• Aucun résultat trouvé

Chapitre IV.Modèles de cognition spatiale

B. Représentations acquises lors de la navigation

B.5. Cognition spatiale des non-voyants

Pour les voyants, l’orientation est rarement critique en environnement urbain. Si une personne voyante se perd lors de l’un de ses trajets, il est toujours possible de demander une indication et de la suivre facilement. La généralisation des smartphones a également amené tout un chacun à avoir en permanence à portée de main une carte des environs disponible avec un système de guidage intégré. Les personnes voyantes sont donc très rarement en situa-tion de danger ou de stress lorsqu’elles sont perdues et parviennent à retrouver leur chemin en autonomie. Pour les non-voyants, le fait de se perdre est beaucoup plus anxiogène car il est alors quasiment impossible de retrouver son chemin sans une aide externe importante. Se re-présenter correctement son espace et son trajet au préalable est donc crucial pour se déplacer et naviguer en autonomie. Pour cela, les personnes non-voyantes apprennent un trajet jusqu’à  ’  ¤           <  *   spatiale chez les non-voyants a été déjà très étudiée dès le milieu du XXème    -  %        "    Q*

    \  Q%;         par [Fletcher 1980] :

◆ La       (     ) proposait que le développement de concepts liés à l’espace était impossible chez les aveugles congénitaux. D’après cette théorie, un mini-mum d’expérience visuelle était requis pour développer une compréhension même mi-nimale de l’espace. Depuis cette théorie a été complètement abandonnée.

◆ La       (     ) considère que les aveugles peuvent déve-lopper des représentations mentales de l’espace, mais que ces représentations sont fonc-tionnellement inférieures à celles développées par les voyants ou les non-voyants tardifs. Selon cette théorie, les personnes aveugles ne peuvent pas se faire une idée globale de la forme d’objets trop complexes.

◆ D’après la dernière théorie intitulée        (Difference Theory), les non-voyants pourraient construire des représentations spatiales fonctionnellement équivalentes à celle des voyants. Cependant ces représentations seraient plus longues à construire et à manipuler car l’information non visuelle à traiter et à intégrer est de na-  *

Actuellement, la dernière théorie est la plus suivie, des études récentes ont montré que    Q%;  %;    " % " " % [ & Ruggiero 2010]. Dans une étude portant sur le volume de l’hippocampe (structure cérébrale impliquée dans la navigation) et la performance de navigation, le groupe de non-voyants a eu de meilleures performances que le groupe de voyants avec les yeux bandés dans l’apprentis-sage et la restitution d’une route par la navigation [Fortin et al. 2008]. Dans le même sens, dans une même tâche d’imagerie mentale et de manipulation d’information 2D non-visuelle les %;  Q%; %          -formances en imagerie mentale qui soient similaires [Vanlierde & Wanet-Defalque 2004]. Pour se représenter certains objets de la vie quotidienne, les non-voyants congénitaux semblent    "       /      ¸   $ les objets ont toujours la même taille quelle que soit la distance depuis laquelle ils sont perçus [Vanlierde & Wanet-Defalque 2005].

Un facteur très étudié dans l’étude de la cognition spatiale à grande échelle chez les non-voyants est l’existence d’une expérience visuelle préalable. Dans le cadre de la navigation, il est possible qu’une certaine expérience visuelle soit indispensable pour se représenter le      %       K Q@ ¦ š  ‰£‘* Z! la plupart des études portant sur ce sujet comparent des sujets voyants congénitaux, non-voyants tardifs et des non-voyants en tant que groupe contrôle. Les aveugles congénitaux semblent %        "            "  non-voyants tardifs ou des sujets voyants avec les yeux bandés [Veraart & Wanet-Defalque 1987]. En revanche, une série d’expérimentations menées récemment montre que des sujets aveugles (de naissance ou non) peuvent faire des erreurs moindres que des sujets voyants les yeux bandés sur des tâches nécessitant une représentation de type Survey ~  * Š''&‘* La méthode de recrutement des sujets peut biaiser les résultats (dans un sens ou dans l’autre), si par exemple les sujets proviennent tous d’un centre dédié aux non-voyants où ils ont pu apprendre à naviguer. Les résultats des études ne précisant pas l’expérience des sujets non-voyants sont donc à prendre avec précautions [Loomis et al. 1993].

Pour un voyant, les informations perçues lors de la navigation sont très précises, nom-      * = %!  Q%; "  % – 

informations parcellaires traitées séquentiellement. De plus, il utilise son système vestibu-laire ainsi que sa proprioception à la place de la vision [Berthoz & Viaud-Delmon 1999]. Cette    # $    %    "     % et sur les performances obtenues si l’on limite le nombre d’informations disponibles simulta- \   < %; ž   * Š'‰Š‘* 9  !   %  ’ sur les stratégies de mémorisation utilisées : les non-voyants étant moins performants que des voyants s’ils optent pour une stratégie d’imagerie mentale de l’espace alors qu’ils obtiennent des performances similaires en utilisant une stratégie verbale [Cornoldi et al. 2009].

Les expérimentations menées dans le cadre de ce doctorat sont décrites dans la partie qui suit. Les connaissances sur les neuroprothèses visuelles, leur simulation ainsi que sur la tâche précise de navigation ont été mobilisées pour mettre au point les protocoles expérimentaux et interpréter les résultats. En particulier la théorie de Meilinger de Network of Reference Frames a été utilisée pour produire certains rendus prothétiques et les analyser. Ces contributions sont constituées de quatre chapitres : le premier évalue l’application d’un rendu déjà utilisé pour des tâches de localisation d’objets à la navigation, le deuxième décrit une expérimentation se concentrant sur un rendu permettant de mettre en valeur la structure de l’environnement,            $       et compare certains de ces rendus à leurs analogues en vision non prothétique. Le quatrième chapitre de contribution traite d’un questionnaire qui a été rempli par des sujets voyants et Q%;     "      "     <      _  *            $ -tations pour les discuter et en extraire quelques lignes directrices sur les rendus prothétiques destinés à la navigation.