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Les conditions à satisfaire pour une méthode de choix de fin de vie optimale en

CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE

2.3 Le processus de choix de fin de vie en phase de conception

2.3.4 Les conditions à satisfaire pour une méthode de choix de fin de vie optimale en

En analysant les méthodes existantes, nous avons pu faire la liste des avantages et inconvénients de chacune d’entre elle. Cela nous a amené à mettre en relief les éléments les plus importants que doit respecter toute méthode d’évaluation des scénarios de fin de vie en phase de conception, afin de répondre aux attentes du concepteur. Ces éléments sont donnés dans cette section.

2.3.4.1 La nécessité d’un outil simple et rapide

Aujourd’hui, les entreprises sont de plus en plus poussées à faire des produits durables pour plusieurs raisons que l’on a déjà énoncées précédemment: les règlementations, leur image, la demande du consommateur et l’augmentation du coût de la mise en décharge. Cependant d’après Luttropp & Lagerstedt (2006), même si tout le monde veut des produits durables, encore peu sont prêts à fournir des efforts pour cela, même si les coûts restent les mêmes.

En effet le développement d’un produit est très complexe : plusieurs équipes de marketing, de conception et de production doivent respecter la demande avec des limites de temps et de coût définies. Ils doivent la plupart du temps augmenter la qualité en diminuant le prix, tout en prenant en compte de très nombreux aspects : performance, matériaux, environnement, standards, sécurité, compétitivité, ergonomie, etc. La fonctionnalité et l’économie ont les parts les plus importantes (Figure 2.11) : si le consommateur n’est pas prêt a payer pour la fonction et que l’entreprise n’est pas capable de faire du profit, il n’y aura pas de marché quelque soient les mesures environnementales qui ont été adoptées.

L’équipe de développement du produit doit donc pour tenir compte du facteur environnemental, avoir à disposition des outils simples et rapides. À côté de cela, les méthodes proposées d’intégration de l’environnement à la conception nécessitant de construire des scenarios de fin de vie sans apporter d'aide ou utilisant des algorithmes génétiques sont une nouvelle variable lourde à prendre en compte. Ils nécessitent pour la plupart une surcharge de travail pour le concepteur, ainsi que des connaissances très spécifiques et complexes, si bien qu’il préfère bien souvent abandonner le côté environnement pour se concentrer sur les nombreux autres aspects à traiter.

Figure 2.11 : Aspects à prendre en compte dans le processus de design. Source (Luttropp & Lagerstedt, 2006) :

2.3.4.2 La nécessité d’intégrer le choix du scenario de fin de vie tôt dans le processus de conception

Nous avons vu qu'il existe deux approches possibles pour intégrer le choix d'un scenario au processus de DfE: au début de la phase de conception, ou à la fin de celle ci. Nous allons démontrer pourquoi il est plus simple de faire ce choix au début.

Le processus de conception en ingénierie est une combinaison d’organisation stricte et d’espace libre (créativité, intuitions) pour les concepteurs (Luttropp & Lagerstedt, 2006). Au début du processus, la connaissance du produit est faible mais le champ libre d’action est large. Au contraire, à la fin, bien que la connaissance des informations sur le produit soit large, l’espace libre est réduit car toutes les décisions importantes ont déjà été prises et les possibilités de changer la conception sont faibles. Cela est le cas même si l'on fait une reconception comme préconisé dans l'approche itérative: on ne recommence jamais tout depuis le début ce qui serait une perte de temps considérable, mais on conserve toujours une grande partie du travail déjà effectue. Ceci est illustré à la Figure 2.12. Celle-ci représente l’évolution de la connaissance des paramètres de conception, du degré de liberté de conception et de la possibilité d’amélioration de l’environnement en fonction de l’avancée de la conception.

C’est donc au début de la conception, avant que les décisions majeures ne soient prises qu’il faut prendre en compte l’environnement afin d’avoir plus de chance de bien assimiler les contraintes (Gehin et al., 2008). Ceci nous amène à choisir l'approche linéaire plutôt que l'approche itérative. Dans cette optique, il est donc impossible d’appliquer les méthodes de DfD et d’évaluation des scénarios vues précédemment. En effet, elles nécessitent une connaissance déjà très précise du produit et ne peuvent être utilisées qu’avec l'approche itérative. Il est souvent nécessaire de connaitre déjà toutes les pièces, leurs nombre, leurs configuration, leur forme, etc. pour les utiliser.

