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4.3 Interf´erom´etrie radar : principes et limites

4.3.3 Contributions `a la diff´erence de phase

Comme nous l’avons signal´e plus haut, plusieurs ph´enom`enes physiques peuvent in- tervenir ensemble dans la production des franges de diff´erence de phase dans un interf´e- rogramme. La d´etermination et la mod´elisation de ces ph´enom`enes sont n´ecessaires pour l’isolement d’une contribution d´etermin´ee. Ces contributions sont discut´ees en d´etail par Massonnet et Feigl (1998). Nous en faisons une br`eve synth`ese avec des exemples de notre ´etude. Dans ce travail, on cherche `a isoler la diff´erence de phase due aux d´eplacements cosismiques. Tout autre contribution est consid´er´ee comme art´efact.

Contribution d’orbites

Un d´ecalage entre les trajectoires d’orbites entre deux acquisitions d’images peut ˆetre `a l’origine de franges dans un interf´erogramme. Cette diff´erence de prise de vue (st´er´eosco- pique) ne doit pas d´epasser une demi-longueur d’onde dans un pixel. La stabilit´e orbitale du satellite ENVISAT et les param`etres orbitaux pr´ecis introduits dans le calcul des in- terf´erogrammes permettent facilement d’exclure toute frange due `a cette contribution.

4.3. Interf´erom´etrie radar : principes et limites 105 Contribution de la topographie

La diff´erence de phase due aux changements topographiques de terrain peut ˆetre contrˆol´ee par une grandeur de sensibilit´e au relief appel´ee “altitude d’ambigu¨ıt´e” ha (Massonnet et Rabaute, 1993). C’est l’altitude minimale au dessus de laquelle les franges topographiques peuvent apparaˆıtre dans un interf´erogramme.

ha =

(Rsλ tan θm)

2d (4.5)

O`u : Rs est la distance entre la trajectoire de l’orbite de l’image esclave

θm est l’angle d’incidence de l’image maˆıtresse

d la distance horizontale qui s´epare les deux trajectoires (ligne de base spatiale) λ la longueur d’onde.

Pour des donn´ees du mˆeme satellite, ha est inversement proportionnelle `a d. Le cas

optimal pour l’interf´erom´etrie, est lorsque la valeur de ha tend vers l’infini (la s´eparation

des orbites tend vers z´ero). Tout d´epend du relief de la r´egion ´etudi´ee, les altitudes ´elev´ees avec une grande s´eparation des orbites peut affecter s´erieusement la qualit´e de l’interf´e- rogramme. Pour bien cerner la contribution de la topographie, on fait appel `a un MNT pr´ecis, pour ´eliminer d’´eventuelles franges topographiques.

Contribution de l’atmosph`ere

Le retard qui peut affecter le signal pendant l’acquisition de l’une des images, donne lieu `a une diff´erence de phase qui pourrait gˆener l’interpr´etation de certains interf´ero- grammes. Des turbulences (changements de pression, de temp´erature, de taux d’humi- dit´e, de concentration ionique) dans la troposph`ere et l’ionosph`ere entre deux acquisi- tions peuvent aboutir `a des franges plus d´elicates `a mod´eliser par rapport aux autres contributions. La complexit´e de cette contribution est due `a l’instabilit´e des turbulences dans le temps et dans l’espace. Elle a ´et´e d´emontr´ee dans plusieurs ´etudes par exemple : Massonnet et Feigl (1995a); Delacourt et al. (1998).

Contribution de la d´eformation de la surface

L’apport de l’interf´erom´etrie radar dans l’´etude des d´eformations de la croˆute ter-

restre r´eside dans l’´evaluation de cette contribution dans la diff´erence de phase `a partir de l’analyse des images et l’extraction des autres contributions (orbites, topographie, at- mosph`ere). Tout d´eplacement d’un point sur la surface de la terre entre deux acquisitions est mesur´e en terme de d´eplacement le long de la ligne de vis´ee du capteur par la corr´e- lation de phase des deux images. Chaque changement de distance sol-satellite de l’ordre

Fig. 4.5 – Relation entre le vecteur de d´eplacement u et le scalaire du changement de distance ∆ρ.

d’une demi-longueur d’onde (28 mm pour ENVISAT) est repr´esent´e par une frange dans l’interf´erogramme. Le changement de distance ∆ρ relatif `a ce d´eplacement (fig. 4.5) est calcul´e math´ematiquement par l’´equation de base :

∆ρ = −u.ˆs (4.6)

O`u : u est le d´eplacement au sol

ˆ

s est le vecteur unitaire orient´e du point au sol vers le satellite

La projection des trois composantes du vecteur de d´eplacement `a 2kπ (avec k entier) dans chaque pixel de l’image permet d’obtenir une carte de champ de d´eformation bien localis´e selon une seule composante sur la ligne de vis´ee du satellite. Les trois composantes de d´eformation peuvent ˆetre estim´ees approximativement `a l’aide de la mod´elisation phy- sique de l’interf´erogramme par dislocation dans un milieu ´elastique. La combinaison des donn´ees des acquisitions ascendant et descendant (deux angles de prise de vue diff´erentes) ainsi que d’autres techniques de g´eod´esie - comme le GPS, nivellement et imagerie optique - peut ˆetre utile pour bien caract´eriser le champ de d´eplacement en 2D voir en 3D.

