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Conduite de section constante : bifurcations et ondes stationnaires

ondes stationnaires

Nous nous plaçons d’abord dans le cas le plus simple d’une conduite de section constante, R(z) = 1. Dans un cadre local (paragraphe 5.3.1), le régime d’écoulement sous-critique est caractérisé par l’existence d’ondes de Kelvin axisymétriques station- naires d’amplitude infinitésimale (d’amplitude unité pour l’écoulement (W0, Ω0)) et de

nombre d’onde k0 croissant avec S0. Lorsque des frontières axiales sont prises en compte,

la longueur finie sélectionne des nombres d’ondes discrets de sorte que ces ondes sta- tionnaires apparaissent, pour des valeurs de S0 elles aussi discrètes, sous la forme de bi-

furcations par rapport à la solution d’écoulement "colonne" (ψ(r, z) = ψ0(r), K(r, z) =

K0(r)). Celle-ci reste solution stationnaire du problème (même si elle n’est pas forcément

stable pour tout S0), et perd son unicité lorsqu’une solution d’onde apparaît.

De façon formelle, la mise en évidence de ces bifurcations s’effectue en cherchant une solution de l’équation de Bragg-Hawthorne (5.6) sous la forme (ψ(r, z) = ψ0(r) +

εψ1(r, z), K(r, z) = K0(r) + εK1(r, z)), avec ε << 1. Par linéarisation de cette équation

on obtient alors ψ1zz r2 + 1 r µ ψ1r rr µ H00 0) − S02 e I00 0) r2 ¶ ψ1 = 0, (5.28)

où eI est défini par S2

0I = Ke 2/2. Les conditions aux limites associées à ce problème de

perturbation s’écrivent

ψ1(0, z) = ψ1(1, z) = 0, 0 ≤ z ≤ L,

ψ1(r, 0) = K1(r, 0) = ψ1z(r, L) = 0, 0 ≤ r ≤ 1

ψ1zz(r, 0) = 0 (problème I) ou ψ1z = 0 (problème II), 0 ≤ r ≤ 1.

     (5.29) Problème I : travaux de Wang et Rusak

Comme le signalent Wang et Rusak dans leur étude sur l’éclatement tourbillonnaire axisymétrique [124], les fonctions ψ1 solutions du problème I (5.28)-(5.29) doivent être

cherchées sous la forme

ψ1(r, z) = φ(r) sin

³πmz 2L

´

5.5 Conduite de section constante : bifurcations et ondes stationnaires 65 avec φ(0) = φ(1) = 0. De ce fait, les bifurcations sont obtenues pour des valeurs Sc,m telles que S2 c,m = SB2 + O µ m2 L2 ¶ (5.31) qui sont donc strictement croissantes en fonction de m.

Dans le cas d’un écoulement amont quelconque, Wang et Rusak se sont intéressés à la première bifurcation à partir de la solution colonne, obtenue pour m = 1. Ils ont montré que celle-ci est transcritique, c’est-à-dire que la branche de solution colonne perd sa stabilité à Sc,1 et est traversée par une branche de solutions dites "solitaires". Pour

S0 < Sc,1, ces solutions sont instables et correspondent à des écoulements accélérés de l’amont vers l’aval à la paroi et décélérés au centre. Pour S0 > Sc,1 elles sont stables et correspondent à des écoulements décélérés de l’amont vers l’aval à la paroi et accélérés au centre [122–124]. La terminologie de "solitaire" est empruntée à l’étude de Leibovich et Kribus [73], qui ont mis en évidence des structures d’onde solitaire autour de SBlorsque L tend vers l’infini. De fait, toutes les valeurs Sc,m tendent alors à se rapprocher de SB. Par référence à l’analyse de Benjamin [10], Wang et Rusak ont désigné la valeur Sc,1 "critical swirl in a pipe" dans la mesure où le décalage introduit par rapport à SB provient de la longueur finie de la conduite. Gallaire et Chomaz [38] ont expliqué récemment à l’aide d’une analyse spatiale que la cette déstabilisation de la solution colonne à Sc,1 est due à la capacité de l’écoulement à propager les perturbations à la fois vers l’aval et l’amont à la criticité, et aux propriétés surréfléchissantes des conditions aux limites responsables d’une injection d’énergie dans l’écoulement.

