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La compréhension est l'un des aspects de l'apprentissage qui nous intéresse particulièrement. Non seulement parce qu'elle fait partie des compétences à acquérir pour l'apprenant d'une langue étrangère mais parce qu'en plus elle est nécessaire à différents moments du processus d'apprentissage. On demande à l'apprenant, par exemple de comprendre un document (texte ou autre), mais cette activité mentale dépasse largement la cadre de la tâche car il faut qu'il comprenne également la consigne, la rétroaction, les aides ou les ressources éventuelles, bref tout ce qui accompagne la tâche. Dans ce chapitre, nous allons présenter la compréhension

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Ce couplage image/ mémoire se retrouve dans la langue du quotidien avec des tournures comme "retenir l’image de, avoir l’image de"

telle qu'elle est envisagée en didactique des langues puis en psychologie cognitive. Nous ferons une distinction entre la compréhension langagière et la compréhension des images.

1. La compréhension en didactique des langues

Dans le domaine de la didactique des langues, la compréhension est qualifiée de compétence ou d'habileté.

1. 1. Une habileté

Dans l'enseignement/ apprentissage des langues, l'approche communicative repose sur la notion de "compétence de communication"32 qui se subdivise en quatre habiletés : compréhension orale, compréhension écrite, production ou expression orale et production ou expression écrite.33

On peut définir cette habileté de compréhension comme étant un accès au sens c'est-à-dire :

"l'ensemble des processus effectués par l'apprenant pour parvenir à la compréhension des textes et documents " (Pendanx, 1998 : 80).

Cet accès au sens s'apprend notamment par le biais d'activités de compréhension.

1.2. Les activités de compréhension

Il nous semble important de distinguer les activités pour l'apprentissage de la compréhension des activités d'évaluation de la compréhension. Elles sont souvent confondues et souvent limitées à l'évaluation alors que comme le souligne Tagliante,"l'objectif de ces activités n'est

pas seulement de vérifier la compréhension, mais surtout de l'enseigner" (Tagliante, 1994 :

51). En effet, nous ne pensons pas qu'il faille considérer la vérification comme une stratégie d'apprentissage, en tout cas pas comme une stratégie prioritaire ou centrale, voire unique. On s'aperçoit que dans le milieu de la formation (tous contextes confondus), la compréhension est laissée au domaine de l'implicite ou à l'initiative de l'apprenant, et s'avère être plus souvent évaluée qu'enseignée.

De plus, il est préférable que les activités varient selon le type de compréhension que l'on veut faire travailler à l'apprenant (Tagliante, 1994), à savoir : la compréhension globale (stratégie du balayage, repérage du type de document, de sa fonction) ; la compréhension détaillée et sélective (stratégie de l'écrémage, repérage d'informations précises, explicites) ; ou encore la compréhension fine et analytique (inférences, compréhension de l'implicite).

1.3. Évaluation de la compréhension

Qu'il s'agisse des manuels ou des environnements multimédias, l'évaluation de la compréhension d'un document (texte ou image) repose sur les mêmes types d'exercices : questionnaires à choix multiples (QCM), exercices lacunaires, exercices de reconnaissance, exercices d'association. À la différence du papier, le multimédia permet à l'apprenant

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Notion proposée par Hymes (1984) 33

Dans un EM, on préfèrera le terme de production (orale ou écrite), l'expressivité de l'apprenant étant quelque peu limitée voire contrainte par le support.

d'interagir avec le support d'activités de façon rapide (technique du glisser-déposer ou "drag- and-drop", par exemple) et peut également lui apporter une rétroaction (marquage des réussites et des erreurs, corrigé, commentaires, encouragements, etc.).

2. Mémoire et compréhension : l’apport des sciences cognitives

La mémoire est un élément-clé dans le processus de compréhension pour ne pas dire dans le processus plus global de l’apprentissage. Les cognitivistes se sont intéressés au rapport qu’entretient la mémoire avec les différents canaux. Michel Lieury, professeur en psychologie, spécialiste de la mémoire, nous éclaire.