La sensibilit´e de l’interf´erom´etrie radar aux d´eformations de la surface terrestre est limit´ee d’une part par la vitesse de la d´eformation et la dur´ee de l’´echantillonnage par le satellite et d’autre part par le gradient et l’´echelle spatiale de la d´eformation (fig. 4.3.3).

4.3. Interf´erom´etrie radar : principes et limites 107 En se basant sur divers travaux en InSAR, diff´erentes ph´enom`enes de d´eformations de

la croˆute ont ´et´e class´es par Massonnet et Feigl (1998) selon leur d´etectabilit´e temporelle

(vitesse et dur´ee) et spatiale (ampleur et ´etendue).

Quant `a la d´etectabilit´e temporelle, le signal de d´eformation est consid´er´e `a la port´ee de l’interf´erom´etrie SAR lorsque son produit vitesse-dur´ee se trouve entre les deux lignes rouges de la figure 4.3.3A. Plus le temps d’´echantillonnage est court, plus la pr´ecision est bonne. Cette classification est applicable seulement pour les mouvements de faibles vitesses et de longues dur´ees (Massonnet et Feigl, 1998). Les mouvements rapides sont plutˆot ˆetre contrˆol´es par leur gradient. Ils sont report´es dans la figure 4.3.3B.

En pratique, la ligne de base temporelle constitue la v´eritable contrainte pour discri- miner les ph´enom`enes g´eophysiques d´etectables, car en r´ealit´e le changement de distance entre deux acquisitions est l’accumulation de toutes les d´eformations qui ont eu lieu au cours de cette p´eriode. Par exemple en utilisant les donn´ees d’un seul satellite de p´eriode

de 35 jours, on ne peut pas trancher entre le d´eplacement dˆu `a l’´ev´enement principal

(mainshock) et un d´eplacement dˆu `a une r´eplique qui peut se produire quelques minutes

apr`es. La minimisation de la ligne de base temporelle par la combinaison des donn´ees de diff´erents satellites dont les orbites peuvent se r´ep´eter seulement en quelques heures (exemple d’ERS-2 qui suit la trace de son jumeau ERS-1 `a un jour d’intervalle), est souhai- table pour s’affranchir de cette limite. Dans ce cas une bonne connaissance de la sismicit´e de la r´egion ´etudi´ee est n´ecessaire.

Quant `a la d´etectabilit´e spatiale, une d´eformation est consid´er´ee mesurable lorsque sa magnitude correspondante `a son ´echelle spatiale se trouve `a l’int´erieur du pentagone de la figure 4.3.3B dont chaque cot´e d´efinie une limite physique. On en distingue alors cinq limites :

• La taille du pixel : d´efinie le strict minimum de la largeur de l’´echelle de d´eforma- tion. La d´eformation doit d´epasser la taille de pixel de l’image. Les mouvements qui se produisent sur de tr`es faibles distances ne seraient pas mesurables par InSAR mˆeme s’ils sont de tr`es grandes amplitudes.

• La largeur de la zone d´eform´ee : d´efinie le maximum de la largeur de la zone de d´eformation qui pourrait ˆetre mesurable sur une image radar normalement de 100 km. Dans ce cas il est possible de traiter des images successives et faire le mosa¨ıquage des interf´erogrammes pour une interpr´etation des zones de d´eformation plus larges.

• Le gradient fort 10−3 : marque la limite sup´erieure du gradient de d´eformation

mesurable. Le gradient de d´eformation ne doit pas d´epasser une frange [−π, +π] par pixel. Des d´eformations comme des ´eruptions volcaniques et certaines ruptures de surface peuvent d´epasser cette limite.

• Le gradient faible 10−7 : la limite inf´erieure du gradient de d´eformation est d´efinie

A

B

Fig. 4.6 – Classification des d´eformations selon la d´etectabilit´e actuelle de l’interf´erom´e- trie SAR d’apr`es Massonnet et Feigl (1998). (A) d´etectabilit´e selon les facteurs vitesse des mouvements et dur´ee d’´echantillonnage. La ligne rouge en tir´ees constitue la limite optimale de la d´etectabilit´e et la ligne rouge en gras constitue la limite typique de la d´e- tectabilit´e. (B) Limites en fonction de la magnitude du d´eplacement (Change in range) et l’extension spatiale (Width) de la d´eformation. Pour ˆetre d´etectable, le signal d´eformation devrait se situer dans le pentagone blanc du diagramme.

4.4. Traitement InSAR par DIAPASON 109