(57) Colloque organisé par l'IFA,
l ' A g e n c e d ' U r b a n i s m e et l ' E c o l e d ' A r c h i t e c t u r e de S t r a s b o u r g - 29 f é v r i e r et 1 mars 1984 - STRASBOURG,
(58) F. d 'A R C Y - l ' u t i l i s a t i o n de la norme dans la domina t i o n , in Prendre la ville,
a c te s du colloque de St.
Etienne du Devoluy - 1976
Ed. Anthropos.
"La nécessité d'une politique économique et sociale cohérente avec la transformation permanente des villes et des quartiers est le nouveau défi que nous pose la modernité. Il ne sera relevé qu'à condition de réussir la décentralisation et de redéfinir les rôles des intervenants dans cette transformation. Le rôle du projet urbain doit être défini quant à ce défi.
La ville est d'oeuvre d'art, ce qui nécessite des créateurs libres, contestataires, de nouveaux acteurs
que les stuctures traditionnelles de l'urbanisme
avaient démobilisés. Depuis vingt ans, les villes
sont mortes, sans création 1"
Y. DAUGE, Directeur de l'Urbanisme et des Paysages Un projet pour la ville - STRASBOURG-BARCELONE (57)
Au début des années 1970, l'Etat peut considérer
comme atteint l'essentiel des objectifs de modernisa tion et d'équipement qu'il a pu se fixer depuis la fin de la guerre.
La réalisation (accélérée par le système de concession) d'un réseau neuf de communications, notamment d'auto routes urbaines et de rase campagne rend aisée la circulation des hommes et des marchandises ; la créa tion de nombreuses aires industrielles allant des
grandes plateformes aux petites zones artisanales
ou d'entrepôt, la concurrence qui s'instaure entre communes pour l'accueil des entreprises rend aisés les relocalisations et les redéploiements industriels ;
l'équipement urbain se développe (croissance des
moyens de formation, multiplication des centres uni versitaires et techniques, centres hospitaliers...) ;
la construction immobilière atteint le rythme de
500 000 logements par an au Vllème Plan.
Plus fondamentalement, l'idéologie de la modernité
portée par la Ve République s'est largement répandue dans la société française, créant de nouvelles habi tudes de consommation, une certaine acceptation de la division technique de l'espace comme "mal néces
saire" , notamment la séparation domicile/travail
et la primauté qui en découle du transport comme facteur d'organisation de la ville et de son usage ; revendication de l'équipement (socio-culturel, spor tif ... ) comme réponse à des "besoins" sociaux ... acceptation de la norme comme "obligation de compor tement, qui impose une identité au titulaire de cette obligation" (58).
L'essentiel des conditions de reproduction de l'Etat moderne (et des forces économiques qui le sous-ten-
dent) est en place : homogénéisation relative du
territoire permettant la généralisation de la mobilité des hommes et des productions ; le principe de la
planification comme facteur d'ordre et de normalisa tion est acquis, quand bien même il commence à être
contesté par des groupes qui, de ce fait, seront
rejetés comme "marginaux".
L'Etat n'a plus besoin d'être, du moins explicite ment, le porteur de la planification ; et de fait,
le Vile et le Ville Plan ne feront plus l'objet de publicité et ne seront pas présentés comme enjeux de société. Au contraire, l'Etat aura intérêt à faire porter aux collectivités locales la responsabilité de l'organisation rationnelle du territoire et de la régulation sociale, face aux mouvements qui se dessinent (écologie, groupements de défense, "luttes urbaines" .. . ) .
Le mouvement de croissance des populations urbaines tend à se stabiliser, traduisant la baisse de la
natalité et un certain équilibre des populations
rurales qui n'ont plus à venir en ville pour chercher un emploi.
La production de terrains équipés pour l'urbanisation est assurée par les SEM d'aménagement et un système
efficace de relais financiers. La restructuration
du secteur du BTP pour la production des grands en sembles est achevée.
La réalisation de ces objectifs n'aura été rendue possible que par l'intervention massive du capital privé, associé au capital public, dans tous les sec
teurs de l'aménagement et de l'équipement. (Procès
de valorisation/dévalorisation relative du capital).