2.1. Les différents aspects de la mémoire

2.1.1. Mémoire visuelle, mémoire auditive

Lieury rapporte les résultats d’une expérience qui ont révélé que « la présentation auditive

était supérieure à la présentation visuelle » (Lieury, 1996 : 26) alors qu’on aurait tendance à

penser le contraire . Cette différence tient au fait que la mémoire sensorielle visuelle (ou iconique) ne dure que 250 millisecondes (millièmes de secondes) alors que la mémoire auditive durerait environ 2 à 3 secondes c’est-à-dire dix fois plus.

Concernant les mots, la mémoire sensorielle visuelle (ou iconique) est relayée par la mémoire lexicale, pour les choses (animés ou inanimés), elle est relayée par la mémoire imagée34. Des chercheurs (tels que Paivio, Fraisse ou Denis) ont montré que la mémoire des images (dessin, objet, image mentale) était en général supérieure à celle des mots35 .

On constate, à la suite de nombreuses expériences, que "le rappel de dessin est aussi

performant que le rappel de dessin simultanément verbalisé." On suppose donc que l’image

est recodée verbalement en mémoire : c’est ce que Paivio a appelé "la théorie du double codage".

Le recodage verbal des images est appelé dénomination. Cette dénomination a la particularité de prendre plus de temps que la lecture " parce que le décodage verbal d’un dessin nécessite

une étape d’interprétation sémantique, réalisée dans (…) la mémoire sémantique." (Lieury,

1996 : 32)

La figure qui suit représente les grandes étapes de mémorisation (sous forme de modules) qui codent les informations du sensoriel au plus abstrait : la mémoire sémantique.

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La mémoire imagée n’est pas la mémoire "photographique", c’est plutôt de la synthèse d’image qui est liée au pouvoir d’imagination. C’est ce qui nous permet par exemple d’imaginer un citron bleu !

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Figure 18 - Les modules de la mémoire (Lieury, 1996 : 31)

2.1.2. Mémoire à long terme, mémoire à court terme, mémoire de travail

À l’échelle du temps, la mémoire se divise en deux systèmes fondamentaux : la mémoire à court terme (de capacité limitée avec un oubli en quelques secondes) et la mémoire à long terme (de capacité extensible ou l’oubli est progressif en fonction du temps).

Lieury explique ainsi le rôle de la mémoire dans le mécanisme de la compréhension : "pour

comprendre une phrase, il faut stocker temporairement plusieurs mots de la phrase le temps qu’il y ait accès sémantique en mémoire à long terme." (Lieury, 1996 : 38). Il semblerait,

d’après les résultats de certaines recherches que la compréhension dans la lecture soit dépendante de la taille de la mémoire à court terme.

La mémoire de travail est définie par Baddeley (1986, 1992b) comme :

"un système de maintien temporaire et de manipulation de l'information, nécessaire pour réaliser des activités cognitives complexes, telles que la compréhension, l'apprentissage, le raisonnement."

Dans le modèle que Baddeley propose, la mémoire de travail est présentée comme un système hiérarchisé en plusieurs sous-systèmes articulés :

" la mémoire de travail se compose de l’unité de contrôle (ou administrateur) et de deux sous-systèmes complémentaires (boucle phonologique et système visuo- spatial)." Poyet (1998)

Ces trois systèmes interviennent différemment dans le traitement et le maintien des informations en mémoire de travail :

" L’administrateur joue un rôle de supervision des opérations de maintien et de traitement de l’information ; la boucle phonologique est spécialisée dans le traitement du matériel verbal (texte écrit ou oral) ; d’une manière complémentaire à la boucle phonologique, le système visuo-spatial gère temporairement les informations de nature visuelle et spatiale." (Poyet, 1998 : 247-248)

On notera que les deux sous-systèmes sont couramment appelés "systèmes esclaves" et ce que Poyet nomme "système visuo-spatial" est également connu sous la désignation de "calepin

visuo-spatial" (ou visuo-spatial scratch pad ou sketch pad) (Gaonac'h & Larigauderie, 2000 :

58).

