• Aucun résultat trouvé

Chapitre 4. Les expériences de conseil au Mali

4.1. Synthèse des expériences de conseil au Mali

4.1.2. La CMDT et l’OHVN

Les deux principales structures qui interviennent sur des zones géographiques complémentaires en zone cotonnière sur le conseil agricole sont la CMDT et l’OHVN.

La situation délicate dans la filière cotonnière au Mali n’a pas permis d’obtenir beaucoup d’informations lors des premiers entretiens et visites de terrain en janvier 2006, mais la CMDT a fourni des informations et documents lors de l’atelier d’avril à Sikasso (Annexe 7 et document sur le CDROM : CMDT, 2006. Module de formation. Conseil de gestion à

l’exploitation agricole. Bamako, 30 p.). La crise cotonnière amène la CMDT à se recentrer

sur l’appui à la production du coton, et à abandonner ses missions de service public comme le conseil ou le développement régional. En 2002, l’étude SOFRECO a montré que le conseil était cher, et ne répondait plus aux besoins des producteurs. La CMDT devait se retirer en 2002 du conseil ; elle l’a fait pour toutes les cultures, sauf le coton.

Deux approches d’appui aux producteurs existent.

4.1.2.1. L’approche de vulgarisation classique

Tiré du rapport SOFRECO (2002). L’organisation comme les modalités d’intervention de la CMDT et de l’OHVN sont assez comparables avec :

- une structure hiérarchisée de la direction à Bamako jusqu’aux agents de terrain, chef de ZAER ou AVB, qui animent une dizaine de villages, ce qui représente, en moyenne, 350 à 400 exploitations par agent,

- l’utilisation de relais villageois chargés d’effectuer un certain nombre de tâches et de contribuer à la diffusion des messages techniques,

- la sélection des thèmes à vulgariser sur la base d’un diagnostic global participatif chargé, en principe, de sélectionner les besoins prioritaires des producteurs,

- un domaine d’intervention qui couvre tous les aspects du développement rural. Par ailleurs, et en plus des activités d’interface avec la société cotonnière, l’encadrement a en charge de nombreuses missions de service public qui lui ont été confiées par l’Etat. En ce début des années 2000, les effectifs totaux mobilisés par les deux structures atteignaient 1.780 agents, pour un coût annuel d’intervention (toutes missions confondues) compris entre 10 et 11 milliards de FCFA par an. Sur ce total, la part supportée par la filière coton est d’environ 7,5 milliards de FCFA, ce qui, sur la base de la production de la campagne en cours, représente un coût de 13 FCFA/kg.

Les interventions de la DTDR et de l’OHVN ont eu un impact indéniable, sur le développement de la culture du coton, ainsi d’ailleurs que sur le développement d’autres spéculations, comme les céréales dont la production dépasse désormais 1 million de tonnes. Les efforts accomplis ont permis au Mali d’être le premier producteur de coton des pays africains situés au sud du Sahara.

Des entretiens réalisés avec monsieur Diakité, correspondant de l’OHVN dans le groupe de travail, il est ressorti que le conseil agricole est actuellement assuré sur le terrain par (voir Annexe 5) :

- des chefs de secteur (10 de niveau ingénieur) qui sont secondés par des adjoints (niveau ingénieurs ou Technicien supérieur)

- des chefs Secteur de Base (SB) au nombre de 80, de niveau variable (moniteur, encadreur, agent technique d’agriculture

- des animatrices, des agents de crédit et des chefs de zone d’alphabétisation fonctionnelle.

L’OHVN intervient au niveau des groupements villageois. Depuis plusieurs années elle chercher à rendre plus autonome les groupements et les exploitations agricoles en prévision du désengagement de l’Etat. Pour cela elle utilise des animateurs villageois qui doivent assurer une partie du conseil ou plutôt de la vulgarisation technique.

Les groupements se constituent selon les affinités sociales. Ce sont les membres du groupement qui identifient en leur sein un animateur villageois. L’animateur dispense la formation après l’avoir lui même reçu du chef de secteur ou des ingénieurs spécialisés de l’OHVN.

Mais se pose aujourd’hui la question de rémunération de ces animateurs villageois par les villages et les OP. Il n’est pas évident que ces structures puissent dégager les ressources financières pour indemniser les animateurs villageois.

