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3 1 CONTEXTE GEOLOGIQUE ₪ Lithologies et structures

L’Arc des granulites de Laponie

II. 3 1 CONTEXTE GEOLOGIQUE ₪ Lithologies et structures

La ceinture de granulites de Laponie et les régions adjacentes sont constituées de 5 unités différentes, du SW au NE (Figures II.3.1 et II.3.2):

(1) Le craton du Sud Laponie (qui correspond à la partie Nord du domaine Karélien) est composé de roches archéennes d’âge inférieur à 3.1 Ga (Kröner et al., 1981) qui sont recouvertes par des ceintures de roches vertes et des métasédiments et intrudées par des granites d’âge paléoprotérozoïque (Huhma, 1986). Le socle archéen est caractérisé par des structures en dômes et les métasédiments qui reposent sur ce socle correspondent à des dépôts mis en place dans un bassin continental (Silvenennoinen, 1985).

(2) La ceinture de Karasjok correspond à une ceinture de degré intermédiaire contenant des sédiments clastiques ainsi que des laves komatiitiques. Les métasédiments et les métavolcanites sont caractérisés par des conditions PT de l’ordre de 500-650 °C et 2-5 kbar (Väänänen, 1982). Cette ceinture montre une zonation métamorphique depuis un faible degré au centre jusqu’à un degré moyen vers ses limites Sud et Nord (Krill, 1985) et est structurée par différentes phases de plissement successives (Gaal et al., 1978). L'âge du dépôt des protholites de cette ceinture est paléoprotérozoïque et a été estimé autour de 2.11 Ga (Krill et

al., 1985).

La limite principale entre la ceinture de Karasjok et le domaine Karélien, vers l'Ouest, est attribuée à un chevauchement à vergence ouest (Krill, 1985 ; Figure II.3.1).

De plus, vers le sud, le domaine de Karasjok-Kittilä est séparé du craton du Sud Laponie par une zone tectonique majeure (la « Sirkka Line ») correspondant à une zone de chevauchements subparallèles d’orientation générale NW-SE à faible pendage vers le Sud (≈ 25 à 40° SW ; e.g. Lehtonen et al., 1985 ; Luosto et al., 1989).

(3) La ceinture de Tana (Tanaelv Belt, TB) est composée d’amphibolites partiellement migmatisées ainsi que de roches acides métamorphisées interprétées comme étant des roches volcaniques appartenant à une série bimodale (Barbey et al., 1984 ; Bernard Griffiths et al.,

1984 ; Krill, 1985). Cette ceinture contient plusieurs « corps » d’anorthosites, de gabbros et

de roches ultramafiques (Mikkola et Sahama, 1936 ; Hörmann et al., 1980 ; Barbey et al.,

1980 ; Moreau, 1981). Elle est caractérisée par un métamorphisme de haut degré et montre

cependant une zonation métamorphique décroissante vers le SW, avec des températures allant de 800 à 730 °C pour une pression relativement constante autour de 7 kbar (Raith et Raase,

1986). La ceinture de Tana est une zone étroite bordant la partie ouest de la ceinture des

granulites qui présente des pendages faibles vers le NE. Les roches de cette ceinture sont intensément cisaillées et déformées (Mikkola, 1941).

Le contact entre la ceinture de Karasjok et la ceinture de Tana est d’origine tectonique et correspondrait à une discordance majeure (Gaal et al., 1989).

(4) La ceinture des granulites de Laponie (LGB) correspond à une séquence métasédimentaire paléoprotérozoïque de haut degré métamorphique, constituée de gneiss à Grt (± Sil) intercalés avec des norites et des enderbites (roches ignées métamorphisées à Opx- Pl) (Eskola, 1952; Meriläinen, 1976; Hörmann et al., 1980; Barbey et al., 1980; Raith et al.,

1982 ; Barbey et Raith, 1990). Il s’agit d’une ceinture granulitique caractérisée par des

températures proches de 800°C et des pressions de 6.5 - 7 kbar (Barbey et al., 1984; Raith et

Raase, 1986). Cette ceinture peut être divisée en deux « domaines » majeurs que sont : (a) le

domaine W, SW et S, correspondant à la partie inférieure de la ceinture, formant une zone large constituée de granulites très déformées et cisaillées ductilement. Ce domaine est caractérisé par une foliation mylonitique à faible pendage vers le NE ainsi que par des linéations d’étirement plongeant vers le NE, indiquant alors un sens de chevauchement vers le SW (Kranck, 1936 ; Sahama, 1936 ; Von Gaertner, 1962 ; Barbey et al., 1977; Marker,

1985). (b) le domaine NE, correspondant à la partie supérieure de la ceinture est constitué de

granulites anatectiques à cordiérite. Ces roches ont une apparence massive et la migmatisation est associée localement au développement de bandes de cisaillement extensives (à pendage vers l’E) syn-granulitiques (Barbey et al., 1977 ; Barbey, 1986). Dans ce domaine, le pendage de la foliation se redresse progressivement près de la bordure NE de la ceinture jusqu’à devenir sub-vertical (voire même pouvant localement devenir SW ; e.g. Lahtinen, 1972 ; Gaal

et al., 1989).

Le contact entre la ceinture de Tana et la ceinture des granulites, qui sont déformées selon la même cinématique, est un chevauchement à vergence SW.

