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3.2. Comment sřappréhendent les communautés en psychologie existentielle ?

3.2.3. Connexion avec le transcendant

3.2.3.1. Expériences transcendantes pour questionner lřexistence

« Jřai rencontré un certain nombre de personnes qui, en visitant une communauté, ont senti intérieurement et avec une grande certitude que leur place était là, alors que rien dans la communauté elle-même ne les attirait : ni les membres, ni le mode de vie, ni le site ! Et pourtant, ils savaient que leur place était là ! » (Vanier, 1989/2012, p. 76)

Il y a parfois des événements qui arrivent dans la vie quřon ne sřexplique pas. Certains disent, « il y a eu ce jour-là un alignement des planètes » dřautres, parlent de hasard. Quoiquřil en soit tous évoquent une dimension, une force, non humaine qui les dépasse, les transcende, leur permettant de prendre du recul et de marquer un temps dřarrêt réflexif sur leur existence. Ce rapport subtil, délicat, invisible, mystérieux se manifeste en chacun souvent lorsquřil y a une interaction avec son environnement, sa communauté. En témoignent les astronautes lorsquřils visualisent la Terre depuis lřespace. Yaden et al. (2016) font état de ces expériences vécues où il est ressenti de très fortes émotions aussi bien positives que négatives envers lřhumanité, la planète. La modification de lřenvironnement affecte lřétat de conscience des astronautes, lřeffet est nommé « lřeffet de surplomb » ou encore, « lřeffet de vue dřensemble du monde » (The overwiew effect). Cette expérience vécue fait ressentir pleinement la notion dřunité. Deux sentiments sont évoqués à ce titre dans la littérature scientifique. Dřune part, le « sentiment cosmique » atteint lorsque lřâme se libère du corps, se dépouille de tout superflu et dépasse la perspective individuelle pour celle universelle. Cette conversion fait se distancier

122 lřêtre humain de tout ce qui nřest pas essentiel dans un rapport à soi ouvert à son environnement pour saisir le Tout (Georgiou, 2014, pp. 82-84). Cette reliance avec soi-même éclaire autrement la vie et le sens quřon lui donne. Dřautre part, le « sentiment océanique » assimilé au sentiment existentiel par Saarinen (2014, p. 2), est appréhendé sous deux formes distinctes temporelles. Lřun est passager et le sentiment ressenti relève dřune « dissolution des frontières psychologiques et sensorielles de soi », lřautre est pérenne avec un sentiment « dřunité, dřembrassement, dřimmanence et dřouverture ». Ressentis relativement fréquemment pour certains ou pour dřautres moins souvent, ils sont néanmoins les témoins vivants des émotions, de la vie affective.

3.2.3.2. La mort / La finitude

« Lřamour et la confiance de la communauté ont été les deux béquilles les plus solides qui lui ont permis de marcher sur le chemin programmé de la mort. » (Diat, 2019, p. 106)

« Je nřai jamais tant conscience de la présence de Dieu quřà lřinstant de la mort de mes frères. Il existe une rupture, un avant et un après. Nous sommes au point de jonction le plus parfait entre Dieu et les vivants. Je ne parle pas dřun sentiment, dřune perception sensible, mais dřune certitude de la foi. La mort est le temps de la réalisation des promesses de la foi. Dřun coup, la vie sřarrête. Dieu vient, et il repart avec notre frère. Sans Dieu, lřhomme est dans une parfaite absurdité. Si la fin sřarrête dans un trou de terre, la vie ne vaut pas la peine. » (Diat, 2019, p. 122)

Tout être humain vivant a cette unique certitude, celle de mourir un jour. Aussi, chacun est amené à appréhender cette certitude et à envisager la vie à partir de la mort. Que deviendrait lřêtre humain sřil se savait immortel ? Quelle saveur aurait sa vie ? Dans cette considération, lřhomme ne serait pas différent dřune chose, dřun objet. Ce qui rend lřunivers vivant, cřest la mort. En avoir conscience transforme la vie en élan, en don. Elle devient signifiante, unique, affectée dřune valeur qui repose dans la part la plus intime de chaque être. Il est intéressant dřobserver lřeffet qui se produit sur les individus lorsquřils évoquent leur propre mort. Si certains sont très mal à lřaise, distants, dřautres sont plus détendus, mais inévitablement elle suscite toujours beaucoup dřémoi. Heidegger (1927/1986) voyait deux façons dřexister. Une première façon basée sur un mode de vie ordinaire où lřindividu est davantage préoccupé par son environnement matériel, lřapparence des choses et une deuxième façon basée sur un mode

123 ontologique où lřindividu est conscient de son être, réceptif au changement personnel. Le passage de lřun à lřautre nécessite de ne pas dénier, fuir la mort dans la quotidienneté de la vie mais de porter une attention sur lřétant au travers dřexpériences limites dont celle de se confronter à sa mort. Lřexercice de lřéloge funèbre, repris du courant de la logothérapie (Frankl, 2009) fondé sur lřintention paradoxale est utilisé dans certaines pratiques de lřaccompagnement et notamment dans le dispositif dřaccompagnement au sens de la vie et sens du travail (SVST) (Bernaud et al., 2015 ; Bernaud et al., 2019). Cet exercice, proposé dès la première séance, invite les bénéficiaires à rédiger un court discours sur ce quřils aimeraient quřil soit dit dřeux lors de leurs funérailles. Lřintention est dřactiver une réflexion sur leurs buts ultimes dans leur vie, de se poser des questions fondamentalement existentielles où lřévocation de la finitude nřa dřautre finalité que de les interroger sur la trace quřils souhaitent laisser dans leur existence. Cette technique issue de la logothérapie est éprouvée et a fait largement ses preuves (Fabry, 2010). Également, parler de la mort en thérapie, des angoisses, des peurs quřelle génère, est comme le rappelle Yalom (2016, p. 151) souvent parent avec des pensées érotiques pour éviter la douleur de la séparation où la « petite mort orgasmique » permet au « « je » solitaire de disparaître dans le « nous » ».

3.2.4. Concepts existentiels transversaux

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