• Aucun résultat trouvé

3 Pour une conception multimodale de la compétence de communication bilingue

Décrire lacompétence bilingue bimodalecomme une compétence de communication au sens où nous l’avons définie et dans une application effective de la définition proposée par Hymes nous engage donc à élargir la perspective descriptive, au-delà des approches existant dans le champ des recherches du bi-plurilinguisme, le plus souvent linguistico-centrées, pour entrevoir l’apport des recherches menées sur la multimodalité concernant la prise en compte des ressources plus largement langagières du contact de langues.

3.1 Entre langue et gestualité : une alliance fondamentale

Si les premières propositions de Gumperz d’une part, et les perspectives ouvertes par Myers-Scotton et Lüdi & Py, d’autre part, que nous venons de développer, ont permis de dépasser une description monolingue et linguistique restrictive du parler bilingue, aucun de ces chercheurs n’a proposé cependant de dépasser la focalisation sur les langues pour envisager plus largement les réalités langagières du locuteur bilingue afin d’interroger la manière dont il transmet ses représentations dans l’interaction à l’aide de toutes les ressources verbales et non-verbales dont il dispose.

Pourtant, en contexte monolingue, il a été montré que la théorie de la relativité linguistique que nous avons déjà mentionnée en faisant référence au concept dethinking-for-speakingSlobin [1996] (cf. section 2.3) transcendait la seule expression linguistique. Ces éléments nous amènent donc à revenir sur les contours langagiers du contact de langues dans la compétence de communication spécifique du bilingue.

3.1.1 Réalités langagières duthinking-for-speaking

En effet, les études inter-langues ont montré que les gestes représentationnels étaient largement conditionnés par la typologie de la langue du locuteur [McNeill & Duncan, 2000; Kita, 2000, entre autres].

En comparant des narrations de locuteurs en anglais, en espagnol et en chinois, McNeill & Duncan mettent en effet au jour des patterns gestuels qui varient selon la manière dont les langues organisent l’en-codage des déplacements. Nous nous limiterons ici, à titre d’exemple, aux observations réalisées sur la comparaison des narrations en anglais et en espagnol. Dans les langues du type ’satellite-framed’ comme

l’anglais, la trajectoire du déplacement est encodée par un satellite ajouté au verbe (downpar exemple), alors que la manière dont s’effectue le déplacement est encodée dans le verbe (rolls, par exemple). A l’inverse dans les langues du type ’verbal-framed’ comme l’espagnol, la trajectoire du déplacement est encodée par le verbe lui-même, alors que la manière dont s’effectue le déplacement est encodée en dehors du verbe, elle est donc non obligatoire. Les résultats montrent que contrairement aux locuteurs anglais qui produisent des gestes qui encodent de manière synchronique avec le verbe la manière dont s’effectue le déplacement – on trouve aussi des gestes qui encodent seulement la trajectoire selon le focus réalisé par le locuteur –, chez les locuteurs espagnols, on trouve exclusivement des gestes du typemanner fog,

i.e.qui encodent la manière alors qu’elle n’est pas encodée par le linguistique23. Ces gestes produits par les locuteurs espagnols sont, en effet, synchronisés avec des informations linguistiques qui encodent plu-tôt la trajectoire (verbe) et/ou le site24(encodé par un groupe nominal). Ainsi, pour McNeill & Duncan, la théorie de la relativité linguistique proposée par Slobin autour du concept dethinking-for-speaking au-rait, au-delà des langues, une réalité plus largement langagière, la gestualité participant à l’organisation d’une pensée bimodale spécifique, propre à chaque langue :

« [...]speakers of different languages create language-specific modes of thinking-for-speaking. Gestures contributes material carriers to thinking-for-speaking, and these take different forms in different languages. » [McNeill & Duncan, 2000, 157]25

Les travaux de Kita [2000, entre autres] viennent préciser les contours de cette hypothèse et per-mettent de rendre compte, de façon encore plus pertinente à notre sens, de la complémentarité entre l’hypothèse duthinking-for-speakingproposée par Slobin et les hypothèses sur le langage. Kita tente de démontrer que deux modes de penser, analytique d’une part, façonné par la langue, et spatio-motrice, d’autre part, façonné par la perception sensible, agissent en concurrence dans la pensée du locuteur, une concurrence qui se manifesterait dans l’expression du locuteurvial’utilisation conjointe de la gestualité et de la langue.

