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Les travaux effectués durant cette thèse montrent que la tomographie chimique, qui semblait peu réalisable de manière routinière il y a encore peu de temps, devient possible grâce aux nouveaux équipements, en particulier les derniers TEM analytiques. Nous avons bénéficié pour cette étude des avancées procurées par le microscope Tecnai OSIRIS installé sur le site de STMicroelectronics. Doté d’une source de haute brillance (X-FEG) et de quatre détecteurs SDD de nouvelle génération, il permet l’acquisition de cartographies chimiques de haute qualité en un minimum de temps. Une cartographie de centaines de milliers de pixels, résolue au nanomètre, peut être acquise en une dizaine de minutes avec, en chaque pixel, un spectre de 4096 canaux. De plus, la détectabilité est d’environ 0,01 %at avec des quantifications précises au pourcent près. Les études ont illustré l’intérêt de l’analyse 2D et 3D par STEM EDX pour l’analyse de dispositifs dans le secteur de l’industrie du semi-conducteur. Les performances évaluées de la technique ont démontré son intérêt pour l’analyse de défaillance dans des structures chimiquement et structurellement de plus en plus complexes. En effet, le temps d’acquisition réduit ouvre les possibilités d’analyses 3D où de nombreuses cartographies 2D doivent être acquises pour reconstruire un volume.

Nous avons montré que l’analyse par STEM EDX n’est toutefois pas sans conséquence sur l’échantillon observé. Durant cette acquisition, le faisceau d’électrons focalisé dégrade l’échantillon, provoquant un endommagement irréversible de la structure. Pour diminuer cet effet, une utilisation du TEM à 120 keV et avec un courant de quelques nano-ampères au maximum est conseillé. Ces précautions restent insuffisantes car les structures observées sont de plus en plus fragiles (utilisation d’oxyde de Silicium). Par conséquent, une solution de protection des échantillons sous forme de lamelles pour les analyses 2D, d’une part, et sous forme de pointes pour les analyses tomographiques, d’autre part, est proposée. Pour cette méthode, une couche de Chrome d’environ 20 nm d’épaisseur doit être déposée sur les deux faces d’une lamelle ou tout autour d’une pointe

Conclusion Générale

aussi lors d’acquisitions tomographiques (STEM EDX) où l’exposition au faisceau d’électrons est très longue. De plus, cette encapsulation ne nuit pas à la qualité du signal EDX.

Lors d’acquisition de cartographie EDX, le signal d’un spectre, ou plutôt son rapport signal-sur-bruit, dépend des différents paramètres d’acquisitions utilisés. Lors de notre étude nous avons fixé la tension d’accélération à 120 keV pour limiter l’endommagement. Le courant de sonde est choisi autour de 1 nA mais peut aussi être augmenté jusqu’à 4 nA en fonction des matériaux analysés. Ce choix du courant est important pour éviter de saturer les détecteurs et pour optimiser le taux de comptage des photons. Plus le temps d’exposition par pixel est important, plus le rapport signal-sur-bruit du spectre obtenu est grand, mais ceci est bien sûr au détriment du temps total d’analyse et augmente la dose reçue par l’échantillon. Les dispositifs semi-conducteurs contiennent des matériaux à conductivité électrique variable pouvant induire des dérives lors du balayage du faisceau d’électrons. Le temps d’analyse total doit donc être optimisé pour limiter la dérive tout en conservant suffisamment d’informations. Une fois l’acquisition terminée les spectres sont traités afin de sélectionner les différents éléments principaux de l’échantillon. Pour cette étape, une attention particulière doit être apportée afin d’éviter les pics artefacts et sélectionner les raies d’émission adéquates pour chaque élément. Les sélections de pics proches interagissant entre eux doivent être évitées car ils détériorent l’information des cartographies correspondantes en mêlant l’information de deux éléments différents. Des quantifications chimiques par la méthode de Cliff-Lorimer sont réalisables sur ces spectres et, pour un traitement plus qualitatif, deux filtres ont été proposés. Le premier améliore le rapport signal-sur-bruit d’une cartographie par étude des proches voisins. Le deuxième permet, à l’aide des cartographies des différentes raies d’émission d’un élément, de corréler leurs informations et de ne garder que celle effectivement représentative de l’élément.

Pour l’analyse en trois dimensions d’un dispositif, les paramètres d’acquisition utilisés sont équivalents à ceux utilisés pour l’analyse 2D ainsi que les méthodes de traitements des cartographies. Seul le temps d’exposition peut être revu à la baisse afin de réduire le temps global d’acquisition. Pour la reconstruction du volume, l’algorithme itératif SIRT est préféré. Les différentes étapes de la technique (acquisition, traitement des cartographies, reconstruction des volumes et visualisation) sont détaillées dans une étude d’un transistor 28 nm FDSOI. Un volume est obtenu pour chaque élément étudié et une combinaison des différents volumes permet d’obtenir un rendu global du dispositif. Une analyse complète des volumes peut être effectuée grâce à l’extraction de tranches dans toutes les directions. Une comparaison des résultats avec des analyses 2D démontre l’intérêt de la technique pour supprimer les effets de projections des structures complexes et ainsi comprendre la composition et la structure tridimensionnelles complexes.

