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LE DIABETE AU COLLEGE

1. Le contexte de l’adolescence

A l’âge de l’adolescence, le praticien, la famille et le patient font face à la difficulté supplémentaire que représente cette étape de changements ; tant sur le plan physiologique et psychologique que sur le plan de l’environnement social de l’adolescent. Le diabète est une maladie chronique imposant un certain nombre de contraintes, et qui nécessite un apprentissage pour la maitriser au quotidien. Il impose également un certain nombre de sacrifices, que les nouvelles avancées thérapeutiques (surtout techniques) ont pour ambition de lever, mais qui sont pour le moment toujours une réalité de la vie des jeunes diabétiques.

Bien souvent l’enfant est encore dans une phase de découverte de sa maladie qu’il sait plus ou moins maitriser et équilibrer selon l’ancienneté du diagnostic, l’éducation qu’il a pu recevoir concernant celle-ci et ses propres capacités d’adaptation et d’apprentissage. C’est bien souvent le moment où l’on observe le passage d’une gestion parentale à une prise d’autonomie vis-à- vis de la maladie.

Mais lors de cette période on peut observer un refus et un déni de la maladie chez un jeune qui aspire à s’intégrer comme les autres dans la vie sociale et sentimentale qui se développe en particulier à ces âges. Une dégradation de l’équilibre glycémique est souvent observée au moment de l’adolescence59. De plus on observe sur différentes études une majoration des accidents aigües (hypoglycémie et acidocétose) et en particulier chez les filles60,61.

Plusieurs barrières qui sont spécifiques à l’adolescence peuvent se présenter et poser des difficultés à l’enfant. Physiologiquement un certain nombre de changement va survenir sur le plan hormonal et corporel qui va nécessiter une adaptation du traitement. Les perturbations hormonales vont rendre plus fragile l’équilibre glycémique. On observe une diminution de la sensibilité à l’insuline d’environ 18% entre le stade T1 et T3 de Tanner chez les filles et de 22% entre le stade T1 et T3 chez les garçons avec pour les 2 sexes un quasi retour à l’insulino- sensibilité pré pubertaire au stade T5 62. De plus il s’opère une prise de masse corporelle avec une redistribution des tissus adipeux (effet majoré par l’utilisation d’insuline), parallèlement à une modification des apports alimentaires, ce qui vient influencer le métabolisme glucidique.

Chez les jeunes filles, la sensibilité à l’insuline varie en fonction du cycle menstruel, de plus la pilule contraceptive peut provoquer une augmentation de la glycémie moyenne.

Cet âge est également le début des expérimentations en ce qui concerne l’alcool, le tabac et les drogues qui peuvent avoir un effet direct pharmacodynamique sur l’équilibre glycémique ou indirecte par la diminution de la vigilance qu’elle engendre.

Psychologiquement l’acceptation de la maladie n’est pas toujours évidente pour l’adolescent. Il peut ressentir un sentiment de honte vis-à-vis de ses camardes, ou avoir l’impression d’être ‘anormal’ dans une période où l’estime de soi passe beaucoup par le regard des autres. Cela est d’autant plus difficile que la maladie peut s’avérer visible pour les personnes extérieures en raison de l’utilisation de dispositifs qu’il n’est pas toujours facile de dissimuler : les lecteurs cutanés ou les pompes à insuline, mais aussi par la fréquence des contrôles et des adaptations insuliniques qu’il impose. Certains patients peuvent décrire un sentiment d’injustice également lorsqu’ils se comparent aux autres jeunes de leur âge qui ne sont pas soumis aux mêmes contraintes.

Mais, de la même manière que dans une population adulte, on peut rencontrer différents comportements face à la maladie. Ceux-ci dépendent de différents facteurs : personnalité du jeune diabétique, tissu social et économique, entourage et notamment attitude des parents face au diabète de leur enfant. On observe toutes les variations possibles : refus de la maladie comme outil d’opposition à l’autorité ou au contraire volonté ferme de vouloir maitriser sa maladie comme preuve de maturité et d’indépendance. Un manque d’expérience et des représentations erronées de la maladie peuvent conduire à des réflexes et à un mode de gestion inadapté. Il est fréquent de se confronter également aux peurs excessives de faire des hypoglycémies63 ou au contraire une adaptation trop stricte du diabète en raison de la peur de présenter une complication du diabète ; ce qui peut aboutir à des hypoglycémies répétées. Ces inquiétudes peuvent représenter un danger pour la vie sociale de l’enfant qui pourrait se priver de sorties entre amis ou d’activités physique par peur de faire une hypoglycémie devant ses amis. Au contraire chez d’autres ; les nombreuses sollicitations extérieures, scolaires et sociales, peuvent interférer avec la vigilance que le patient devrait avoir vis-à-vis de sa maladie, c’est pourquoi on observe souvent des oublis de contrôles glycémiques pouvant aboutir à des hypo ou hyperglycémies.

De nombreux facteurs environnementaux vont également entrer en jeu à cette période avec l’accession à une certaine autonomie qui de facto permet une diversification des activités extérieurs, des déplacements avec l’obtention du permis de conduire, ou comme évoqué précédemment la confrontation à de nouvelles expériences que sont l’alcool et les drogues. Pour les soignants, et notamment pour les IDE scolaire il est parfois difficile de concevoir que le patient ne soit pas compliant à son traitement alors que celui-ci est efficace et nécessaire à sa survie. Ce manque de compliance est parfois vécu personnellement et comme une forme de ‘’trahison’’ par les soignants64. Mais il semble essentiel de ne pas perdre de vue la souffrance qui peut être vécu par l’adolescent face à sa maladie chronique, et savoir questionner son propre rôle dans l’acceptation de la maladie, et dans la création d’une relation de confiance avec le patient. Cela nécessite d’adapter sa pratique de façon spécifique et adapté à l’adolescence.