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Partie 1 : Bibliographie

5. Conclusion

Des progrès significatifs ont été faits sur les BAMI au cours des dernières années et le procédé a évolué au cours du temps en ce qui concerne la structure (densité, diamètre et longueur de fibres…) comme les conditions opératoires (concentration en MES, flux de perméat, aération). Il y a quelques années le procédé fonctionnait à de très hautes concentrations en MES, jusqu’à 30 g.L-1 alors qu’aujourd’hui les concentrations sont dans une

gamme plus faible (environ 6-20 g.L-1 sur les travaux présentés) mais toujours plus élevées que dans les BA.

La gestion du flux et du séquençage de la filtration ont déjà été largement étudiés. Bien qu’il soit parfois compliqué de faire fonctionner les BAM sans rétrolavage, cette technique semble être d’un intérêt limité en considérant les flux instantanés important qui sont nécessités pour maintenir la production d’eau. A ce niveau une filtration intermittente avec de courtes périodes de relaxation semble plus bénéfique pour une même quantité d’eau filtrée.

Plus récemment, les études se sont portées sur l’amélioration des paramètres d’aération. Celle-ci est plus efficace lorsque les conditions opératoires sont propices au colmatage (forts flux de filtration et concentration en MES). L’aération intermittente, synchronisée avec la relaxation de la filtration, semble une solution efficace pour économiser de l’énergie.

Il est cependant actuellement impossible de donner un réglage optimal des paramètres opératoires génériques même si l’existence d’un seuil d’efficacité de l’aération envers la filtration est démontrée. Malgré le nombre important d’études réalisées, un travail plus approfondi est nécessaire pour diminuer la consommation énergétique requise par l’injection d’air. Plusieurs raisons qui doivent servir de tremplin de réflexion peuvent être avancées :

- Il y a un manque de standardisation dans les méthodes utilisées pour comparer les travaux réalisés. Ce problème a déjà été mentionné dans des reviews écrites auparavant sur le colmatage membranaire. Il concerne aussi bien l’hydrodynamique (détermination du flux critique, effet global de l’aération) que la caractérisation des boues (fractionnement, extraction des SPE).

- Des conclusions trop hâtives ont parfois été généralisées, face à une complexité de procédé non ou mal prise en compte.

- Il est possible de trouver de nombreux travaux traitant du même paramètre mais étant donné les gammes étendues de paramètres opératoires et de configurations de BAM, leur comparaison n’aurait pas de sens la plupart du temps.

- Il y un manque d’études grandeur nature (Drews, 2010), le passage à l'échelle induisant des modifications des phénomènes en jeu.

- De nombreux pilotes fonctionnent avec des effluents synthétiques. Ces effluents dont la composition peut varier d'une étude à l'autre auront un impact notoire sur le milieu biologique. Les conclusions de ces travaux ne seront pas toujours applicables à des cas pratiques, une boue alimentée en eaux usées réelles pouvant avoir un comportement sensiblement différent.

- La répétabilité des expériences est difficile à mettre en œuvre avec des boues activées alimentées en effluent réel du fait de la variabilité de la composition de l'alimentation, de l’évolution du milieu biologique et du temps nécessaire pour réaliser les expériences (parfois plusieurs mois).

Pour remédier à ce manque de standardisation des études et fournir des données transposables aux installations réelles une solution pourrait être de focaliser les recherches sur les installations grande échelle qui fonctionnent en boues et effluents réels. Toutefois la plupart des installations industrielles sont en fonctionnement continu, il est donc difficile, voire impossible, de régler et modifier les paramètres opératoires à souhait à cause des contraintes de production.

Une autre stratégie envisageable serait de trouver des tendances globales qui pourraient être appliquées à tous les BAM. A l'échelle du réacteur, l’homogénéité de l’aération et donc de l’hydrodynamique sont d’une grande importance pour obtenir une bonne distribution du colmatage. Le cas particulier des mauvaises distributions de flux de perméation le long d’une fibre seule est bien connu mais la même tendance est observée à l’échelle du module et même à celle du BAM dans son ensemble. Il y a également un besoin de quantifier l'impact des mécanismes locaux induits par l’aération sur l'amélioration des performances de filtration, en fonction des conditions opératoires. Cela permettrait de déterminer d'éventuelles zones de prédominances des uns par rapport aux autres. Ces mécanismes sont :

- Les turbulences, qui ont un effet bénéfique sur l’amélioration du rétrotransport. Elles permettent également d’homogénéiser les conditions hydrodynamiques grâce aux propriétés instables de l’écoulement induit.

- Le mouvement des fibres, qui pourrait augmenter la probabilité pour la membrane de bénéficier de l’influence de l’air et celle des chocs entre fibres ainsi qu’augmenter le cisaillement dû au liquide à la surface de la membrane.

