• Aucun résultat trouvé

Construction et ajustement de la SED

11.3.1 Les données utilisées

Pour construire la SED de GX 301-2 du visible à la radio, nous avons ajouté aux flux extraits des données PACS, différentes données d’archive.

Les flux visibles, en bande B (445 nm) et V (551 nm) sont issus du catalogue Tycho-2 (Høg et al., 2000). Les flux J (1.235 µm), H (1.662 µm) et Ks(2.159 µm) sont issus du relevé 2MASS (voir section 4.2.5 de

l’introduction).

Les flux à 3.6, 4.5, 5.8 et 8.0 µm proviennent du relevé GLIMPSE effectué avec l’instrument IRAC à bord du satellite Spitzer (voir section 4.2.6 de l’introduction). Notons que Kaplan et al. (2006) soulignent que les pixels centraux de la source sont saturés à 3.6 et 4.5 µm, et par conséquent, ré-évaluent les flux à ces deux longueurs d’onde. Nous utiliserons donc leurs valeurs qui semblent plus précises.

Par ailleurs, nous avons utilisé les flux à 12 et 22 µm obtenus par le satellite WISE (voir section 4.2.7 de l’introduction), ainsi que les flux à 8.28, 12.13 et 14.65 µm récoltés par le satellite MSX (Midcourse Space Experiment).

Enfin, le flux radio à 8.6 GHz provient de Pestalozzi et al. (2009). Les auteurs détectent la contrepartie de GX 301-2 dans les bandes radio à 4.8 et 8.6 GHz à différentes époques, correspondant à des états distincts de la source. Lorsque la source présente des sursauts en rayonnement X, l’indice spectral4 est négatif, ce

que Pestalozzi et al. 2009 attribuent à la possible détection d’une composante d’émission transitoire et non thermique (peut-être sous la forme d’un jet ou bien d’un choc provoqué dans le vent stellaire par l’étoile à neutrons). Juste après les sursauts d’émission X, l’indice spectral issu des observations en radio

11.3. Construction et ajustement de la SED 193 devient positif et émane probablement du vent stellaire sphérique. Nos observations Herschel/PACS ont été effectuées juste après un sursaut, si l’on se réfère à la courbe de lumière obtenue avec l’instrument Swift/BAT. À ce stade d’activité de la source, l’indice spectral observé par Pestalozzi et al. (2009) est positif et vaut +0.53+1.14

−0.07. Le flux à 8.6 GHz est de 0.72 ± 0.13 mJy. Nous utiliserons cette valeur dans

la construction de la SED.

11.3.2 Le modèle utilisé

La SED de GX 301-2, du domaine visible à l’infrarouge moyen a été ajustée par Kaplan et al. (2006) et par Moon et al. (2007) en utilisant un modèle de corps noir sphérique entourant le système binaire ajouté à l’émission de l’étoile hypergéante. Ce modèle permet d’expliquer l’excès infrarouge observé en invoquant la présence d’une composante de poussière sphérique chauffée à ∼ 740 K avec une extension spatiale de ∼ 9 R∗. Néanmoins, ce modèle paraît trop simpliste pour deux raisons principales. D’une

part parce qu’il fait intervenir une seconde composante de poussière, chauffée aux alentours de 170 K, et rarement observée dans les étoiles massives et évoluées telles que GX 301-2 (Moon et al., 2007), d’autre part parce qu’une telle géométrie de la distribution de poussière semble étonnante dans l’environnement d’une étoile (Lamers et al., 1998) de ce type.

Par ailleurs, Revnivtsev et al. (2003), Kaplan et al. (2006) et Moon et al. (2007) soutiennent, sur la base des observations à haute énergie et en infrarouge, que GX 301-2 a un comportement et une évolution similaire à IGR J16318-4848, source obscurcie détectée par INTEGRAL (voir section 9.2.4.2 du chapitre 9). Dans ces circonstances, nous avons utilisé dans cette étude, un modèle d’émission qui a été développé initialement pour étudier les composantes d’émission de IGR J16318-4848 (Chaty and Rahoui, 2012).

Il est basé sur différentes composantes d’émission décrites ci-après et positionnées dans le plan équato- rial de l’étoile compagnon, supergéante. Celui-ci est composé d’une part d’une cavité interne dans laquelle se situe du gaz ionisé, optiquement mince. D’autre part, d’un anneau (d’épaisseur Hrim) constitué de pous-

sière sublimée par le rayonnement UV de l’étoile, de température Trim, et responsable de l’excès de flux

en infrarouge proche. Et enfin, d’un disque de poussière chaude, de rayon interne Rin, de rayon externe

Routet de température T (R) dépendant du rayon R. Ce disque de poussière est lui responsable de l’excès

de flux en infrarouge moyen.

!"#$%

&'()% &#*%

Figure 11.3 – Représentation polaire des différentes composantes du modèle d’émission utilisé pour ajuster la

SED de GX 301-2 (ce schéma n’est pas à l’échelle). L’étoile est représentée en bleue, l’anneau en rouge et le disque en brun.