Figure 19 - Le modèle de la mémoire de travail (Gaonac'h & Larigauderie, 2000, d'après Baddeley, 1986)

2. 2. La compréhension langagière

Voici la définition que Lieury donne du processus de compréhension, du point de vue de la psychologie cognitive :

"Comprendre un énoncé est un processus actif dont le but est de construire une

représentation mentale traduisant notre perception de cet énoncé. Le sujet s’appuie sur ses connaissances afin de tirer des inférences qui sont la pierre angulaire pour la compréhension." (Lieury, 1996 : 62)

Calepin visuo- spatial Administrateur central Boucle phonologique

Pour Gaonac'h & Fayol (2003), la compréhension est un processus et aussi le résultat de ce processus. Il s'agit donc d'une activité mentale (et non du seul résultat de cette activité), d'un processus dynamique et complexe qui vise à intégrer les informations au fur et à mesure qu'elles sont perçues en sollicitant simultanément des mécanismes de perception, de mémorisation, de coordination et de contrôle qui requièrent un coût attentionnel très élevé. Le processus de compréhension relève ainsi d'une double opération qui consiste à :

"mémoriser ce qui a été préalablement traité en élaborant une représentation la plus cohérente et la plus exhaustive possible de toutes les informations déjà disponibles, cela en s'appuyant sur les données déjà traitées, ainsi que sur les connaissances antérieures dont on dispose", puis à "traiter les informations nouvelles en les interprétant localement tout en cherchant le plus vite et le mieux possible à les relier de manière significative à la représentation antérieure."

(Gaonac'h & Fayol, 2003 : 6)

Le processus décrit conduit à un résultat que l'on peut qualifier de compétence ou d'habileté.

Merlet (1998b : 142) considère que l’activité de compréhension langagière relève de la réalisation de trois niveaux principaux qui sont les niveaux de la perception, de l’analyse en constituants syntaxiques (ou parsing) et enfin de l’interprétation qui découle de "l’usage

individuel de la signification véhiculée par le message." (Merlet, 1998b : 142). Ils

correspondent à des niveaux de représentation de la signification de plus en plus élaborés. L’activité de compréhension doit donc être considérée " comme une activité de recherche de

la signification dont l’objectif est l’élaboration d’une représentation sémantique de type modèle mental." (Merlet, 1998b : 143).

2.2.1. La compréhension écrite

Gaonac’h nous explique que "la lecture n’(…) est pas conçue comme un recueil

d’informations ; elle est construction de sens par un lecteur actif s’appuyant sur les indices du texte jugés les plus significatifs." (Gaonac’h, 1987 : 159). Les processus de réception du

langage pourraient se résumer en une succession de cycles dont les étapes seraient : échantillonnage, prédiction, test et confirmation.

Baccino & Colé expliquent que comprendre c'est construire une représentation intégrée. L'intégration est une opération cognitive qui consiste à incorporer l'information extraite des différentes phases en une représentation unique cohérente (Baccino & Colé, 1995 : 96). Ils précisent que :

"La structure d'une telle représentation reflète davantage la structure de la situation imaginaire ou réelle que le texte décrit, plutôt que la structure propositionnelle." (Baccino & Colé, 1995 : 96)

Aussi selon les auteurs, la représentation intégrée est qualifiée de modèle de situation (Kintsch & Van Dijk, 1983), de modèle mental (Johnson-Laird, 1983) ou de représentation référentielle (Just & Carpenter, 1987).

Quand on parle de modèle de lecture, il est bien évident que cela revient à parler de modèle de compréhension du texte écrit. La lecture n’est pas seulement la perception et le décodage d’un texte, elle est également construction de sens.

Depuis une trentaine d’années, des modèles de lecture ont été élaborés afin de constituer une représentation du fonctionnement mental du sujet pendant la lecture. En constituant ces modèles, les chercheurs ont tenté d’identifier les différents facteurs qui entrent en jeu dans le processus d’élaboration du sens mais également de déterminer l’importance de chacun de ces facteurs. On a coutume de diviser ces modèles en trois grands types : Le type ascendant "du bas vers le haut", le type descendant "du haut vers le bas" et le type "interactif"36 .

Le modèle ascendant

Dans le type "du bas vers le haut", le lecteur s’appuie principalement sur les signes graphiques pour interpréter les éléments d’information. Ce processus de lecture est linéaire. L’emploi de ce type de modèle est soit la marque d’un lecteur inexpérimenté soit celle d’un bon lecteur qui se trouve face à un texte difficile. Dans le contexte d’apprentissage d’une langue étrangère, un apprenant peut très bien être expérimenté en lecture dans sa langue maternelle et trouver particulièrement difficile un texte écrit en langue étrangère.