(5) Le craton d’Inari correspond à des orthogneiss migmatiques entourés d’étroites ceintures de roches supracrustales (Kesola, 1988). Ces roches d’âge archéen sont intensément remaniées et intrudées par de nombreux granites, granodiorites, gabbros et diorites d’âge paléoprotérozoïque (Merilaïnen, 1976). Les roches de ce craton sont caractérisées par un métamorphisme de moyen à haut grade (700 °C – 7 kbars pour les supracrustales ; Hörmann

et Raase, non publié), et présentent des températures décroissantes depuis 750°C, à la limite

avec la ceinture de granulites, jusqu’à 700°C vers le centre du craton (Hörmann et al., 1980). La déformation caractérisant ce craton est polyphasée.

La limite entre la ceinture de granulites et le craton d’Inari n’est pas franche mais est caractérisée par un mélange tectonique de roches provenant des deux domaines (Gaal et al.,

1989).

Figure II.3.1 : Carte géologique de la ceinture de granulite (LGB) et des zones adjacentes (modifiée d’après Barbey et Raith, 1990). La position de la coupe représentée en figure II.3.2 est indiquée par le trait rouge. Ka et Ki représentent les ceintures de Karasjok et Kittilä et SL est « la Sirkka Line ». L’encart (à droite) représente les principales unités litho-tectoniques de la partie Nord du domaine Baltique (d’après Berthelsen et Marker, 1985-1986) : (1) unité de Mursmank, (2) unité de Sydvaranger et noyau de Kola, (3) séries de Pechenga, (4) craton d’Inari, (5) ceinture de granulites de Laponie, (6) ceinture de Tana, (7) craton du sud Laponie.

₪ Modèles géodynamiques

La caractéristique principale de la partie Nord du domaine Baltique est l’existence de ceintures de métasédiments et métavolcanites d’âge paléoprotérozoïque qui ont été soumises à un régime compressif le long de zones de failles majeures. Ceci suggère la fermeture de bassins paléoprotérozoïques situés sur (ou entre) des segments de croûte continentale archéenne. Plusieurs modèles ont été proposés pour expliquer l’évolution géodynamique de cette partie Nord du domaine Baltique (Gaal et al., 1989) (Figure II.3.3) :

● Barbey et al. (1984) et Barbey et Raith (1990) proposent que, lors d’un stade de rifting (2.2-

2.0 Ga), une croûte océanique se soit formée entre la province Karélienne au Sud et un domaine continental, au Nord, comprenant le craton d’Inari. Dans ce modèle, les protolithes de la LGB correspondraient à des turbidites associées à des intercalations volcaniques. Puis, lors d’une phase en compression, la croûte océanique aurait été subductée vers le NE et des roches calco-alcalines auraient intrudé le craton d’Inari. Lors de la collision entre les deux cratons, la LGB enregistre un métamorphisme de haut degré et chevauche la province Karélienne. Parallèlement, la LGB est elle-même chevauchée par le craton d’Inari (Figure

II.3.3a).

● Krill (1985) et Krill et al. (1985) envisagent la formation d’un bassin océanique, sur le site

de la ceinture de Karasjok, vers 2.1 Ga. Les dépôts des protholites de la LGB se mettent alors en place sur une des marges alors que les volcanites de la ceinture de Karasjok sont émises sur l’axe de la dorsale, pendant l’ouverture du bassin océanique (2.0-1.9 Ga). Une compression conduit à la subduction de la croûte océanique vers le NE sous le craton du Nord, ce qui induit la production de magmas calco-alcalins. Puis la collision continentale permet la juxtaposition des différentes unités que sont la ceinture de Karasjok, la ceinture de Tana et la ceinture des granulites, par le jeu de chevauchements à vergence SW (Figure

II.3.3b).

Les modèles proposés par Barbey et al. (1984) et par Krill et al. (1985) sont assez complémentaires même s'ils diffèrent sur l’interprétation de l’âge de la ceinture de Karasjok. Les premiers considèrent que cette ceinture est directement associée à la province Karélienne (avec un âge supérieur à 2.1 Ga) tandis que les seconds lient génétiquement le dépôt de cette

2.1 Ga. Des données géochronologiques obtenues sur les roches de cette ceinture montrent que la seconde hypothèse est la plus plausible (Krill et al., 1985).

● Marker (1985) et Berthelsen et Marker (1986) envisagent la formation d’un océan à l’Est

du craton d’Inari entre 2.4 et 2.0 Ga (dont la marque de la suture correspondrait à la ceinture de Pechenga). Une phase compressive débutant vers 2.0 Ga initie la fermeture de cet océan et provoque une subduction de la croûte océanique vers le SW. Cette subduction génère un arc insulaire très à l'Est de la LGB et l’intrusion de magmas calco-alcalins dans le craton d’Inari. Les protolithes de la LBG se déposent dans un bassin arrière-arc (au SW de la subduction) et se métamorphisent. Lors de la collision continentale (1.9 Ga), la LGB ainsi que la ceinture de Tana sont chevauchées sur la province Karélienne (Figure II.3.3c).

Figure II.3.3 : Modèles géodynamiques de l’évolution de la partie Nord du domaine Baltique (modifié d’après Gaal et al., 1989). LGB : Lapland Granulite Belt ; PPPB : Polmak-Pasvik-Pechenga Belt ; KP : Karelian Province ; KKGB : Karasjok-Kittilä Greenstone Belt ; IT : Inari Terrain ; ST : Sorvaranger Terrain ; SG : Svecofennian geosyncline