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Nous avons évoqué dans la section 5 concernant la TA et le jeu vidéo le poids et les recettes énormes engrangées par les studios de jeux vidéo à travers le monde, et la nécessité pour ces studios de toucher le plus de marchés internationaux possibles de manière simultanée. En ce sens, les plus gros éditeurs ont compris l’importance ces dernières années d’une localisation et d’une internatio-nalisation de qualité de leurs produits, pour garantir leur succès partout dans le monde et pour assurer leur compétitivité.

En ce sens, le but de notre travail de Mémoire était de déterminer s’il serait intéressant pour un studio de jeux vidéo de se tourner vers la TA post-éditée pour optimiser la traduction de l’un de ses jeux, plutôt que de recourir à une traduction humaine (TH) « classique ». Nous avons cherché à savoir d’une part si la TA post-éditée était plus rapide à réaliser que la TH, mais aussi d’autre part si la TA post-éditée était préférée à la TH au niveau du sens, du style, et de la fidélité au texte source.

Pour tenter de répondre à ces questions, nous avons choisi d’extraire un corpus de textes du jeu Divinity : Original Sin 2 composé de 250 phrases issues du début du jeu (section 6.2). Nous avons demandé à un groupe de traductrices de les traduire à la main (section 6.4), puis de post-éditer la TA de DeepL (section 6.5), avant de procéder à deux évaluations automatiques (Bleu et TER, sec-tions 6.7.1 et 6.7.2) et à une évaluation humaine comparative (section 6.8), réalisée par cinq juges qui connaissent le jeu.

Si nous reprenons le résumé de nos résultats du tableau 8 ainsi que le résumé des choix de nos cinq juges à la Figure 23, nous pouvons comparer les résultats de nos évaluations automatiques, de notre évaluation humaine, et les temps mis pour la PE et pour la traduction. Il apparaît que c’est la TH qui obtient un score Bleu légèrement meilleur (21.49 contre 19.77). Cependant, elle prend aussi plus de deux fois plus de temps à être réalisée que la TA post-éditée (1h25 contre 48 minutes), l’effort de PE correspondant au score TER (voir section 6.7.2). Ceci peut être un argument de poids non négligeable pour préférer la TA post-éditée à la TH, malgré les résultats des évaluations qui ne concernent, au final, que la qualité des traductions. De ce point de vue, c’est bel et bien la TH qui semble plus adaptée pour traduire des textes de jeux vidéo, qui se rapprochent en général plus

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des textes littéraires que techniques. A ce jour, la TA post-éditée ne semble pas encore être une option qui puisse remplacer la TH en termes de qualité, malgré le gain de temps.

Néanmoins, cette conclusion est évidemment à nuancer. Il est impératif de bien garder en tête les nombreuses limites de notre expérience au moment d’interpréter nos résultats : notre corpus de 250 phrases était somme toute très minime. Nous ne disposions en outre que de cinq traductrices, cer-taines encore étudiantes et la plupart sans expérience de la traduction dans le domaine du jeu vidéo et certaines sans connaissances approfondies du domaine en général. Elles ont systématiquement effectué d’abord la traduction, puis la PE, ce qui peut avoir une incidence sur la qualité de leur travail. Nous ne disposions également que de cinq juges humains, dont l’avantage était qu’ils con-naissaient tous très bien le jeu, mais qui ne basaient leurs choix que sur leurs propres connaissances du jeu, leur subjectivité et leurs quelques connaissances linguistiques. Nous n’avons testé que la TA de DeepL qui, bien qu’il soit très en vogue ces jours, n’est pas le seul système de TA neuronal sur le marché qu’il serait intéressant de tester. Enfin, nous n’avons testé qu’un seul type de jeu vidéo alors qu’il en existe des dizaines. Avec un corpus plus large, avec des dizaines de partici-pants, en testant plusieurs types de jeux traduits par plusieurs systèmes de TA, en mélangeant l’ordre des tâches de traduction et de PE à effectuer, les résultats auraient été encore plus pertinents à analyser. De ce point de vue, il serait intéressant que la recherche scientifique se penche davan-tage sur le sujet de la TA et du jeu vidéo car comme nous l’avons vu, le jeu vidéo est une industrie qui ne cesse de croître et qui engrange chaque année des centaines de milliers de dollars, et dont les acteurs principaux savent aujourd’hui que la conquête des marchés internationaux passe par une internationalisation de ses produits de qualité.

Néanmoins, le but de ce travail de Mémoire n’était pas d’arriver à des résultats parfaits, ni à tirer des conclusions hâtives. Il s’agissait plutôt de nous intéresser à un champ d’études encore méconnu qui englobe les domaines d’actualité que sont la TA et le jeu vidéo. Surtout, notre but tout au long de ce travail était de nous familiariser à la recherche académique, à la lecture d’articles scientifiques et à la méthodologie scientifique. Grâce à ce travail, nous avons eu l’occasion d’utiliser des outils que nous ne connaissions que de loin ou que nous n’avions utilisé que dans le cadre des cours, nous avons appris à recruter des volontaires, à récolter des données, à analyser des résultats et à les

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présenter. Nous espérons qu’à l’avenir, davantage de recherches se concentreront sur le sujet pas-sionnant de la TA dans le jeu vidéo, et que la traduction de textes de jeu vidéo ne s’en retrouvera qu’améliorée.

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