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6.1 Quelques précisions

J’ai fait le choix de retranscrire mot pour mot les entretiens menés ; il apparaît alors parfois qu’une phrase ne semble pas très claire ou construite de manière peu juste, grammaticalement parlant. Mais dans ce type de discours direct, les doutes, les hésitations ou les contradictions sont parfois fréquentes. J’avais le désir de respecter scrupuleusement les dires des personnes qui se racontaient afin que la suite de mes démarches s’appuie réellement sur ce que les individus avaient pu me confier.

Les différents entretiens se trouvent donc en annexe de mon travail.

En gras, apparaissent mes questions ou mes interventions et avant chaque réponse de l’interviewé, son prénom (fictif) y figure. J’ai fait le choix de ne pas noter les véritables prénoms afin de respecter tout d’abord leur intimité et parce que deux personnes portaient le même prénom, ce qui n’aurait pas été clair pour l’analyse.

Durant la partie analytique, je fais donc référence aux cinq entretiens ainsi qu’à mon Autobiographie interculturelle. Des mots ont parfois été changés ou enlevés afin que la phrase ait du sens dans le contexte de l’analyse ; c’est pourquoi, j’ai utilisé le symbole suivant pour les modifications entreprises : […].

6.2 Organisation de la partie analytique

C’est en relisant plusieurs fois les entretiens effectués que j’ai petit à petit su de quelle manière construire l’analyse. Je me suis rendu compte des thèmes parfois largement développés par les personnes interviewées et qui fournissaient suffisamment d’informations significatives pour pouvoir y prêter plus d’attention.

En parallèle, je me repenchais sur les différentes notes théoriques récoltées lors d’une précédente phase et soulignais ceux pouvant éclairer les propos des jeunes filles et femmes interrogées. Ainsi, les thématiques ayant servi de fil rouge lors des entretiens, rejouaient le

47 même rôle pour la partie analytique de mon travail. Elles ont été comme un guide pour réunir sous différents sous-thèmes, les paroles retenues des interviewés.

Lors de la construction analytique, il a été plus facile pour moi de d’abord réunir les éléments des différents interviews pouvant se regrouper sous une même catégorie, d’ensuite créer plusieurs textes et de finalement nommer ces différentes parties. Les informations données par les interviewés n’ont donc pas été toutes reprises pour l’analyse. Je n’ai retenu que les plus importantes et conséquentes.

Il était alors clair pour moi de commencer par le Contexte scolaire suisse afin de poser une base ou un point de départ pouvant aider à comprendre les diverses situations de ces personnes métisses. Le sous-thème suivant, Se sentir appartenir à…, est clairement lié au premier, dans le sens où il fait partie de ces mouvements observés au sein d’un établissement scolaire, et ce dès le plus jeune âge ; c’est pour cette raison que je l’ai placé à ce moment-là de l’analyse.

Ensuite, je m’éloigne du contexte scolaire et aborde de manière large les liens que les personnes ont tissés avec leur culture africaine. Deux sous-thèmes composent cette thématique-là : Attaches africaines et Transhumer entre ses deux cultures. Dans ce dernier sous-thème, je mets surtout en avant les va-et-vient fréquents, dans la plupart des cas, vers sa culture africaine et la difficulté, parfois, de l’accepter.

Les deux sous-thèmes suivants sont également liés car ils reprennent à eux deux la dynamique des personnes ″biculturées″ (Etre de deux cultures – Etre entre deux cultures) et leur situation d’individu métis dans leurs pays respectifs : Etre métis en Suisse – Etre métis en Afrique.

Quant au dernier sous-thème développé, je n’y avais pas du tout pensé lors de la préparation de mes entretiens. C’est lors de discussions avec les personnes interviewées que j’ai décidé qu’il ferait partie de mon analyse. Je le considère non seulement comme une continuation du sous-thème précédent, mais également comme une note conclusive positive ; je l’ai donc nommé L’internationalité d’un individu métis, car il ne reste pas focalisé sur deux pays mais il s’étend sur une échelle plus grande.

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6.3 Une démarche compréhensive

Avant de passer à l’analyse, j’aimerais clarifier la démarche que j’ai choisie d’utiliser pour la partie analytique.