Le modèle descendant

Au contraire, dans le type "du haut vers le bas", le lecteur "accorde une place prépondérante

aux systèmes de niveau supérieur dans le traitement de l’information, c’est-à-dire aux structures de connaissances contenues dans le cerveau du lecteur." (Cornaire,1999 : 22). Ce

type de modèle s’appuie sur le principe que la compréhension est "un processus d’élaboration

et de vérification continues d’hypothèses" (Cornaire, 1999 : 23). En fait, le lecteur part de la

signification globale d’un texte et son objectif est alors d’affiner l’hypothèse initiale (élaborée à partir de son expérience et de ses connaissances) au fil des indices qui confirmeront ou infirmeront son idée de départ. C’est ainsi qu’il pourra accéder au sens du texte.

Le modèle interactif

Enfin, le type "interactif" mélange selon les besoins les deux procédés précédents :

"le sens se construit par la mise en correspondance des structures de connaissances du lecteur avec les données qu’il a extrait du texte. Il s’agit d’un échange continu, d’une interaction entre le lecteur et le texte." (Cornaire, 1991 :

22).

En somme, des interactions sont possibles entre les systèmes de niveau inférieur (du bas vers le haut) et supérieur (du haut vers le bas).

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Comme ces modèles proviennent de travaux sur la lecture de l’anglais, on a l’habitude de désigner ces types en anglais : "bottom-up", "top-down" et "interactive".

Les modèles interactifs les plus récents s’inspirent de la théorie des schèmes. Mais avant d’en venir à la théorie, nous allons définir ce qu’est un schème :

"Le schème est un groupement structuré de connaissances qui représentent un concept particulier, par exemple un objet, une perception, une situation, un événement, une série d’actions, etc." (Cornaire, 1999 : 25).

On peut dire que les schèmes représentent nos connaissances. Ils sont hiérarchisés en schèmes supérieurs (ou connaissances globales) et en sous-schèmes (ou connaissances détaillées). Leur caractéristique principale est d’être "des processus actifs qui se modifient avec l’acquisition

de nouvelles connaissances." (Cornaire, 1999 : 26). Cornaire nous explique quel rôle jouent

les schèmes dans le processus de compréhension d’un texte :

"Pour comprendre un texte le lecteur sélectionne des schèmes qui vont lui permettre de donner une signification au texte à partir de l’information contenue dans celui-ci. Il s’ensuit que l’on a compris un texte lorsqu’on a élaboré une série d’hypothèses qui rendent compte de façon cohérente de la signification du texte."

(Cornaire, 1999 : 26).

En 1979, Moirand proposait un modèle qui n’a pas été validé mais qui a le mérite de mettre l’accent sur certaines variables socio-culturelles et relationnelles qui ont également leur importance dans le processus de compréhension d’un texte. Le modèle de Moirand est donc composé des bases suivantes : le lecteur, les relations lecteur/ scripteur (ou plutôt les représentations qu’ils se font l’un de l’autre), les relations lecteur/ scripteur et document, les relations lecteur/ document et extra-linguistiques (références, connaissances).

Si l’on se place du point de vue d’un apprenant en langue étrangère, il faut reconnaître que les modèles "du bas vers le haut" sont trop limités et que les modèles "du haut vers le bas" sont des modèles de lecteurs compétents. Il semblerait donc que les modèles "interactifs" conviennent mieux aux apprenants d’une langue étrangère car ces modèles mettent l’accent sur des habiletés qu’il convient d’acquérir pour devenir un bon lecteur. Il a été remarqué que dans le cas où un apprenant maîtrise vraiment très mal le code linguistique, il a tendance à se replier sur des pratiques plutôt linéaires. Ce qui tendrait à confirmer l’intérêt de démarches pédagogiques dans le sens des modèles interactifs qui seraient d’une certaine façon progressifs.

On distingue la compréhension écrite de la compréhension orale parce que la première construit du sens à partir d’informations textuelles écrites et que la seconde en construit à partir d’informations auditives.

Après avoir considéré les modèles représentant les divers processus de compréhension écrite, voyons maintenant si la compréhension orale fonctionne différemment.