Figure 2.12: Paradoxe du design pour l’environnement. Source (Bhander et al., 2003) : 2.3.4.3 La nécessité d’une méthode laissant place aux négociations

Comme on l’a vu précédemment dans la description du processus linéaire de choix de fin de vie, les concepteurs ne sont pas seuls à choisir un scénario de fin de vie pour le produit. Ils doivent consulter les autres membres de l’équipe, et respecter la stratégie fixée par l’entreprise. Afin qu’il soit possible de prendre en compte ces contraintes, la méthode devrait aboutir soit (i) à la proposition de plusieurs scénarios optimum (pour qu’il en existe au moins un parmi eux qui conviennent à tous les membres et qui concorde avec la stratégie), soit (ii) à la possibilité d’évaluer tous les scénarios (afin de pouvoir choisir le meilleur possible, tout en respectant l’avis de chacun et la stratégie de l’entreprise). La méthode ne devrait donc pas aboutir à l’imposition d’un choix de fin de vie par le concepteur. Elle devrait plutôt aboutir à l’apport d’arguments de négociations lors de la rencontre de l’équipe de conception et de la prise de décision collective. Dans cette optique, les méthodes ELDA et PEOLSP qui conseillent un unique scénario, sans laisser place à l’évaluation, ne sont donc pas adaptées.

2.3.4.4 La nécessité d’une méthode au niveau modulaire

Pour pouvoir déterminer des paramètres de conception précis pour chaque sous-assemblage, il faut choisir une option de fin de vie pour chacun d’entre eux et non pas pour l’ensemble du

produit. La méthode AEOLOS par exemple en tient compte, puisqu’un scénario de fin de vie est formé d’un ensemble de couples module/option de fin de vie. Pour comprendre l’importance de cet aspect, prenons l’exemple de ELDA qui donne au contraire une fin de vie du produit complet. Excepté pour la mise en décharge, chaque fin de vie fournie ne suffit pas :

Reuse : Le produit est réutilisé dans son ensemble. Certes cela nous indique qu’il faut choisir des

matériaux durables, et réaliser un produit particulièrement fiable. Cependant, à la fin de sa deuxième ou troisième vie, quand le produit ne pourra plus être réutilisé, il faudra tout de même savoir tout d’abord si on le récupèrera. Si oui, il faut déterminer quel sera la fin de vie de chaque module. Car c’est le devenir de chaque module qui nous importe vraiment lorsque l’on réalise la conception détaillée du produit. C’est d’ailleurs ce devenir qui déterminera l’impact environnemental final de la fin de vie du produit.

Remanufacturing : le remanufacturing consiste à désassembler le produit pour le reconstruire

ensuite, en changeant les modules défectueux et en gardant ceux qui sont encore en état. Mais une méthode globale ne nous indique pas du tout lesquels il faudra garder, lesquels il faudra changer et le devenir de ceux qui auront été remplacés. Encore une fois, c’est plutôt la fin de vie modulaire qui a un intérêt.

Recycling : Recycler un produit peut signifier le recycler en entier pour des produits simples

comportant peu de pièces. Pourtant, en général, ce n’est pas faisable pour ceux qui sont plus complexes. Recycler un produit signifierait alors recycler la majorité de ses modules. Mais on ne sait pas lesquels, ni ce qu’il advient des autres. Cela nous conduit là encore à préférer une fin de vie modulaire.

Il est donc nécessaire d’avoir une méthode donnant la fin de vie pour chaque module. 2.3.4.5 La nécessité d’une méthode flexible

En fonction de chaque concepteur et de chaque entreprise, l’importance des divers aspects considérés pour choisir un scénario de fin de vie va changer. Le concepteur doit pouvoir, au besoin, contrôler l’importance qu’il veut accorder au bénéfice économique, au respect des lois ou à la performance environnementale du produit. C’est pourquoi une méthode adaptée doit rester

flexible. La plupart des méthodes vues jusqu’à maintenant n’apportent pas cette flexibilité puisque le concepteur n’est pas capable d’agir sur les paramètres qu’elles utilisent.

2.3.4.6 La nécessité d’une méthode pertinente

Les méthodes de DfD, même si elles sont inutilisables en début de conception, donnent de très bons résultats, précis et pertinents puisqu’elles s’appuient sur de nombreux paramètres : forme du produit, matériaux précis, poids et taille, prix de fabrication des modules, lois, etc. Même si l’on a choisi de se placer en phase de développement de produit et que peu d’informations sont disponibles, il faut donc tout de même s’appuyer sur tous les paramètres à disposition qui ont une influence importante sur la fin de vie du produit. En ce sens, les méthodes orientées produit utilisant des arbres de décision et nécessitant très peu de paramètres sont peut être trop simplifiées, et s’éloignent de la réalité. Dans la méthode de Xing et al. (2003) par exemple, il n’y a plus que quatre facteurs pris en compte : cycle technologique, durée de vie, raison de reconception et niveau d’intégration des fonctions. Cela semble peu : même au début du processus de design, on est capable de connaître plus d’éléments qui sont susceptibles d’influencer le choix de la fin de vie du produit. Par exemple, on peut connaître le cadre législatif dans lequel elle va s’appliquer, facteur qui a par évidence une grande influence. La même remarque est à faire pour la méthode ELDA.