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II. Convertir des fichiers existants, du noir vers le braille

2. Conversion de la partition simple : le Boléro

2.6. Commentaires sur l’utilisation du braille musical

2.6.1. Ce qui est à retenir de l’utilisation du braille musical pour un non-voyant

Dans le cas d’une partition peu complexe comme celle que nous avons utilisée ici, l’utilisation du braille musical paraît pertinente. D’abord parce qu’elle contient les mêmes informations musicales qu’une partition en noir. D’un point de vue objectif, la transmission d’informations écrites est donc rigoureuse. Seule la façon de les lire, l’accès aux informations change, ce qui n’est certes pas sans conséquences. D’autre part, pour une partition simple, à une voix, une partie, à plus forte raison un instrument mélodique, la notation est plutôt succincte. Mises à part les deux premières lignes qui contiennent le titre et l’auteur, il n’y a que trois lignes de symboles pour retranscrire toute la musique. Si l’on omet les premières indications de tempo, mesure et clé de sol, pour ne retenir que la mélodie, il faut en tout 186 symboles braille. En comparaison, la partition en noir comporte 116 notes, plus 50 autres indications (liaisons rythmiques, indications d’expression, barres de mesure, silences), soit un total de 166 symboles. Cela revient à un taux de douze pourcents de symboles supplémentaires en braille, pour une même quantité d’informations. C’est relativement peu compte tenu des contraintes de la représentation braille.

Il est également à noter que les symboles essentiels de l’écriture en braille musical ne sont pas très difficiles à apprendre, reconnaître et utiliser. C’est la syntaxe et l’ensemble des règles à respecter qui rendent leur utilisation plus complexe ; à plus forte raison lorsque la partition en noir l’est. Après avoir dit cela, il semble important de souligner également que

70 l’écriture musicale en noir est elle-même complexe à apprendre, comprendre et utiliser. S’il n’est pas naturel et aisé de lire une partition en braille, n’oublions pas que l’écriture musicale en soi ne l’est pas plus. C’est pourquoi il faut tout d’abord bien évaluer les niveaux de connaissances et de capacités des élèves auxquels on s’adresse afin de comparer objectivement les difficultés de lecture des notations braille et en noir. Il semble que dans les premiers temps de l’apprentissage, les élèves voyants ou non-voyants auront probablement les mêmes difficultés. Ils auront quoi qu’il en soi besoin de faire appel à de bonnes capacités d’abstraction, de représentation mentale et de compréhension du processus de retranscription d’un phénomène sonore par l’écrit. Dans notre cas, ce premier exemple nous permet de constater que lorsque l’exemple de notation en noir est simple, la transcription en braille l’est relativement aussi, ce qui permet d’aborder les bases du solfège plutôt sereinement, même en braille.

Cependant, nous constatons déjà que l’expérience de lecture d’une partition braille est très différente de la lecture d’une partition en noir. Une lecture globale de la partition en braille ne peut être envisagée. En tout cas, certaines informations ne sont pas directement visibles et encore moins de façon instantanée ; telles que l’ambitus de la mélodie, les rythmes utilisés, les récurrences, les motifs musicaux, les changements de métrique, de tonalité, les nuances ou bien les indications d’expression.

Toutes ces informations sont visibles très rapidement sur une partition en noir, et sont le fruit d’une vision globale et analytique de la partition. En braille, la prise d’information nécessite une lecture caractère après caractère, dans l’ordre d’écriture de la partition en braille. Il est extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, de chercher directement ces informations au bon endroit tout en omettant le reste du contenu de la partition à la simple lecture des doigts. Parfois, il s’agit simplement de vérifier si l’information existe ou non. Citons par exemple les changements de tonalité ou de métrique : ces informations en disent long sur une œuvre, sur le caractère de l’œuvre, sur sa difficulté, voire sur le style. Elles sont rapidement repérables en noir. Là encore, pour déterminer la présence d’une information en braille, il faut lire l’ensemble de la partition.

71 Revenons à l’ensemble des éléments listés précédemment. Dans l’utilisation courante d’une partition en noir par un musicien voyant, le regard du musicien se pose en priorité sur ces informations. Cela se vérifie tout d’abord lors de la découverte d’une partition pour la première fois. Il convient d’en appréhender rapidement le contenu, afin d’en déterminer l’intérêt ou la difficulté. Cela se vérifie également lorsque l’œuvre est apprise et que la lecture d’une partition est une aide pour se rappeler des détails d’interprétation. Les musiciens ont pour habitude d’occulter bon nombre d’informations visuelles qui leur sont inutiles dans l’instant pour se focaliser sur l’essentiel, ce qu’ils requièrent au moment de la lecture. Ce type de lecture est inaccessible en braille, à plus forte raison lorsque l’exécution de la partition nécessite l’usage de l’une ou des deux mains. 2.6.2. A propos de l’utilisation du braille pour le professeur voyant

Nous avons fait le choix ici d’une œuvre relativement simple du point de vue du rythme et de la mélodie. La longueur, l’ambitus, les intervalles, ainsi que les indications d’expression sont limités en nombre et en difficulté. Cet exemple illustre la situation pédagogique dans laquelle le professeur veut transcrire un court exemple musical, une brève citation ; que ce soit pour un exercice de lecture de notes, à la voix ou à l’instrument, pour déchiffrer une mélodie ou expliquer un point de théorie musical.

Du point de vue du professeur, il y a peu de manipulations à effectuer. Nous partons du principe que le fichier initial a déjà été préparé sous un éditeur de partition en noir, l’objectif de ce travail est de donner les moyens au professeur de partir d’un cours préparé pour l’ensemble des élèves afin de l’adapter à son ou ses élèves non-voyants. Suivant le logiciel utilisé, il suffit d’ouvrir le fichier initial et de suivre les étapes nécessaires à l’export au format XML (décrites précédemment). Lorsque les partitions sont simples, ne comportent qu’une partie (un instrument), et pas de signe dont la notation porte à confusion (l’exemple du mezzo-staccato est très représentatif de cela), les risques d’erreurs de transcription sont minimes et ne nuiront pas à la compréhension des éléments musicaux. Les erreurs sont en très grande majorité liées à des éléments périphériques (textes, indications diverses). Le professeur pourra donc transmettre directement le fichier XML exporté depuis son éditeur de partitions.

72 Il est toujours possible, dans un second temps, d’ouvrir la partition avec BME2 pour en vérifier le contenu. Il n’est pas nécessaire pour cela de savoir lire la notation braille. Le logiciel indique systématiquement la signification du signe ou de la séquence de signes qui suit le curseur. On peut donc prendre connaissance de l’intégralité du contenu d’une partition en braille sans pour autant être capable de la déchiffrer. En revanche, en cas d’erreur, ou de contenu manquant, il sera possible d’éditer la partition en modifiant légèrement son contenu, à condition de connaitre la notation braille.

Du point de vue du professeur, la diffusion de partitions simples auprès d’élèves non- voyants nous semble donc pertinente, et demande très peu de manipulations. C’est un outil utile, qui peut être rapidement appréhendé et utilisé efficacement.