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Les entretiens, quant à eux, ont mis en lumière des différences d’organisation et de coordina- tion entre les enseignants de FLE et de FLM. Ils ont également révélé les difficultés constatées chez les EANA par les enseignants. Les pratiques de ces derniers et leurs stratégies mises en place pour aider les élèves seront exposées dans la partie IV, car elles ont servi de point d’appui pour construire mes propositions didactiques.

5.2.1

Coopération enseignants / direction et FLS / FLM

Légalement, la première année de prise en charge linguistique ne peut excéder 12 heures hebdomadaires. Cependant, suivant le niveau des élèves et l’implication de la direction dans la constitution des emplois du temps, cette part peut s’avérer plus ou moins importante. Certains enseignants expliquent d’ailleurs qu’ils appréhendent l’affectation de nouveaux personnels de direction car ils sont tributaires de l’importance que ces derniers attribuent à la situation des EANA et des efforts qu’ils consentent pour aménager les emplois du temps(cf Annexe p., En- tretien E.J., tp 602). L’ancienneté du professeur dans l’établissement lui permet d’asseoir une certaine légitimité qui rend plus difficile la remise en question des dispositifs mis en place. La prise en charge linguistique, dans les textes, n’est pas censée excéder une année scolaire.

Cependant, dans la plupart des établissements, les professeurs interrogés assurent un suivi de leurs anciens EANA sur leurs propres heures lorsqu’ils ont encore besoin d’accompagnement (ce qui est encore souvent le cas). C’est le cas aussi dans l’établissement où j’ai fait mon stage, où l’élève que j’ai suivi aurait pu ne pas bénéficier de soutien sans l’insistance de son professeur d’UPE2A. Il semble donc que l’efficacité de l’encadrement des élèves soit largement tributaire du bon vouloir de l’institution et des collègues. (Annexe p.131, Entretien E.J., tp. 102)

En UPE2A, également, même si les enseignants s’efforcent de communiquer sur les besoins spécifiques de leurs élèves, les collègues de FLM ne mettent pas toujours en pratique les préco- nisations du professeur de FLE. «Là, cette année, j’ai pas eu de collègue qui m’a dit qu’elle avait travaillé ci ou ça, bon. Là, je fais un peu à mon idée. Et puis c’est souvent les élèves qui vont m’apporter des choses.3» Le temps de concertation que cela suppose est souvent un frein à cette

coordination, ce qui conduit l’enseignant de FLE à apporter un étayage en fonction de ce que que les élèves apportent de la classe de FLM. C’est ce constat qui a poussé la cité scolaire inter-

2. tp. noté pour ”tour de parole”. 3. Annexe p.131, Entretien E.J., tp.146

nationale à faire en sorte qu’un seul et même professeur assure les heures de FLS et les heures de FLM : « Au début, il y avait d’une part un professeur de FLE et un professeur de français (FLM) ; et puis on s’est aperçu que c’étaient des temps de concertation à n’en plus finir et puis des redites auprès des élèves. Du coup, on s’est dit qu’il valait mieux mettre les efforts sur un seul prof, qui est à la fois prof de français de la classe et prof de FLE et il fait du cousu-main.»4

5.2.2

Groupes de niveau ou non

L’effectif d’une UPE2A pouvant être très hétérogène aussi bien dans le niveau de langue que dans les objectifs d’orientation des élèves, les professeurs sont amenés soit à pratiquer la différenciation au sein de leurs cours (c’est le cas au lycée Charles Poncet à Cluses), soit à établir des groupes de niveau. Ainsi, R.H. explique qu’au lycée Vaucanson de Grenoble, les élèves sont répartis en deux groupes de niveau à la fois en fonction de leur niveau de langue et de leurs aspirations : un groupe A d’une part, qui comprend des élèves niveau A0 et qui passent le DELF A2 à la fin de l’année ; un groupe B d’autre part, qui comprend des élèves ayant un profil bac général ou technologique et qui présentent le DELF B1 à la fin de l’année. Le lycée Vaucanson leur propose également de passer une certification B2 « maison » pour reconnaître leurs efforts. Cette répartition n’est pas figée dans le temps et montre une certaine souplesse : si les élèves du groupe B trouvent cela trop difficile, ils peuvent demander à repasser dans le groupe A (et inversement)5.