Au début de ma recherche, j’employais souvent le mot comparaison pour désigner mon travail ; mais dorénavant, je ne désire plus faire de comparaisons en prenant telle ou telle variable. Je m’intéresse plus à une démarche compréhensive afin de comprendre, comme son nom l’indique, les processus marquant chez des filles, jeunes femmes ou femmes métisses. (Journal de mémoire, 13 novembre 2008, p. 2)

Afin d’examiner mon objet d’étude, l’approche de la recherche s’inscrit dans une démarche compréhensive aux méthodes dites qualitatives. Mon travail de recherche correspond à un raisonnement idiographique, comme l’explicite Groulx (1999) en définissant trois styles distincts (raisonnement idiographique, raisonnement formaliste, raisonnement post-moderne) autour de la recherche qualitative.

A travers ce raisonnement idiographique, le chercheur représente à la fois l’outil de recueil de données et à la fois le facteur déterminant de l’analyse ; il détermine ainsi les règles de la méthode. Afin que les faits qu’il communique paraissent plausibles et l’analyse qui en découle, crédible, le chercheur doit respecter trois conditions. La première correspond à la retranscription précise et honnête des dires des acteurs. Groulx dit à ce propos que « la crédibilité de la recherche repose sur la force de la description ou du compte-rendu où le lecteur est amené à voir et à entendre ce que le chercheur a vu et entendu » (Groulx, 1999, cité par Charmillot & Dayer, 2007, p. 128). Lors de ses démarches, le chercheur est amené à s’introduire suffisamment dans le terrain afin de comprendre les différentes « significations que les acteurs attachent à leur action » (Groulx, cité par Charmillot & Dayer, p. 128). Mais dans un même temps, il doit pouvoir garder une distance avec son objet d’étude pour, par la suite, mieux analyser les faits observés ; il s’agit alors de la deuxième condition. Comme troisième et dernière condition, le chercheur analyse ses données en effectuant des interprétations et des comparaisons, en s’aidant et en s’appuyant sur son matériel et sur un cadre théorique préalablement établi.

Cette approche compréhensive implique également « quatre pôles interdépendants caractéristiques de toute démarche de recherche » (Charmillot & Dayer, 2007, p. 131) mettant

49 en lien les dimensions épistémologique et méthodologique. Les quatre pôles sont les suivants : épistémologique, théorique, morphologique et technique où chaque pôle est lié aux trois autres. Charmillot et Dayer associent le terme qualitatif (ou quantitatif) au pôle morphologique (ou technique) qui représente donc la forme que peut prendre une recherche.

Le pôle technique est lié à la méthode présente comme mise en pratique du dispositif choisi.

Le pôle théorique représente un guide aidant à l’élaboration « des hypothèses ainsi que la construction des concepts et détermine le mouvement de la conceptualisation » (Charmillot &

Dayer, 2007, p. 131). Pour terminer, le pôle épistémologique – sur lequel je vais m’attarder plus longuement car il représente un élément essentiel pour toute démarche de recherche – s’associe au champ de la compréhension.

La personne humaine est considérée comme un acteur avec ses propres significations qu’il associe à ses actions. L’analyse du chercheur est donc centrée sur la logique des conduites tant au niveau individuel que collectif (dialectique individuel/collectif). La logique individuelle a été citée précédemment ; pour la logique collective, il s’agit de l’activité sociale en évoquant les questions suivantes : « quelle trame les actions et réactions forment-elles ? Quel est le réseau de significations qui apparaît sur la base du faisceau croisé des actions singulières ? » (Charmillot & Dayer, 2007, p. 132)

Une définition de Schurmans (2003) sur la compréhension complète les propos évoqués : Si les déterminismes existent – biologiques, environnementaux, historiques, culturels, sociaux – ils ne suffisent pas à la saisie des phénomènes sociohumains. Car ils ne permettent pas d’aborder le travail constant de production de sens qui caractérise notre humanité. L’approche compréhensive se focalisera donc sur le sens : d'une part, les êtres humains réagissent par rapport aux déterminismes qui pèsent sur eux ; d'autre part, ils sont les propres créateurs d’une partie de ces déterminismes. (Schurmans, 2003, cité par Charmillot & Dayer, 2007, p. 132)

A travers l’analyse qui va suivre, j’ai le souhait d’examiner les parcours de vie de jeunes filles ou femmes métisses afin de connaître et essayer de comprendre leur position par rapport à leur situation d’être métis. Cette analyse permettrait ainsi de montrer la complexité au sein d’un même individu et les différentes conséquences engendrées par le fait d’être de deux cultures différentes. L’exercice n’est pas aisé car il est important d’ « éviter autant les dérives ethnocentristes que les dérives inverses, à savoir se fondre dans le point de vue des acteurs qu’on cherche à comprendre » (Charmillot et Dayer, 2007, p. 136).

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