE.
Cetunivers est soumisàtes lois,
Le cœur
setroubleauxaccents detavoix, Etsurtesyeux, touslesyeux en extase Viennentpuiserun
feu quilesembrase;Ton
seul toucher faitcouler dans nossens L'ardente soifdes désirsrenaissants; Partes baisers tu dispenseslavie,
Elle est pareux etdonnée et ravie.
Les dieuxaussiconnaissent tes bienfaits; Et detesfeux
une
seule étincelle,Un
seulmoment
de tes plaisirs sivrais,Vaut
toutl'éclat deleurgloireimmortelle.Vénus émue
approche de son seinLe
beloiseau,puis de sadoucemain
Semble luidire, en flattantsonplumage
:Priez
Vénus
, cen'estjamais envain.Brillant d'espoir,
humble
dans son langage, L'oiseaureprend, etd'un ton de candeur:Fille
du
ciel,pourprétendre àton
cœur
,
Du
dieu sanglant quiravagela terre, Je n'aileport, nila démarchefière;J'aimerais
mieux du
berger AdonisTe
rappelerla timide tendresse,a6
LANAISSANCE
Son
airnaifetsonfrais coloris;De mes
cheveuxje dénoûraisla tresse, J'étalerais à tes regards surprisLeurs flots dorés, leursoyeusemollesse; Je n'ai
non
plus de l'enfantdeNaïsLe doux
regardni le tendresouris; EtJupiter,me
déclarant laguerre,Pour me
punir d'unbonheur
indiscret, N'apoint surmoi
faittomber
sontonnerre;Maisjepossède
un
merveilleux secret:Quand
je leveux, àmon
ordre fidèle,Mon
corps revêtune
formenouvelle; Toujoursun
autre, et lemême
pourtant,Changeant
sans cesse etjamais inconstant,De
cent façonsmon amour
se décèle;Etlabeautédont
mon cœur
afait choix,
Parlasurprise àtoute heureagitée,
En
possédantle mobile Protée, Croitpossédervingtamants à-la-fois.Vénus
se trouble; etdans son œilhumide Le
désirlanceune flamme
rapide;Son
sein s'élève;un
brillantincarnatA
sursajoueétaléson éclat;