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Lorsque nous étudions les caractéristiques du marché gazier, nous constatons que sa libéralisation doit tenir compte de nombreux facteurs, à la fois pour son développement et son bon fonctionnement. Son ouverture est sensiblement différente des autres indus-tries de réseau car la production n’est pas totalement endogène. Elle est principalement l’objet de gros producteurs, en général hors de l’Union Européenne et qui en conséquence échappent largement aux mécanismes de régulation et aux directives. La production endo-gène européenne est sur une pente descendante, alors que la consommation augmente et que des marchés captifs commencent à apparaître (marché de la production d’électricité). L’Europe devient de plus en plus dépendante de ses fournisseurs extérieurs, à la fois pour le gaz mais également pour cette production électrique. A côté des objectifs d’efficacité et de compétitivité128 s’est donc développé le souci de la sécurité d’approvisionnement, qui quelquefois peut entraîner une logique qui s’éloigne quelque peu de celle d’un approvision-nement au moindre coût. Cette problématique n’est pas nouvelle et l’industrie gazière a su mettre en place des instruments pour optimiser cette gestion de la SA et pour développer l’industrie. La première mesure a été de diversifier les sources d’approvisionnement, en ne favorisant pas uniquement les fournisseurs proposant les conditions tarifaires les plus intéressantes. La seconde a été de développer les négociations par contrats de long terme, associés à la logiquenetback, permettant non seulement un partage des risques mais aussi le développement de l’industrie gazière. Ces contrats manquent certes de flexibilité mais leur utilité n’est plus à prouver ; des auteurs ont souligné leur rigidité mais nous avons vu qu’ils se justifiaient pleinement, à la fois d’un point de vue empirique et théorique. Toute-fois, dans le nouveau contexte de libéralisation et de séparation des activités, de nouvelles incertitudes, notamment en termes de demande, sont apparues. Pour gérer ces nouveaux risques, des instruments plus flexibles ont été jugés nécessaires et se sont développés. Les marchés spot et hubs gaziers, sur lesquels se signent des contrats plus courts, émergent, permettant les rééquilibrages en cas soit d’excès soit de déficit d’offre ou de demande. Ces marchés ont pour l’instant un développement limité, et resteront certainement des compléments aux contrats de long terme, toujours prépondérants et signés à la fois par les électriciens et les nouveaux entrants. Avec ces marchés s’est développé le risque prix, contre lequel les acteurs y agissant désirent se couvrir. En effet, les prix du gaz naturel peuvent être bien plus volatils que ceux du pétrole, en raison d’un marché moins

hubs lié à un nombre trop restreints d’offreurs ou aux contraintes de capacités. Peu de ceshubs disposent actuellement d’instruments de couverture, adaptés le plus souvent des marchés financiers.

Le marché gazier est un marché particulier129, répondant à des logiques qui peuvent défier celles basées uniquement sur les coûts. C’est un marché où des hypothèses d’imper-fection sont vérifiées (abscence de multiplicité de demandeurs et d’offreurs, présence de capacités de transport limitées...etc). De multiples stratégies sont présentes sur ce marché, rendant la concurrence imparfaite à la fois du côté de l’offre ou de la demande. Peu de producteurs sont présents en amont, même si le GNL commence à les mettre en concur-rence. Ils sont toujours contraints par les coûts de transport élevés de leur ressource, mais d’autres facteurs leur permettent cependant d’exercer un certain pouvoir dans les négociations, comme le marché croissant de la production électrique ou les contraintes en-vironnementales. Leur stratégie est non seulement un renforcement de leurs exportations, mais également une intégration sur le marché aval pour vendre directement la ressource (stratégies de forclusion). Sur le marché final, les importateurs-distributeurs européens sont en concurrence, ce qui peut limiter leur pouvoir de négociation face à cet oligopole de producteurs. Ils cherchent d’ailleurs à s’intégrer vers l’amont (Baranes, Mirabel et Poudou [2003]) pour acquérir des ressources propres et ne plus dépendre seulement de fournisseurs tiers pour la totalité de leurs approvisionnements. Certains ont déjà un avan-tage sur ce point puisqu’ils sont adossés à des pétrogaziers disposant de ressources. Sur le marché aval, nous assistons à des comportements de fusions qui reconcentrent l’industrie autour des grands opérateurs nationaux déjà existants. La structure de marché est donc un oligopole bilatéral. Ses caractéristiques introduisent des contraintes qu’il faut intégrer, soit en terme d’approvisionnement, soit en terme de ventes sur le marché aval130.

L’offre de gaz en Europe est une question assez complexe, regroupant à la fois des interactions entre des entreprises non-régulées, les producteurs, et des entreprises régulées (les importateurs-distributeurs). La formation des prix est sujette à de nombreux tiraille-ments, reflétant tantôt l’équilibre entre offre et demande131, tantôt des volontés politiques

129Chaque industrie de réseau a des spécificités propres qui limitent la portée de la concurrence.

130Ce marché aval est le marché des approvisionnements si ce sont les producteurs et les importateurs qui sont pris en compte, agissant comme des parts de marché imposées par les importateurs aux producteurs ; c’est le marché final si ce sont les importateurs-distributeurs face aux clients finals, agissant comme des contraintes de capacités sur les importateurs-distributeurs.

avec une régulation sur le marchéfinal. Les premiers comme les seconds sont susceptibles d’exercer des pouvoirs de marché, soit en restreignant l’offre, soit en saturant les réseaux. Les marchés de court terme sont risqués pour que les fournisseurs alternatifs puissent y in-tervenir pour négocier la majorité de leurs approvisionnements. Pour favoriser l’émergence d’offres alternatives, certains régulateurs se sont lancés dans des démarches différenciées, comme la promotion pour de nouveaux investissements en infrastructures ou l’application de régulations asymétriques (gas release et objectifs de perte de parts de marché).

Les expériences de gas release en