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5 Caractérisation et quantification de la composante organique des particules cométaires

5.1 Détection et caractérisation de la composante organique cométaire

5.2.4 Le rapport élémentaire C/Si

5.2.4.3 Comparaison à des cosmomatériaux

La Figure 133 présente la comparaison du rapport élémentaire C/Si des particules de la comète 67P/Churyumov-Gerasimenko (67P/C-G) avec quatre objets : la photosphère solaire (en noir), les particules de la comète 1P/Halley (en bleu cyan), les IDPs chondritiques et poreuses (en orange) et les chondrites carbonées CI (en bleu).

L’abondance relative du carbone dans les poussières de 67P/C-G est donnée d’une part pour la composition globale provenant de la sélection des 494 spectres de masse. Celle-ci est de (𝐶 𝑆𝑖 = 5,5 ⁄ −1,2+1,4)

67𝑃/𝐶−𝐺 et est indiquée par un carré rouge. Le rapport élémentaire C/Si est également

indiqué, pour chacune des 25 particules sélectionnées, par des carrés au contour rouge (Tableau 44).

Figure 133 : Rapport élémentaire C/Si du proto Soleil, des particules cométaires de 67P/C-G et 1P/Halley, des IDPs chondritiques et poreuses (CP-IDP) et des chondrites carbonées CI. Les valeurs pour la photosphère solaire et les chondrites carbonées CI proviennent de Lodders (2010), la valeur pour 1P/Halley de Jessberger, Christoforidis, and Kissel (1988), la moyenne et les valeurs individuelles des 19 CP-IDPs proviennent de Thomas et al. (1993) et les valeurs pour la comète 67P/C- G sont issues des travaux présentés dans ce manuscrit. La moyenne provient de la sélection des 494 spectres de masse, la barre d’erreur du facteur RSF. Les valeurs individuelles proviennent des 25 particules cométaires sélectionnées.

 Comparaison avec la photosphère solaire

Les abondances élémentaires du proto Soleil correspondent à celles présentes dans le système solaire lors de sa formation il y a 4,5 milliards d’années. Le rapport de carbone par rapport au silicium est de 𝐶 𝑆𝑖 = 7,19 ± 0,83⁄ (Lodders 2010). La proximité du rapport C/Si, entre les particules de la comète 67P/C-G et le proto Soleil, indique que l’abondance de carbone cométaire a relativement peu évoluée depuis sa formation. La matière de 67P/C-G n’aurait donc pas subi d’altération thermique suffisante pour être appauvrie en cet élément.

Proto soleil 67P/C-G 1P/Halley

CP-IDP

CI

0

2

4

6

8

C

/Si

(at

/at

)

177

 Comparaison avec les particules de la comète 1P/Halley

L’abondance relative du carbone au sein des particules de la comète 1P/Halley est de 𝐶 𝑆𝑖⁄ = 4,4 ± 1,3 (Jessberger, Christoforidis, and Kissel 1988). 1P/Halley et 67P/C-G sont les seules comètes pour lesquelles l’abondance en carbone a été calculée. Or, ces deux abondances sont très proches l’une de l’autre. Les analyses élémentaires des particules de la comète 67P/C-G viennent donc confirmer la forte teneur en carbone de ces petits corps.

 Comparaison avec les IDPs chondritiques et poreuses

Une origine cométaire a été proposée pour certaines IDPs chondritiques et poreuses (CP-IDPs, voir la discussion § 1.3.2). L’abondance élémentaire de carbone relatif au silicium a été calculée pour 19 CP-IDPs (Thomas et al. 1993), l’abondance moyenne est de 𝐶 𝑆𝑖⁄ = 2,0. Les 19 valeurs de ces CP-IDPs sont comprises entre 0,67 et 4,6 (Figure 133).

