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1.3 Application du modèle

1.3.1 Atome d’aluminium

1.3.1.1 Choix des transitions

Un des buts de la thèse est de développer une méthode de diagnostics in situ des flammes de propergols aluminisés en utilisant la fluorescence des atomes d’aluminium gazeux. À notre con-naissance, des mesures des atomes d’aluminium par LIF dans des conditions de flammes n’ont encore jamais été effectuées.

L’aluminium est un métal appartenant au groupe 13 du tableau périodique ainsi qu’à la famille des métaux du bloc p. Sa configuration électronique est [Ne] 3s2 3p1.

Les critères de sélection des transitions sont fondés sur les données spectroscopiques tirées de la bibliographie. Comme mentionné en introduction, les flammes de propergol composite de type PA/PBHT sont très lumineuses, avec un continuum d’émission important qui augmente avec la

pression. Ce continuum d’émission est encore fortement augmenté en présence de particules d’aluminium. Cela s’explique par la montée significative de la température de typiquement 2300 K (sans aluminium) à environ 3500 K (avec de l’aluminium), ainsi que par l’incandescence des parti-cules en combustion. Ce fond est moins fort dans l’ultraviolet, où nous travaillerons donc préfé-rentiellement pour les mesures de fluorescence. Le spectre synthétique des transitions de l’aluminium entre 210 nm et 400 nm est présenté Figure 1.2. Chaque raie est représentée par un pic de Dirac dont l'amplitude est le produit de la force d’oscillateur (fik) et du poids statistique du niveau d'énergie inférieure (gi). La position spectrale et les facteurs gifik proviennent de la base de données de Kurucz [47]. Entre 210 nm et 240 nm, le spectre comporte un grand nombre de raies dont les deux plus intenses sont situées à 226,9797 nm (23/22D5/2) et à 237,3122 nm (23/2

2D5/2). Cependant, on sait aussi que des composants habituels des flammes comme CO2, H2O et O2

ont de fortes absorptions entre 210 et 250 nm [55,56]. Au final, nous choisirons donc des transi-tions entre 250 nm et 400 nm pour l’excitation et la détection. Entre 240 nm et 400 nm, le spectre est composé de raies plus parsemées sur le domaine spectral. Les transitions les plus intenses (avec des gifik > 0,1) sont : 257,586 nm (23/2- y2D5/2), 308,305 nm (21/22D3/2), 309,361 nm (23/22D5/2), 394,512 nm (21/22S1/2) et 396,152 nm (23/22S1/2).

Figure 1.2 Spectre synthétique de l’aluminium

Toutes ces transitions ont déjà été utilisées dans des mesures par LIF des vitesses et des concen-trations relatives des atomes d’aluminium, principalement pour le suivi de l'ablation d'une surface d'aluminium et pour le suivi de dépôt de couches minces. Le doublet 394/396 nm est le plus utili-sé, avec excitation laser à 394 nm et détection à 396 nm [57–68]. Dans le cas des flammes de pro-pergol contenant beaucoup de particules qui peuvent diffuser le faisceau laser (diffusion de Mie et

210 230 250 270 290 310 330 350 370 390 410 0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 2 P-2D 2 P-2S 2 P-2D 2 P-2D 2 P-2S 2 P-2D

g

i

f

ik

Longueur d'onde vide, nm

2 P-2S

l’excitation et la détection. De ce fait, les doublets de l’aluminium (308/309 nm, 394/396 nm) ne sont pas utilisables directement, de même que les transitions à résonance (excitation et détection à la même longueur d’onde) [62,69,70]. Il est donc préconisé de choisir un processus LIF indirect (en cascade) où l’état qui fluoresce est différent de l’état excité.

Deux schémas d’excitation/détection indirecte sont présentés dans la littérature :

• 257,587 nm / 394-396 nm : Ce schéma a été utilisé par Goehlich et al. [71] dans une expé-rience de suivi de dépôt de couches minces. Ils donnent un rapport de 0,3 entre la fluores-cence à 394-396 nm (indirecte) et à 257 nm (résonante) pour une pression de 10-5 mbar et des températures d’atomes importantes (>60 000 K), sachant que ce rapport dépend de la pression et de la nature des espèces environnantes car l’état qui fluoresce est peuplé par collisions.

• 257,587 nm / 309,3608-309,374 nm : Utilisé par Le Bihan et al. [72] pour mesurer la con-centration d'aluminium dans l'eau de mer. Les atomes sont produits par atomisation élec-trothermique d'un échantillon d'eau de mer dans un four à 2773 K.

Pour choisir un schéma de LIF indirect, nous avons comparé théoriquement dans le Tableau 1.1 l'efficacité des différents schémas d’excitation/détection en calculant le produit des facteurs fikgi

de la transition d’excitation et de la somme des facteurs Akigk des états du multiplet excité (toutes les transitions du multiplet excité sont intégrés dans la fenêtre de détection pour avoir le plus de signal possible). Cela permet de comparer à la fois l’efficacité de l’absorption et de la fluorescence, mais en considérant que 100% des atomes excités subissent un transfert collisionnel vers les états qui fluorescent. Ce taux de 100 % n’est pas réaliste puisqu’il néglige le quenching vers l’état fon-damental qui peut être fort. Cette méthode de comparaison n’est donc pas parfaite, mais cela donne tout de même les ordres de grandeur. Les transitions d’excitation utilisées dans le Tableau 1.1 ont la plus grande force d’absorption pour chaque multiplet. Par exemple, pour le multiplet 2D à 308/309 nm, la transition 23/22D5/2 à 309,3608 nm est choisie (gf = 0,65) par rapport aux deux autres transitions 21/22D3/2 à 308,305 nm (gf = 0,36) et 23/22D3/2 à 309,3737 nm (gf = 0,07). gifik ΣgkAki (107 s-1) Détection (nm) Excitation (nm, vide) 265-266 308-309 394-396 257,587 1,3 7,2 4,8 266,118 -- 2,6 1,7 309,361 -- -- 20

Tableau 1.1 Comparaison de l’efficacité des schémas d’excitation/détection. Données spectroscopiques issues de [47].