Le rapport BARRE et sa mise en oeuvre partielle (1976), visent à assimiler, dans le financement du logement, secteur privé et secteur public et conduisent à une
homogénéisation des conditions de production des
logements. C'est ainsi que 43,0 % des logements finan cés au Vile Plan le seront par le secteur privé, le secteur HLM n'assurant plus que 33,7 % du volume de la construction.
Les Sociétés d'Economie Mixte se multiplient, tant pour la réalisation des grandes infrastructures que pour l'équipement des terrains. Aux SEM d'aménagement du groupe SCET s'ajoutent celles de PARIBAS.
Sans doute la question de la libération des sols
pour la construction n'est-elle q u 'imparfaitement
réglée : l'Etat n'aura pas été à même d'aborder de front la question foncière, malgré la pression des groupes financiers privés ou publics et des collec
tivités locales qui entendent réduire au maximum
ü2
(59) A. LIPIETZ (le trib u t foncier
urbain, p. 198), indique que
les Maires qui avaient soutenu,
dans le cadre de la commis
sion préparatoire du Vie Plan,
le principe de l'impôt foncier
ont voté co ntre lors du débat au Parlement.
(60) Voir, notamment, Y.A. DANAN,
op. cité.
(61) B. DELBARD et ait. -
L ' a d o l e s c e n c e d 'u n n o u v e a u pouvoir communal - UER Urba nisation - Aménagement GRENO BLE 1978.
Les projets de loi successifs (CHALANDON/GALLEY en 1971, GUICHARD en 1973) d'impôt foncier annuel basé sur le prix de vente déclaré seront rejetés par le Parlement (59). De même ne verra-t-on pas se générali ser les Agences foncières urbaines. Seule la taxe d'urbanisation (plus tard le PLD) et le système des Zones d 'Aménagement Différé (ZAD), institué en 1962 mais renforcé en 1971, permettront aux collectivités de procéder à des réservations foncières (60), mais
dans des conditions de financement insuffisantes.
Dans cette situation, la prétention de l'Etat à pren dre en charge la globalité de l'urbanisme (contrôle et action), que traduisait la législation des ZUP et des Plans directeurs n'a plus de fondement : son appareil administratif, même fortement implanté sur le territoire (Préfets, directions départementales), n'est pas à même d'organiser seul et directement une urbanisation qui doit, par ailleurs, être négociée à chaque fois avec le capital privé. Il n'est pas capable d'analyser finement et d'orienter les dynami ques à l'oeuvre dans la formation sociale, en particu lier dans ses caractéristiques locales.
Aussi va-t-il, dès les années 1970, s'appuyer sur
les collectivités locales et tenter de les responsa biliser, les conduire à prendre en charge une part de l'urbanisme-action tout en maintenant fortement son contrôle au niveau des procédures et des finance ments .
C'est le sens de l'institution des Schémas Directeurs d 'Aménagement et d'Urbanisme (SDAU) et de la politique contractuelle (contrats de région, contrats de pays, plans de référence, dossiers d'agglomération, dossiers d'habitat ...) qui suivront. Ainsi qu'on l'a souligné au chapitre précédent, le SDAU est le lieu d'un compro mis négocié entre les orientations de l'Etat et les intérêts locaux défendus par les élus des collecti vités locales.
C'est ainsi que le SDAU de l'agglomération strasbour
geoise entérine, malgré l'opposition des communes
rurales concernées, le principe d'une extension des zones urbanisables quatre fois plus importante qu'il
n'apparaît nécessaire (principe CHALANDON en vue
de "casser" la spéculation foncière), contre une priorité accordée aux liaisons routières et aériennes avec le reste de la France et l'étranger.
A Grenoble (61), le Livre Blanc établi en 1968 mobili se largement les milieux politiques, administratifs, économiques locaux ainsi que le Conseil Général et les administrations d'Etat ; la publicité faite autour de ce document devait (dans l'esprit des élus greno
blois) , engager les divers intervenants sur leurs
propositions. Le Livre Blanc prépare le SDAU qui
klà