• Aucun résultat trouvé

Le combat des femmes pour l’obtention de droits politiques

IV. Résultats d’analyse et d’enquête

2. Les femmes dans le domaine politique

2.2 Le combat des femmes pour l’obtention de droits politiques

La majorité des manuels abordent cependant le combat des femmes pour l’obtention de droits politiques de manière plutôt complète. Mais le regard porté sur ce combat diffère selon la manière dont il est évoqué. Ce combat est souvent abordé en trois périodes : pendant la période de la Révolution, pendant la IIIe République et dans l’après-guerre. Trois manuels proposent des double-pages concernant les femmes sous la Révolution, l’un sous forme de « dossier » les deux autres, présentent deux double pages quasiment similaires ayant pour titre « J’ai vécu… la Révolution et l’Empire (1789-1815). Les femmes sont alors traitées en « annexe » du corps de texte mais cela à l’avantage de présenter clairement leur statut et leur position. On présente ainsi leur statut marginalisé, leur exclusion de la scène publique mais on présente aussi leur rôle actif dans la Révolution française, avec notamment cette fameuse gravure de La Marche des femmes sur Versailles [annexes 37 et 38 p. 98]. On les présente dans trois des huit manuels comme des femmes actives, des femmes qui rédigent des cahiers de doléances, qui se réunissent, qui organisent des émeutes … La place des femmes sur la scène politique est forcément sous-entendue lorsque l’on parle de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC). En effet, malgré cette déclaration, l’égalité entre les hommes et les femmes n’étaient pas respectée. Certains manuels le mettent en avant comme le manuel Hatier de 2016 qui interroge les élèves : « La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ne concernait que la moitié des Français : qui n’avait pas tous ces droits ? » 22. On peut lire aussi dans la leçon de l’un des manuels « La Révolution a aussi proclamé la liberté et l’égalité des citoyens […] ces principes […] ne furent pourtant pas tous appliqués :le droit de vote fut d’abord réservé aux plus riches et les femmes durent

21Le Callennec S. (dir.), 2007, Histoire cycle 3, Magellan, Paris, Hatier, p. 176.

27

attendre 1945 pour l’obtenir »23. Dans ce combat pour l’égalité, on présente dans quelques manuels deux personnalités : Condorcet – présenté à travers une petite biographie, et Olympe de Gouge, dont le portrait est présenté ainsi qu’un extrait de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, en écho à la DDHC [annexe 39 p. 99]. Seuls deux manuels présentent cette déclaration. Ensuite, il est intéressant d’observer la manière dont est abordé le suffrage universel de 1848. Ce suffrage, présenté comme universel, était en réalité un suffrage universel masculin. Les huit manuels abordent la question du suffrage universel obtenu en 1848 et tous précisent bien que ce suffrage universel est masculin, qu’il est établi « pour les hommes de plus de 21 ans »24 ou bien une définition vient l’expliquer : « mode de suffrage dans lequel seuls les hommes peuvent voter »25. D’autres manuels explicitent le fait que les femmes en sont exclues à travers des textes, on peut ainsi lire « La France est le premier pays, en 1848, à donner à tous les hommes de plus de 21 ans le droit de vote. Mais les femmes en sont exclues, car on considère que la politique n’est pas

leur affaire ! »26. Aussi, A. de Tocqueville l’explique très bien dans un texte relatant le

premier vote : « le matin de l’élection, tous les électeurs se réunirent devant l’église, […]. Au bout de la longue file, venaient sur des chevaux de bât ou dans des charrettes des infirmes et des malades qui avaient voulu nous suivre : nous ne laissions derrière nous que les

enfants et les femmes. » 27 [annexe 40 p. 99]. Enfin, le combat des femmes pour

l’acquisitions de leurs droits politiques se poursuit au XXe siècle, et les huit manuels abordent également la question du combat politique qui mènera jusqu’à l’obtention du droit de vote en 1944. Mais parmi ces huit manuels, seuls deux intègrent ce combat dans une logique plus générale. En effet, les autres consacrent une double page à cette question – il s’agit soit de dossiers annexes, soit de chapitres. On remarque alors une évolution car les deux manuels qui intègrent ce passage de l’histoire des femmes à un combat plus général – rassemblant femmes et hommes – sont les manuels les plus récents, ceux de 2016. Cette volonté de ne pas mettre les femmes en annexes est de plus en plus forte, il faut les inclure, au même titre que les hommes. De ce fait, dans ces deux manuels, on aborde cette question

23 N

embrini J-L., Bordes J., Polivka P., 1992, Histoire CM t2, Paris, Pour connaître la France, cycle des approfondissements, Hachette école, p.13.

24 Le Callennec S. (dir.), 2007, Histoire, cycle 3, Magellan, Paris, Hatier, p. 170.

25 Dermenjian G. (dirc.), 2011, Histoire, histoire des arts, cycle 3, Les Ateliers Hachette, Paris, Hachette éducation, p. 149.

26 Badier W, Rouillon G., Aymérial C., Morel V., 2017, Histoire, Géographie, Histoire des arts CM2, Vanves, Citadelle, Hachette éducation, p. 22.

27 Dermenjian G. (dir.), 2011, Histoire, histoire des arts, cycle 3, Les Ateliers Hachette, Paris, Hachette éducation, p.149.

28

dans deux chapitres intitulés pour le premier : « Comment les Français ont-ils obtenu de nouveaux droits ? »28 et pour le second : « La République et l’égalité »29. Dans ce dernier, on questionne les élèves : « Qui, en 1848 n’avait toujours pas le droit de vote ? Que penses- tu de cette situation ? ». On peut aussi apercevoir des photographies de femmes manifestant [annexes 41-43 pp. 100-101], cette image de femmes manifestant montre ce groupe social constitué et donne vie à ce combat par des actions sur la scène publique, cela rompt avec l’image que les élèves peuvent avoir de femmes passives. On retrouve ce genre de photographie dans la plupart des autres manuels – excepté deux. On amène les élèves, par le biais de questions à réfléchir à ce que veulent les femmes et pourquoi, combien de temps ont-elles attendu par rapport aux hommes ? Parmi les huit manuels, quatre seulement abordent le rôle des suffragettes. On peut lire dans un texte issu de L’Histoire de France en

B.D, « A la fin du XIXe siècle, des femmes commencent à se battre pour leurs droits : ce

sont les féministes, appelées aussi « suffragettes ». Elles réclament le droit de vote et l’égalité avec les hommes »30. Même si l’on peut critiquer le fait que ce texte induit que les femmes « commencent » seulement maintenant à se battre, l’explication est plutôt claire pour les élèves. D’autres manuels vont venir préciser qu’ils s’agit à l’origine d’un mouvement qui se développe « en Grande-Bretagne puis en France »31. Le manuel édité aux éditions Hachette en 2011 indique même sur une frise chronologique que le premier groupe de suffragistes françaises apparaît en 1876. On peut donc constater, malgré une sous- représentation numérique constatée mais également un très faible nombre de femmes associées au domaine politique, qu’elles n’en sont pas pour autant absente, leur combat est plutôt présent et évolue dans le temps, ce qui peut permettre à l’élève de construire une progression dans la lutte féministe comme étant un mouvement engagé et non pas le fait de quelques personnalités détachées.