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Chapitre III : Synthèse et caractérisation d’une série de complexes multinucléaires à base

III.2. Les complexes nonanucléaires

III.2.1. Complexes nonanucléaires homonucléaires

Le sel métallique d’ions lanthanide (1 équivalent) est solubilisé dans un minimum de méthanol. Sous agitation magnétique sont ajoutés simultanément 2 équivalents d’Hacac et 3 équivalents de triéthylamine. Immédiatement après l’ajout de ces deux éléments, la solution est placée au réfrigérateur (5°C). Après 48h à cette température, des cristaux incolores et transparents d’excellente qualité pour des études par diffraction des rayons X sont obtenus.

III.2.1.2. Description structurale

Les complexes nonanucléaires sont tous isostructuraux de formule affinée [Ln9(acac)163 -OH)84-O)(μ4-OH)]•xH2O (Figure III.2 ; à gauche). Les structures cristallisent dans le groupe d’espace tétragonal P4/n. Les conditions d’enregistrement des données de diffraction ainsi que les longueurs et les angles de liaison des complexes [Ln9] étudiés sont rassemblées dans l’annexe de ce chapitre. L’unité asymétrique est composée de trois atomes Ln(III), un sur une position spéciale de Wickoff (2c, position métallique centrale) et deux sur des positions générales (8g, positions métalliques périphériques). Elle est complétée de quatre entités déprotonés acac- servant de ligands terminaux, deux groupements μ3 -OH- connectant les positions périphériques et centrale entre elles et de deux groupements μ4-OH- / μ4 -O2- sur des positions désordonnées à 50% (pour assurer la neutralité de l’ensemble) reliant les atomes métalliques des positions périphériques entre eux. Les complexes nonanucléaires peuvent alors être vus comme des pyramides à base carrée [Ln5] mettant en commun leur sommet de la pyramide (Figure III.2 ; à droite). Les groupements μ3-OH- viennent alors coiffer les quatre faces triangulaires de chacune des pyramides et les groupements μ4-OH-/O2- coiffent celles des bases carrées.

Figure III.2: (à gauche) Structure du complexe nano-[Ln9 (acac)16(μ3-OH)8(μ4-O)(μ4-OH)]. Les atomes d’hydrogène ont été omis pour plus de clarté ; (à droite) vue simplifiée du complexe [Ln9] présentant les positions métalliques

74 Les complexes [Ln9] sont bien isolés les uns des autres au sein de l’empilement cristallin puisque la plus courte distance, de centre à centre pour chaque complexe, est égale à 14,22 Å (Figure III.3).

Figure III.3 : Projection selon la direction [010] de la maille de l’empilement cristallin des complexes [Ln9]. Pour plus de clarté, les atomes d’hydrogène ont été omis.

III.2.1.3. Caractérisations magnétiques

Le dysprosium(III), le terbium(III) et l’ytterbium(III) sont les ions lanthanides les plus utilisés pour former des molécules-aimants.14-17 En partant de ces derniers, nous avons tenté de synthétiser les complexes [Ln9] correspondants. Uniquement le [Dy9] et [Tb9] ont pu être isolés et caractérisés. Nous allons dans ce qui suit étudier les propriétés magnétiques de ces deux composés. Nous aborderons tout d’abord l’étude des propriétés magnétiques statiques de ces systèmes (sous forme d’échantillons polycristallins) par des mesures dc à l’aide d’un magnétomètre à détection SQUID entre 2 K et 300 K. Cette étude permet dans un premier temps de caractériser les interactions magnétiques qui peuvent exister entre les centres métalliques porteurs des spins. Puis, des mesures dynamiques ac obtenues avec le même appareillage seront présentées à basse température afin d’étudier la relaxation de l’aimantation dans ces systèmes. Cette dernière technique consiste à appliquer un champ magnétique oscillant et à regarder comment le système suit le champ appliqué, en mesurant la susceptibilité magnétique ac définie par χac = χʹ(réelle) + i χʹʹ(imaginaire) en fonction de la température en champ nul ou en présence d’un champ statique à différentes fréquences.

