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2.3 Echanges entre les microbioréacteurs

3.1.3 Compaction de l’émulsion

Nous proposons deux méthodes qui permettent de réaliser un réseau 2D compact de gouttes d’émulsion. La première méthode est basée sur l’équation 3.1. Des gouttes libres d’eau dans une huile fluorée vont crémer rapidement et se compacter naturellement en strates de plus en plus denses [Mueth et al., 1996]. L’émulsion de microbioréacteurs est collectée dans une seringue puis réinjectée par strate dans la chambre de stockage. Le choix de la strate permet le choix de la fraction volumique en gouttes.

La figure 3.6, illustre les différents états de compaction que l’on peut obtenir. Les gouttes étant déformables, on peut aller au-delà du "close-packing", Φ3D=0.7405 calculé par Ostwald qui corres-

pond à Φ2D=0,9069 pour des gouttes cylindriques, c’est-à-dire compactées à 2D comme dans notre chambre [Princen, 1983]. Les gouttes prennent une forme hexagonale typique des films de savon (Fig. 3.6.a). Ce n’est pas le cas idéal pour arrêter les gouttes car celles-ci vont avoir tendance à relaxer pour retrouver une forme circulaire, ce qui va se traduire par des mouvements d’ensemble du réseau. La relaxation est possible car l’organisation très compacte des gouttes se fait par domaine est pas sur l’ensemble de la chambre. Dans le cas "close-packed", les gouttes se touchent sans déformation de l’interface. Il est difficile de sélectionner cette strate de la précédente. Ainsi est-il préférable de travailler dans un cas légèrement moins compacte. Le réseau de goutte est assez dense pour limiter les mouvements et la présence de défauts va permettre "d’absorber" des déformations du réseau dû par exemple à des événements de coalescence.

Une autre méthode de compaction consiste à extraire de l’huile à mesure que l’émulsion est for- mée. L’extracteur de phase continue décrit figure 3.7 est basé sur une analogie entre électrocinétique et hydrodynamique [Schindler and Ajdari, 2008]. Dans le cas d’un liquide newtonien incompressible et d’un écoulement laminaire dans un canal, il existe une correspondance univoque entre la perte de

g

(a) (b) (c) plongeur émulsion

Figure 3.6 – Création d’un réseau 2D de gouttes par réinjection d’émulsion stratifiée. Dans une se- ringue des émulsions contenant des concentrations croissantes en colorant ont été collectées en série. On observe une stratification des fractions d’émulsion sans mélange entre les différentes concentra- tions. (a) Strate la plus compacte 0.9069 6 Φ2D<1, les gouttes sont déformées ; (b) Strate compacte, les gouttes sont au "close-packing", Φ2D0.9069 ; (c) Strate semi-compacte Φ2D<0.9, il y a des dé-

fauts (flèche rouge) qui peuvent permettre aux gouttes de se réarranger. Les images ne correspondent pas aux strates indiquées sur la seringue à gauche, il s’agit d’une illustration.

charge ∆P et le débit de liquide Q.

∆P = RQ (3.3)

Cette loi de Hagen-Poiseuille est formellement similaire à la loi d’Ohm qui donne un coefficient de proportionnalité entre le courant et la tension au borne d’une résistance électrique. Par analogie, on appelle R, la résistance hydrodynamique du canal, qui dépend de la viscosité du liquide et des dimensions du canal. Un extracteur de phase continue est donc l’équivalent d’un diviseur de courant et on pourra appliquer la loi de noeuds pour estimer les débits dans les différentes branches du circuit. Toutefois, dans le cas bi-phasique, la résistance hydrodynamique dans un canal est augmentée par la présence des gouttes, il faudra donc en prendre compte dans les calculs [Sessoms et al., 2009].

Si la goutte est plus petite que les dimensions du canal, elle suit les lignes de champs imposée par le flux de la phase continue et sera entraînée dans le sens du débit le plus élevé [Chan and Leal, 1979]. Tan et al. ont utilisé ce principe pour réaliser la séparation de gouttes satellites (générés lors de la formation de l’émulsion) de gouttes monodisperses d’une émulsion [Tan and Lee, 2005]. De

Q

in

Q

out

Q

1

Q

2 L (a) (b) (c) 1 0 0 4 0 2 0 30 30 10 10

Figure 3.7 – Extracteur de phase continue. (a) Cas où les gouttes n’occupent pas tout le canal. Les gouttes sont compactées à mesure que de l’huile est extraite dans les canaux latéraux. Les débits sont contrôlés par un pousse-seringues à l’entrée et un connecté aux canaux d’extraction. La symétrie de la géométrie permet de garder les gouttes au centre du canal. Les nombres le long des canaux repré- sentent la fraction du débit total d’huile Qin. L’échelle correspond à 25µm ; (b) Analogie électrique. Du fait de la symétrie nous ne représentons qu’un demi-circuit. Pour obtenir les débits en (a), nous avons calculé R2 =3R1. De plus il faut R ≪ (R1,R2) ; (c) Cas où les gouttes occupent tout le ca-

nal. Le contrôle de l’extraction est réalisé en adaptant de manière manuelle la résistance des canaux d’extraction.

la même manière, nous nous arrangeons donc pour que les débits dans les branches latérales soit inférieurs à celui dans le canal principal. Pour cela il suffit soit de contrôler le débit dans les branches latérales avec un pousse seringue soit d’imposer les résistances hydrodynamiques géométriquement par les dimensions des canaux latéraux.

Dans le cas où la goutte occupe tout le canal, la résistance imposée par la goutte est bien plus importante et dépend de la longueur de la goutte, L [Vanapalli et al., 2009]. Afin d’éviter qu’elle ne se fractionne dans les canaux latéraux, ceux-ci sont réduits à une taille au moins inférieur à celle du canal. Avec cette méthode de compaction jusqu’à 92% de l’huile utilisée pour la fabrication des gouttes peut être extraite soit une fraction volumique maximale dans la chambre Φ2D=0.92 [Frenz

et al., 2009].

Nous venons de voir comment fabriquer un réseau de gouttes bi-dimensionnel plus ou moins compacte de microbioréacteurs dans une chambre en verre. Pour pouvoir suivre la cinétique d’évé-

nements qui se produisent à l’intérieur de ces compartiments nous avons réduit le mouvement des gouttes. Nous allons aborder maintenant les méthodes de mesure des réservoirs et de leur contenu.