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CONCILIER LA RÉGLEMENTATION RELATIVE AUX SERVICES FINANCIERS RELATIVE AUX SERVICES FINANCIERS

SERVICES FINANCIERS

F. CONCILIER LA RÉGLEMENTATION RELATIVE AUX SERVICES FINANCIERS RELATIVE AUX SERVICES FINANCIERS

AUX NIVEAUX LOCAL ET INTERNATIONAL

Le manque de régime réglementaire limite l’accès aux marchés financiers et leur viabilité

Comme les marchés financiers africains accusent un retard par rapport à ceux d’autres régions du monde, les banques étrangères pourraient jouer un rôle important en facilitant le financement extérieur et en améliorant la qualité des capitaux à travers une plus grande démultiplication des risques. La présence de filiales de banques étrangères sur les marchés africains a amélioré l’offre et la qualité des services financiers, mais ces progrès ne profitent pas aux ménages à bas revenu, aux PME et aux secteurs de l’économie qui n’ont pas accès aux services bancaires. Ces banques n’ont pas forcément élargi l’accès au crédit ni développé le système financier au sens large (World Bank, 2011). Par rapport à d’autres régions du monde, la gestion des risques est encore insuffisante en Afrique (Mlachila et al., 2013), surtout parce que le secteur financier reste largement concentré sur le financement du secteur public et des entreprises publiques, souvent au détriment du secteur productif (Berg and Fuchs, 2013). À mesure que le secteur financier évolue et qu’il s’intègre dans les marchés mondiaux à travers les activités à l’étranger, un certain nombre de pièges pourraient s’ouvrir, que les décideurs et les régulateurs africains doivent analyser et éviter lorsqu’ils étudient les moyens d’attirer des capitaux pour renforcer les capacités productives et la diversification économique de leurs pays.

L’Afrique doit s’attaquer aux obstacles structurels qui obèrent le développement du secteur financier

Parmi les principaux obstacles structurels qui obèrent le développement, l’intégration et la croissance du secteur financier, on peut citer la médiocrité des infrastructures, l’existence de monopoles et une réglementation sectorielle inadéquate. De nombreux pays africains doivent encore prendre des mesures pour promouvoir la concurrence intérieure et la déconcentration des marchés financiers. Une plus grande diversification et une plus forte concurrence au sein du secteur financier grâce à une meilleure réglementation pourraient également atténuer les incidences des chocs extérieurs. S’il y a eu des améliorations dans le domaine de la communication (d’où les progrès du système M-PESA et de l’Equity Bank), la faiblesse des infrastructures dans le domaine de l’énergie et des transports reste un frein pour pallier la pénurie chronique de services financiers dans les zones rurales. La réglementation peut aussi être un moyen de remédier aux asymétries d’information sur les marchés financiers ainsi qu’aux problèmes d’aléa moral et de non-bancarisation et, en même temps, d’aider les pouvoirs publics à améliorer l’intégration, l’intégrité et la stabilité financières (voir les principes d’une intégration financière novatrice du G-20).

Enfin, les banques publiques et les banques de développement disposent aussi de vastes réseaux de succursales rurales qui peuvent être mis à profit pour promouvoir un accès rapide et relativement bon marché à des services financiers ruraux.

L’Afrique doit améliorer la réglementation prudentielle applicable aux services financiers

La réglementation prudentielle, qui encadre le comportement des banques au moyen de règles en matière de fonds propres, de critères de prêt et d’autres critères d’exposition aux risques visant à éviter l’instabilité financière, est un aspect important de la réglementation des services financiers. Elle est indispensable à la solidité et au bon fonctionnement de tout système financier et vise, en particulier, à écarter et à maîtriser les crises financières. Plus généralement, la réglementation prudentielle peut aussi améliorer la qualité des décisions relatives à l’attribution des crédits en orientant le financement vers les secteurs les plus productifs de l’économie et peut donc accroître les retours sur investissement. L’impact des crises financières est une fonction des asymétries d’information et de la qualité de la réglementation et des autorités

prudentielles. Les marchés financiers tendent à être opaques et imparfaits, incitant un certain nombre d’acteurs en quête de meilleures informations à des comportements indésirables (panurgisme, sélection adverse, aléa moral). Ces comportements, qui sont contraires à une appréciation lucide des risques, engendrent des risques systémiques et de graves problèmes de liquidités en temps de crise (Eichengreen et  al., 1998). La réglementation doit donc obliger les institutions financières à communiquer des informations financières et prévoir la mise en place de mécanismes de surveillance qui fassent une