¾ Mesures dc

Les produits ߯T vs T des deux complexes [Dy9] et [Tb9] sont présentés en Figure III.4 (à gauche). A 300 K, les ߯T pour [Dy9] et [Tb9] sont de 128,92 cm3·K·mol-1 et de 98,75 cm3·K·mol-1, respectivement,

75 proches des valeurs théoriques de 127,53 cm3·K·mol-1 et106,38 cm3·K·mol-1, attendues pour neuf ions Dy(III) et neuf ions Tb(III) magnétiquement indépendants. Au refroidissement, le produit ߯T décroit pour atteindre les valeurs respectives de 63,12 cm3·K·mol-1 et 49,32 cm3·K·mol-1 à 2 K. Ce comportement indique le dépeuplement des sous-niveaux Stark par effet du champ cristallin. Le faible couplage antiferromagnétique entre les centres métalliques peut également contribuer à ce comportement mais ne peut pas être facilement quantifié en raison du fort moment orbitalaire des ions dysprosium(III) et terbium(III) en général.18 L’aimantation des composés [Dy9] et [Tb9] a été mesurée à 2 K (Figure III.4 ; à droite). Les valeurs obtenues sont de 48,7 μβ pour le [Dy9] et 41,88 μβ pour le [Tb9].

Figure III.4 : (à gauche) courbe χT vs T ; (à droite) les courbes d’aimantation en fonction du champ pour les complexes [Dy9] et [Tb9].

¾ Mesures ac

Des mesures ac à basse température ont été réalisées sur les deux composés précédents. En ce qui concerne le complexe [Tb9], l’absence de signal hors phase en absence et en présence de champ statique montre que ce dernier ne présente pas le comportement caractéristique d’une molécule-aimant. Pour le complexe [Dy9], le résultat est le même sans l’application d’un champ magnétique externe. En revanche, lorsque ce dernier est de 1 000 Oe, les mesures de susceptibilité montrent une composante hors-phase (߯’’) indiquant ainsi un comportement de molécule-aimant induit par le champ (Figure III.5). L’effondrement du signal (߯’’) en fonction de la fréquence est signe d’une relaxation rapide de l’aimantation. Sachant que différents types d’interactions sont possibles entre les ions dysprosium(III) au sein du complexe nonanucléaire, l’accélération de la relaxation peut être dans ce cas la conséquence de l’ensemble de ces interactions19 et/ou à la présence d’un effet tunnel important.

76 Figure III.5 : (à gauche) courbe AC des susceptibilités réelle et imaginaire (à droite) pour le [Dy9], H = 1000 Oe.

En regard des différents paramètres impliqués, apporter une explication à un résultat magnétique observé dans une entité moléculaire comportant plusieurs sites magnétiques est très compliqué. Pour simplifier et essayer de comprendre les différents phénomènes mis en jeu, il serait intéressant d’isoler un seul ion Dy(III) au sein d’une matrice d’ions diamagnétiques pour cette structure polynucléaire. Une étude des données structurales approfondie de la structure cristalline des [Ln9]13 montre que la position métallique centrale offre 20% plus de volume d’occupation que la positon périphérique (Figure III.6).

Figure III.6 : Structure [Ln9] mettant en valeur les deux positions cristallographiques (centrale et périphérique).

Parallèlement, il est reconnu que tout au long de la série des lanthanides, les propriétés physiques sont similaires, le seul paramètre structural variant est la taille de l’ion (rayon ionique). Ce dernier décroît en effet régulièrement du lanthane (1,03 Å) au lutécium (0,86 Å). Connaissant ces deux paramètres (rayon ionique, volume d’occupation), l’idée fut d’isoler un ion dysprosium(III) en position centrale et dopé le complexe par un autre ion métallique de rayon ionique moins important et si possible diamagnétique. Théoriquement, un dopage comprenant 10 % dysprosium(III) et 90% yttrium(III), le premier étant plus volumineux (0,93 Å) que le second (0,90 Å), mènera à une position centrale préférentiellement occupée par un ion Dy(III), les positions périphériques étant occupées prioritairement par l’ion Y(III). La caractérisation du complexe hétéronucléaire formé et les mesures réalisées sont décrits ci-dessous.

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