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La complémentarité entre la répartition et la capitalisation ou la question du

Les simulations basées sur le modèle d'équilibre général d'Auerbach et Kotlikoff (1987) ont montré que la privatisation du système par répartition aurait des effets positifs sur les variables macroéconomiques dans le long terme. Toutefois, la période de la transition engendre un coût qui sera supporté par certaines générations. La plupart des politiques de financement de la transition auraient des effets positifs sur le bien-être des générations futures, mais au détriment du bien-être des générations de la transition. Il s'en suit que les effets positifs de la privatisation du système de retraite n'apparaissent que dans le long terme ce qui peut expliquer la réticence des politiciens à entreprendre une telle réforme.

En partant du principe qu‘une politique ne sera applicable que si elle est politiquement acceptable, Cooley et Soares (1999) développent un modèle de marché d‘économie politique pour analyser les politiques qui laisseraient inchangé le bien-être des générations de la transition. Ce sont ces dernières qui vont voter pour l‘application d‘une politique, et elles ne vont le faire que dans le cas où leurs intérêts sont préservés.

Ces politiques présentent la particularité de pénaliser les plus jeunes et d‘évincer le système de répartition en quatre périodes au cours desquelles le taux de remplacement diminue de manière graduelle et linéaire. Plus particulièrement, si on subdivise la période de

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durée de vie active en trois, il est possible d‘identifier quatre groupes au sein des générations de la transition. Le premier groupe a atteint l'âge de la retraite lors de l'introduction de la capitalisation. Le second correspond aux individus en fin de période d'activité. Les troisième et quatrième groupes correspondent aux individus qui se trouvent respectivement en seconde et première partie de période active.

La réforme se caractérise par le fait que les actifs vont cotiser de moins en moins au système par répartition et en retour vont recevoir de moins en moins de pensions une fois à la retraite.

Les résultats ont montré que la politique qui maximise l‘utilité moyenne de tous les individus, est celle où la baisse du taux de remplacement ne commence qu‘en deuxième période, celle où le groupe de la génération de la transition qui se trouve en fin de sa vie active atteint l'âge de la retraite. Cette politique préserve ainsi les intérêts du groupe des retraités de la génération de la transition. Le financement de la transition doit se faire par le recours simultané à l'emprunt et à une taxe sur la consommation.

Le financement par emprunt présente l‘avantage de reporter le coût de la transition sur les générations futures préservant ainsi le bien-être des générations de la transition. En revanche, la taxe sur la consommation pénalise plus les retraités que les actifs car les retraités ont une propension moyenne à consommer plus élevée. Dans ces conditions, le taux de remplacement nécessaire doit être plus élevé pour préserver le bien-être des retraités. Mais, cette politique se traduit par un effet négatif sur le bien-être des générations futures (Arrau et Schmidt-Hebbel, 1993; Cooley et Soares, 1999).

Le choix de la politique de transition adopté par Cooley et Soares (1999) a pour objectif de préserver le bien-être des générations de la transition, de telle sorte qu‘elles votent la privatisation. Toutefois, cette politique qui affecte négativement le bien-être des générations futures n'est pas efficiente. Ce problème pourrait être contourné en maintenant un pilier par répartition garantissant l'aspect de l'assurance sociale (Pecchenino et Pollard, 1997).

L‘idée d'un système de retraite mixte se base sur la complémentarité entre le système de retraite par répartition et celui par capitalisation. Cette complémentarité, liée aux différences dans les caractéristiques des deux systèmes de retraite, apparaît à plusieurs niveaux.

Ainsi, alors que le système par répartition présente un risque de rendement lié à l‘évolution démographique et à la croissance de la productivité du travail, le système par

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capitalisation offre une assurance contre le risque démographique. De même, le risque de rendement du système par capitalisation qui est lié à l'inflation est couvert par le système par répartition. Aussi, la complémentarité des deux systèmes de retraite apparaît au niveau de la couverture que chacun d'eux offre contre le risque de rendement de l'autre.

