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Contrôler la dette publique: quelles sont les raisons de l'augmentation de la dette publique

Dans le document Essais sur les politiques économiques (Page 42-46)

3. Politique budgétaire: consolider, relancer et contrôler la dette publique

3.3 Contrôler la dette publique: quelles sont les raisons de l'augmentation de la dette publique

Avec une dette publique qui pèse pour 95% du PIB en 2014, la France est dans le quartile

des pays de l'OCDE avec la dette publique la plus élevée et a une dette publique

supérieure de près de 30 points de PIB à celle du pays médian. Vingt-cinq ans plus tôt, la

France, avec une dette publique de 20% du PIB était dans le quartile des pays avec la

dette publique la plus faible et de 15 points de PIB en dessous de celle du pays médian

(Graphique 15). Cette détérioration relative n'est pas spécifique à la France (par exemple,

le Japon, le pays avec la dette publique la plus faible jusqu'en 1965, est depuis 1999 le

pays avec la dette publique la plus élevée), mais elle pose la question de la soutenabilité

de la dette publique en France.

Dans un article écrit avec Jean Boissinot et Clotilde L'Angevin

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, nous testons la

soutenabilité de la dette publique en France en utilisant des tests statistiques usuels, avant

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J. Boissinot, C. L'Angevin, et B. Monfort, 2004, "La dette publique en France: la tendance des vingt dernières années est-elle soutenable ?", publié dans L'Economie française 2004, INSEE. Article présenté à

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de décrire en utilisant un VAR cointégré les facteurs qui ont contribué à l'augmentation

de la dette publique sur la période 1980-2004.

Une équation comptable d'accumulation de la dette offre une première approximation des

facteurs qui ont contribué à l'augmentation de la dette

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. Sur la période d'étude, le

"dividende de croissance" (le fait que la croissance réelle et l'inflation réduisent le

dénominateur du ratio dette / PIB) compense presque exactement la charge d'intérêt.

Deux facteurs expliquent à part égale l'augmentation de la dette: (1) le déficit primaire,

avec une seule période de 1998 à 2001 avec un solde primaire positif; (2) un terme

résiduel, lié au changement du périmètre de l'Etat ou à la reprise de créances (par

exemple nationalisation au début de la période ou reprise de la dette de France Télécom

en 1996). Pour autant, ce deuxième terme est en ligne avec la moyenne des pays

européens, à la différence de la croissance du PIB, en moyenne plus faible, ainsi que de

l'effort au niveau du solde primaire, lui aussi plus faible. En particulier, sur la période

d'étude de l'article, le déficit primaire de la France a été le plus élevé après seulement

l'Espagne et le Portugal.

Graphique 15: France - Dynamique de la dette publique

un séminaire interne à l'INSEE, à la conférence 2004 International Conference on Policy Modeling / Ecomod, et à l'assemblée annuelle de l'Association des Economistes Française en septembre 2004.

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Spécifiquement, l'équation d'accumulation de la dette prend la forme suivante: avec bt la dette publique, gt les dépenses, idt la charges de la dette, rest l'impact du dividende de croissance et adjt l'ajustement comptable. Toutes les variables sont mesurées en pourcentage du PIB.

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L'article utilise plusieurs tests statistiques pour essayer de déterminer la soutenabilité de

la dette. Les tests proposés par Hamilton et Flavin (1986) ou Wilcox (1986) portent sur la

stationnarité de l'incrément de dette. Un test alternatif, basé sur Quintos (1995) propose la

définition de deux formes de soutenabilité, forte ou faible, basé sur le coefficient entre les

revenus publics et les dépenses publiques (coefficient , graphique 16): la "soutenabilité

forte" correspond à un coefficient unitaire entre les revenus et les dépenses, la

"soutenabilité faible" à un coefficient entre 0 et 1. Sur la base des ces tests, nous

concluons que la dette en France est "faiblement soutenable". Une estimation récursive

du coefficient  montre par ailleurs que ce coefficient, autour de 0,5-0,6 jusqu'en 1992,

s'est ensuite fortement dégradé. Sur l'ensemble de la période d'estimation, il est de

seulement 0,26.

Pour déterminer les raisons de la faible soutenabilité de la dette en France, nous estimons

ensuite un VAR cointégré avec cinq variables qui expliquent la dynamique de la dette

publique: le dividende de croissance, les dépenses publiques, les recettes publiques, la

charge de la dette et enfin le terme d'ajustement comptable. Pour interpréter ces relations,

une lecture structurelle est imposée au VAR, sur la base de l'ordre de présentation des

variables ci-dessus (par exemple la croissance va influencer les dépenses, via les

stabilisateurs automatiques et ces deux effets conjugués vont influencer les recettes

publiques).

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Graphique 16: France - Test de soutenabilité et tendances stochastiques du VAR

Le VAR présente deux relations de cointégration et trois tendances stochastiques,

interprétées comme suit: (1) La première tendance est interprétée comme un biais en

faveur du déficit, un choc de dépenses ne donnant pas lieu à une augmentation des

recettes pour rééquilibrer le solde budgétaire. (2) La deuxième tendance est liée à un effet

boule de neige, un choc de taux d'intérêt ayant tendance à être persistant. (3) La troisième

tendance est liée au terme d'ajustement comptable, en moyenne positif sur la période

d'étude (graphique 16).

Si l'article conclut de manière prudente sur les limites de l'analyse (en particulier la

non-prise en compte d'effets démographiques ou la difficulté à prédire une évolution sur la

base des tendances passées), les évolutions depuis dix ans, liées en partie au choc

Lehman de 2008, semblent confirmer certains des résultats de l'étude: le solde primaire a

été négatif de manière permanente; malgré la baisse des taux d'intérêt la charge de la

dette a été au même niveau moyen que sur la période d'étude (en raison d'une dette plus

élevée); et le terme d'ajustement comptable a ajouté directement près de 4 points de dette.

Depuis la rédaction de cet article, la dette publique a progressé en France de 35 points de

PIB en France contre 13 points de PIB pour le pays médian de l'OCDE.

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3.4 Comparer la dette publique entre pays: quelle est vraiment la taille de la dette

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