«lecture» fiable des marchés et qui alertent les autorités financières des risques systémiques potentiels. Les règlements qui renforcent les obligations des institutions financières en matière de publication d’informations, telles les règles de Bâle  II et Bâle  III et les normes comptables internationales, peuvent contribuer à discipliner les marchés financiers (Baumann and Nier, 2003); les banques étrangères peuvent améliorer les pratiques relatives à la publication d’informations sur les marchés où elles s’installent dès lors qu’elles parviennent à y faire appliquer les bonnes pratiques de gouvernance bancaire et d’évaluation des risques qui ont cours dans leur pays d’origine (Buch et al., 2011). Les marchés financiers africains ont réussi à rester à l’écart des récentes crises financières parce qu’ils sont peu intégrés dans les marchés financiers mondiaux. Toutefois, comme cette intégration s’accroît avec l’activité des banques étrangères et la monétisation de l’activité économique, les effets de contagion peuvent être extrêmement rapides s’il n’existe pas de réglementation prudentielle efficace. Les insuffisances de l’Afrique dans ce domaine expliquent aussi l’insuffisance du financement du secteur privé et le risque que les institutions de crédit soient captives des secteurs les moins efficaces de l’économie, au détriment de secteurs qui pourraient afficher des gains de productivité plus élevés. En Afrique, c’est un point faible notoire.

Pour les PME en particulier, l’accès au crédit, même dans les pays dotés d’un secteur bancaire puissant, est relativement difficile. L’ampleur des emprunts de l’État est l’une des causes de ces difficultés (Berg and Fuchs, 2013). C’est pourquoi les pratiques optimales que favorise la réglementation prudentielle devraient permettre aux banques de suivre les entreprises plus étroitement et d’allouer des crédits en fonction non plus des habitudes mais plutôt des résultats. Les pays qui agissent ainsi bénéficient, semble-t-il, d’un meilleur degré de financiarisation lequel peut favoriser la croissance grâce à une meilleure allocation des ressources à l’investissement productif (Barth et al., 2013).

L’Afrique doit aligner les cadres réglementaires régionaux et multilatéraux Dans le contexte du système commercial multilatéral, la réglementation prudentielle semble avoir été négligée dans les listes d’engagements annexées à l’AGCS de nombreux pays africains. Ceux qui souhaitent réglementer l’entrée des banques étrangères devraient avoir la possibilité d’exercer un pouvoir discrétionnaire sur la base de leur réglementation prudentielle, et comme le principe NPF est un principe essentiel de la libéralisation menée au titre de l’AGCS, la faculté d’exercer ce pouvoir discrétionnaire peut être compromise. C’est pourquoi les pays africains qui n’ont pas encore libéralisé leur secteur de services financiers doivent veiller à bien utiliser les flexibilités ménagées par le système, en prévoyant que leurs exceptions prudentielles soient traitées comme des exemptions NPF. La définition de ces exceptions prudentielles exigera une plus grande coordination entre les responsables de la politique commerciale et les banques centrales, ainsi que d’autres autorités et parties prenantes du secteur financier.

En outre, les pays africains devront examiner sérieusement comment harmoniser leur réglementation financière avec la réglementation régionale existante, étant donné que certaines régions disposent déjà de protocoles relatifs à différents aspects de l’intégration du secteur financier ou de l’investissement, telles que l’Union du Maghreb arabe, la CAE, la CEDEAO et la SADC, en particulier en ce qui concerne la libre circulation des capitaux dans la région. On observe des discordances entre les différentes réglementations régionales applicables aux marchés de capitaux; malgré cela, les banques africaines ont développé leurs opérations régionales. Là aussi, des exceptions devront être prévues pour faciliter l’intégration financière et la formation d’un secteur bancaire régional.

De plus, il existe d’autres éléments pouvant être incorporés dans les listes d’engagements et déjà utilisés par certains pays: les examens des besoins économiques et sociaux, qui imposent aux banques étrangères de faciliter l’accès des pauvres et du secteur privé aux services bancaires. Les pays pourraient y ajouter des obligations en matière de formation, d’évaluation et de gestion des risques pour faire en sorte que les effets attendus profitent à l’économie tout entière. Enfin, il faut veiller à ce que les négociations en cours sur les accords commerciaux régionaux qui englobent les services financiers n’empiètent pas sur la réglementation. En effet, les pays africains ne

participent pas aux négociations des méga-accords régionaux, tels l’Accord plurilatéral sur le commerce des services et le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement. S’ils sont adoptés, ces accords pourraient prendre le pas sur la réglementation financière, avec des dispositions qui vont au-delà des engagements visés par l’AGCS et préempter les futurs cycles de libéralisation des services puisqu’ils établiraient des normes de type AGCSplus, qui dépassent de loin les capacités de nombreux pays africains.

Il est donc capital que les pays africains suivent ces questions de très près et se tiennent informés de l’évolution des négociations de ces accords afin qu’ils puissent mener le processus sur les services financiers en connaissance de cause et conserver la marge d’action qu’ils se sont ménagée pour développer leur secteur financier.

5

CHAPITRE

PRINCIPALES CONCLUSIONS