Cette étude porte sur la comparaison de narrations de locuteurs japonais et américains pour encoder le même évènement : la trajectoire en arc d’un chat, qui correspond à des encodages différents dans les deux langues. Cet encodage est marqué par un verbe en anglais (to swing to), alors qu’il est inexistant

23. « A manner fog is defined as manner in gesture that is not also coded in speech » [McNeill & Duncan, 2000, 150] 24. Nous utilisons ici les équivalents français des concepts defigureetgroundrepris de la terminologie de Talmy utilisée par McNeill & Duncan, en reprenant les termes proposés par Vandeloise [1986] sous l’oppositioncible, l’entité à localiser,site, l’entité qui sert de repère.

25. « [...] les locuteurs de langues différentes créent un mode langagier spécifique de thinking-for-speaking. Les gestes contribuent à l’essence même duthinking for speaking, ceux-ci prennent différentes formes dans des différentes langues. » (notre traduction)

3. Pour une conception multimodale de la compétence de communication bilingue

en japonais. Kita parvient ainsi à montrer que cet écart d’expression dans les langues a un impact sur le type de geste produit. En effet, dans les productions des locuteurs japonais, il observe une concurrence entre deux gestes : une trajectoire droite et une trajectoire en arc ; alors que, en anglais, tous les locuteurs produisent un geste encodant la trajectoire en arc. Ces deux gestes révèlent, pour Kita, la concurrence entre deux modes de symbolisations : la trajectoire droite représentant un contenu informatif aussi com-patible que possible avec l’encodage linguistique du japonais, alors que la trajectoire en arc symbolise un contenu informatif plus proche du stimulus de la scène du dessin animé.

Ces observations donnent ainsi à ce chercheur à argumenter en faveur de l’existence de deux forces d’influence : une influence de la langue sur le contenu encodé par le geste d’une part, et, d’autre part, une convergence entre le contenu du geste et le contenu de la parole pour organiser conjointement l’or-ganisation de la description de l’évènement. Au sens de Kita donc, l’influence ne s’effectue pas dans une direction unique – de la langue vers le geste – mais il se peut que la représentation transmise par les combinaisons geste/parole contribuent à créer une information qui n’est pas prévue par l’encodage de la langue. L’hypothèse que fait Kita prédirait donc que le locuteur est cognitivement contraint de pro-duire plus de gestes représentationnels si la représentation d’un évènement spatio-moteur ne se prête pas facilement à un encodage verbal tel que la langue le structure (absence d’un item lexical pertinent par exemple).

Plus globalement, cette hypothèse qu’il nomme "Information Packaging Hypothethis" se base sur trois points principaux :

– les gestes représentationnels aident le locuteur à organiser des informations spatio-motrices riches ; – la pensée spatio-motrice – qui soutient les gestes représentationnels – facilite l’expression du locuteur

en fournissant une façon alternative d’organiser la description du déroulement des évènements que celle qui est rendue possible par la pensée analytique – i.e.la façon par défaut d’organiser les informations par la langue ;

– la pensée spatio-motrice et la pensée analytique donnent accès à des façons différentes d’organiser l’ensemble des informations sur le déroulement d’un évènement. Dans le discours, les représentations spécifiques à ces deux modes de pensée sont coordonnées et ont tendance à converger. [Kita, 2000, 163, notre traduction]26

26. « Information Packaging Hypothesis :

1. The production of a representational gesture helps speakers organize rich spatio-motric information into packages suitable for speaking.

2. Spatio-motric thinking, which underlines representational gestures, helps speaking by providing an alternative infor-mational organization that is not readily accessible to analytic thinking, the default way of organizing information in speaking.