La différence entre les deux systèmes apparaît également au niveau du lien entre les cotisations et les pensions. Ce dernier est faible pour le système par répartition ce qui lui confère son caractère redistributif assurant un niveau de pension minimum aux plus démunis. En revanche, dans un système par capitalisation, les cotisations et pensions vérifient le principe de l‘équivalence actuarielle réduisant ainsi les disparités à l‘intérieur des générations ce qui rend ce mode de financement plus «juste». Enfin, contrairement au système par répartition, le système par capitalisation favorise l‘accumulation du capital.

La combinaison des deux techniques de financement permettrait en raison de leur complémentarité de pallier leurs insuffisances respectives en puisant dans les avantages de l‘autre. Il est nécessaire, cependant, de savoir quelle part va occuper chaque système de retraite afin d'avoir un système mixte optimal.

Aussi, dans la section suivante, nous nous proposons d'étudier d'un point de vue théorique le dosage optimal entre le système de retraite par répartition et celui par capitalisation dans une optique de maximisation du bien-être social [Belan, 1997; Artus et Legros, 1998].

4.1 Le système de retraite optimal dans un contexte d'hétérogéneité des

travailleurs: distinction entre travailleurs qualifiés et travailleurs non-qualifiés

L'augmentation de la part de la capitalisation accentue les inégalités de revenu entre les travailleurs qualifiés et non qualifiés ce qui se répercute négativement sur le bien-être social (Artus et Legros,1997). En raison de ses effets redistributifs, le système de retraite par répartition peut pallier cette insuffisance. Aussi, Artus et Legros ont cherché à déterminer le dosage optimal du système par répartition qui permettrait de maintenir constant le niveau de bien-être social.

Les travailleurs non-qualifiés ont tendance à être risquophiles et n‘adoptent pas un comportement de prévoyance. En l'absence du système par répartition, leur bien-être se trouverait détérioré. En revanche, les travailleurs qualifiés bénéficient d‘un héritage qui préserve leur bien-être. De plus, le rendement des placements des travailleurs non-qualifiés

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est inférieur à celui des travailleurs qualifiés. En effet, l‘épargne des non-qualifiés étant faible, elle ne leur permet pas de diversifier leurs placements. De plus, le contexte économique international qui pousse à la spécialisation et à l‘évolution technologique ne fait qu‘accroître les inégalités de revenus entre ces deux catégories de travailleurs.

Le modèle présenté par Artus et Legros prend en compte toutes ces particularités afin de déterminer dans ce contexte les caractéristiques du système de retraite optimal.

Pour les entreprises, la fonction de production par tête se présente comme suit: 𝑦𝑡 = 𝜃𝑎 1 − 𝜃 𝑏𝑘

𝑡

1−𝑎−𝑏 (2.54)

Où 𝜃 représente la part des travailleurs non-qualifiés dans la population active.

La rémunération des facteurs de production à leurs productivités marginales détermine le taux d‘intérêt 𝑟𝑡, le salaire des non-qualifiés 𝑤𝑡 et des qualifiés 𝑠𝑡.

Le salaire relatif des qualifiés peut ainsi s'exprimer comme suit:

𝑠𝑡 𝑤𝑡 = 𝑏 𝑎 𝜃 1−𝜃 (2.55)

Par hypothèse, Artus et Legros supposent que le salaire relatif des travailleurs qualifiés est élevé, c'est-à-dire: 𝑏 > 0 𝑒𝑡 1−𝜃 𝜃 > 1.

