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Contexte réglementaire et normes de rejets associés

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Chapitre 1 - Pollution des Rejets Urbains de Temps de Pluie : source, transport et impact

1.2. Contexte réglementaire et normes de rejets associés

En Europe, la protection des milieux aquatiques continentaux est une préoccupation depuis les années 70. La première directive cadre européenne visant à protéger les milieux aquatiques contre les rejets de substances dangereuses date de 1976. De nombreuses directives ont ensuite été publiées, dans le but de protéger les milieux naturels.

La première directive européenne ayant pour objectif la protection des milieux naturels est la Directive 76/464/CEE (CE, 1976). Elle concerne « la pollution causée par certaines substances dangereuses déversées dans le milieu aquatique ». Cette directive met en place une réglementation générale pour les rejets en milieu aquatique qui concerne deux types de substances dangereuses: celles dont la pollution doit être éliminée (liste I) et celles dont la pollution doit être réduite (liste II). Le terme micropolluant n’est pas encore évoqué, bien que les substances dangereuses concernées soient des métaux ou des biocides. Le terme pollution y est défini comme « le rejet de substances ou d'énergie effectué par l'homme dans le milieu aquatique, directement ou indirectement, et ayant des conséquences de nature à mettre en danger la santé humaine, à nuire aux ressources vivantes et au système écologique aquatique, à porter atteinte aux agréments ou à gêner d'autres utilisations légitimes des eaux ».

Deux directives majeures ont été adoptées en 1991. La Directive 91/271/CEE (CE, 1991), ou Directive « ERU », est relative au traitement des eaux urbaines résiduaires . Elle impose la collecte et le traitement des eaux usées, et donne des niveaux de traitement en fonction de la taille des agglomérations d’assainissement et de la sensibilité du milieu récepteur. La Directive 91/676/CEE (CE, 1991b), ou Directive « Nitrates », concerne la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles. Elle vise à protéger les eaux souterraines et superficielles contre la pression agricole à travers un guide de bonnes pratiques.

La Directive 2000/60/CEE (CE, 2000), appelée Directive-Cadre sur l’Eau (DCE), établit un cadre pour une politique communautaire européenne dans le domaine de l’eau. L’objectif principal de la DCE est la préservation et la restauration de l’état des eaux superficielles. Des sous-objectifs ont été définis :

- L’atteinte du bon état des eaux d’ici 2015 sur tout le territoire européen ; - La non-détérioration des ressources en eau et des milieux aquatiques ; - La réduction ou la suppression des rejets de substances dangereuses.

La qualité des eaux est le marqueur de l’atteinte de ces objectifs. Cette qualité est évaluée à l’échelle de la masse d’eau définie au niveau de chaque bassin versant. Ces masses d’eau doivent présenter un bon état écologique, chimique et quantitatif. En France en 2013, seulement 48% des masses d’eau étaient en bon état chimique mais 23% n’avaient pas atteint le bon état général (ONEMA, 2015). Le bon état de l’ensemble des masses d’eau n’a pas été atteint en 2015, première échéance de la DCE. Un nouveau plan de gestion par cycle de 6 années a été mis en place suite à ces premiers résultats (2015- 2021, 2021-2027...).. La dernière échéance pour la réalisation des objectifs est 2027.

La Directive 2006/11/CE (CE, 2006) est une version codifiée de la directive 76/464/CEE. Elle concerne la pollution causée par certaines substances dangereuses déversées dans les milieux aquatiques et dresse deux listes de substances dangereuses. Les États membres doivent prendre des mesures pour éliminer la pollution des eaux par les substances de la liste I et pour réduire la pollution des eaux par les substances de la liste II.

Avec la DCE a été annoncée la mise en place de mesures complémentaires pour la protection des milieux naturels. Différentes directives filles ont été adoptées dont la directive 2008/105/CE (CE, 2008) établissant des normes de qualité environnementale (NQE) dans le domaine de l’eau. Cette directive modifie la DCE et présente la liste de 33 substances prioritaires et substances prioritaires dangereuses et les NQE correspondantes.

La dernière directive en date est la Directive 2013/39/UE (CE, 2013) qui modifie les directives 2000/60/CE et 2008/105/CE. Elle concerne les substances prioritaires pour la politique dans le domaine de l’eau et introduit 12 nouvelles substances, complétant ainsi la liste de 33 substances prioritaires pour lesquelles les Etats membres doivent respecter des

1.2.2. La réglementation française

La politique actuelle de l’eau en France repose sur la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux, et à la lutte contre leur pollution (RF, 1964).

