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Contrôle de la taille et de la monodispersité des capsules

0,05 0 0,1 0 0,25 0 0,5 > 99 1 > 99

Tableau V.2 –Taux d’encapsulation en fonction de la concentration en SDS dans la solution d’alginate à 1,7 %m. Cœur : solution de glycérol à 80 %m. rCaCl2s “ 1 %m, rq“ 5, ˜e “ 0, 05

V.2

Contrôle de la taille et de la monodispersité des capsules

V.2.1 Paramètres de contrôle de la taille des capsules

Supposons que le jet se fragmente à une longueur d’onde λ et que le rayon du jet soit Rjet. La taille des capsules formées sera ainsi de Rcap “

´ 3 4R 2 jetλ ¯1 3

. Nous pouvons donc moduler la taille des capsules formées par deux paramètres : la taille de l’injecteur et la fréquence d’excitation.

Comme nous l’avons vu en section IV.2.1, l’excitation du jet à une fréquence f donnée force le jet à se fragmenter selon une seule longueur d’onde λ. A priori, f et λ sont liés par la relation suivante : vconv“ f λ avec vconvla vitesse du jet lorsqu’il a relaxé en profil bouchon. C’est ensuite cette longueur d’onde qui va définir la taille des bigouttes produites.

Toutefois, comme discuté en section IV.2.2, la vitesse des ondes à la surface du jet n’est pas constante et égale à vconv : elle diminue avec z pour atteindre la vitesse des bigouttes formées, ralenties par la force capillaire. Ceci a pour conséquence une évolution des longueurs d’onde à la surface du jet, parallèlement à l’évolution de la vitesse comme vconv “ f λ. Ceci est dû, comme nous l’avons vu, aux faibles valeurs de W e dans nos expériences.

Il est donc malheureusement difficile, connaissant Rjet, Qtot et f , de déterminer la longueur d’onde excitée et finalement la taille des bigouttes formées. Comme nous l’avions représenté figureIV.19, une modification de la fréquence reste néanmoins un moyen de moduler la taille des bigouttes formées. La plage de fréquences sur laquelle le contrôle de la fragmentation est possible réduit cependant la gamme de rayons accessible.

Le second paramètre permettant de modifier la taille des capsules est la taille de l’in- jecteur utilisé. Naïvement nous pourrions en effet penser que le rayon du jet formé est égal au rayon de l’injecteur. Mais nous avons vu en section III.2 que ceci n’est en pratique presque jamais vérifié à cause du gonflement ou de la contraction du jet en sortie d’ex- trusion. Malheureusement, il est là encore difficile d’évaluer le rayon du jet formé, même en connaissant Rjet, Qtotet les propriétés rhéologiques des fluides utilisés. Malgré le gon- flement ou la contraction du jet, son rayon reste toutefois lié au rayon de l’injecteur (cf. équations (III.6) et (III.7)). De cette façon une augmentation du diamètre de l’injecteur aura nécessairement pour effet une augmentation de la taille du jet et par conséquent des capsules formées.

Finalement, le rayon de l’injecteur et la fréquence d’excitation restent des moyens de contrôler la taille des capsules formées même s’il est difficile de prédire a priori, connaissant ces deux paramètres, la taille qu’auront les capsules formées. De façon générale, nous avons pu vérifier expérimentalement que Rcap„ 2 ´ 4 ¨ Rinjecteur.

V.2.2 Coalescence

Une fois le rayon de l’injecteur et la fréquence d’excitation fixés, la taille des capsules formées est a priori imposée. Toutefois, un phénomène peut induire de la polydispersité au sein des capsules formées : la coalescence.

Coalescence au sein du jet

Comme nous en avons discuté en section IV.4.3, des gouttes peuvent coalescer au sein du jet, avant fragmentation. Cette coalescence est induite par la dispersion des vitesses d’onde à la surface du jet. En l’absence de tensioactifs, les dispersions de vitesse sont en général trop faibles pour que des phénomènes de coalescence apparaissent. Mais nous avons vu que l’ajout de tensioactifs, sur une certaine gamme de concentrations, générait un gradient de tension de surface le long du jet à l’origine d’une augmentation de la dispersion des vitesses. Dans ce cas, nous avons pu observer un grand nombre de phénomènes de coalescence au sein du jet.