L’article de Wang et Rusak sur l’éclatement a un but plus général puisqu’il explore l’ensemble des solutions stationnaires du problème, qui correspond à l’ensemble des ex- trema d’une fonctionnelle d’énergie de structure assez complexe. En plus de la bifurcation transcritique à Sc,1, il montre que la branche de solutions solitaires pour S0 < Sc,1 donne naissance à une autre branche de solutions via une bifurcation noeud-col se produisant pour S0 = Se < Sc,1. Ces solutions sont dites éclatées car elles possèdent une zone de recirculation sur l’axe de la conduite. L’analyse généralise donc l’étude de Keller et

al. [62] qui avait mis en évidence l’existence d’une solution éclatée pour la valeur unique S0 = Se. Comme ces solutions éclatées constituent le minimum global de la fonctionnelle dès lors que S0 est supérieur à une valeur très légèrement plus grande que Se, Wang et Rusak interprètent l’apparition de l’éclatement tourbillonnaire axisymétrique dans une conduite de longueur finie par la déstabilisation à Sc,1 de la solution colonne (via la bifurcation transcritique), puis par l’évolution de l’écoulement vers le minimum global qui est l’écoulement éclaté. Rusak, Wang et Whiting [108] ont confirmé ce scénario en simulant les équations d’Euler axisymétriques instationnaires avec des conditions aux limites identiques, à l’aide d’un schéma numérique dissipatif. Le diagramme complet de bifurcations ainsi obtenu est représenté sur la figure 5.13.

Lorsque l’écoulement amont est de type rotation solide et advection uniforme, la recherche de branchement peut s’effectuer en cherchant une solution de la forme

ψ(r, z) = r2/2 + ψ

1(r, z) (5.32a)

K(r, z) = S0r2 + K1(r, z), (5.32b)

le formalisme linéaire de petite perturbation devenant inutile du fait de la linéarité du problème (équation (5.7)). L’équation à l’ordre 1 devient alors

ψ1,zz+ ψ1,rr−

ψ1,r

r + 4S

2

S w(0,L) colonne solitaire éclatée Sc,1 Se 0

Fig. 5.13:Solutions stationnaires d’écoulement tournant axisymétrique de fluide parfait incompressible dans une conduite de section constante, repérées par leur vitesse axiale w(0, L) au centre du plan de sortie. Les branches de solutions stables sont représentées en traits pleins, les branches instables en pointillés. D’après Wang et Rusak [124].

et en utilisant la décomposition (5.30) de Wang et Rusak on trouve l’équation sur φ

φrr− φr r + ³ 4S2 0 m2π2 4L2 ´ φ = 0. (5.34)

Les bifurcations successives à partir de la solution colonne sont donc ici obtenues pour les valeurs Sc,m telles que

Sc,m2 = SB2 +m

2π2

16L2. (5.35)

Il faut signaler que toutes ces bifurcations sont dégénérées. En effet, ici non seulement l’équation du problème est linéaire, mais aussi les conditions aux limites, ce qui n’est plus le cas dès qu’on considère une conduite de rayon variable, même avec des variations de faible amplitude. En conséquence, la solution colonne reste unique, sauf ponctuellement lorsque S0 = Sc,m. En pratique, les solutions bifurquées apparaissent sous forme de branches verticales sur un diagramme analogue à celui de la figure 5.13 où le nombre de swirl est pris comme abscisse, et pour une conduite de longueur L = 1, la première d’entre elles correspond à la valeur Sc,1 ≈ 2.071. Cette dégénérescence montre que la branche éclatée ne peut apparaître que pour S0 = Se= Sc,1, ce qui simplifie le problème de façon drastique.

Problème II

La perturbation à superposer à l’écoulement colonne respectant ψ1z(r, 0) = 0 à

l’amont doit être recherchée cette fois sous la forme

ψ1(r, z) = φ(r) µ 1 − cos³πmz L ´¶ , m∈N∗ (5.36)

5.6 Déploiement à Sc,1 sous l’effet de perturbations 67