Le choix du système de retraite répond à la maximisation du bien-être social, défini par la fonction d‘utilité suivante:

𝑈 = 𝜃 𝑙𝑛 𝐶𝑗 + 1 1+𝑛𝑙𝑛 𝐶

𝑣 + 1 − 𝜃 𝑙𝑛 𝐷𝑗 + 1 1+𝑛 𝐷

𝑣 (2.56)

Cette fonction d‘utilité sociale est la somme de la fonction d‘utilité des travailleurs non-qualifiés, pondérée par θ, et de la fonction d‘utilité des travailleurs qualifiés, pondérée par (1-θ). La consommation des jeunes non-qualifiés et qualifiés est représentée respectivement par Cj et Dj. La consommation pendant la retraite pour les catégories des non-qualifiés et qualifiés est représentée respectivement par Cv et Dv. Le taux de croissance démographique est désigné par n.

Cette maximisation se fait sous les contraintes budgétaires des jeunes et des vieux qualifiés et non- qualifiés:

Chapitre 2 97 𝐶𝑣 = 𝜏 1 + 𝑛 𝑤 + 𝑒 1 + 𝑟 + 𝜇𝑤 (2.58) 𝐷𝑗 =1+𝜌 2+𝜌[𝑠 (1 − 𝜏 𝑟−𝑛 1+𝑟 ) − 𝑓 − 𝜇𝑤 1 1+𝑟 𝜃 1−𝜃] (2.59) 𝐷𝑣 = 𝜏 1 + 𝑛 𝑠 + 𝑓 1 + 𝑟 − 𝜇𝑤 𝜃 1−𝜃 (2.60)

La contrainte (2.57) représente la contrainte de liquidité des jeunes travailleurs non- qualifiés qui définit leur consommation comme le résidu de leur salaire net de la cotisation au système de retraite par répartition au taux τ et d‘une épargne minimale 𝑒 traduisant la présence d'une contrainte de liquidité.

Au cours de la période de retraite, le travailleur non-qualifié va recevoir une pension égale à sa cotisation augmentée du taux de rendement du système par répartition, soit (1+n), à laquelle s‘ajoute son épargne augmentée du taux d‘intérêt ainsi qu‘un transfert de revenu (µw) variant avec le salaire des non-qualifiés et versé par les "vieux" qualifiés.

La contrainte budgétaire (2.59) correspond à celle des actifs qualifiés. Elle indique que leur consommation est égale à leur salaire net de la cotisation au système de retraite par répartition et de l‘épargne. Bien que le transfert de revenu effectué entre les retraités apparaisse au niveau de cette équation, il est financé par des prélèvements réalisés sur le salaire des actifs qualifiés.

La contrainte budgétaire (2.60) est relative aux "vieux" qualifiés. Elle relie leur consommation à la pension de retraite qu‘ils vont recevoir en plus de leur épargne,𝑓, augmentée de son rendement et le tout diminué du transfert qu‘ils versent aux non-qualifiés.

En utilisant la relation d'équilibre, reliant l‘épargne des jeunes au capital de la période suivante, il vient que:

1 + 𝑛 𝑘 = 𝜃𝑒 + 1 − 𝜃 𝑓 (2.61)

En posant 𝑒 = 𝜀𝑘1−𝑎−𝑏 et en explicitant l‘épargne des qualifiés, l‘expression (2.61) peut être formulée comme suit:

1 + 𝑛 𝑘𝑎+𝑏 = 𝜃𝜀 +𝜃𝑎 1−𝜃 𝑏 2+𝜌 𝑏 1 − 𝜏 1 + 1+𝜌 1+𝑛 1+𝑟 + 𝜇𝑎 1+𝜌 1+𝑟 (2.62)

La dérivée de cette expression par rapport au taux du transfert µ décrit l'évolution du stock du capital suite au transfert:

98 1 + 𝑛 𝑎 + 𝑏 𝑘𝑎+𝑏−1 𝜕𝑘 𝜕𝜇 − 𝜏 1 + 𝜌 1 + 𝑛 1 + 𝑟 2 𝜃𝑎 1 − 𝜃 𝑏 2 + 𝜌 𝑏 𝜕𝑟 𝜕𝑘 𝜕𝑘 𝜕𝜇 + [𝜇𝑎𝜃 𝑎 1 − 𝜃 𝑏 1 + 𝜌 1 + 𝑟 2 2 + 𝜌 𝜕𝑟 𝜕𝑘 𝜕𝑘 𝜕𝜇] = 𝜃𝑎 1 − 𝜃 𝑏 2 + 𝜌 𝑎 1 + 𝜌 1 + 𝑟