Malheureusement, nous avons montré qu’il était nécessaire de rajouter du SDS dans notre solution d’alginate pour obtenir des taux d’encapsulation convenables. Nous avons donc cherché à évaluer l’effet de la concentration en SDS sur la coalescence au sein du jet. Pour cela nous définissons un taux de coalescence Rcoal qui quantifie la proportion d’évènements de coalescence au sein du jet avant fragmentation :

Rcoal “ nombre de coalescences

nombre total de gouttes form´ees (V.5)

La mesure est effectuée sur environ 1000 gouttes.

FIGUREV.6 –Influence de la concentration en SDS sur la coalescence au sein du jet. Cœur : solution de glycérol à 80 %m. Coque : solution d’alginate à 1,7 %m avec une concentration variable en SDS. (QtotpmL.h´1q, rq, VpppV q, f pHzq, Rjetpµmq)=(138 ; 3, 6 ; 20 ; 600 ; 111)

Le résultat obtenu est présenté sur la figureV.6. Nous observons sans surprise la même évolution que celle mesurée sur la figureIV.30pour la dispersion des vitesses. Pour des concentrations supérieures à 1 mM, le taux de coalescence reste supérieur à 5%. L’utilisation

V.2. Contrôle de la taille et de la monodispersité des capsules

de SDS au delà de 1 mM n’est donc pas favorable si l’on souhaite obtenir des capsules monodisperses.

Nous avons montré plus haut que la concentration critique pour obtenir un taux d’en- capsulation supérieur à 99% à r˚

q était de 0,5 mM. Le taux de coalescence obtenu à cette concentration est heureusement relativement faible („ 2%). Cette courbe nous montre finalement, que nous avons tout intérêt à utiliser cette concentration critique dans nos solutions d’alginate et qu’il n’est pas favorable de chercher à l’augmenter.

Des expériences menées en faisant varier la fréquence d’excitation ont en outre montré sans surprise une augmentation du taux de coalescence avec la fréquence. En effet, plus la fréquence est élevée, plus les distances entre gouttes sont faibles et la probabilité de coalescence élevée.

Coalescence en vol

Même si les bigouttes n’ont pas coalescé au sein du jet, il est possible qu’elles coalescent en vol, après fragmentation, avant d’entrer dans le bain de calcium.

La distance entre le bain de gélification et la zone de fragmentation est en effet de l’ordre de 5 cm et leur vitesse est de l’ordre de 1 m.s´1. Leur temps de vol est donc d’environ 50 ms. Étant donné que les gouttes sont séparées d’environ 1 mm, un écart de vitesse de l’ordre de 2% suffit ainsi pour que deux gouttes coalescent en vol avant gélification. En section IV.2.2, la dispersion des vitesses mesurée pour les gouttes en vol est de cet ordre. Expérimentalement nous observons effectivement un grand nombre de coalescences en vol, comme celle présentée figureV.7.

FIGUREV.7 –Exemple de coalescence en vol. De gauche à droite, le temps entre deux images est de 1,17 ms. La barre d’échelle représente 1 mm. La fréquence d’excitation est de 800 Hz, ce qui explique qu’excepté l’évènement de coalescence le jet et les autres gouttes paraissent fixes.

Afin d’empêcher ces coalescences, nous avons mis en place le même dispositif expéri- mental utilisé dans l’encapsulator et décrit par Brandenberger et al. [19]. Notre dispositif est représenté sur la figureV.8. Il s’agit d’une électrode cylindrique, placée autour du jet,

au niveau de la zone de fragmentation. L’électrode est alimentée par un générateur de tension continue (PSU 130 de marque Lascar) et un amplificateur haute tension (MM3PN de marque Spellman). La masse de l’amplificateur, le bain de calcium ainsi que le fluide de coque sont reliés électriquement à la terre. Les tensions imposées sont de l’ordre de 1500 V.

Ce dispositif permet de charger la surface des bigouttes au moment de la fragmentation du jet. Par ce biais, nous générons une répulsion électrostatique entre les gouttes qui se repoussent en vol et forment un spray conique visible sur la figureV.8.

FIGUREV.8 –Utilisation d’une électrode pour prévenir la coalescence en vol. À gauche : photo du dispositif utilisé où l’on peut voir le spray formé par les gouttes qui se repoussent. À droite : Image du spray obtenue à la caméra rapide. Le haut de l’image correspond à la fin de l’électrode. La barre d’échelle représente 1 mm.