Cette première loi a conduit à une gestion de l’eau décentralisée par bassin versant hydrographique. Six Agences de l’Eau (organes exécutifs) et six Comités de Bassin (organes consultatifs) ont été créés. Cette loi a aussi instauré le principe « pollueur-payeur » visant à préserver la qualité de l’eau.

La loi n° 92-3 du 3 janvier 1992, dite « loi sur l’eau » (RF, 1992), reconnait l’eau comme un

« patrimoine commun de la Nation ». Elle propose une gestion globale de l’eau sous toutes ses formes (superficielle, souterraine, marine) et la préservation des écosystèmes aquatiques et des zones humides. Cette gestion intégrée se traduit par la mise en place de Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) pour les bassins versants, et de Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE) pour les sous-bassins.

La loi n° 2004-338 du 21 avril 2004 (RF, 2004) transpose la DCE en droit français via la modification du code de l’Environnement.

La loi n° 2006-1772 du 20 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques, dite « LEMA », est la dernière loi sur l’eau en France (RF, 2006). Elle rénove l’ensemble de la politique de l’eau afin d’atteindre les objectifs de la DCE, d’améliorer les conditions d’accès à l’eau et d’apporter une transparence au fonctionnement du service public de l’eau. De plus, cette loi reconnait le droit à l’eau pour tous, réforme le système de financement des Agences de l’Eau et permet la création de l’ONEMA (Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques) aujourd’hui Agence Française de la Biodiversité (AFB).

La Figure 2 résume les principaux textes réglementaires européens et français concernant la protection des milieux naturels.

1.2.3. Evolution des listes de substances prioritaires

L’élaboration de listes de substances prioritaires (dont les rejets doivent être limités) et dangereuses prioritaires (dont les rejets doivent être supprimés) date de 1976. Les listes I et II de la directive 76/464/CEE comportaient déjà respectivement 17 et 11 substances ou groupes de substances prioritaires à surveiller. La DCE a complété ces deux listes au regard de l’évaluation de 820 000 données de surveillance de l’eau et de sédiments fournies par les états membres (Zgheib, 2009). La DCE fournit une liste de 33 substances prioritaires comprenant 10 pesticides, 4 métaux et 22 substances organiques diverses, dont 11 sont classées dangereuses prioritaires (Table 1).

TABLE 1 : LISTE DES SUBSTANCES PRIORITAIRES ET DANGEREUSES PRIORITAIRES (EN GRAS) DE LA DIRECTIVE CADRE SUR L'EAU (SCHMITT, 2014)

22 substances organiques 10 pesticides 4 métaux Acide perfluorooctanesulfonique et ses dérivés Aclonifène Cadmium et ses

composés

Anthracène Alachlore Mercure et ses

composés

Benzène Atrazine Nickel et ses composés

Chloroalcanes Bifénox Plomb et ses composés

Composés du Tributylétain (TBT) Chlorfenvinphos Di(2-éthylhexyl)phtalate (DEHP) Chlorpyrifos

1,2-dichloroéthane Cybutryne

Dichlorométhane Cypermetrine

Dioxines et composés de type dioxine Dichlorvos

Diphényléthers bromés Dicofol

1.2.4. Classes d’état et Normes de qualité environnementales

Afin d’évaluer l’état écologique d’un cours d’eau, la DCE indique la prise en compte de cinq éléments de qualité physico-chimique généraux (Ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, 2016):

- La température ; - Le bilan d’oxygène ; - La salinité ;

- L’état d’acidification ;

- La concentration en nutriments.

Ces éléments physico-chimiques sont des facteurs explicatifs des conditions biologiques des cours d’eau. Les paramètres et valeurs-seuils à prendre en compte pour évaluer le bon état écologique sont présentés dans la Table 2:

TABLE 2 : VALEURS DES LIMITES DES CLASSES D’ETAT POUR LES PARAMETRES PHYSICO-CHIMIQUES GENERAUX POUR LES COURS D’EAU (*: LES CONNAISSANCES ACTUELLES NE PERMETTENT PAS DE FIXER DES SEUILS FIABLES POUR CETTE LIMITE ; LES LIMITES DE CHAQUE CLASSE SONT PRISES EN COMPTE DE LA MANIERE SUIVANTE :]VALEUR SUPERIEURE, VALEUR INFERIEURE]) (MINISTERE DE L’ENVIRONNEMENT, DE L’ÉNERGIE ET DE LA MER, 2016)

En plus de fournir une liste de substances à surveiller dans les masses d’eau, la DCE a prévu de leur associer des concentrations dans les milieux naturels à ne pas dépasser, appelées Normes de Qualité Environnementales (NQE). Une NQE est définie dans la DCE comme « la concentration d'un polluant ou d'un groupe de polluants dans l'eau, les sédiments ou le biote qui ne doit pas être dépassée, afin de protéger la santé humaine et l'environnement » (CE, 2000). Les NQE ont été évaluées à partir des seuils de concentrations sans effet négatif sur les êtres vivants.