2.2.2. Compréhension orale

Nous reprendrons ici deux modèles, issus de recherches en psycholinguistique, présentés par Gremmo & Holec (1990 : 31-33). Dans le premier modèle, la construction du sens correspond à une démarche sémasiologique c’est-à-dire qui va de la forme au sens. Le deuxième modèle figure une démarche onomasiologique allant du sens à la forme.

Le modèle sémasiologique

Le modèle sémasiologique décrit un processus qui peut se découper en quatre phases. La première est une phase de discrimination : l’auditeur isole d’abord la chaîne phonique du message et identifie les sons qui constituent cette chaîne. Dans la phase de segmentation, l’auditeur délimite les mots, groupes de mots et phrases que représentent ces sons. C’est au niveau de la phase d’interprétation que l’auditeur associe un sens à ces mots, groupes de mots et phrases. Enfin, durant la phase dite "de synthèse", l’auditeur construit la signification globale du message en ‘additionnant les sens des mots, groupes de mots et phrases.

"La démarche adoptée pour comprendre le message oral accorde ainsi la priorité à la perception des formes (signifiants) du message." (Gremmo & Holec, 1990 : 31). Les

défaillances de cette démarche sont les suivantes :

"tout signifiant non discriminé et segmenté échappe à l’opération d’interprétation et laisse un ‘vide’ de sens ; tout signifiant mal segmenté conduit à un non-sens ou à un contresens." (Gremmo & Holec, 1990 : 31).

Par rapport à un lecteur, on voit ici qu’un auditeur doit faire face à une difficulté supplémentaire dans sa perception du texte puisqu’il doit passer par les phases de discrimination et de segmentation. Un texte écrit est en fait la visualisation de l’accomplissement des deux tâches (phases) précédentes.

Le modèle onomasiologique

Le deuxième modèle dit onomasiologique décrit le processus de compréhension de la manière suivante. Dans un premier temps, l’auditeur établit des hypothèses sur le contenu du message en se fondant sur les connaissances dont il dispose et sur les informations qu’il tire de ce message au fur et à mesure de son déroulement. Ces hypothèses sémantiques s’établissent aussi bien au niveau global du message qu’au niveau plus restreint de diverses unités de sens. À ces hypothèses sémantiques sont associées des attentes formelles concernant les formes linguistiques que prendra le contenu sémantique. C’est durant le déroulement du message que l’auditeur établit des hypothèses formelles qui sont fondées sur ses connaissances des structures des signifiants de la langue dans laquelle est encodé le message. Vient ensuite le moment où l’auditeur procède à la vérification de ses hypothèses qui s’opère par une prise d’indices permettant de confirmer ou d’infirmer ses attentes formelles et sémantiques. La prise d’indices s’effectue en fonction des hypothèses formelles, "qui jouent un rôle de

projecteur utilisé pour éclairer le terrain de la vérification." (Gremmo, Holec, 1990 : 33) et

évidemment elle tire avantage des redondances d’indices dans le message. Cornaire (1998 : 89) tenant compte des remarques de Chiang & Dunkel note que la redondance n’est utile qu’aux apprenants d’un niveau intermédiaire fort. Dans le cas des apprenants débutants, la redondance peut concourir à rendre un texte plus difficile (car ces apprenants ont des ressources linguistiques limitées). Cette remarque ne vaut bien sûr que pour les indices d’ordre linguistique).

La dernière phase du processus de compréhension varie selon le résultat de la vérification. Si les hypothèses sont confirmées, la signification du message "préconstruite" s’intègre dans la construction de signification en cours. Si les hypothèses ne sont ni confirmées ni infirmées, l’auditeur suspend sa construction de signification et stocke les informations recueillies. Puis il reprendra sa construction de signification lorsque d’autres indices l’y aideront. Enfin, si les hypothèses sont infirmées, soit l’auditeur reprend la procédure depuis le début mais en partant d’autres hypothèses, soit il abandonne la construction de la signification localement entreprise. Dans ce processus de prévision-vérification, la place accordée au message et à ses formes (signifiants) est secondaire. La signification se construit par une interaction entre l’information apportée par l’auditeur et l’information donnée par le texte.

On voit ici que les modèles représentant le processus de compréhension de l’écrit et de l’oral sont assez proches. On peut même dire que le modèle sémasiologique correspond au modèle "du bas vers le haut" tandis que le modèle onomasiologique se rapproche du modèle "du haut