3. Spatio-motric thinking thinking and anlytic thinking have readily access to different sets of informational organizations. However, in the course of speech production, the representations in the two modes of thiniking are coordinated and tend

A travers cette hypothèse, Kita propose ainsi d’expliquer le lien entre les aspects cognitifs et expressifs du langage en considérant que la concurrence, dans la pensée du locuteur, de deux systèmes de pensées, spatio-moteur et analytique, se traduit par la coexistence de deux systèmes de représentations alternatifs, gestes et parole, dans l’expression du locuteur.

Ce qui nous semble fondamental dans cette hypothèse, outre son application aux adultes, ce sont les perspectives que cette conception de la bimodalité comme deux façons alternatives/concurrentes de représenter les évènements sous-tendus par deux modes de penser ouvre sur la compréhension du lan-gage en général et du développement du lanlan-gage enfantin en particulier. Nous reviendrons plus spéci-fiquement sur les propositions de ce chercheur pour expliquer lesmismatch gestures(i.e.combinaisons gestes/parole discordantes) qu’il propose d’interpréter comme le fait d’une conceptualisation acquise dans une pensée spatio-motrice mais non encore systématisée dans un encodage linguistique.

Pour finir sur ce point, les propositions de Kita sur l’existence de deux modes de penser concurrents nous semblent compléter de manière très fine les propositions de Slobin sur la théorie de la relativité linguistique autour du thinking-for-speaking. D’une part, Slobin propose de considérer que la langue requière une forme de pensée singulière qui pourrait être associée au concept depensée analytique pro-posée par Kita. D’autre part, le fait que la pensée globale du locuteur ne soit pas entièrement déterminée par la langue, comme le propose Slobin, pourrait s’expliquer, entre autres, par l’existence d’un autre mode de penser plus proche de la manière dont le locuteur perçoit les objets et les évènements dans le monde réel, ce qui correspond à lapensée spatio-motrice chez Kita. C’est sur ce dernier point que ces deux hypothèses s’éclairent, à notre sens, mutuellement : lethinking-for-speakingdu locuteur d’une langue en particulier serait conditionné par une façon de dire propre à l’encodage linguistique mais ne serait pas entièrement déterminé par la langue, dans la mesure où ce que ne permet pas de dire la langue peut être évoqué et transmis en complémentarité par un encodage non linguistiqueviala gestualité. Ce double éclairage théorique nous incite donc à concevoir que langue et gestualité sont des éléments indis-sociables de la compétence de communication, nous donnant ainsi à revenir sur ce que signifie parler et penser bilingue.

3.1.2 Retour sur les contours langagiers de la compétence bilingue

Comme nous l’avons déjà mentionné, la gestualité n’a que peu été intégrée dans la description et la compréhension du bilinguisme.

3. Pour une conception multimodale de la compétence de communication bilingue

Les travaux de Gullberg [1998, entre autres], pionniers dans le domaine de la gestualité d’apprenants langue seconde d’âge adulte, ont contribué à montrer que les encodages discursifs des déplacements (ma-nière + trajectoire du mouvement, par exemple), réalisés en contexte de restitution d’un dessin animé, différaient considérablement de ceux effectués par les monolingues dans chacune des langues27. On citera en outre, à titre d’exemple, l’étude de Brown & Gullberg [2008] réalisée sur des apprenants ja-ponais (L1)/ anglais (L2), témoignant d’une influence réciproque langue/gestualité sur leur compétence discursive en L1 comme en L2.

Ce n’est donc pas seulement la compétence linguistique du locuteur qui est modifiée par le bilin-guisme, mais plus globalement la compétence communicative dans son ensemble, les modes de symbo-lisations langagiers dont il dispose à travers la bimodalité pour exprimer sa pensée. Nous rejoignons à ce propos la prise de position défendue par Gullberg [2010, entre autres] pour argumenter l’intégration in-dispensable de la gestualité dans la description du bilinguisme comme un aperçu unique sur l’expression, la transformation et l’adaptation des représentations singulières du locuteur bilingue.