4.1.2.2. Le conseil de gestion en zone cotonnière

L’IER au travers du CRRA de Sikasso mène des activités de conseil avec la CMDT depuis 1979/1980. Au départ le conseil était un outil de recherche-action adapté aux besoins de la vulgarisation par la CMDT pour les jeunes alphabétisés en langue nationale afin de leur permettre de faire un diagnostic et un suivi de leur exploitation. La CMDT trouvait que cet outil était trop lourd (trop complexe), ce qui l’a amené à l’adapter à son contexte et à le simplifier. Elle trouvait aussi qu’il y avait trop de temps pour les questions, le diagnostic par rapport à l’analyse et le conseil venant trop tard. Elle le trouvait aussi incomplet car il ne prenait pas en compte les aspects genre, l’élevage, les bas-fonds, etc. Pour réaliser les activités de conseil, le profil de Technicien Supérieur d’Agriculture était le plus indiqué. Les conseillers de niveau inférieur doivent compenser par leur expérience. La CMDT a surtout utilisé des agents techniques qui ont réalisé le conseil en plus de leurs activités habituelles, sans reconnaissance par la hiérarchie de ce travail supplémentaire, d’où l’importance d’avoir un statut pour le conseiller. Les paysans relais n’ont pas été utilisés dans le conseil.

En zone cotonnière la mise au point et le test des outils de conseil ont été poursuivis jusqu’en 1987 par l’IER et la CMDT et repris dans les années 90. Environ 2500 exploitations de cette zone ont pu participer au conseil à l’exploitation familiale souvent pendant plusieurs années de suite. Mais, cette approche n’a jamais été généralisée en zone Mali Sud.

En 2003, les effectifs d’encadrement de la CMDT ont été réduits de 600 agents. Aujourd’hui un chef de zone couvre 10 à 15 villages et de 300 à 350 exploitations. Parmi les départs, de agents ont été repris par les ONG et les bureaux prestataires intervenant dans la région, d’autres ont créé leur propre bureau.

Dans les années 90, la CMDT a mis en place le conseil de gestion (méthode participative). Les différentes phases du conseil sont :

• Le diagnostic d’exploitations

• La stratification des exploitations en plusieurs catégories par rapport au rendement en coton : moins de 700 kg/ha, de 700 à 1200 kg/ha, de 1200 à 1500 Kg/ha et plus de 1500 kg/ha

• La répartition des exploitations en plusieurs types sur la base de l’équipement et du cheptel bovin : les exploitations motorisées, celles possédant plusieurs attelages et animaux (type A), celles possédant un attelage (type B), celles ayant un équipement incomplet (type C) et celles en culture manuelle (type D).

• Les thèmes traités dans les séances de conseil se font par groupe d’exploitations selon les types ;

• Les visites conseil ; le conseiller visite individuellement chaque exploitant sur son lieu de travail (4 exploitations par jour)

• Chaque paysan a un cahier d’exploitation qu’il doit remplir, mais très peu de paysans le font ;

L’expérience conseil à l’exploitation continue à la CMDT. Aujourd’hui Il y a environ 800 agents de terrain (ZAER) qui y participent, en sus de leurs autres activités. Chaque agent suit de façon rapprochée 2 exploitations par groupement par an, par ailleurs chaque conseiller doit rencontrer au moins une fois par an toutes les exploitations de son secteur d’intervention. Deux approches complémentaires sont mises en œuvre :

- un conseil rapproché (conseil de gestion) qui doit concerner des exploitations en difficulté (rendement moyen en coton faible) dans des groupements en difficulté (rendement coton faible). L’objectif est de montrer qu’avec le conseil de gestion il est possible d’aider les paysans à relever le niveau de leur production. Cette démarche implique une prise de note de la part du producteur (alphabétisé), un traitement des données, un dialogue rapproché avec le conseiller et donc des visites régulières. Après une phase de diagnostic le producteur se fixe des objectifs, un plan de campagne est élaboré, sa mise en œuvre est évaluée en fin de campagne agricole ; - une « visite conseil » : Le conseiller doit être capable de comprendre la situation et le

fonctionnement de l’exploitation visitée lors d’un seul entretien de quelques heures. En recueillant quelques informations et en recourant à des normes (surface/actif ; surface/attelage ; % en coton, ….) il doit être en mesure en fin d’entretien de faire des recommandations au chef d’exploitation.

