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Chapitre I : Design de ligands pour l’époxydation et complexation d’anions

I. 3. 3. Conclusion

Pour conclure, ces ligands ne présentent pas de bonnes activités catalytiques pour l’époxydation. Les complexes se sont révélés sensibles aux conditions oxydantes, en particulier avec H2O2 et TBHP. L’activité obtenue avec l’iodosylbenzène reste malgré tout très faible : le meilleur TON obtenu dans le cas du cis-cyclooctène est de 37 et la réaction prend plus de deux jours ! Les ligands sont instables aux conditions oxydantes malgré l’introduction de groupements électroattracteurs en position méso qui ne suffisent alors pas à stabiliser le ligand. La comparaison des potentiels rédox montre que ces derniers sont, d’une manière générale, beaucoup plus riches en électrons que ne le sont les porphyrines ou les salens. La formation de l’espèce manganèse oxo est très probable comme en attestent les études d’électrochimie effectuées par le groupe d’A. Aukauloo et au vu de l’activité obtenue en époxydation. En revanche, cette espèce semble très peu réactive. Ceci est certainement dû au fait que le ligand possède un mode de coordination LX3, similaire aux corroles, qui stabilise fortement les hauts degrés d’oxydation. Le modèle DFT est cohérent avec la formation d’une triple liaison manganèse-oxo relativement courte.

De plus, ces ligands semblent montrer une activité catalase importante observée avec H2O2. Le caractère non-innocent du ligand contribue certainement dans notre cas à stabiliser l’espèce de haut degré d’oxydation, la rendant ainsi moins réactive. La baisse du degré d’oxydation peut avoir plusieurs impacts du point de vue mécanistique : un pouvoir oxydant amoindri et un métal ayant un caractère acide de Lewis plus faible. L’alcène se coordine alors moins facilement au centre métallique. De même, comme dans le cas proposé par Goldberg82 (Schéma I-15, p. 25), la molécule d’iodosylbenzène supplémentaire responsable de l’oxydation, doit également se complexer au centre métallique. Finalement, l’introduction d’un groupement électroattracteur en position méso n’apporta pas la stabilité aux conditions oxydantes attendues par analogie avec les porphyrines.

I. 4. Complexation d’anions

Au vu des faibles activités catalytiques observées, il a été décidé de valoriser ces ligands d’une autre manière. Des groupements donneurs de liaisons hydrogène de type phénols, anilines et acétamides ont été introduits sur des ligands de type dipyrrométhènes. En effet, un réseau complexe de liaisons intramoléculaires et intermoléculaires a été observé (Figure I-8, p. 44). Différents mono-cristaux supplémentaires ont été obtenus et caractérisés par

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Guillaume Pilet du Laboratoire des Multimatériaux et Interfaces (LMI) de l’université de Lyon. Le cas des acétamides est particulièrement éloquent. Encore une fois, les deux conformations « in-in » et « in-out » (Figure I-17 et Figure I-18) sont observées. Dans le premier cas, le monocristal a été obtenu par évaporation lente d’une solution du ligand dans un mélange dichlorométhane/méthanol. Une molécule d’alcool, présente dans la maille cristalline, forme des liaisons hydrogènes à la fois avec le groupement carbonylé de l’acétamide et l’azote d’un deuxième ligand de la maille. Elle sert ainsi de « relais » entre deux molécules de ligands de la maille. Le deuxième groupement acétamide sert également de donneur de liaison H pour un troisième ligand créant ainsi un réseau de liaisons hydrogène relativement compliqué. Les deux moitiés 2-arylpyrroles forment également un angle non-nul (14,5° et 20,7° de gauche à droite) avec le plan médian du dipyrrométhène. La structure est alors déformée et les résidus NH ne pointent pas exactement vers le centre de la structure. Ceci explique en partie les problèmes observés lors de la complexation et la sensibilité du complexe obtenu à l’air et à l’eau. De par l’encombrement stérique des groupements méthyles, le métal complexé au ligand est contraint à une géométrie tétraédrique et ne peut pas adopter la géométrie plane observée dans la structure X du complexe I-11c (Figure I-8, p. 44). La deuxième structure (Figure I-18) a été obtenue par évaporation lente d’une solution du ligand dans le dichlorométhane. Le groupement pointant vers l’extérieur du ligand forme alors des liaisons H avec le groupement amide d’une deuxième molécule, expliquant ainsi la conformation « in-out » observée. Contrairement au complexe de manganèse (Figure I-6, p. 38), aucune interaction fluor-fluor n’est observée. En revanche, les protons en position β-pyrrolique présentent des interactions avec les atomes de fluor en position ortho d’une deuxième molécule. De plus, le groupement aromatique est quasiment perpendiculaire au plan du dipyrrométhène (81,3°).

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Figure I-18 : Structure X du composé I-19 – conformation « in-out ».

Les molécules I-14 et I-15 ont toutes les deux été cristallisées par évaporation lente de dichlorométhane. Dans les deux cas, les molécules cristallisent dans la conformation « in - in ». La molécule I-14 ne forme pas de liaison intermoléculaire particulière. En revanche, des liaisons intramoléculaires entre les fluors et les protons β-pyrroliques, ainsi que des liaisons intermoléculaires entre les fluors et les protons en ortho des groupements nitrophényles sont observées dans I-15 (Figure I-19). Malgré ces différences, la position du noyau aromatique en méso change très peu entre les deux molécules (69,5° et 67,8° pour I-14 et I-15 respectivement).

I-14 I-15 I-15

Figure I-19 : Structures de diffraction aux rayons X des composés I-14 et I-15.

Tous ces composés montrent des caractéristiques structurales similaires : le proton N-H du dipyrrométhène forme une liaison intramoléculaire avec l’azote du deuxième noyau pyrrolique. Si le groupement présent sur la partie inférieure du ligand est capable de donner des liaisons hydrogènes (R = OH, NH2, NHAc), celui-ci en forme une supplémentaire avec ce même noyau pyrrolique. De plus, le groupement aromatique en méso forme un angle quasi-perpendiculaire avec le plan du dipyrrométhène dans la plupart de ces structures (excepté I-14

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et I-15). Les deux bras aromatiques en position 5 et 5’ ne sont pas coplanaires avec le dipyrrométhène mais forment un angle de l’ordre de 20° dépendant de l’encombrement des groupements placés sur la partie inférieure.

Ces ligands sont alors capables de former des réseaux de liaisons hydrogène compliqués et, on s’intéressera en particulier, à leurs capacités à avoir des interactions avec des anions. En effet, au moins trois groupements donneurs de liaisons hydrogènes sont présents sur la molécule. On cherchera alors à vérifier si ceux-ci sont capables de former des complexes ligands/anions. Il s’agira alors de déterminer leur stabilité, leur stœchiométrie ainsi que leur structure. L’étude de leur stabilité pourra également donner une indication sur l’effet du groupement électroattracteur en méso. En effet, un ligand électrodéficient aura tendance à augmenter la charge partielle positive sur le groupement donneur de liaison hydrogène et ainsi, augmenter la force de la liaison H-anion. Finalement, la partie dipyrrométhène étant responsable de la couleur de ces molécules, on peut espérer qu’un changement suffisamment fort, induit par la complexation, entraîne une différence dans les propriétés électroniques du ligand et produise ainsi un changement dans le spectre UV-visible.