Ainsi, il nous faut élargir les propositions de Lüdi & Py (voir section 2.3 page 35) pour repousser les frontières des langues afin d’envisager la spécificité de la communication bilingue dans ses aspects plus largement langagiers en donnant à cette idée de« choc entre deux manières d’interpréter le monde par le langage et la communication »[Lüdi & Py, 2003, 62] un sens effectivement multimodal. En effet, le

thinking-for-speakingdu bilingue n’est pas seulement singulier au regard des langues qui le construisent, mais sa singularité se compose plus fondamentalement autour de la rencontre de deux façons de commu-niquer à travers la bimodalité : chacune étant composée d’une façon spécifique d’interpréter le monde à la fois dans la pensée analytique, dans un encodage propre à une langue en particulier, et à la fois dans la pensée spatio-motrice, dans un encodage alternatif plus proche de la perception rendue possible par la gestualité. Ce n’est donc pas seulement du parler bilingue dont il s’agit de rendre compte mais du

langage bilingue.

Ce parti-pris théorique est encore plus crucial pour le bilinguisme bimodal. En effet, les langues en présence n’engagent pas seulement une façon différente de combiner les gestes et la langue dans les énoncés, mais plus fondamentalement l’organisation langagière duthinking-for-speaking corresponda priori à une organisation bimodale inversée : alors que le geste sert à l’encodage linguistique en LS, il sert à l’encodage non-linguistique en LV – et inversement pour la modalité vocale. Le bilinguisme bimodal rend donc encore plus effectif cette perspective langagière de description du contact de langues

27. Voir sur les avancées récentes de la problématique gestualité et langue seconde, le numéro spécial de la revueSecond Language Acquisition(SLA) récemment publié, numéro coordonné par Gullberg & McCafferty [2008]

dans la mesure où l’encodage linguistique et l’encodage non-linguistique, rendus possible par la pensée analytique et la pensée spatio-motrice, sont en concurrence dans chacune des modalités. Partant, il nous semble essentiel de préciser la manière dont, dans leur ensemble, les ressources gestuelles et vocales issues du contact de langues et de modalités forment les contours de la compétence du locuteur bilingue bimodal.

Nous proposons donc de replacer le bilinguisme bimodal dans sa réalité multimodale pour revenir ensuite sur la définition des contours de ce que nous avons appelérépertoire verbal bimodalen prenant à notre compte les propositions de Gumperz (cf. section 2.1.1 page 27), que nous élargirons, compte tenu des perspectives ouvertes par la prise en compte de la multimodalité, à la notion derépertoire langagier bimodal.

3.2 Regard multimodal sur le bilinguisme bimodal

A notre sens, la surdité, en introduisant la gestualité, et plus largement la bimodalité dans un potentiel linguistique, bouleverse, certes, l’organisation bimodale verbal/non-verbal univoque qu’on observe chez l’entendant28, mais n’invalide pas pour autant le fait que l’expression du locuteur sourd se compose, comme celle de tout sujet communicant, autour de composantes verbale et non-verbale.

3.2.1 Langues et ressources non-verbales : des frontières bousculées par la surdité

Si les pratiques des locuteurs entendants ont été largement étudiées au-delà du linguistique pour ana-lyser la gestualité comme une composante co-verbale dans l’expression du locuteur de langue vocale, les pratiques des locuteurs sourds ont été peu étudiées dans leurs réalités langagières, en revanche, et ce, même en contexte monolingue. En effet, si certains chercheurs postulent que cette proximité relève de matrices communes aux sourds et aux entendants [Millet & Colletta, 1997; Millet, 2002a], d’autres re-mettent en question le continuum entre gestualité non-verbale entendante et signes en prenant pour appui l’exemple des LS émergentes –i.e.langues crées par des sourds isolés – pour considérer un continuum de gestualité propre aux sourds basé sur une iconicisation de l’expérience [Boutetet al., 2010].

