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3 Cadre physique et concepts du modèle L&K en milieu poreux

3.2 Comportement instantané élastoplastique

3.2.1 Comportement pré-pic

Le comportement pré-pic concerne les petites déformations, celles avant d’atteindre la rupture ou le pic de contrainte. Après avoir succinctement présenté le cadre physique choisi, nous décrirons les concepts du modèle L&K dans ce domaine de déformation.

3.2.1.1.Cadre physique

Plusieurs descriptions de cadres physiques de la phase pré-pic sont présentées par Kleine (2007a) dans sa thèse. Nous rappelons ici les phases proposées par Haïed (1995) sur l’évolution de la déformation axiale et de la déformation volumique (Figure 3.22). Chaque phase est plus ou moins visible selon le type de roche car elle dépend des caractéristiques intrinsèques de la roche.

Figure 3.22 : Phases principales du processus avant rupture dans l’essai de compression uniaxiale et triaxiale monotone (Haïed, 1995)

A l’échelle microstructurale, Kleine (2007a) reprend les considérations micromécaniques de Diederichs (1999) pour mettre en évidence la prépondérance des fissurations d’extension dans le comportement des géomatériaux dans les gammes de confinement étudiées. La Figure 3.23 présente une autre description théorique détaillée du comportement d’une roche, en termes de résistance et de déformation volumique, en correspondance avec les phénomènes microstructuraux sous-jacents (Zhao et al. 2010).

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Figure 3.23 : Evolution théorique de la déformation volumique et de la fissuration (modifié de Zhao et al., 2010a)

La juxtaposition de ces deux descriptions nous amène à identifier de façon simplifiée 3 phases avant le pic de contrainte :

- phase I : serrage et compression élastique linéaire. A très faibles contraintes, la roche commence par fermer ses ouvertures préexistantes puis continue à se contracter tant que la pression de fluide dans les pores reste inférieure à la contrainte exercée. Le fluide peut être de l’air ou de l’eau selon que l’échantillon est sec ou non. Cette phase correspond aux phases 1 et 2 dans la description d’Haïed et avant les points A et E pour Zhao.

- phase II : initiation et propagation régulière de la fissuration. Une fois les fissures créées, on observe une dilatance relative : le matériau continue à se contracter à l’échelle macroscopique mais de moins en moins au fur et à mesure de la propagation des fissures. Ce phénomène se poursuit jusqu’à atteindre un pic de déformation volumique contractante qui précède le pic de contrainte (sous condition de contrainte de confinement pas trop élevée). Cette phase correspond aux phases 3, 4 et 5 dans la description d’Haïed, et entre les points A et B (E et F) pour Zhao.

- phase III : propagation instable de la fissuration et dilatance. Les fissures se propagent de plus en plus, se relient entre elles, et commencent à s’ouvrir : une dilatance absolue apparaît, le volume du matériau augmente. Ce phénomène va s’amplifiant jusqu’à atteindre le pic de contrainte.

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Les trois phases décrites ci-dessus correspondent à des états physiques successifs pour une roche qui vont dépendre de nombreux facteurs, et en particulier de l’état des contraintes comme on a pu le voir sur les Figures 3.12 et 3.13 par exemple. Pour une modélisation du comportement, il est nécessaire de connaître les domaines de contraintes dans lesquels ces phases sont susceptibles de se développer. D’après Diederichs (1999), la propagation des tractions locales est d’autant plus importante que le confinement est faible, et plus précisément que le rapport

min

max est faible. La Figure 3.24 propose quelques seuils en fonction de ce rapport des contraintes.

Figure 3.24 : Influence du rapport des contraintes sur la propagation des tractions locales (Diederichs, 1999)

Malgré la difficulté de la définition d’une telle limite, Kleine (2007a) propose de définir la limite appelée limite de clivage (traduit de « spalling limit ») comme la limite entre un domaine où les fissures d’extension vont se propager et un domaine où les fissures d’extension resteront bloquées. Cette limite peut être décrite par le rapport :

min max

0.05 

(3.2)

La limite de clivage peut ensuite être prolongée pour de plus forts confinements en venant tangenter le seuil de pic jusqu’à l’atteindre pour de grands confinements. Au delà, le modèle proposé par Kleine n’est plus valable. Le seuil ainsi formé sera dorénavant appelé seuil de clivage (Figure 3.25).

Figure 3.25 : Définition du seuil de clivage

fissuration d’extension fissuration limitée min max 0.05   seuil de pic seuil de clivage seuil d’endommagement ζmin ζmax

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Une première conclusion importante de ce paragraphe est donc la définition d’un seuil de clivage qui sépare le plan des contraintes en deux domaines au comportement pré-pic différent :

- à pression de confinement « forte » : fissuration limitée et contrôlée, pas d’ouvertures d’extension ni de tractions locales, et contractance.

- à pression de confinement « faible » : fissuration incontrôlée, ouvertures en extension et tractions locales, et dilatance.

La seconde conclusion sur laquelle nous reviendrons en 3.2.3 concerne le rôle de l’évolution de la déformation volumique et donc de l’évolution de la dilatance dans le comportement des roches considérées comme des milieux poreux. Cela revêt une importance d’autant plus grande que les couplages hydromécaniques basent les interactions roche – fluide autour de l’espace disponible pour le fluide et sur la pression de pore.

Enfin, un dernier aspect important pour la suite est la notion de seuil entre une propagation stabilisée et une propagation instable des fissures. En dessous de ce seuil dans l’espace , si l’on arrête la sollicitation, les fissures arrêtent spontanément de se propager, tandis qu’au dessus, la propagation des fissures est irréversible et incontrôlée. Dans ce dernier cas, la roche sera amenée à la rupture quoiqu’il arrive, à plus ou moins long terme. On reviendra sur ce point dans le paragraphe traitant du comportement différé (3.3).

3.2.1.2.Seuils de résistance « pré-pic »

Nous résumons ci-après les idées retenues pour le modèle L&K à l’aide des phases proposées précédemment. Dans l’espace des contraintes (

min;

max), lors d’une augmentation du déviateur à confinement constant, le comportement pré-pic passe par trois états délimités par trois seuils de contraintes (Figure 3.26) :

- un seuil d’endommagement initial traduisant l’entrée en plasticité du matériau.

- un seuil de clivage au delà duquel la fissuration devient instable avec apparition de tractions locales. La plupart du temps, en dehors des faibles confinements, ce seuil traduit l’apparition de la dilatance au sein du matériau (nous reviendrons sur la dilatance au paragraphe 3.2.3).

- un seuil de pic correspondant à la résistance maximale du matériau.

Figure 3.26 : Les différents seuils et domaines du comportement pré-pic dans le plan des contraintes principales et exemple de chargement à confinement constant

seuil de pic seuil de clivage seuil d’endommagement ζmin ζmax fissuration d’extension fissuration limitée

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Maintenant que le maximum de résistance du matériau a été atteint, il s’agit de décrire ce qui va se passer ensuite, c’est-à-dire le comportement post-pic. Mais les deux comportements ne sont pas découplés : les phénomènes pré-pics que l’on vient de présenter et qui représentent l’histoire du matériau vont avoir une influence et orienter le comportement post-pic.

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