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CHAPITRE IV L’ARC DES MARIANNES

IV.1. Contexte Géologique

Ce quatrième chapitre se focalise sur l’arc des Mariannes ; dans un premier temps, une présentation du contexte général de l’arc sera faite ainsi qu’une description détaillée de chaque type d’échantillons étudiés et leurs résultats. Puis une discussion basée sur les résultats isotopiques en Ce et Nd permettra d’alimenter les questions de recyclage sédimentaire et de processus à la source des laves dans cette zone et plus particulièrement l’origine de l’anomalie en Ce.



IV.1. Contexte Géologique



IV.1.1. Introduction



Le pourtour de l’océan Pacifique est le lieu où sont réparties les 4/5 des zones de subduction actuelles (Lallemand, 1999). Au niveau des limites de plaque, on remarque une forte concentration des séismes due à la convergence des plaques et au retour dans l’asthénosphère de la plaque océanique plongeante. Cette zone de forte activité sismique et volcanique est appelée la « ceinture de feu » du Pacifique (Figure IV-1). La longueur cumulée de frontière convergente dans la ceinture de feu représente 42500 km. Le reste des zones de subductions du globe représente 12500 km. Elles sont réparties entre la ride Méditerranéenne, la ride Caraïbe et la subduction de la plaque Indo-Australienne sous les îles de la Sonde (Lallemand, 1999).

Figure IV-1 : Carte du monde avec la localisation des volcans, de la ceinture de feu et de l’arc IBM. Source du fond de carte : http://www.brianmiller.co.nz/styled-5/

      

 

Au nord-Est de l’Océan Pacifique a lieu la subduction de la plaque océanique Pacifique sous la plaque Philippine, ce qui a pour conséquence de créer une zone de subduction longue de 2800 km : l’arc Izu-Bonin-Mariannes (IBM dans la suite du manuscrit). L’arc s’étend depuis Tokyo (Japon) au nord jusqu’à l’île de Guam au sud (Figure IV-2). La croûte océanique subductée dans cette région est la plus vieille croûte océanique terrestre. Elle est datée du Jurassique (∼170 Ma).

L’arc IBM actuel est divisé en trois segments : l’arc Izu au nord qui est délimité par la ligne tectonique Sofugan au sud (Figure IV-2), puis le segment Bonin au centre et le segment Mariannes au sud. L’arc des Mariannes est délimité au nord par le nord du bassin d’arrière arc des Mariannes (Mariana Trough), et par l’île de Guam au sud, qui annonce aussi la fin de l’arc IBM.

Figure IV.2 : Carte schématique de l’arc Izu-Bonin-Marianne modifiée d’après Stern et al. (2003). * * * * * 

 

 



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IV.1.2. Chronologie du système IBM



L’arc IBM s’étend depuis la ride Palau-Kyushu jusqu'à la fosse IBM (Figure IV-2). Les composants les plus anciens de l’arc sont préservés à l’ouest (Stern et al., 2003). Aux alentours de 52 Ma (début de l’Eocène), la subduction spontanée de la plaque océanique Pacifique commence, associée à une extension du plancher océanique formant la croûte basaltique de l’arc (Arculus et al., 2015). L’activité éruptive dans ce contexte forme des boninites, des tholéiites et des rhyodacites (à faible taux de K) au niveau de l’avant arc (Hickey et Frey, 1982; Stern et al., 1991). Un premier arc volcanique se forme sur ce plancher basaltique à 200 km de la fosse, ce qui permet à l’avant arc de ne plus être le lieu de la principale production magmatique (Figure IV-3.B). Puis à partir de 30 Ma, la croûte commence à s’étirer et créer un rift formant par la suite le bassin de Parece-Vela. L’extension continue en se propageant vers le nord formant ainsi le bassin de Shishoku (Figure IV-2). Les mouvements d’extension continuent jusqu'il y a 15 Ma environ, ou les deux bassins d’arrière arc se rejoignent (Figure IV-2 et Figure IV-3.C). L’activité volcanique de l’arc reprend après l’épisode de rift de la croûte océanique formant ainsi un nouveau front volcanique. L’ancien front volcanique correspond aujourd’hui à la ride Palau Kyushu (Figure IV-2). Vers 15 Ma, le nord de l’arc IBM entre en collision avec Honshu (Japon) ce qui a pour conséquence de créer la zone de subduction actuelle Nankaï. Peu après 10 Ma, c’est le début de la formation d’un rift au niveau de l’arrière arc des Mariannes qui se poursuit par une extension du plancher océanique dont le début est datée aux alentours de 5 Ma (Yamazaki et al., 2003). Il forme le « Mariana Trough » actuel (Figure IV-3-E). Par conséquent, le début de l’activité volcanique de l’arc des Mariannes actuel date d’il y a moins de 3-4 Ma.

Du fait des différents épisodes d’extension, les fronts volcaniques qui prennent place au dessus de la zone de fusion partielle du manteau, sont retirés au fur et à mesure de cette zone, et forment les rides, témoins des arcs volcaniques passés.

L’arc IBM est soumis à de fortes contraintes d’extension étant donné les directions de déplacement des plaques Philippine et Pacifique. En effet la plaque Philippine se déplace en direction nord-ouest à une vitesse de 40 mm/an par rapport à Hokkaido (Japon) et la vitesse augmente en allant vers le sud (Seno et al., 1993). La plaque Philippine converge vers la plaque Eurasie à une vitesse plus rapide que le déplacement de la plaque Pacifique en direction nord-ouest (par rapport au sud IBM). La figure IV-4 résume les directions et les vitesses de déplacement de ces plaques.