En outre, le statut des premières productions gestuelles du jeune enfant sourd évoluant dans un envi-ronnement en LS, en comparaison de celles produites par son pair entendant – et spécialement le statut linguistique ou non-linguistique du pointage – sont largement débattues à l’échelle internationale pour parvenir à distinguer ce qui relève de la langue et ce qui relève de la communication pré-linguistique

28. Nous utiliserons ici le terme ’locuteur entendant’ pour faire référence au locuteur de langue vocale par commodité d’expression, bien consciente toutefois que cette désignation est quelque peu abusive, dans les faits le locuteur entendant pouvant très bien être locuteur d’une LS.

3. Pour une conception multimodale de la compétence de communication bilingue

ainsi que les éléments de rupture ou de continuité entre ces deux étapes développementales [Pizzuto, 1994; Petitto, 1994; Engberg-Pedersen, 2003; Morgensternet al., 2010, entre autres].

Toutefois, peu d’études, à notre connaissance, se sont penchées plus spécifiquement sur la réalité lan-gagière du discours en LS, à l’exception de Emmorey [1999] qui propose de questionner la coexistence, dans les pratiques des locuteurs sourds, d’une gestualité verbale et non-verbale. En outre, les études réalisées sur le bilinguisme bimodal se sont davantage focalisées sur les aspects linguistiques des phéno-mènes pour observer l’utilisation relative de la langue vocale et de la langue signée, et ce majoritairement dans les productions de locuteurs entendants bilingues LS/LV comme nous l’avons déjà mentionné (cf. section 1.2).

Quelques-unes des études menées sur le bilinguisme bimodal entendant proposent toutefois d’aller au-delà de cette focalisation sur les langues pour questionner l’influence de la compétence bilingue bimo-dale sur l’utilisation de la bimodalité dans des situations d’interactions avec des entendants monolingues en LV [Messing, 1999; Naughton, 1996; Emmoreyet al., 2005; Casey & Emmorey, 2008; Pyers & Em-morey, 2008]. Néanmoins, ces observations restent centrées sur la gestualité en ne questionnant que l’influence signes/gestes accompagnateurs de la parole, et ne font aucun cas de la question de la vocalité. Les résultats de ces études montrent, en effet, que la connaissance d’une langue gestuelle influence la ges-tualité produite à l’adresse d’un interlocuteur entendant monolingue : des signes clairement identifiables de l’ASL sont produits dans une synchronisation avec la parole, similaire à celle qu’on trouve dans les gestes accompagnateurs de la parole chez des entendants monolingues. Si ces observations apportent la preuve d’une dynamique intra-modalité au sein de la modalité gestuelle et permettent d’entrevoir que dans les pratiques du locuteur bilingue bimodal la LS n’est jamais complètement désactivée, elles ne proposent cependant pas d’aller au-delà de ce constat.

En effet, à notre sens, les phénomènes observés dans la gestualité du bilingue bimodal entendant nous donnent une base pour investir plus largementles dynamiques verbal/non-verbal intra- et inter-modalités qui façonnent l’adaptation communicative du locuteur bilingue bimodal dans la prise en compte de tous les mouvements de convergence entre les langues et les modalités qui composent sa compétence de communication.

3.2.2 A la rencontre d’une LS et d’une LV : l’oralité bilingue bimodale

Ainsi, au terme de ces réflexions liminaires, il nous semble que les pratiques bimodales en contexte de surdité offrent une toute nouvelle perspective de recherche sur la multimodalité du langage, puisqu’elles nous confrontent à la manière dont se réorganisent les ressources verbales et non-verbales du locuteur

lorsque chacune des modalités peut être investie dans un potentiel linguistique. Envisager le bilinguisme bimodal dans sa réalité langagière nous incite ainsi à entrevoir les contours spécifiques d’une bimodalité sourde.

En effet, la compétence du locuteur bilingue bimodal ne bouleverse pas seulement l’organisation discursive univoque qu’on observe chez le locuteur entendant, mais multiplie les possibilités d’exploiter