194 Chapitre 11. Herschel : une nouvelle fenêtre ouverte sur l’étude de GX 301-2 Ce modèle est alors résumé par l’équation :

Fν =! R∗ D∗ "2 × B(ν, T∗) 6 78 9 Photosphère stellaire + 2πHrimRin D2 ∗ cos(i)B(ν, Trim) 6 78 9 Émission de l’anneau + 2πcos(i) D2 ∗ : Rout Rin RB(ν, T (R))dR 6 78 9 Émission du disque (11.1)

avec T (R) = Tin(R/Rin)−q et B la fonction de Planck à la fréquence ν. T∗, R∗et D∗, correspondent

respectivement à la température, au rayon et la distance de l’étoile compagnon. i, Tin, Rout et q sont

respectivement l’inclinaison du disque, la température interne du disque au rayon Rin, le rayon externe

et l’indice de température respectivement. T et R sont les température et rayon à un point quelconque du disque.

Le modèle d’émission de la photosphère stellaire provient des modèles de Castelli and Kurucz (2004) pour une étoile supergéante de type spectral B0I, avec une température T∗ = 19 000 K et une gravité de

surface, log(g)=2.5, correspondant aux valeurs déterminées par Kaper et al. (2006).

Le flux total est par ailleurs modulé par une loi d’extinction construite à partir des lois de Cardelli et al. (1989) pour le visible, Indebetouw et al. (2005) entre 1.25 et 8 µm, Lutz et al. (1996) entre 8 et 24 µm et Moneti et al. (2001) au-delà de 24 µm.

11.3.3 Ajustement de la SED

L’ajustement des données au modèle a été réalisé par étapes.

Dans un premier temps, nous avons déterminé la distance D∗et l’extinction E(B − V ) en ajustant le

modèle d’émission de la photosphère aux flux dans les bandes B, V et J (les flux à plus grande longueur d’onde n’ont pas été pris en compte puisque l’excès infrarouge contribue fortement à l’émission à partir de la bande H). Le rayon stellaire est fixé à R∗= 62 R⊙. Nous obtenons alors D∗ = 2750 pc et E(B − V )

= 1.96 (en supposant RV = E(B−V )AV = 3.1 selon Fitzpatrick 1999) pour un χ2min/dof = 1.12 avec dof

le nombre de degrés de liberté, égal à 2 ici (voir figure 11.4, en haut à gauche). Ces paramètres seront ensuite fixés dans les autres étapes de l’ajustement.

Dans un second temps, nous avons tenté d’ajuster l’excès de flux infrarouge, mis en évidence de l’infrarouge proche (bande H) à l’infrarouge lointain (100 µm), par une composante de poussière sphé- rique, modélisée par une émission de corps noir analogue aux modèles utilisés dans la partie III (voir aussi Kaplan et al. 2006 et Rahoui et al. 2008). Les paramètres libres correspondent à la température

de la poussière Td et au rayon de cette composante Rd. Ce meilleur ajustement est obtenu pour un

χ2

min/dof = 10.62 (avec 14 degrés de liberté). En outre, nous obtenons Td = 520 ± 113 K et Rd = 982 ±

255 R⊙. Cet ajustement ne semble toutefois pas satisfaisant. En particulier, les données PACS sont très

mal intégrées à l’émission totale issue de ce modèle (voir figure 11.4, en haut à droite).

Dans un troisième temps, nous avons ajusté la SED (jusqu’à 100 µm seulement) à l’aide du modèle défini par l’équation 11.1 (voir figure 11.4, en bas à gauche). Les paramètres de la composante d’émission de la photosphère stellaire sont fixés. La température de l’anneau est fixée à Trim= 4000 K (en cohérence

avec la valeur déterminée par Chaty and Rahoui 2012). De même, nous fixons la largeur de l’anneau, Hrim, à 15 R⊙ et nous considérons le cas d’une inclinaison du disque i=60◦ (d’après le résultat obtenu

par Kaper et al. 2006). Enfin, l’indice de température du disque, q, est pris égal à 0.75, ce qui correspond à un disque visqueux (Shakura and Sunyaev, 1973; Chaty and Rahoui, 2012). Dans ce contexte, nous obtenons le rayon externe de l’anneau, Rin, égal à 352 ± 26 R⊙, la température de la région interne du

disque, Tin égale à 706 ± 87 K et une extension spatiale du disque de poussière Rout de 1898 ± 356 R⊙.

Cet ajustement est obtenu pour un χ2

min/dof = 2.50 (avec 13 degrés de liberté). Toutefois, il est difficile

d’ajuster correctement le flux à 100 µm avec ce modèle et il est également clair que le flux à 8.6 GHz (bien que non pris en compte dans la procédure d’ajustement), ne peut être expliqué grâce à ce modèle.