Ainsi, en se basant uniquement sur les probabilités d’absorption et de fluorescence des transi-tions, les deux schémas d’excitation/détection les plus efficaces théoriquement sont : 257,587/308-309 nm et 309,3608/394-396 nm.

Dans leur étude, Le Bihan et al. ont également comparé expérimentalement différents schémas d’excitation/détection indirects (Tableau 1.2).

Détection (nm) Excitation (nm) 308,305 309,36-309,37 394,512 396,264 226,992 2 2 1 1 256,875 20 27 9 15 257,587 50 100 11 22 257,617 27 54 15 20 309,361 -- -- 30 45 396,264 -- -- 30 --

Tableau 1.2 Rapports signal sur bruit pour différents schémas d’excitation/détection indirects normalisés à 100 pour le schéma le plus intense 257,857/309 nm [72]

Ce Tableau 1.2 compare les rapports signal sur bruit avec une bande de détection qui ne filtre qu’une seule transition de fluorescence. Le meilleur rapport signal sur bruit est obtenu pour le schéma 257,587 / 309,36-309,37 nm. Ce rapport est pris comme référence de 100. D’après les auteurs, la détection à 309 nm est avantageuse par rapport à celle à 394-396 nm, du fait d’un fond d’émission de corps noir moins important. Leur étude comparative trouve également que les schémas de transitions les plus favorables sont 257,587/309 nm et 309,361/396 nm.

Nous avons donc choisi le schéma 308 - 309 nm/394 - 396 nm dans cette thèse. Un des avantages de ce schéma est qu’il simplifie le modèle théorique et qu’il diminue le nombre de données spec-troscopiques à déterminer. En effet le multiplet 2D qui fluoresce à 308 - 309 nm est plus bas éner-gétiquement que le multiplet y2D qui fluoresce à 257 nm. (29 000 cm-1 contre 39 000 cm-1). Comme on peut le déduire du Tableau 1.2, la redistribution collisionnelle issue de l’excitation de cet état touche tous les autres états plus bas énergétiquement. Pour que le modèle soit suffisam-ment précis, il aurait donc fallu modéliser la densité de population de tous ces états peuplés par cascades collisionnelles, soit 10 états, ce qui se traduit par 10 équations différentielles couplées dans le système d’équations (1.4). Cela est représenté dans la Figure 1.3 (haut). Sur ce schéma des niveaux d’énergie de l’aluminium figurent à gauche les niveaux d’énergie peuplés par l’excitation laser et à droite ceux peuplés par transferts collisionnels (et émission spontanée pour les états 2P° à 33 000 cm-1). Les transitions radiatives sont notées par des flèches. Pour être complet, tous les niveaux d’énergie en dessous de 41 000 cm-1 sont représentés, y compris les niveaux 2P à 29 000 cm-1 et 2P° à 40 270 cm-1 qui sont peuplés et relaxent uniquement par collisions, et qui de ce fait peuvent être négligés dans la modélisation théorique. Pour ne pas surcharger la figure, les 90 transferts collisionnels possibles entre états ne sont pas représentés.

L’excitation à 308 - 309 nm illustré dans la Figure 1.3 (bas) met en jeu moins d’états : 7 états, en négligeant les états 2P à 29 000 cm-1 peuplés et dépeuplés par collisions, ce qui représente 42 transferts collisionnels.

Figure 1.3 Schéma de niveaux d’énergie de l’aluminium mis en jeu lors de l’excitation à 257 nm (haut) et 308 - 309 nm (bas) (pas à l’échelle par souci de visibilité).

2P°1/2 0 cm-1 2P°3/2 112 cm-1 2D3/2 32 435 cm-1 2D5/2 32 437 cm-1 2P°3/2 32 966 cm-1 2P°1/2 32 950 cm-1 2S1/2 37 689 cm-1 y 2D3/2 38 929 cm-1 y 2D5/2 38 934 cm-1 2S1/2 25 348 cm-1 y 2D –2P° 1672-1676 nm y 2D –2P° 256-257 nm 2S –2P° 2110-2116 nm 2S –2P° 265-266 nm 2P° –2S 1312-1315 nm 2D –2P° 308-309 nm 2S –2P° 394-396 nm

Peuplés par excitation laser Peuplés par transferts collisionnels et fluorescence

4P1/2-5/2 29 000 cm-1 2P°1/2-3/2 40 270 cm-1

Peuplés par excitation laser Peuplés par

transferts collisionnels 2D3/2 32 435 cm-1 2D5/2 32 437 cm-1 2P°3/2 32 966 cm-1 2P°1/2 32 950 cm-1 2S1/2 25 348 cm-1 2P1/2-5/2 29 000 cm-1 2P°1/2 0 cm-1 2P°3/2 112 cm-1 2D –2P° 308-309 nm 2S –2P° 394-396 nm 2P° –2S 1312-1315 nm