- Le cisaillement induit par l’air, qui peut avoir deux effets antagonistes : un équilibre doit être trouvé entre l’augmentation des contraintes de cisaillement à la membrane qui vont permettre d’enlever les substances colmatantes adhérant à la membrane d’une part (+) et la préservation de l’intégrité des boues d’autre part (-).

En conclusion, l’amélioration des performances énergétiques des BAM passe par une double approche prenant en considération le design et les mécanismes locaux, les deux pouvant être liés (dimensions de fibres et leur mouvement). La CFD aura un rôle important à jouer dans ce but et pourra être utilisée pour les études préalables, son efficacité ayant été démontrée dans les deux cas par de nombreux exemples que ce soit sur des problèmes de configuration (densité et arrangement de fibres, dimensionnement de réacteurs) ou d'étude à une échelle plus petite (cisaillement à la membrane). En ce qui concerne la gestion du procédé, des

Aération pour le décolmatage dans les bioréacteurs à membranes immergées pour le traitement des eaux usées : impact sur le milieu biologique et la filtration

travaux récents ont montré que la consommation énergétique pouvait être diminuée en mettant en œuvre des algorithmes relativement simples, par exemple en adaptant le débit d’aération en fonction des variations de PTM sur le court et le long terme. Nous pouvons également espérer que le développement de capteurs et de systèmes de contrôle locaux rende la gestion des BAM plus facile et plus sûre.

Sur un plus long terme la compréhension fondamentale des phénomènes induits à l’échelle locale par l’aération pourrait également être utile au développement de modèles globaux de BAM. Comme souligné par certains auteurs qui ont traité de problèmes de CFD (Brannock et

al., 2010), le développement naturel des modèles de CFD appliqués aux BAM serait la prise

en compte de bioréactions comme le fait le modèle Activated Sludge Model (ASM). C’est une tendance émergente et la modélisation des BAM basée sur le modèle ASM a récemment été reviewée (Fenu et al., 2010b). La création d’un modèle couplant les conditions hydrodynamiques, l'évolution du milieu biologiques et des lois de transport/adhésion constituerait un outil puissant pour la gestion des BAM. Des essais ont déjà été faits dans ce sens (Zarragoitia et al., 2008) mais les difficultés de modélisation liées aux échelles de temps très différentes des phénomènes en jeu ainsi que les variétés de configuration de BAM rencontrées demandent des ajustements de paramètres spécifiques qui limitent la généralisation d’un modèle global du procédé.

La Figure 1-41 (inspirée de Drews, 2010) récapitule les différents paramètres pouvant jouer sur le colmatage dans les BAM et positionne le travail présenté dans cette thèse. Les flèches rouges indiquent les voies choisies pour la compréhension du lien entre l'aération et le colmatage membranaire dans les BAMI.

SRT : âge de boues ; HRT : temps de séjour hydraulique ; TMP : pression transmembranaire ; MLSS : matière en suspension ; PSD : distribution de tailles de particules ; DO : oxygène dissous

Figure 1-41 : Récapitulatif des paramètres influençant le colmatage dans les BAM et étude choisie (inspiré de Drews, 2010)

L'étude présentée dans ce mémoire se focalise ainsi sur l'impact de l'aération sur le milieu biologique. Elle se sépare en deux grandes parties expérimentales :

- Une étude pilote dans laquelle les variations de PTM ainsi que celles des différentes propriétés des boues, et plus particulièrement la taille de flocs et les concentrations en SPE, seront évaluées pour différents réglages d'aération et de filtration.

- La caractérisation de l'hydrodynamique crée par l'injection d'air dans les modules membranaires utilisés avec l'évaluation des tailles et vitesses de bulle en fonction du débit d'air et les simulations CFD de l'écoulement induit. Celles-ci permettront de donner les gammes de cisaillement imposées aux boues qui seront ensuite utilisées pour effectuer des simulations rhéologiques et estimer l’éventuelle déstructuration des boues via l’évolution de leurs propriétés (taille de flocs et relargage de SPE).

L’étude est schématisée sur la Figure 1-42.

Figure 1-42 : Schéma récapitulatif de l’étude menée dans cette thèse

Propriétés des boues

Aération

Colmatage

Contraintes de

cisaillement dans pilote

Pilote

Variations de PTM

Ecoulement gaz

Séquençage

Débit aération

Granulomètrie

Substances polymériques extracellulaires

Computational

Fluid Dynamics

Caméra rapide

Traitement image

Pilote

Déstructuration contrôlée de boues

Rhéomètre

Aération pour le décolmatage dans les bioréacteurs à membranes immergées pour le traitement des eaux usées : impact sur le milieu biologique et la filtration

Le couplage des résultats expérimentaux et numériques permettra d'établir le lien entre paramètre opératoire (ici débit d'air) et performance du procédé (variations de PTM) via les phénomènes locaux hydrodynamiques et les variations du milieu biologique.