Comme le dernier terme de cette expression est positif, il s'en suit que le transfert µw agit positivement sur le capital par tête. Ainsi, la redistribution intragénérationnelle qui caractérise le système par répartition favoriserait l‘accumulation du capital dans l‘économie. En effet, les travailleurs qualifiés vont augmenter leur effort d'épargne pour compenser la perte qu'ils vont subir en versant une partie de leur épargne aux travailleurs non-qualifiés. Il en résulte que l'augmentation de leur épargne va contribuer à l‘augmentation du capital par tête.

Le taux de cotisation du système par répartition qui permettrait de garantir un niveau de bien-être constant est celui pour lequel: 𝜕𝑈𝜕𝜏 = 0

Le taux de cotisation optimal vérifie la condition suivante:

−𝜃𝑤 𝐶𝑗 + 𝜃𝑤 𝐶𝑣 + 1−𝜃 𝐷𝑗 1 + 1 1+𝑛 1+𝜌 2+𝜌𝑠 1+𝑛 1+𝑟− 1 + 𝜕𝑈 𝜕𝑟 𝜕𝑟 𝜕𝜏 + 𝜕𝑈 𝜕𝑤 𝜕𝑤 𝜕𝜏 = 0 (2.63)

Selon l'équation (2.63), la consommation des jeunes non qualifiés agirait positivement sur le bien-être social contrairement à la consommation des vieux non qualifiés. Autrement dit, le taux de cotisation optimal au système par répartition est celui qui permettra aux actifs non-qualifiés d'obtenir un niveau de consommation au cours de la période d‘activité plus important qu'au cours de la période de retraite.

Ce modèle montre également que si le taux de cotisation agit positivement sur le bien- être social alors le transfert améliore le bien-être social. Autrement dit, le caractère redistributif du système par répartition améliore le bien-être social, ou du moins assure le maintien de son niveau.

Ce modèle peut être étendu à la prise en compte d‘hypothèses ayant pour conséquence d‘amplifier les inégalités entre les retraités. Ainsi, en économie ouverte, en supposant la présence d'héritages spécifiques aux travailleurs qualifiés, de contrainte de liquidité pour les non-qualifiés, de taux d‘intérêts différenciés plus avantageux pour les qualifiés, il apparait que

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ce sont les non-qualifiés qui ont intérêt à ce que la taille du système par répartition augmente. Les transferts de revenu dans le cadre de la capitalisation contribuent à réduire les inégalités favorisant une augmentation du niveau du bien-être social. Il en résulte que si le système par capitalisation contribue à creuser les inégalités entre les retraités, une dose de répartition permettrait de les réduire.

Dans l'étude d'Artus et Legros, le taux de cotisation optimal pour le système par répartition paraît indépendant du stock de capital de l'économie. En revanche, Belan montre que le stock de capital est un facteur déterminant dans le choix du taux de cotisation optimal.

4.2 Le taux de cotisation optimal: extension du modèle de Samuelson

1975

Selon Samuelson, le système de retraite optimal à l'état stationnaire est celui qui répond aux attentes d‘une économie selon son degré d‘accumulation de capital. Aussi, l'auteur entreprend de déterminer le taux de cotisation au système par répartition qui la rapprocherait de la règle d'or. Il conclut que, dans une situation de suraccumulation du capital, le système par répartition ayant des effets négatifs sur l'épargne et l'accumulation du capital, est le seul capable de conduire l'économie sur un sentier de croissance le long duquel la consommation par tête est optimale et stock de capital par tête vérifie la fameuse règle d'or d'accumulation du capital. En revanche, lorsque l'économie se trouve en situation de sous-accumulation, le système par capitalisation obligeant les individus à épargner davantage, pourrait ramener le stock de capital à son niveau de la règle d'or. Il s'ensuit que dans cette optique il n'y a aucun intérêt à faire coexister les deux systèmes de retraite.