Des études ont été réalisées afin d’évaluer l’impact des paramètres d’acquisition (dose, pas angulaire) sur la qualité du volume reconstruit (signal, résolution). La qualité du signal du volume reconstruit est estimée à l’aide d’un facteur de qualité. D’après ce facteur, il est possible de conserver une qualité de volume reconstruit identique en jouant sur le compromis de deux paramètres : diminuer la dose utilisée et le pas angulaire. Une étude sur la résolution est menée en liant ces paramètres avec le nombre d’itérations utilisées pour l’algorithme. Elle permet de

Conclusion Générale

confirmer la possibilité de compréhension de défauts à l’échelle nanométrique avec une résolution spatiale de 4 nm. L’étude sur l’impact de la forme de l’échantillon sur les résultats permet d’évaluer l’intérêt des échantillons sous forme de pointe par rapport aux lames fines utilisées pour l’analyse 2D. En effet, l’utilisation d’échantillons sous forme de pointe permet non seulement de ne pas avoir d’impact de l’angle d’inclinaison sur l’intensité des signaux, contrairement à un échantillon de type lame mince tenue par une grille, mais autorise aussi une analyse sur 180°. Analyser l’échantillon sur un demi-tour évite une zone d’ombre de l’information lors de la reconstruction du volume ce qui permet d’obtenir des résultats sur les quantifications atomiques et volumiques plus homogènes, c'est-à-dire un volume plus réaliste.

Dans une perspective d’amélioration et d’optimisation de la technique de tomographie par STEM EDX, les points faibles de la technique qui peuvent être encore optimisés sont : la résolution spatiale, le temps d’analyse global (acquisition, traitement) et la complexité du traitement. En effet, avec l’arrivée des nœuds 14 nm et bientôt 10 nm, une amélioration de la résolution est nécessaire pour adresser les futures applications. La première solution envisagée est de mêler l’information d’un volume STEM HAADF, dont la résolution est proche du nanomètre, avec celle d’un volume STEM EDX afin de bénéficier à la fois d’une bonne résolution spatiale et de l’information chimique. La deuxième consiste en une amélioration de la qualité de la reconstruction par une diminution du pas angulaire. Cette deuxième proposition implique l’acquisition et le traitement de nombreuses cartographies, impactant directement le temps d’analyse global. Afin de compenser cette augmentation du temps d’expérience, une automatisation des différentes étapes permettrait d’alléger la charge que représente une telle analyse. Ainsi, l’automatisation de l’acquisition des cartographies comme il en existe déjà pour l’acquisition de tomographie en STEM HAADF permettrait un gain de temps et une simplicité d’analyse. De même, le traitement des nombreuses cartographies, c'est-à-dire, l’extraction des différentes cartographies élémentaires, l’application des filtres, l’alignement des images et l’ajustement de l’axe de ‘tilt’ pourrait aussi être optimisé grâce à l’automatisation. De plus, ces étapes d’alignement et d’ajustement étant cruciales pour obtenir la meilleure résolution possible de la technique mériteraient aussi d’êtres améliorées et fiabilisées. Ces étapes étant actuellement réalisées manuellement, la création d’algorithmes automatiques spécifiques, avec notamment l’utilisation de l’information fournie par l’encapsulation Chrome pour l’ajustement de l’axe de ‘tilt’, permettrait de rendre ces étapes moins opérateur dépendant et faciliterait une utilisation plus industrielle de la technique.

Des améliorations du traitement de signal par des techniques assez complexes de « multivariate

statistical analysis » (MSA) sont encore à tester afin d’améliorer l’extraction des signaux EDX. Ce

serait une alternative possible à l’utilisation des filtres d’extraction des signaux que nous avons développés. Lors de la reconstruction des volumes, des normalisations des signaux font que la quantification de la composition des matériaux est perdue. Un axe à approfondir serait de pourvoir remonter à la composition chimique des volumes. En effet, à la fin de la reconstruction, on dispose, d’une part, de la disposition et de la taille des différents volumes élémentaires et, d’autre part, de

Conclusion Générale

devrait autoriser l’écriture d’équations permettant d’extraire les compositions des différents matériaux présents. Cet axe reste à explorer et ne semble pas à notre connaissance faire l’objet de travaux dans la littérature.

L’intérêt de la technique est indéniable pour la compréhension tridimensionnelle des structures complexes défaillantes. Même si la tomographie STEM EDX est pour le moment appliquée de manière ponctuelle, son intérêt pourrait croître avec l’arrivée des nouveaux nœuds technologiques et de l’automatisation globale des différentes étapes. De plus, ses applications peuvent s’étendre au-delà de l’industrie du semi-conducteur. Elle peut s’appliquer aussi bien dans le domaine de la biologie que celui de la métallurgie ou encore des polymères. Pour des études plus complètes, combiner aux volumes chimiques une analyse des contraintes en trois dimensions, par holographie en champ sombre ou diffraction électronique (NBED - Nano Beam Electron Diffraction - ou précession) permettrait de caractériser un volume sous tous ses aspects.