Afin d’évaluer l’efficacité de ce dispositif, nous avons mesuré la taille des bigouttes formées avec et sans électrode en vol, juste avant entrée dans le bain de gélification. Les résultats obtenus sont donnés figureV.9. Nous définissons la polydispersité ainsi :

polydispersit´e “ σpR¯ goutteq Rgoutte

(V.6)

avec Rgouttele rayon des gouttes, ¯Rgouttele rayon moyen des gouttes et σpRgoutteq l’écart- type.

Sur la figureV.9(a), nous pouvons comparer l’effet de l’électrode en l’absence d’excitation ou sous excitation à 600 Hz. Dans les deux cas nous observons une diminution de la polydispersité quand l’électrode est utilisée. Sans excitation la polydispersité demeure tout de même élevée („ 15%) car le jet se fragmente selon plusieurs longueurs d’onde ce qui produit des gouttes de tailles diverses. En revanche, à 600 Hz nous parvenons à une polydispersité de moins de 3% quand l’électrode est utilisée, alors qu’elle est de l’ordre de 10% en son absence.

Sur la figureV.9(b)nous avons représenté plus précisément la distribution des tailles mesurées sous excitation à 600 Hz. L’axe des ordonnées représente la densité de probabilité P d’observer une goutte de taille donnée. Si nous notons N pRq le nombre de gouttes

V.2. Contrôle de la taille et de la monodispersité des capsules

(a) (b)

FIGUREV.9 –Mesure de la polydispersité. cœur : solution de glycérol à 80 %m. coque : solution d’alginate à 1,69 %mavec 0,5 mM de SDS. (QcoeurpmL.h´1q, QcoquepmL.h´1q, VpppV q)=(120 ; 40 ; 6)

(a)Polydispersité en fonction de la fréquence, avec et sans électrode.(b)Densité de probabilité P pµm´1q en fonction du rayon des gouttes, à f “ 600Hz.

possédant un rayon R, Ntot le nombre total de gouttes et dR le pas de la mesure, nous avons : P pRq “ NN pRq

tot¨dR avec dR “ 8 µm. Avec et sans électrode nous observons un pic centré sur 270 µm, ce qui signifie que dans les deux cas, la majorité des gouttes formées possède un tel rayon. En revanche, sans électrode un second pic centré sur 330 µm apparaît aussi. Il s’agit des gouttes issues de la coalescence de deux gouttes de rayon 270 µm. On retrouve en effet à peu près R2“ 213R1, avec R1le rayon des gouttes qui n’ont pas coalescé

et R2le rayon des gouttes ayant coalescé. Ceci montre aussi, comme attendu étant donné les temps de vol et les distances entre gouttes, la faible probabilité d’observer des coalescences à trois gouttes ou plus.

Ces résultats confirment l’efficacité de l’électrode qui parvient à supprimer la coales- cence en vol.

Sur la figureV.9(a), la polydispersité obtenue avec électrode pour différentes fréquences d’excitation est aussi représentée. Cette figure est à mettre en lien avec la courbe de dis- persion obtenue figureIV.21 via la mesure de Lf rag. Les polydispersités les plus faibles sont en effet obtenues aux fréquences possédant les taux de croissance les plus élevés pour l’instabilité de Rayleigh-Plateau. Ceci n’est pas étonnant puisqu’à ces fréquences il est beaucoup plus facile de forcer le jet à se fragmenter à une longueur d’onde unique. Pour des fréquences possédant des taux de croissance plus faibles en revanche, d’autres longueurs peuvent se superposer, donnant lieu à un fragmentation moins bien contrôlée et à la formation de gouttes de tailles distribuées. Cette figure nous montre en outre qu’il est possible d’obtenir une polydispersité inférieure à 5% sur une gamme de fréquences de l’ordre de 400 Hz.

Sur la figureV.10nous pouvons voir un exemple de capsules produites dans de telles conditions et vérifier la très faible polydispersité. Le cœur a été coloré, grâce à l’ajout d’un

peu de latex1, ce qui permet de visualiser la membrane d’alginate.

FIGUREV.10 –Exemple de capsules obtenues avec utilisation de l’électrode. Cœur : solution de glycérol à 80 %m coloré avec 0,1 %m de latex. Coque : solution d’alginate à 1,7 %mavec 0,5 mM de SDS. rq“ 5, [CaCl2] = 1 %m. La barre d’échelle représente 500 µm.