Belan entreprend de vérifier si ce résultat tiendrait encore lorsqu'on tient compte de la redistribution intra générationnelle liée au système par répartition. A cet effet, l'auteur introduit la distinction entre travailleurs qualifiés et travailleurs non qualifiés. Toutefois, il suppose que les deux catégories de travailleurs reçoivent le même niveau de pension. Comme les cotisations sont liées au salaire, il s'ensuit que le taux de remplacement est plus faible pour les travailleurs qualifiés.

Le système de retraite optimal déterminé est celui qui maximise le bien-être social sous la contrainte des ressources de l'économie:

100 𝑀𝑎𝑥 𝑁1 𝑢 𝑐𝑎1,𝑡 + 𝛾𝑢 𝑐𝑟1,𝑡+1 + 𝑁2 𝑢 𝑐𝑎2,𝑡 + 𝛾𝑢 𝑐𝑟2,𝑡+1 (2.64) Sous contrainte 𝑁1+ 𝑕𝑁2 𝑓 𝑘 − 𝑘 = 𝑁1 𝑐𝑎1,𝑡 + 𝑐𝑟1,𝑡+1 + 𝑁2 𝑐𝑎2,𝑡 + 𝑐𝑟2,𝑡+1 (2.65) 𝑐𝑎,𝑡 + 𝑠𝑡 = 𝑤𝑡 1 − 𝜏𝑟 − 𝜏𝑐 (2.66) 𝑐𝑟,𝑡+1 = 𝜏𝑐𝑤𝑡 + 𝑠𝑡 1 + 𝑟 +𝑕+𝑏1+𝑏𝜏𝑟𝑤𝑡 (2.67) 𝑏 =𝑁1 𝑁2 (2.68)

Où l'indice 1 désigne les travailleurs non-qualifiés et 2 les travailleurs qualifiés.

𝑁1 représente la taille de la population des travailleurs non-qualifiés et 𝑁2 celle des

travailleurs qualifiés.

𝜏𝑟 𝑒𝑡 𝜏𝑐 représentent respectivement le taux de cotisation au système par répartition et au système par capitalisation.

h correspond à un facteur de productivité associé au travail qualifié. Il est supposé être supérieur à 1.

L'équation (2.64) représente la fonction de bien-être social. Elle est définie par la moyenne pondérée de la fonction d'utilité des travailleurs qualifiés et des non-qualifiés. La contrainte de ressources de l'économie est représentée par (2.65) qui établit un lien entre le stock de capital de l'économie et l'épargne des travailleurs qualifiés et non-qualifiés.

Les relations suivantes (2.66) et (2.67) expriment la contrainte budgétaire d'un individu respectivement durant ses deux périodes de vie.

En se basant sur une étude numérique, Belan détermine le triplet (k, 𝜏𝑟, 𝜏𝑐) qui permet à l'économie d'atteindre le régime de croissance de la règle d'or d'accumulation de capital. Il en conclut que lorsque l'économie est en sous-accumulation, il serait utile d'introduire la capitalisation qui, en obligeant les individus à épargner davantage, permet d'augmenter le stock de capital ainsi que le revenu disponible pour la consommation. Mais, il n'en demeure pas moins que dans ce cas le système par répartition a un rôle à jouer dans la redistribution du revenu entre les catégories considérées. Les deux systèmes de retraite seraient alors indispensables pour maximiser le niveau du bien-être social. En revanche, si l'économie en

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situation de sous-accumulation se trouve très éloignée de la règle d'or, le système de retraite optimal serait le système par capitalisation.