La Table 3 présente la liste des paramètres et leurs NQE associées à respecter pour atteindre le bon état chimique des eaux. Cette liste est issue de la directive 2008/105/CE (CE, 2008) modifiée par la directive 2013/39/UE (CE, 2013). Les NQE sont définies en valeur moyenne

annuelle (NQE_MA) et en concentration maximale admissible (NQE_CMA). Les eaux de surfaces intérieures comprennent les rivières, les lacs et les masses d’eau artificielles.

Lorsque les NQE_CMA sont « sans objet », il faut considérer les NQE-MA car on considère qu’elles assurent une protection contre les pics de pollution. Les normes de la Table 3 sont relatives à la matrice eau, et s’appliquent sur l’eau brute pour les polluants synthétiques et sur l’eau filtrée (filtration à 0,45 µm) pour les polluants non synthétiques (métaux). Les NQE_MA dans l’eau relatives aux hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) se rapportent à la concentration en benzo(a)pyrène, car ce dernier est considéré comme un marqueur des autres HAP.

TABLE 3: NORMES DE QUALITE ENVIRONNEMENTALES DES SUBSTANCES PRIORITAIRES ET AUTRES SUBSTANCES DETERMINANT L'ETAT CHIMIQUE (EN GRAS : LES SUBSTANCES PRIORITAIRES) (CE, 2013)

Nom de la substance NQE_MA eaux de surfaces intérieures (µg/l)

Tétrachlorure de carbone 12 sans objet

Chloroalcanes 0,4 1,4

Chlorfenvinphos 0,1 0,3

Chlorpyrifos (éthylchlorpyri fos)

0,03 0,1

Pesticides cyclodiènes Σ = 0,01 sans objet

DDT total 0,025 sans objet

Pentachloro- benzène 0,007 sans objet

Pentachloro- phénol 0,4 1

Tétrachloro- éthylène (7) 10 sans objet

Trichloro- benzène 0,4 sans objet

Trichloro- méthane 2,5 sans objet

Trifluraline 0,03 sans objet

1.2.5. Que retenir sur la réglementation de la qualité des eaux pluviales ?

Les textes réglementaires européens et français présentés ci-dessus concernent des masses d’eau très diverses (cours d’eau, eaux souterraines, plans d’eau artificiels, eaux marines côtières…etc.) mais les eaux pluviales n’y sont pas mentionnées spécifiquement. Il n’existe donc pas, dans la réglementation actuelle, des concentrations limites en polluants dans les eaux pluviales à surveiller et/ou respecter.

Cependant, en imposant le bon état des masses d’eau à l’échelle européenne, la DCE oblige les collectivités à prendre en compte toutes les sources de pollution potentiellement dégradantes pour la qualité des milieux récepteurs. Les rejets d’eaux pluviales font parties de ces sources potentielles, et il convient de diminuer leurs impacts sur les milieux naturels afin de les protéger et d’atteindre les objectifs de qualité.

De plus, les eaux pluviales ne sont pas totalement oubliées par la réglementation française. En effet, l’imperméabilisation des surfaces entraine la nécessité de collecte et de gestion des débits d’eaux pluviales, qui peuvent avoir un impact sur la qualité et l’hydraulique des milieux aquatiques récepteurs. Les rejets importants d’eaux pluviales sont soumis à une procédure d’autorisation d’après les articles L.

214-1 à L. 214-6 du code de l’environnement et leur collecte et traitement est une compétence des collectivités d’après les articles L. 640 et L. 641 du code civil.

Pour nos travaux de recherche sur les eaux pluviales, il faudra prendre en compte ce contexte réglementaire bien qu’il ne concerne pas directement ce type de masse d’eau. Les NQE nous permettront d’évaluer l’impact potentiel des eaux pluviales et des systèmes de traitement sur le milieu naturel.

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