 



Figure IV.3 : Carte simplifiée de l’histoire de l’arc Izu-Bonin-Marianne modifiée d’après Stern et al. (2003)

L’arc IBM est donc soumis à une forte extension compte tenu de la convergence de la plaque Philippine vers la plaque Eurasienne. De plus la plaque plongeante n’effectue pas de retour (« roll-back ») vers l’Océan Pacifique, elle plonge verticalement ce qui diminue les effets de mouvements latéraux. Tout ceci explique l’ouverture des différents bassins d’arrière arc dans ce système ainsi que la forme courbée actuelle des Mariannes (Stern et al., 2003).

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Figure IV-4 : Carte illustrant les vitesses relatives de déplacement aux contours des plaques Philippine (PH) et Caroline (CR). Les barres indiquent les azimuts des déplacements des plaques et les nombres la vitesse en mm/an. Le long de la frontière entre EU-PH et NA-PH, c’est le mouvement de PH par rapport à EU ou NA. A la frontière PA-PH ou PA-CR c’est le mouvement de PA par rapport à PH et CR respectivement. Carte extraite de (Seno et al., 1993).

IV.1.3. L’arc des Mariannes



L’arc des Mariannes, qui représente donc le segment sud de l’arc IBM, est compris entre 24°N et 12.3°N (Martinez et al., 2000). L’arc est composé de différentes zones bien définies :

– L’avant arc : c’est la partie du système qui se trouve entre la fosse et le front de l’arc. Cette zone est large d’environ 200 km (Stern et al., 2003). Aux Mariannes, aucun prisme d’accrétion n’est présent dans l’avant arc, ce qui signifie que la totalité des sédiments déposés sur la plaque Pacifique sont subduits. L’absence de sédiments accrétés dans l’avant arc permet d’étudier l’initiation de la subduction et de comprendre les phénomènes associés. La présence de volcans de boues de serpentinite et d’affleurements de serpentinite au niveau de la fosse, permet d’étudier la modification du manteau sous l’avant arc par la déshydration de la croûte dès son entrée en subduction (Mottl et al., 2003; Savov et al., 2003; Savov et al., 2005; Fryer et al., 2006; Savov et al., 2006; Savov et al., 2007).

– Le front magmatique : il représente la zone surélevée après l’avant arc et concentre la majorité de l’activité magmatique de l’arc. On y trouve une activité volcanique sous-marine et aérienne (Baker et al., 2008). Il est composé d’îles dans la partie centrale de l’arc, allant d’Anatahan au sud à Uracas au nord (Figure-IV-5). L’activité volcanique sous-marine continue dans la partie nord et sud de l’arc (Bloomer et al., 1989). On dénombre une

         

 

quarantaine de volcans actifs au total (Pearce et al., 2005). Les laves sont majoritairement de nature basaltique à andésite-basaltique. Les proportions de minéraux dans les laves sont assez homogènes (30-50%) avec des phénocristaux de plagioclase et de clinopyroxène principalement ainsi que des olivines et des minéraux secondaires comme la titanomagnétite, l’hématites, l’hornblende , l’apatite et quelques biotites (Meijer et Reagan, 1981; Woodhead, 1989b; Elliott et al., 1997).

Figure IV-5 : Carte de l’arc des Mariannes montrant les différentes îles aériennes de la partie centrale de l’arc ainsi que les monts sous-marins (Hiyoshi et Kasuga seamounts) du nord de l’arc et de la plaque Pacifique (Magellan seamount). Carte extraite de (Tollstrup et Gill, 2005).

– Le Mariana Trough: le segment à l’est de l’arc volcanique des Mariannes est caractérisé par un bassin d’arrière arc actif qui est appelé le Mariana Trough. Il est subdivisé en 3 parties : le SMT (pour Southern Mariana Trough) délimité entre 12.5°N et 17.5°N, ou l’extrémité sud du SMT rejoint et croise le sud de l’arc volcanique ; la partie centrale du bassin (CMT : Central Mariana Trough), qui commence à 17.6°N et dont la fin est fixée à 21°N par Pearce et al. (2005), bien que la limite de cette frontière nord reste débattue (Martinez et al., 2000; Yamazaki et al., 2003) ; la partie nord (NMT pour Northern Mariana Trough) délimitée entre 21°N et 24°N (Pearce et al., 2005). Le bassin d’arrière arc converge vers l’arc volcanique au nord et au sud avec une largeur maximum d’environ 100 km au centre (Pearce et al., 2005). La zone centrale du Mariana Trough est en extension d’environ 1.5 cm/an alors que la partie nord en est encore au stade de rift. L’extension du plancher océanique a commencé un peu avant 5 Ma (Yamazaki et al., 2003). L’activité magmatique dans le bassin d’arrière arc est causée par la décompression adiabatique du manteau supérieur due à l’ouverture du plancher

  

océanique. Les basaltes sont produits de façon similaire aux MORB dans les dorsales océaniques. Les compositions de ces basaltes d’arrière arc sont comprises entre des compositions type-MORB et des compositions type-arc, en fonction de la proportion de matériel provenant de la croûte subductée introduite dans le manteau appauvri de l’arrière arc (Taylor et Martinez, 2003).