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4.1) Une contrainte sur l’eau contrastée

Un des enjeux majeurs de la monoculture de maïs est sa dépendance à la ressource en eau durant la période estivale. Cependant, en fonction des exploitations, on sait qu’il existe des différences de disponibilité et/ou de gestion de l’eau. Ainsi, les attributs qui décrivent la disponibilité de l’eau d’irrigation dans l’expérience de choice modelling peuvent donc apparaitre comme plus ou moins restrictifs ou crédibles.

V.4.1.1) Disponibilité, origine et gestion de l’eau d’irrigation

Dans l’expérience de choice modelling, l’attribut permettant de décrire la disponibilité en eau d’irrigation pour l’agriculteur est le quota maximal d’eau autorisé (trois niveaux: 1 800, 1 500 et 1 200 m3/ha). Cependant, au sein de l’échantillon enquêté, seule la moitié des agriculteurs sont actuellement soumis à un quota de consommation en eau. De plus, cette proportion varie d’une zone de production à une autre. Dans l’Adour et l’Armagnac, plus de 60 % des producteurs sont soumis à un quota de consommation en eau. Dans la zone de la Garonne, cette proportion est moindre, avec 31 %.

Cette différence de gestion de la ressource en eau peut s’expliquer par la provenance de l’eau d’irrigation (Figure 28). En effet, si le pompage en rivière et en réseau collectif est contrôlé par un niveau de quota autorisé, ce n’est pas le cas pour le pompage dans des forages. Ce dernier est uniquement soumis à une déclaration du volume pompé à l’Agence de l’Eau, pour calculer la valeur

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de la redevance. Par ailleurs, le pompage dans des lacs individuels n’est pas non plus soumis à un quota de consommation, c’est l’agriculteur qui gère lui-même sa ressource et il est uniquement limité par le volume d’eau de sa retenue. Dans la zone de la Garonne, 40% des agriculteurs déclarent qu’au moins une partie de leur eau d’irrigation provient de forages et/ou de rivière. Dans la zone de l’Armagnac, 30% des exploitants trouvent leur ressource en eau dans des lacs individuels ou collectifs, 15% en rivière et 15% en réseau collectif. En été, la pluviométrie est faible, le pompage en rivière ou sur le réseau peut être limité voire interdit lors d’épisodes de sécheresse estivale. Ce secteur est donc plus sensible à la contrainte en eau l’été. Enfin, dans la zone de l’Adour, la provenance de l’eau est assez diverse, 30% des agriculteurs pompent en rivière, 25% ont accès à un lac, 20% à un forage et 15% se fournissent sur le réseau collectif.

Cette première constatation pourrait expliquer que certains agriculteurs ne se soient pas mis en situation réelle de carence estivale en eau lors de l’expérience. Les maïsiculteurs qui n’ont actuellement pas de quota d’irrigation pouvaient estimer que la mise en place de quota sur leur exploitation n’était pas crédible ou bien ils ont eu des difficultés à déterminer l’impact réel de cette limitation sur leurs pratiques actuelles.

Figure 28 : Provenance de l'eau d'irrigation en fonction des zones de production

Par ailleurs, lorsque les quotas existent, on remarque une disparité en termes de niveaux entre les différentes zones (Tableau 39). Les exploitants sont soumis, en moyenne, à une restriction de 1 900 m3/ha. Ainsi, comme il était souhaité lors de la conception du questionnaire de choice modelling, les niveaux de quotas proposés de 1 800, 1 500 et 1 200 m3/ha semblent bien restrictifs pour les agriculteurs. Cependant, il apparait une forte hétérogénéité du niveau du quota au sein de l’échantillon avec un coefficient de variation de plus de 30 %. En moyenne, les agriculteurs de l’Adour ont un quota de 2 000 m3/ha alors que dans l’Armagnac il est de 1 850 m3/ha. Les agriculteurs qui sont soumis à un quota dans la zone de la Garonne ont, en moyenne, le quota le plus faible limité à 1 750 m3/ha. Ainsi, le contexte de production proposant 1800 m3/ha peut être perçu comme restrictif par certains des agriculteurs de la zone Adour mais pas pour d’autres dans la zone de l’Armagnac. De plus, dans ces deux zones de production il existe une forte variabilité interne du niveau de quota avec un coefficient de variation de 30%.

0% 1 0 % 2 0 % 3 0 % 4 0 %

Adour Bearn Armagnac Garonne Réseau Lac

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Tableau 39 : Quota et niveaux des quotas au sein de l'échantillon

Total Adour Armagnac Garonne

Présence de quota 48,3 % 64,5 % 62,5 % 31,0 %

Quota moyen (m3/ha) 1906,4 2007,5 1850,0 1744,5

Coeff. Var. quota 32,6 % 35,8 % 32,1 % 15,6%

Source enquête 2014

De manière générale, l’accès et la gestion de l’eau sont distincts en fonction des zones de production. Dans la zone de la Garonne, à peine un tiers des agriculteurs sont soumis à des quotas, car une majorité d’entre eux ont accès à des forages. Cependant, dans cette zone, lorsque les agriculteurs sont soumis à des quotas, il s’agit des quotas les plus restrictifs des trois zones étudiées. Dans les zones de l’Adour et de l’Armagnac plus de 60 % des agriculteurs sont soumis à des quotas en moyenne de 2 000 à 1 850 m3/ha respectivement pour les deux zones. Cependant, le niveau des quotas est assez variable au sein de ces zones avec des coefficients de variation de l’ordre de 30 %. On sait cependant que, dans la zone de l’Armagnac, la pluviométrie est plus faible, ce qui peut réduire la disponibilité en eau pour les agriculteurs de cette zone qui dépendent des pompages en lacs et en rivières.