Des modalités d’accueil originales : un seul professeur pour le FLE et le FLM

A la cité scolaire internationale de Lyon (CSI Lyon), le mode de fonctionnement est très différent. En effet, si une UPE2A accueille indifféremment des élèves de seconde, de première ou de CAP, il n’en est rien à la CSI : tous les élèves sont scolarisés dans les filières générales et il y a une classe dite ”FLS” pour chaque niveau du lycée, la classe de seconde dite ”d’intégration” étant prise en charge par C.M. et la classe de 1ère FLS par C.B. C.M. a en tout 19h de cours avec sa classe de seconde d’intégration, qui sont réparties entre des heures consacrées aux débutants, celles destinées aux élèves allophones un peu plus avancés en français et les heures de FLM. Voilà comment cette dernière présente ce fonctionnement original :« Dans cette classe, il y a environ une vingtaine d’élèves allophones et une dizaine d’élèves francophones. Au début de

4. Voir Annexe p.150 section ”Evolution du dispositif” 5. Annexe p.146 section ”Groupes de niveau”

l’année, les seuls élèves de cette classe qui suivent le cours de FLM sont les élèves francophones et les élèves allophones ayant déjà un niveau B1 minimum et qui sont suffisamment scolaires et capables de s’adapter pour tirer profit du cours ( si l’élève allophone est rétif ou ne se sent pas capable de suivre en FLM, il peut revenir au cours de FLS). Tout est négocié : on fait les choses pas à pas. Si l’élève ne se sent pas bien en intégration, on le retire du cours de FLM. C’est pour ça que c’est important que ce soit la même personne qui soit le professeur principal de la classe et de FLE et de FLM. Ça nous donne une vision d’ensemble et on fait évoluer la structure à mesure qu’on réfléchit dessus.»6 « Actuellement, je n’ai presque plus d’heures de FLE mais j’ai des

heures où je prends des élèves en difficulté, non francophones et je leur fais du soutien au cours de littérature puisque maintenant, à partir du mois de janvier, tous les élèves allophones sont intégrés au cours de littérature en plus de leurs heures de FLE / FLS, de soutien linguistique.»7 Cette organisation permet à la fois au professeur d’avoir une vue d’ensemble des besoins des élèves et de bénéficier d’une souplesse dans l’emploi du temps. Ce mode de fonctionnement s’est construit par ajustements successifs, l’établissement recueillant chaque année en début de terminale des retours de élèves sur leur expérience des EAF.

5.2.3

Intégration d’objectifs littéraires et exercices travaillés

La focalisation sur les objectifs littéraires est particulièrement sensible à la CSI Lyon et au lycée international de St Germain en Laye, probablement parce que l’ensemble de l’effectif accueilli dans ces classes a un profil de bachelier général. Les professeurs de la CSI Lyon se définissent d’ailleurs moins comme des professeures de langue que comme des professeures de lettres (Annexe p.150 Entretien CSI Lyon, C.M.), tout en étant formées au FLE. C’est un peu moins le cas dans les UPE2A, où les EANA candidats au baccalauréat, comme on l’a vu, sont un public minoritaire. En UPE2A, l’enseignante E.J. travaille surtout la dissertation avec ses élèves et consacre du temps à leur apporter les repères littéraires dont ils ont besoin pour cela8.

Pour elle, comme pour les professeurs de lycée international, l’intégration précoce d’objectifs littéraires participe au succès des EANA aux EAF. Néanmoins tous les professeurs signalent le manque de manuels de FLS qui abordent vraiment la littérature, ce qui conduit à butiner et à fabriquer les outils que ne proposent pas les éditeurs. E.C., C.M. et C.B. travaillent tous les

6. Annexe p.150 7. Annexe p.150

types de sujets mais déconseillent l’écriture d’invention9.

5.3

Difficultés constatées chez les élèves