Au vu de la forte teneur en carbone de 5 CP-IDPs (C/Si > 3,0) Thomas et al. (1993) proposent que celles-ci proviennent de particules cométaires. Les abondances en carbone des particules de la comète 67P/C-G (2,8 < C/Si < 8,0) sont compatibles avec les valeurs des 5 CP-IDPs. Ces résultats semblent donc aller dans le sens de l’origine cométaire proposée par Thomas et al. (1993). Toutefois, si la valeur du rapport C/Si est proche entre ces deux objets, celle des CP-IDPs est en moyenne inférieure aux particules cométaires. Ce résultat laisse donc à penser que les CP-IDPs auraient subi des altérations thermiques, ayant pour conséquence une perte de carbone. Ces altérations pourraient avoir eu lieu, après l’éjection des particules de la comète, durant leur parcours vers la Terre et/ou lors de leur entrée dans la stratosphère terrestre.

 Comparaison avec les chondrites carbonées CI

Les chondrites carbonées CI appartiennent à la classe de météorites les plus carbonées (Lodders 2010) avec une abondance relative de carbone 𝐶 𝑆𝑖⁄ = 0,76 ± 0,10. Cependant, si leur composition chimique est proche de celle de la photosphère solaire pour la plupart de leurs éléments constitutifs, les éléments formant des composés volatils (H, C, N et O) sont sous abondants (§ 1.3.1). Les processus (thermique et altération aqueuse) qu’aurait subi le corps parent des chondrites pourraient être à l’origine de leur faible teneur en carbone.

Les particules de la comète 67P/C-G ont une abondance en carbone environ 7 fois supérieure à celle des chondrites carbonées CI (Figure 133). Les particules cométaires seraient ainsi plus primitives que ces dernières. Ce résultat est en accord avec la caractérisation de la composante organique des particules de 67P/C-G, qui propose que la matière organique cométaire soit plus primitive que celle de l’IOM extraite des chondrites (§ 5.1.3).

 Comparaison avec les micrométéorites ultracarbonées d’Antarctique

Les micrométéorites ultracarbonées collectées en Antarctique (UCAMMs) sont à ce jour les petits corps du système solaire les plus riches en carbone. L’UCAMM (DC94) analysée sur le modèle de référence de COSIMA et discutée dans ce manuscrit a une abondance relative de carbone de 𝐶 𝑆𝑖⁄ = 14 ± 9. Toutefois certaines UCAMMs peuvent atteindre des rapports largement supérieurs, jusqu’à C/Si = 1000 (Bardin 2015).

L’abondance relative du carbone des particules de 67P/C-G est entre 3 et 200 fois inférieure à celle des UCAMMs (pour des raisons de clarté, ces valeurs n’ont pas été incluses dans la Figure 133). Une origine cométaire a été proposée pour les UCAMMs. Au vu de leur très forte teneur en azote (0,05 < N/C (at) < 0,17 (Bardin 2015)), il a été proposé que la matière organique des UCAMMs se soient formées suite à l’irradiation par rayonnement cosmique galactique d’objets glacés transneptuniens riches en glaces de N2 et CH4 (Dartois et al. 2013). Toutefois, l’abondance en

carbone et en azote des particules de 67P/C-G (N/C = 0,033 ± 0,011 (Fray en préparation)) est inférieure à celles des UCAMMs. Les signatures spectrales de l’UCAMM DC94 mesurée sur l’instrument COSIMA RM (§ 4.2.2.2) diffèrent également des particules cométaires analysées. Ces résultats suggèrent que les processus de formation de la matière organique, contenue dans les UCAMMs et dans les particules de 67P/C-G, ne sont pas les mêmes.

178 La matière organique cométaire présente des similarités avec la matière organique insoluble (IOM) extraite de météorites (§ 5.1.3 et (Fray et al. 2016)). Ces similitudes pourraient indiquer que la matière organique réfractaire ait une origine commune pour ces deux échantillons. Toutefois, le lieu de formation de l’IOM reste, à ce jour, non déterminé avec certitude. L’IOM pourrait provenir de la nébuleuse solaire (Nuth, Johnson, and Manning 2008; Ciesla and Sandford 2012) ou du milieu interstellaire (Alexander et al. 2008) (voir la discussion § 1.3.1.1.2).

5.3 Recherche de polyoxyméthylène