V.4.1.2) Sécheresses et restrictions de consommation en eau d’irrigation

Un deuxième attribut de l’expérience est la disponibilité de la ressource en eau : fréquence des épisodes de sécheresse ou de restrictions. Il décrit le risque d’accroissement des événements extrêmes, évoqué par les agriculteurs comme une des conséquences du changement climatique. Il a été choisi de regrouper les sécheresses et les restrictions au sein d’un même attribut afin que tous les exploitants soient potentiellement limités dans leur consommation en eau. En effet, une restriction ne concernerait pas les maïsiculteurs qui ne sont pas soumis à des quotas de pompage (forage ou lac). A l’inverse, une sécheresse sans restriction ne limiterait pas la consommation des agriculteurs qui pompent sur le réseau. Cet attribut est composé de trois niveaux : 2 années sur 10, 4 années sur 10 et 6 années sur 10. L’expérience de choice modelling montre que l’attribut « risque de sécheresse » n’affecte pas significativement les choix d’adaptation des maïsiculteurs. Ce résultat semble contradictoire étant donné la dépendance de la monoculture de maïs à la ressource en eau. En moyenne dans l’échantillon, les agriculteurs déclarent avoir été soumis à près de 3 épisodes de sécheresse et à 1,5 épisode restriction sur 10 ans (Tableau 40). Concernant les épisodes de sécheresse, les maïsiculteurs de la Garonne et de l’Adour déclarent en subir entre deux et trois par décennie. Les maïsiculteurs de l’Armagnac, qui disposent d’une pluviométrie moindre, font face, en moyenne, à près de 4 épisodes de sécheresses sur 10 ans. Cependant, si l’Armagnac subit de nombreuses sécheresses, il ne s’agit pas de la zone qui a supporté le plus de restrictions. Dans l’Adour, les maïsiculteurs ont été restreints dans leur irrigation à deux à trois reprises sur les dix dernières années. Les zones de l’Armagnac et de la Garonne, ont, elles, fait face à une seule restriction.

De plus, les sécheresses et les restrictions ont des effets distincts en fonction des zones de production. Lors des épisodes de sécheresses, les maïsiculteurs de l’Adour et de l’Armagnac perdent en moyenne plus de 25 q/ha. Dans la Garonne, les agriculteurs déclarent perdre une quinzaine de quintaux par hectare. A l’inverse lors des épisodes de restriction, les maïsiculteurs de la Garonne

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déclarent les plus hauts niveaux de perte en moyenne, avec près de 19 q/ha. Dans l’Adour et l’Armagnac les pertes moyennes sont de 5 et 9 q/ha respectivement.

On peut donc constater que la zone de la Garonne est, en moyenne, moins affectée par les sécheresses et les restrictions. L’augmentation des niveaux de l’attribut de « fréquence des sécheresses et des restrictions » semblerait dont être plus contraignante dans cette zone. Cependant, lors des épisodes de sécheresse, les agriculteurs de la Garonne déclarent des pertes de rendement plus faibles. En effet, leur pompage dans les nappes leur permet de bénéficier d’eau d’irrigation et ce même pendant des périodes de sécheresses. A l’inverse, ils sont fortement sensibles à des restrictions en déclarant les pertes les plus élevées des zones de production étudiées. Par ailleurs, dans la zone de l’Armagnac, où les agriculteurs déclarent une fréquence d’épisodes de sécheresse de quatre années sur dix, les deux premiers niveaux de l’attribut proposé ne sont pas plus contraignants que leur contexte actuel.

Il apparait que les niveaux de l’attribut « fréquence des épisodes de sécheresse et de restriction » peuvent être perçus comme plus ou moins restrictifs en fonction des zones de production. De plus, les conséquences de cet attribut sur la productivité du maïs sont différentes selon qu’il s’agisse d’une sécheresse ou d’une restriction. En effet, les zones qui disposent de forages ne sont pas fortement affectées par la sécheresse. Concernant les effets des restrictions la zone de la Garonne est la plus affectée. Il y a donc un « effet-zone », mais il faut aussi noter qu’au sein des zones de production, les coefficients de variation des pertes associées aux restrictions sont supérieurs à 100 %. Cet attribut apparait donc comme complexe à interpréter ce qui peut expliquer que, malgré la dépendance de la monoculture de maïs à la ressource en eau, il n’apparait pas comme significatif dans notre étude.

Tableau 40 : Fréquence des épisodes de sécheresse et de restriction et effet sur la productivité du maïs

Total Adour Armagnac Garonne

Moy33. Coeff. Var Moy. Coeff. Var Moy. Coeff. Var Moy. Coeff. Var

Nb Sécheresse (/10 ans) 2,7 - 2,2 - 3,7 - 2,7 -

Perte Rdt sécheresse (q/ha) 21,4 87,8 % 25,1 76,9 % 28,3 49,1 % 15 121,6 %

Nb Restriction (/10 ans) 1,5 - 2,5 - 0,9 - 1,1 -

Perte Rdt restriction (q/ha) 11,2 155,8 % 4,7 179,6 % 8,9 121,3 % 18,7 122,5 %

Source Enquête 2014