Toutefois, si l'économie se trouve en situation de suraccumulation, l'introduction de la répartition permettrait de réduire le stock de capital le ramenant à son niveau de la règle d'or, tout en réduisant les écarts de revenu de cycle de vie. En revanche, lorsque l'économie se trouve proche de la règle d'or, il est préférable d'associer au système par répartition un système par capitalisation qui permettrait d'atténuer la diminution du stock de capital pour éviter à l'économie de se retrouver en situation de sous-accumulation.

Aussi, dans le cas où l'économie n'est pas éloignée de la règle d'or, le système de retraite optimal est un système de retraite mixte. Il permet au planificateur d'effectuer un arbitrage entre le revenu disponible pour la consommation et sa répartition entre les deux catégories considérées, dans une optique de maximisation du bien-être social.

CONCLUSION

Le passage du système par répartition au système par capitalisation implique une période de transition dont il importe d'évaluer les effets sur l'économie. Ainsi, dans la première section de ce chapitre, nous avons montré d‘un point de vue théorique, en nous basant sur un modèle à générations imbriquées, que des effets positifs sur l'épargne et le stock de capital peuvent apparaître durant cette période sous condition de maintenir constant le taux de cotisation global. Nous avons également montré, dans la seconde section, que l'efficience de la période de transition est tributaire du maintien d'un pilier redistributif (Homburg, 1990, Brunner, 1994; Pecchenino et Pollard, 1997; Belan 2001; Gyàrfàs et Marquardt, 2001).

Dans la section trois, en nous appuyant sur les résultats issus de simulations de modèle d'équilibre général calculable nous avons examiné les effets de la transition sur les variables macroéconomiques et sur le bien-être des générations selon les modalités de financement de cette période. Il apparaît alors que lorsque le financement est réalisé par l'emprunt uniquement ou combiné avec un impôt sur le revenu, l'effet sur le bien-être des générations de la transition est positif (Arrau et Schmidt-Hebbel, 1993). En revanche, lorsque le financement se base essentiellement sur l'impôt, l'effet sur le bien-être des générations de la transition est négatif. La diminution du bien-être serait plus importante pour les actifs démunis lorsque l'impôt est appliqué sur le salaire, pour les actifs riches lorsque l'impôt est appliqué sur le revenu et pour les retraités de la classe moyenne lorsque l'impôt est appliqué sur la consommation (Kotlikoff,

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1996). Plusieurs politiques d'accompagnement de la transition ont été analysées: la politique de la pension minimale, du "progressive matching" ou encore du "opting out". Toutefois, ces politiques qui ont pour objectif d'alléger la charge de la transition ne garantissent pas pour autant un effet positif sur le bien-être des générations de la transition (Kotlikoff et al., 1998(a); Kotlikoff et al., 1998(b)). En revanche, tous ces travaux ont montré que l'effet de la transition sur les variables macroéconomiques quoique faible est positif.

Ces études mettent en évidence l'importance de conserver un pilier redistributif à côté du système par capitalisation, ce qui permettrait pour de préserver le bien-être des générations (Pecchenino et Pollard, 1997). Aussi, dans la section 4 nous avons examiné la question du dosage optimal entre les deux piliers dans un cadre d'un modèle tenant compte de l‘hétérogéneité de la force de travail et des revenus (Artus et Legros, 1997; Belan,1997). Il ressort de ces travaux que, dans l'optique de maximiser le bien-être social, la coexistence des deux systèmes de retraite serait utile.

Ce chapitre aboutit à la nécessité de combiner les deux modalités de financement de la retraite. L‘expérience des systèmes à piliers multiples préconisée par la Banque Mondiale depuis 1994 semble conforter cette déduction. Plusieurs pays ont adopté des systèmes de retraite à plusieurs piliers. Aussi, dans le chapitre suivant, nous examinerons quelques expériences de réforme.

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CHAPITRE 3 .LES EXPERIENCES