En mobilisant les régions CMDT il serait possible de recenser le nombre d’exploitations en conseil (rapproché), de les situer et par une étude complémentaire, d’évaluer l’impact du conseil de gestion depuis 15 ans.

Chaque année, la CMDT organise des formations sur le conseil pour le personnel d’encadrement. La CMDT ressent la nécessité d’adapter les démarches de conseil aux évolutions du contexte. En effet, les caractéristiques des exploitations et les stratégies des producteurs ont évolué. Les travaux récents de Dufumier (2005) sur les typologies basés sur des critères de taille, de types d’activités, etc ont été cités (voire Annexe 6, page 71) :

- Les exploitations gérées par de «grandes familles» possédant des troupeaux bovins de grande taille et de nombreux équipements attelés :

- Les exploitations de taille moyenne dans lesquelles les revenus proviennent encore pour l’essentiel des cultures annuelles (cotonnier, céréales et légumineuses)

- Les exploitations de petite taille, peu équipées et ne disposant que de très peu d’animaux, dans lesquelles les systèmes de culture sont destinés prioritairement à l’autoconsommation familiale

- Les exploitations conduites par de grandes familles d’éleveurs Peuls transhumants - Les quelques exploitations détenues par des propriétaires absentéistes «agriculteurs

du dimanche»

Avec l’appui de l’APCAM, le consultant national a pu rencontrer l’encadrement CMDT et les producteurs des coopératives de producteurs de coton (CPC) du secteur de Kléla sur les activités de « conseil » aux producteurs.

Les activités d’appuis aux producteurs de coton sont assurées par un chef de secteur, un secrétaire technique, un chef de zone semences (coton), un conseiller polyvalent (collecte de données statistiques), onze chef de zone de production agricole (ZPA) relayés par des animateurs villageois (néolaphabètes) notamment pour les activités suivantes : inventaires des superficies, répartition des intrants, le suivi de la commercialisation, la distribution des recettes et le recouvrement des crédits.

Les membres des équipes techniques villageoises, sont formés au cours de stages collectifs et leur suivi pendant la campagne est assuré par les chefs ZPA. Chaque équipe rend compte au chef de ZPA.

Les activités d’un chef ZPA couvrent entre 8 à 17 CPC. Le nombre moyen d’exploitations agricoles suivi a été ramené à 300 par ZPA, depuis 2003. Ceci dans le souci d’améliorer la capacité de suivi.

La démarche de conseil appliquée consiste à choisir quelques exploitations agricoles pour les démonstrations de thèmes techniques et faire en sorte que tous les autres exploitants participent aux séances.

Les principales contraintes soulignées par l’encadrement portent sur :

- Le manque de concertation (dans une moindre mesure pour la Banque Nationale de Développement Agricole) entre le personnel de la CMDT et les structures chargées du crédit. Ceci occasionne chez certains agriculteurs l’application de faibles doses de fertilisants et une situation de surendettement.

- La réduction du nombre et la baisse du niveau des néo-alphabètes. L’absence de relève chez les jeunes présente des incertitudes pour l’avenir.

- L’absence de synergie entre les intervenants dans le domaine de l’appui technique aux producteurs. Ils sont nombreux mais ont du mal à apporter une diversité d’appui afin de répondre aux besoins des producteurs.

Les producteurs se déclarent ouverts à toutes les innovations même s’ils sont satisfaits des conseils techniques fournis par les agents de la CMDT. Cependant ils sont obligés d’observer une certaine prudence face à la diversité des intervenants soit parce que leurs interventions sont éphémères, soit parce qu’ils n’honorent pas tous leurs engagements « il y

a trop d’intervenants, on ne sait plus qui est bon et tout le monde cherche à nous enfoncer, etc. et notre avis n’est jamais pris en compte »

Les producteurs sont marquées par les perturbations et les évolutions en cours et futures de la filière cotonnière raisons pour laquelle, ils ne sauraient exprimer des demandes précises de conseil avant les changements même s’ils ont des préoccupations (baisse de la fertilité des sols) et de fortes attentes en matière de diversification (riziculture et autres spéculations).

La CMDT essaie de répondre à de nouveaux besoins en conseil des paysans en élaborant des fiches techniques et un programme de formation : exemple du stockage villageois des céréales.